Le destin des Ackerman - Tome 1

Chapitre 42 : Chapitre 41 - Reconnaissance, jour 1

4798 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 12/05/2020 19:50

Galoper à vive allure les cheveux au vent, l'impression d'être perdu au milieu de nulle part loin de toute civilisation, la sensation grisante de s'échapper de cette cage de pierre dressée depuis plus de cent ans : c'est sûrement ce qui s'approche le plus du sentiment de liberté.


Le temps est magnifique en cette fin de matinée pour un jour d'automne, il n'y a que quelques nuages épars et la température est clémente.


A l'Est, si haut dans le ciel, un énorme « V » est visible. Il se déplace vers le Sud où les températures seront plus agréables et où les forêts regorgent encore de nourriture pour ces oiseaux migrateurs. Ce spectacle qui dure de longues minutes happe l'attention de Thomas qui observe ces animaux qui ont le luxe de pouvoir changer de lieu d'habitation pour vivre toute l'année dans des conditions proches de l'idéal.


Si seulement les humains pouvaient voler... Cela aurait réglé beaucoup de problèmes pendant le siècle qui vient de s'écouler. Tous auraient pu aller vivre ailleurs, dans un endroit où les titans n'auraient pas pu leur mettre la main dessus. Aujourd'hui tout est différent. Le continent, le reste de l'humanité qui veut détruire ce « peuple d'Ymir », les titans qui sont en fait des humains condamnés...


La capacité de voler serait alors le moyen de prendre de la hauteur, être hors d'atteinte de tout ce qu'il se passe ici bas, devenir intouchable, se laisser transporter par le vent...


Le soldat Ralle soupire et recentre son attention sur l'ordre dans lequel se déplacent ces oiseaux et ce n'est pas sans rappeler quelque chose qu'il connait très bien : la formation de détection à distance. Le jeune homme se demande pourquoi ces oies sauvages se déplacent ainsi puisque, si prédateurs elles ont, ce n'est pas dans les airs qu'elles risquent quelque chose ou alors... Est-ce pour une autre raison ?


Lorsqu'il détourne les yeux du ciel pour regarder devant lui il comprend enfin pourquoi Armin est si rêveur en pensant au monde extérieur. Rien que leur petite île regorge de richesses et de beauté alors combien de couleurs, formes, animaux et autres curiosités peuvent exister dans toute l'étendue d'un monde si vaste ? Les lacs de feu, les mers de sable, le grand océan salé, les plaines de glace... Tant d'environnements différents qui doivent regorger d'espèces animales et végétales toutes plus différentes, étranges et magnifiques les unes que les autres.


Il est tiré de ses pensées quand, devant lui et à l'avant de leur colonne, Jean fait un signe de la main pour qu'ils se déploient afin de couvrir plus de terrain. Sasha et Conny s'écartent sur leur gauche, Mikasa et Thomas sur la droite.


Les deux Ackerman échangent un regard et hochent la tête. Le jeune homme se tourne pour accéder à cette grande sacoche, harnachée derrière lui sur sa gauche où sont ses fumigènes. Il l'ouvre d'une main et se saisit du pistolet.


Cela doit faire déjà plus de deux heures qu'ils chevauchent en direction du Nord avec l'objectif de rejoindre un endroit très précis à peu près à mi-chemin entre Karanes et le mur Maria. Les ordres ainsi que le plan de Jean sont très clairs : rejoindre cette forêt d'arbres géants qui fut en partie le théâtre d'opération de la 57e expédition extra-muros.


Mikasa était inquiète à l'évocation de ce lieu si particulier pour Thomas et lança un regard en direction de son compagnon. Il resta de marbre sur le moment parce qu'il ne savait pas comment réagir à l'idée de se rendre là où Petra fut tuée.


Ils ont aussi pour consigne de ne retourner au mur qu'en cas d'extrême nécessité. Les portes et les monte-charges ne s'ouvriront ni ne se déplaceront pour eux. Forcément, la question des réserves de gaz et de lames se pose aussi. Ils sont extra-muros et bien qu'ils doivent un maximum éviter le combat, tout peut arriver. Alors s'ils viennent à manquer de ces deux éléments vitaux pour se défendre, certainement qu'ils devront annuler la mission et retourner en catastrophe au mur Rose.


