Le Revers de L'Infini - Tome 3 : Labyrinthe

Chapitre 1 : Griffes dans la toile

3096 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 01/12/2025 18:31

Le ciel est bas, écrasé par un voile d’énergie maudite qui pulse comme une respiration étrangère. L’air vibre, suspendu, tenu dans un silence trop dense, le genre de silence qui annonce les catastrophes. Même les oiseaux ont déserté le ciel.


Le groupe se rassemble autour de la zone marquée par la faille, une cicatrice invisible dans l’espace qui irradie comme une fièvre. Personne ne parle. Pas besoin. Tous sentent la même chose : ce qu’ils s’apprêtent à affronter dépasse tout ce qu’ils ont connu et ce qu’ils croyaient connaître d’eux-mêmes.


Gojo incline légèrement la tête vers Megumi, un signe silencieux, lourd de confiance et d’urgence.


Megumi avance. Ses doigts se rejoignent, gestes précis, ancrés dans une maîtrise ancienne. Quand il inspire, son ombre frissonne. Puis la voix tombe, grave, plus assurée que jamais :

Sors des ténèbres, voile plus noir que la nuit, et purifie cette souillure, source d’ennui.


L’espace se tord. Les contours du réel frémissent, s’effritent comme une peinture mouillée. L’air se déchire dans un souffle profond, et un rideau noir s’abat du ciel, lourd, épais, comme une chape d’encre. Il engloutit tout ce qui les entoure, coupant l’école du monde extérieur, scellant définitivement leur départ. Un point de non-retour.


Aya resserre sa peluche contre elle. Ses doigts tremblent. Son cœur cogne si fort qu’elle croit qu’il va la trahir. Elle sent déjà Raku’en, comme une présence glacée collée à sa nuque.


Gojo sourit, ou tente de le faire. Une étincelle qui n’a rien de joyeux, juste une façon de dire « on y va ».

Verrouillé.


Yuta hoche la tête, son aura frémissante autour de lui comme un vent prêt à exploser.

C’est maintenant. On entre.


Sho, fouet déjà dégainé, bondit presque sur place dans un mélange d’excitation et de tension nerveuse.

Yep !! On y va !!


Sho.

La voix de Nanami tombe, basse, sans hausser le ton, mais avec la fermeté d’un roc inamovible.

On fonce pas dans le tas. Et toi non plus, Rin. On vous connait…

Un silence complice suit. Sho déglutit. Rin souffle du nez. Gojo tourne la tête vers Aya et lui fait signe.


Elle avance. Chaque pas pèse un peu plus lourd. À mesure qu’elle approche du centre, des sceaux s’allument dans le vide, traçant un cercle autour d’elle, un halo vibrant, qui pulse en réponse à sa présence. Comme si la faille l’appelait. Comme si elle reconnaissait la clé qu’elle attendait.

Vite, dit Gojo. Sa voix n’a plus rien de léger. Main dans la main. Il faut pas qu’elle nous isole.


Aya tend la sienne, hésitante. Gojo la prend sans délai. Sa poigne est solide. De l’autre côté, il saisit celle de Megumi. Maki prend celle de Yuta. Rin prend celle de Sho. Et ainsi de suite, jusqu’à ce que le cercle soit complet, soudé par une même volonté. Une seule respiration. Un seul front.


Le voile se déchire devant eux, s’ouvrant comme la gueule d’une bête ancienne. Un souffle glacé les effleure, comme si quelqu’un venait de rire derrière la porte. Et ils basculent tous ensemble, vers l’inconnu qui dévore tout.

 


---

 

Dans un autre espace mental...

Un autre temps.

Un battement de cœur qui n’appartient plus au réel.


Le sol est glacé sous ses paumes. L’air, lui, brûle comme s’il sortait d’une bouche infernale.

L’odeur du sang se colle à la gorge, poisseuse, métallique, trop familière pour être un simple souvenir. Souta ouvre les yeux d’un coup. Il halète. Ses bras tremblent. Sa tête tourne. Le béton râpe sa peau comme si elle voulait lui rappeler qu’il existe encore.


Autour de lui… le chaos.


Shibuya… Celui du 31 octobre 2018… Peut-être même celui des jours suivant… Mais pas la vraie.

Un Shibuya fantôme, déchiquetée, reconstruite par des mains qui n’ont jamais vu la ville, seulement imaginé sa fin. Les lumières sont mortes. Les rues, déformées. Les immeubles, inclinés comme des os brisés.


Souta se relève, titube, chancelle dans ce décor fracturé.

— C’est pas possible… Moi j’ai jamais vécu ça…


Il avance d’un pas. Son ombre… reste au sol, immobile, comme si elle refusait de le suivre dans cette illusion. Comme si elle appartenait à quelqu’un d’autre. Son cœur manque un battement. Il tente aussitôt d’appeler un shikigami.