Thomas fixe Frock et se remémore ses mots au moment de l'explication du plan et de la façon dont va se dérouler cette mission, justement quand il était question de réserve de gaz et de lames.


J'ai pas l'intention de faire en sorte que ça dégénère.


Cette remarque qui lui valut un regard noir de Mikasa et l'exaspération de tout le groupe. Thomas commençait vraiment à détester ce type.


Bref. On fera le tour du mur Rose. La partie Nord devrait être la plus tranquille voire vide, en fait. Reprit Jean.


Tu m'étonnes, on se les caille là-haut ça ne donne pas envie d'y aller, même pour un titan. Plaisanta Conny, faisant glousser Sasha.


Jean lui mit un gentil coup de coude avec un grand sourire.


Demain quand on sera à bonne distance du mur genre... Dix ou vingt kilomètres, on se séparera pour couvrir plus de terrain et on utilisera les fumigènes comme en expédition. La seule différence c'est que les rouges ne servent que si vous avez un problème que vous ne pouvez pas éviter. Compris ?


Compris. Dirent en chœur les cinq autres membres de l'équipe.


Thomas se reconcentre de nouveau sur l'instant présent et attrape un fumigène rouge pour le charger dans son pistolet. Mikasa le regarde faire. Pour l'instant ils n'ont croisé aucun titan à part ceux qui se massent à la porte de Trost et se font gentiment écrabouiller par ce gigantesque tronc d'arbre installé au sommet du rempart.


Leur mission consiste de toute façon à recenser les démons qui ne peuvent pas être détectés depuis le mur. C'est pour cela que maintenant qu'ils sont à plus d'une vingtaine de kilomètres plus loin dans les terres, ils continuent de s'éloigner jusqu'à atteindre un rayon de trente kilomètres.


Avec de la chance on n'aura aucun problème pendant ces quelques jours et tous les titans sont au pied du mur... Pense Thomas pendant qu'il actionne le chien de l'arme qu'il tient dans sa main gauche.


Il se tourne ensuite vers son binôme et lui sourit.


En la regardant, le jeune homme se souvient qu'il s'est rendu compte, le matin même, que Mikasa n'aime pas se battre. Il ne pourrait pas dire pourquoi il le sait ni comment ça lui est apparu mais c'est une évidence. C'est pourtant difficile à croire étant donné son talent, ses performances, son tableau de chasse ainsi que son acharnement à l'entraînement.


Se battre n'est qu'une corvée, le seul moyen de survivre et de se donner le pouvoir d'atteindre ses rêves.


Sans doute que beaucoup sont dans le même cas, et c'est celui de Thomas. Il est libérateur de déchaîner toute sa haine et sa rancœur sur ces monstres qui dévorent des humains depuis des centaines d'années à travers le monde mais ça ne justifie en aucun cas la suppression d'une vie.


Tous ces titans sont des humains qui ont été transformés, punis pour des crimes dont ils ne sont pas responsables, condamnés parce qu'ils ont l'indécence de vivre. Peut-être qu'il existe un moyen de les ramener à leur état normal et alors, si c'est possible, chaque titan dont la nuque est tranchée est un meurtre.


Les titans sont-ils vraiment conscients de ce qu'ils font ? Sont-ils des soldats ou des victimes de cette guerre ?


Thomas réfléchit à la condition de cette transformation. Certes, tant qu'un humain demeure sous cette forme il n'a pas besoin de se nourrir ni de s'hydrater, en plus d'être quasiment invulnérable et d'échapper aux affres du temps... Mais si le seul moyen de redevenir humain est de dévorer l'un des détenteurs d'un titan primordial alors c'est une malédiction. Oui il est presque impossible de mourir mais ce n'est pas vivre pour autant.


Doivent-ils alors considérer un humain transformé en titan pur comme mort ?


Toutefois l'un des rapports d'Eren faisant mention d'une conversation entre Ymir et Bertolt, révélant qu'un humain a l'impression d'être en plein cauchemar. Mais qu'est-ce que ça doit vraiment être là-dedans ?


Thomas ! Appelle Mikasa.


Mh ? Il lève la tête vers elle d'un air interrogateur, se rendant compte qu'il était perdu dans ses pensées.


La brune désigne un groupe de quatre titans au loin, à plusieurs centaines de mètres, qui marchent tranquillement vers l'Ouest. Ils doivent légèrement dévier de leur trajectoire mais rien de grave.


Il se rend compte qu'il doit se ressaisir et vraiment se concentrer.


De toute façon c'est l'avantage de leur petit nombre et de leur séparation en duo : c'est beaucoup plus simple de se faufiler entre les différents groupes de titans qu'ils vont rencontrer. Tout ce qui compte c'est de se retrouver au point de rendez-vous en début de soirée.


C'est toi qui a de quoi noter ? Demande-t-il.


Elle acquiesce et sort un carnet à la couverture noire de la poche de sa veste d'uniforme. La jeune femme l'ouvre à la page marquée par le crayon à papier qui s'y trouve. Un coup d’œil devant elle pour vérifier qu'il n'y a pas d'obstacle à éviter ni de bosse sur son chemin puis elle trace quatre bâtons sur la première page vierge.


Quand Mikasa range ce petit cahier, elle lance un regard au cavalier qui chevauche à ses côtés et remarque qu'il fixe l'horizon. Elle fait donc de même et aperçoit des pics montagneux au loin.


Tu crois que tu pourrais trouver ton bonheur là-bas ? Demande Thomas avec un petit sourire.


Comment ça ?


Mikasa ne saisit pas où est-ce qu'il veut en venir.


Il y a peut-être un endroit comme tu en rêve pour t'y installer plus tard, une fois qu'on sera libres et en paix. Précise-t-il.


Il s'exclut volontairement du tableau parce qu'après tout c'est son rêve à elle, rien ne dit qu'elle voudrait qu'il en fasse partie ni qu'ils seront toujours ensemble d'ici là.


Pendant quelques secondes la jeune Ackerman observe les reliefs lointains de façon pensive puis elle revient à son conjoint avec un sourire timide mais sincère, le regard brillant.


Mh, sûrement... On pourrait s'y réserver un petit coin pour y vieillir. Suggère-t-elle.


Thomas ne dit rien, intimidé et touché par ce qu'elle sous-entend mais aussi et surtout parce qu'elle projette de le faire avec lui.


L'idéal serait d'avoir une petite maison au bord d'un lac, dans une clairière au milieu d'une forêt qui s'étend au pied d'une montagne. Continue la jeune femme qui imagine très bien un tel endroit.


Cela fait des années qu'elle pense à cette vie idéale et paisible, à cette bâtisse en bois posée dans un endroit bucolique cerné par une nature prospère et harmonieuse. Un recoin de paradis presque coupé du monde où elle pourrait quasiment vivre en autarcie, comme ses parents autrefois. Un potager, une ou deux têtes de bétails, quelques volailles et la richesse de la forêt. Voilà ce qui ferait d'elle la plus heureuse des femmes : partager ça avec l'homme qu'elle aime, le père de ses enfants.


Le temps et les épreuves faisant leur office, les doutes disparaissent les uns après les autres quant à son avenir avec ce jeune homme au regard bleu qui l'observe avec un sourire tendre aux lèvres.


Se projeter dans un avenir commun avec Thomas ne lui fait plus peur, ce n'est plus difficile. Ils mèneraient une vie simple et heureuse tous les deux et personne ne viendrait troubler leur havre de paix où les possibles liens familiaux, problèmes du monde et autres obstacles n'auraient pas le bras assez long pour les atteindre.


...Et puis en n'étant pas très loin de Karanes nous pourrions rendre régulièrement visite à ta maman. Termine-t-elle, incluant maintenant clairement son compagnon dans ce projet d'avenir.


Il ne peut retenir cette chaleur qui monte à ses joues. Son cœur fait un bond dans sa poitrine et il se sent soudainement fébrile. Ses yeux sont pendus aux lèvres de Mikasa qui affichent un sourire tout aussi gêné et timide. Elle est sincère.


La jeune homme est incapable de dire quoi que ce soit parce qu'en fait il n'y a pas de réponse à formuler, il ne peut qu'acquiescer et garder pour lui le bonheur de ce rêve qui leur est dès à présent commun.