Rien.

Pas même un souffle.

Pas même un frisson dans l’air… Juste le vide.


— Je rêve… murmure-t-il. C’est pas réel…


Mais la douleur dans ses jambes est réelle. La brûlure dans sa gorge aussi. Et la terreur qui serre sa cage thoracique ne laisse aucun doute : il est prisonnier d’un monde qui joue avec ses nerfs comme avec une marionnette.


Et alors, la voix tombe.

Douce.

Proche.

À la fois derrière lui et dans son crâne.

— Tu n’es pas mort, Souta.


Il pivote.

Elle est là.

Raku.


Ou plutôt… toutes ses versions.

Enfant.

Ado.

Femme.

Un collage impossible, chaque forme clignotant entre deux respirations.

Comme si elle n’avait jamais choisi un âge pour exister.


— Tu es juste… à l’intérieur de toi-même, poursuit-elle.

Son sourire est une fracture.

— Enfin… d’une version que j’ai réécrite.


Souta recule d’un pas, horrifié.

— T’approche pas…


— Pourquoi ? demande-t-elle doucement.

Elle marche vers lui, pieds nus dans les flaques de sang qui n’éclaboussent pas.

— Ici, tu peux voir ce que tu ignores. Ressentir ce que tu caches.

Son regard s’enfonce dans le sien.

— Tu voulais être fort ? Alors je vais te montrer ce qu’est la peur…


Elle lève la main.

Le monde explose en silhouettes.

Des morts.

Des visages d’exorcistes déformés par la souffrance.

Certains qu’il connaît.

D’autres… qu’il n’a jamais croisés.

Et pourtant, leurs noms se plantent dans son esprit.

Comme s’il les avait toujours portés.

Comme si sa mémoire était réécrite, forcée, remodelée par la volonté de Raku.


Parmi eux…

Aya.

Figée.

Le ventre transpercé.

Les yeux vides.

Comme une poupée brisée abandonnée au milieu d’une rue en ruine.


— Non… NON AYA !!

Il fonce vers elle. Sa main la traverse et elle se dissout en fumée grise, sans un son.


Un autre visage surgit.

Gojo.

À genoux.

Coupe nette à la taille.

Encore vivant.

Encore conscient.

Les yeux écarquillés dans une agonie interminable.


— NON !! ARRÊTE ! STOP !!

Souta hurle. Sa voix se brise en morceaux. Il ferme les yeux, tente de rassembler son énergie, chercher un shikigami, une arme, une étincelle…


Rien.

Le vide le dévore de l’intérieur.


La voix de Raku glisse dans son esprit comme une caresse glacée.

— Voilà ton monde, souffle-t-elle. Vous ne survivez qu’à ce que vous ne comprenez pas…

Son sourire se tord, doux et implacable.

— Maintenant, Souta… je vais t’apprendre ce que NOUS comprenons.


Le sol se fissure sous lui.

Le cauchemar, lui, commence seulement.

 

Elle s’approche. D’une lenteur presque tendre, presque humaine, mais rien en elle n’est humain.

 

— Tu veux voir ce que ton Satoru a vraiment vécu ?

Sa voix caresse, glisse, serpente.

— Ce que ton clan t’a caché ? Ce qu’ils refusent de te montrer… pour que tu ne deviennes jamais comme lui ?

 

Ses doigts frôlent l’air à la hauteur de son visage, comme si elle dessinait un voile invisible.

— Je peux ouvrir. Je peux te montrer.

Une lueur traverse ses yeux, jaune comme une fièvre.

— Et si tu tiens bon… tu seras prêt.

Elle sourit.

— Prêt à porter ce que lui n’a jamais pu.

 

Souta serre la mâchoire. La rage, l’effroi, la honte se battent dans sa gorge.

— Et si je refuse ? crache-t-il, les dents serrées, les pupilles vibrantes d’une colère à peine contenue.

 

Raku penche la tête, comme un oiseau qui découvre un insecte intéressant.

— Tu refuses ?

Elle rit. Un petit son aigu, presque enfantin.

— Mais tu es déjà à l’intérieur, Souta.

 

Elle claque des doigts.

Le monde se brouille.

Les couleurs se liquéfient.

Le décor se déforme.

La gravité s’inverse, puis retombe comme un rideau.

 

Quand la vision se stabilise, Souta marche. Ses pas résonnent dans un couloir de béton froid. Il ne court plus, il avance. Le souffle court, la nuque en sueur. Quelque chose le suit, ou l’attend, ou respire avec lui.

 

Un rire brise le silence.

Un rire grave.

Moqueur.

Ancien.

— T’as rien à faire ici, gamin.

 

Souta se fige.

 

Là, assis sur un amas de décombres, éclairé par une lumière rouge qui n’existe dans aucune réalité… Sukuna.