Les heures passent et aucun des trois binômes n'a été inquiété par la menace des titans, aucun fumigène rouge n'a été tiré jusque là. Pour l'instant, cette mission est une balade à cheval pendant laquelle il faut garder un compte.

Mikasa recompte ce qu'elle a marqué avant de refermer le carnet puisqu'à l'instant ils viennent de croiser un déviant qui les ignore complètement et les regarde passer en étant assit contre un rocher.


« ┼┼┼┼ ┼┼┼┼ ┼┼┼┼ ┼┼┼┼ ┼┼┼┼ ┼┼┼┼ ┼┼┼┼ ││││ »


Alors qu'elle le range l'ancienne du 104e régiment d'entraînement fixe ledit titan.


Il est marrant celui-là, il profite du beau temps. Commente Thomas.


Attends, je crois qu'un truc cloche... Répond Mikasa qui a l'impression qu'il y a quelque chose d'anormal.


Hein ?


Elle tire sur les rênes de sa main droite pour faire une petit détour et s'approcher du démon. Thomas la suit sans broncher mais sent que ce n'est pas une bonne idée, un mauvais pressentiment le fait frissonner.


Après trente secondes à s'approcher ils réduisent l'allure pour détailler le corps du monstre. Les deux soldats se rendent rapidement compte que les articulations de ses bras et de ses jambes saignent et portent des traces de mutilation faisant penser à des blessures qui seraient provoquées par les lames d'un équipement tridimensionnel, à n'en pas douter.


Ils fixent les profondes tranchées sanguinolentes dans la chair du titan de façon interloquée. Ils sont à une trentaine de kilomètres de Karanes, minimum, qui aurait bien pu faire ça ? D'autant plus que ça a dû être fait il y a moins d'une heure.


Mikasa se tourne vers son compagnon et il acquiesce immédiatement. Thomas se saisit de son pistolet et tire après s'être bouché une oreille. Ils descendent ensuite de cheval puis s'approchent du démon dont les blessures laissent échapper une épaisse vapeur.


En fait ce n'est pas un déviant... Constate Thomas.


Non...


Mais qui aurait pu faire ça ? Pourquoi autant le charcuter pour complètement l'immobiliser mais ne pas le tuer, ça n'a aucun sens...


Mikasa reste à bonne distance pour éviter de prendre le moindre risque mais Thomas continue de s'approcher.


Et puis ce n'est pas un débutant qui lui a fait ça. Il n'y a pas de traces de lames ailleurs qu'à des endroits précis et stratégiques, la coupe est nette...


Quand il est au plus près, le titan se laisse tomber sur le côté vers le jeune homme en ouvrant grand la bouche.


Thomas, attention ! Hurle Mikasa qui voit le pire arriver.


Au dernier moment il se jette sur le côté en faisant une roulade maladroite et échappe de peu à la mâchoire béante du démon. Ni une ni deux Mikasa a déjà ses crosses en main et grippe deux lames avant de tirer un grappin en direction de l'épaule du titan pour lui monter dessus.


Une fois qu'elle peut voir dans son dos elle aperçoit Thomas qui se relève en époussetant sa veste.


Merde, c'est un vicieux celui-là...


C'est toi qui est inconscient oui ! S'énerve-t-elle parce qu'elle a eu peur.


Ça va... Regarde y'a rien de cassé. Dit-il.


Fais un peu attention. Ajoute la brune sur un ton sec.


Il ne répond pas mais son sourire qu'elle qualifierai d'insolent le fait pour lui.


Elle a toujours apprécié sa fougue, sa façon de ne pas hésiter à prendre des risques pour atteindre son objectif. Mais quand il est complètement inutile d'agir de la sorte, quand ils ne se battent pas, ça la terrifie plus qu'autre chose qu'il soit inconscient à moins que... Que ça soit à cause de ce dont ils ont parlé plus tôt dans la journée.


J'ai envie de te coller une beigne... Râle Mikasa en rangeant ses lames de façon brutale.


Aïe... Pas sûr que ce soit une punition... Continue-t-il pour plaisanter, ne comprenant pas qu'elle est véritablement en colère.


Mikasa voit rouge et saute de l'épaule du titan. Son regard ne peut pas être aussi sombre que lors de leurs premiers échanges mais il peut clairement y lire sa désapprobation.


Mais merde arrête de faire comme si... Raaah, tu me rends dingue... Dit-elle avant de finalement détourner le regard, sachant que c'est peine perdue.


Thomas se rend compte qu'il a effectivement été inconscient, juste pour analyser de plus près les blessures du titan. Mikasa a raison, il devrait faire plus attention, ça ne sert à rien de prendre des risques.


Pardon, je te promets de réfléchir avant d'agir.


Elle ne sais pas si c'est sincère ou s'il ne fait que lui dire ce qu'elle veut entendre, Mikasa lui jette un regard en coin puis soupire.


T'as intérêt sinon je te fais l'autre arcade... Menace-t-elle sans conviction.


Forcément les images lui reviennent en tête. Le choc de son visage avec l'encadrement de la porte, son arcade qui pisse le sang puis leur proximité alors qu'elle appuyait sur la coupure pour stopper l'hémorragie... Elle se tourne rapidement pour qu'il ne puisse pas voir qu'elle s'adoucit en repensant au moment où les choses sont devenues ambiguë entre eux.


Il est vraiment prêt à n'importe quoi tant que le résultat peut lui apporter la moindre bribe de satisfaction, ça la désespère tout en la faisant craquer, c'est inexplicable comme il arrive à jouer avec elle et ses nerfs. Mais là, sur le coup, c'était vraiment dangereux et inconsidéré.


Elle peut entendre son soupir amusé.


Pense à moi un peu, qu'est-ce que je fais si tu te fais bouffer, hein ? Tu y penses à ça des fois quand tu prends ce genre de risques ? Continue la jeune femme, toujours remontée même si elle ne hausse pas le ton.


Thomas comprend que sa plaisanterie était de trop et se sent idiot. Il s'approche d'elle.


Mikasa... Je suis désolé, c'était con et j'ferai attention... S'excuse-t-il.


Elle ne répond pas ni ne se retourne pour le laisser seul avec sa connerie et sa honte.


Il s'approche d'elle et tapote d'une façon très particulière à un endroit très précis.


Hé...


Elle ne peut pas s'empêcher de sourire puis se retourne pour mette une tape dans sa main pour la dégager.


Tu boudes..? Demande Thomas.


Décidément c'est un véritable emmerdeur et il ne lâche pas le morceau. Elle joue un peu la comédie, certes, mais sa colère est réelle. Cet idiot joue beaucoup trop avec sa sécurité et ça ne la rend pas sereine quant à la suite de cette mission.


Putain je vais te... Commence-t-elle à répondre mais le bruit d'une troupe à cheval qui s'approche se fait entendre.


Ils laissent donc leur différent de côté pour l'instant et font le tour du titan qui est affaissé au sol. Leur quatre compagnons se pointent. Quand ils voient ce monstre immobilisé, découpé et au sol ils ne comprennent pas pourquoi ils ont demandé de l'aide.


Vous vous foutez de nous ? Demande Frock.


Nan, on l'a trouvé comme ça. Répond Thomas.


Hein ? Tu veux dire que vous l'avez trouvé dans cet état, c'est pas vous qui lui avez fait sa fête ? S'étonne Conny.


Exact. Reprend le brun. Ça veut dire qu'il y a moins d'une heure quelqu'un avec une bonne expérience du combat est passé par ici et s'est amusé à découper les articulations de ce titan, sans le tuer.


Quoiiiiii ? Attends ça me fout mal au crâne... Se plaint Jean pour qui cette histoire n'a ni queue ni tête.


C'est pas vous qui avez décidé de tuer le temps et essayez de vous trouver une excuse ? S'impatiente le roux.


Ouais c'est pour ça qu'on a tiré un fumigène, ça serait dommage que personne ne nous prenne la main dans le sac... Du con. Rétorque Thomas qui lance un regard noir à Frock.


Hé, du calme. Pas besoin de vous exciter. Réprimande Jean.


Qu'est-ce qu'on fait de lui ? S'inquiète Sasha.


On n'a pas le temps de s'occuper de ça et on ne peut pas non plus le laisser se régénérer, autant profiter qu'il soit dans cet état pour le liquider, ça fera un ahuri de moins à zigouiller. Décide le chef de l'escouade.