Pas une ombre. Pas une copie. Pas un murmure.

Sukuna.

Le vrai.

Avec son aura écrasante, carnassière, terrifiante même affaiblie, même spectrale.

 

Souta tente de respirer.

— Tu… t’es pas réel. C’est une illusion…

 

Sukuna ricane, dévoilant ses canines.

— Je suis dans ta tête. Je suis entré parce-que c’était facile. Pas ma faute si ta tête a des portes ouvertes.

Il pointe une griffe vers lui, nonchalant.

— Donc… je suis réel, pour toi. Suffisamment réel pour te broyer.

Ses yeux de serpent s’attardent sur lui et le scanent rapidement.

 

Souta recule d’un pas, mais la terre se dérobe sous son talon.

 

— Raku m’a ouvert la porte, gamin.

La voix de Sukuna est presque amusée.

— Et j’ai pas résisté à l’envie d’entrer. Mais… Tu n’es pas intéressant pour moi… Pas encore.

 

— Je suis pas là pour toi, lâche Souta, la voix cassée.

 

— Tu crois que c’est moi, le problème ?

Sukuna éclate de rire.

— Ce n’est pas un cauchemar, petit Zenin. C’est une leçon.

 

Il claque des doigts.

Le décor se plie.

Le ciel crache des débris.

Le sol se tord en un gouffre.

Un tunnel s’ouvre sous les pieds de Souta, il chute, tombe, hurle sans un son.

Puis il se retrouve debout.

Devant lui, Shinjuku.

Et l’instant.

L’instant précis.

Gojo face à Sukuna.

 

Le vent déchire les ruines.

Le sang bat dans les oreilles de Souta.

 

Il voit Gojo.

Vibrant. Vivant.

Puis l’instant où tout se renverse.

L’instant où Gojo va perdre.

Le monde entier se fissure sous le poids de cet événement.

Souta chancelle, suffoque.

— Arrête… arrête ça… Je ne veux pas voir ça !

 

Le décor tremble, comme si le monde lui-même se souvenait.

La scène continue.

 

Megumi.

Megumi… dans ce corps qui n’est plus le sien.

Son visage déformé par Sukuna, ses yeux son rouges, son sourire étranger, un masque posé sur son cousin perdu.

Puis, le geste, le meurtre, la fin de celui qu’il admire comme son sauveur…


Souta tombe à genoux. Sa gorge se serre à s’étouffer.

— Pourquoi tu me montres ça…

 

Sukuna apparaît à côté de lui, accroupi, amusé.

— Parce que tu refuses d’ouvrir les yeux, gamin. Tu veux devenir fort ? Alors regarde ce que deviennent les forts quand ils protègent seuls.

Une main griffue se pose sur son épaule.

— C’est pas la puissance qui tue. C’est ce qu’ils portent.

 

Le silence s’abat.

Épais.

Étouffant.

 

Et Raku murmure quelque part dans son crâne :

— Bienvenue, Souta. Dans la vérité que personne ne t’a racontée.

Raku revient. Glisse comme un souffle derrière lui. Sa silhouette oscille entre l’enfant et l’adulte, comme si elle hésitait encore sur la forme la plus cruelle.

Tu veux comprendre un homme ?

Sa voix envahit l’espace, douce comme un scalpel.

Alors accepte sa chute.


Le sceau noir pulse sur le front de Souta. Une brûlure sourde, rythmique, battant comme un deuxième cœur. Un cœur qui n’est pas le sien.


Raku sourit, penche la tête.

Toi, tu peux aller plus loin…

Elle effleure le vide, un geste presque tendre.

Le revers de l’Infini…


JE NE SUIS PAS UN PION !

Le cri de Souta traverse le décor. L’air lui-même recule. Son aura explose, pas brillante, pas parfaite, mais brute. Écorchée. Mémoire d’un pouvoir qu’il n’a pas encore dompté. Sa propre ombre vibre, tremble, se déchire presque sous l’effort.


Une présence se matérialise derrière lui.

Une forme.

Incomplète.

À moitié née, à moitié avalée par les ténèbres du plan mental.

Mais vivante.

Sa volonté seule la tire hors de l’abîme.

Le shikigami tendu comme un écho de lui-même... Son dragon tricéphale.

Trop instable pour prendre forme.

Trop déterminé pour disparaître.


Sukuna observe soudainement le garçon avec une nouvelle étincelle d'intérêt dans le regard. Puis il disparait avec un sourire carnassier.


Souta respire fort, tremblant, mais debout.

— Si j’ai encore mes pensées…

Il serre les dents, ses yeux flambent d’une lueur entêtée.

— …j’ai encore mes armes.


Un silence.

Raku cligne des yeux.

Puis elle sourit.

Pas moqueuse.

Pas froide.

Sincèrement intéressée.


Fais attention, Souta Zenin…

Elle avance, s’accroupit devant lui comme devant un enfant qui apprend à marcher. Sa voix tombe, presque un murmure.

C’est dans la tête que les gens se brisent pour de bon.


Le décor se fissure.

Le ciel se distord.

Les ruines se liquéfient.

Et tout se brouille d’un coup, comme si une nouvelle couche du cauchemar venait de s’ouvrir sous ses pieds.


Cour d’école.

Ciel gris.

Silence pesant.


Aya est là.


Elle se tient au milieu de la cour comme une apparition, cheveux agités par un vent qui n’existe pas. Pas un bruit autour. Pas un élève. Juste elle.


Tu n’es pas seul.

Sa voix est douce, vibrante. Comme un fil de lumière dans la brume.

On te cherche. On arrive, Souta.


Il avance. Lentement. Une main tremblante, à peine levée vers elle.

— Aya…


Ses doigts sont à un souffle des siens.

L’image se met à vibrer.

Un grincement.

Comme une cassette mal rembobinée.

Le sourire d’Aya se fissure.

Ses yeux se brouillent.

Son visage craque sur les bords.


— J’ai pas dit que tu pouvais sortir.

La voix n’est pas la sienne. Elle tombe de sa bouche comme un poison familier.

Raku.


Le sceau noir pulse, une détonation silencieuse.


Souta s’effondre. Son crâne percute le sol. Un éclair blanc déchire sa vision. Son nez saigne. Ses oreilles bourdonnent. Le monde se plie, s’étire, se rétracte autour de lui comme une bête qui respire.

Pas encore l’heure… murmure Raku.

Une berceuse.

Un verdict.


L’image d’Aya se brise, éclate en tessons de verre qui voltigent dans le ciel gris. Souta tend la main vers le vide. Trop tard. Le décor s’effondre d’un bloc. Noir. Puis plus rien. Juste la chute. Sans fin…

 


---

 

Intérieur du domaine — barrière — autre plan


Le sol se dérobe à chaque pas. Les ruelles ondulent. Les murs respirent. Les lampadaires, tordus comme des os brisés, se penchent vers eux, grincent, et semblent vouloir les happer à mesure qu’ils avancent.


Rin murmure, un souffle étranglé :

C’est… c’est dégueu. On est clairement plus chez nous, là…


Aya serre sa peluche contre elle, ses doigts tremblant légèrement.

On est où… ?


Sho agite son fouet, prêt à frapper la moindre ombre qui bouge.

— Faites gaffe à vous, les filles !


Maki s’arrête net, son œil s’affûte.

Mouvement. Plusieurs… fléaux. Ils approchent.


Sous leurs pieds, l’air vibre. Une marée d’aura maléfique rampe dans les fissures du sol.


Gojo ne ralentit pas. Il ne hausse pas la voix. Juste un ordre.

— Ignorez-les. Elle teste nos nerfs. On avance.

 

Megumi, jusque-là silencieux, s’accroupit soudain, paume contre le sol. Un cercle d’ombre pulse sous sa main. Il analyse. Évalue. Décrypte.

Les fléaux… ils ne viennent pas vraiment vers nous, dit-il.

Son regard se durcit.

Ils sont… attirés. Comme si quelque chose les appelait derrière nous.


Rin blêmit.

— Donc elle essaie de nous isoler… ou de nous faire paniquer.


Les deux, répond Megumi en se redressant.

Il passe à côté d’Aya, protecteur sans le montrer.

Reste près de nous. Si l’une de ces choses touche ton ombre, ça peut tourner mal très vite.


Aya inspire, tremble à peine, et sa projection jaillit dans un souffle, translucide et nerveuse. Elle colle le groupe de près, plus qu’elle ne l’a jamais fait.


Yuta jette un œil à la jeune fille, un sourire presque imperceptible adoucissant son visage.

Respire. On a trois rangs S avec nous. Rien ne t’arrivera.


Aya hoche la tête, fragile mais déterminée.

Merci… d’être venus.


Sho observe les murs. On dirait qu’ils s’ouvrent pour mieux écouter ce qu’ils disent.

— Sérieux… c’est l’apocalypse version cauchemar. Quelqu’un sait où on est ?!


Silence.


Personne ne répond.

Parce que la réponse n’existe pas.


Mais Megumi, lui, hausse à peine les épaules.

On n’est pas dans un lieu. On est dans… une intention.


Gojo tourne légèrement la tête, un bref sourire froid.

— Exact.


Ils savent alors tous ce qu’ils foulent : Ce n’est pas un endroit. Ce n’est pas un souvenir. Ce n’est pas un piège physique.


C’est une tête. Un esprit. Un royaume mental réécrit par une entité inhumaine. La partie n’a pas commencé.

Ils sont déjà en plein dedans.

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