Sans hésiter ni discuter Mikasa tire deux lames des caissons en métal qui pendent contre ses cuisses et s'approche de la nuque du démon. Un bruit caractéristique de chair tranchée se fait entendre et du sang gicle aux alentours. La jeune femme réapparaît avec quelques gouttes sur son uniforme et son visage, qu'elle essuie du revers de la manche.


Elle lance un regard qui n'est pas tendre à son conjoint avant de remonter à cheval, ça n'échappe pas à madame patate qui est toujours à l'affût.


Bon, c'est réglé. On en parlera à Hanji quand on sera de retour, en attendant rejoignons la forêt.


Oui chef. Dit Thomas qui lève son pied gauche pour le mettre dans l'étrier puis se hisse sur sa selle.


L'équipe de reconnaissance se remet en route, groupée cette fois puisqu'il ne reste pas tellement de chemin à parcourir. Sasha approche sa monture de celle de Mikasa.


Il y a de l'eau dans le gaz ? Demande-t-elle pour ne rien arranger.


Mikasa souffle d'exaspération.


Nan, j'ai juste envie de lui en coller une des fois. Dit-elle sans s'étendre sur le sujet.


C'est bien, faut un peu de confrontation de temps en temps dans un couple. Plaisante Sasha qui se met à rigoler comme une pintade.


Pour la punir Mikasa met une tape sur la croupe du cheval de son amie qui part au triple galop sans qu'elle ne s'y attende.


AaaaAaAAaaAAAaaAaaAaah ! Putain Mikasa j'te déteste ! Hurle Sasha qui panique et essaye de calmer son cheval.


Conny est mort de rire et Jean n'est pas en reste. Thomas regarde la morfale avec amusement puis tourne la tête vers Mikasa qui a un sourire satisfait aux lèvres.







[ Le soir même - Quelque part entre Karanes et le mur Maria ]


Les trois binômes installent un campement de fortune sur les hautes branches des arbres géants de la forêt où ils se trouvent. Passer la nuit ici leur garantit une sécurité optimale contre les titans. Chaque duo s'est choisi un arbre voisin aux autres.


Mikasa s'occupe d'allumer un feu pour les réchauffer — puisque la nuit s'annonce froide — pendant que Thomas s'occupe de déplier et installer leurs deux sacs de couchage : leur branche est bien assez large pour prendre de la place.


Sur l'arbre voisin, un peu plus haut, les rires de Sasha et Conny résonnent même si leur conversation n'est pas perceptible. Du côté de Jean et Frock c'est le calme plat. Le premier épie d'ailleurs le couple avec un air renfrogné.


La brune casse du petit bois et le dispose dans les flammes qui crépitent puis jette un coup d’œil à son partenaire par dessus son épaule. Celui-ci semble préoccupé et pensif mais ça ne l'étonne pas. Il y a trois mois sa grande sœur mourrait ici des mains d'Annie.


Soucieuse de l'effet que les lieux peuvent avoir sur lui, elle s'approche une fois qu'elle a terminé sa tâche et passe une main dans son dos.


Ça va..? Demande-t-elle.


Mh-mh, juste un peu fatigué.


C'est vrai ce mensonge ?


Thomas sourit, amusé par la tournure de sa question.


Oui enfin nan... J'pense à ce qu'il s'est passé ici forcément... Mais ça ne me rend pas vraiment triste, finalement. Explique-t-il.


Cette nouvelle rassure Mikasa qui continue de le dévisager.


— Je me dis qu'elle aurait beaucoup aimé visiter cet endroit dans une autre situation. Elle aimait beaucoup l'air forestier, se balader dans les bois...


Elle acquiesce lentement et l'écoute attentivement. Thomas soupire et prend une mine un peu plus triste l'espace d'un instant.


Un truc qui me manque beaucoup c'est nos sorties le dimanche. Dit-il, regardant droit devant lui, signe qu'il se remémore des souvenirs.


Mikasa ne dit rien et le laisse replonger dans son enfance, observant le petit sourire qui apparaît sur les lèvres du jeune homme.


A partir du moment où j'ai été assez grand pour faire de longues balades à pied, tous les dimanches elle me réveillait tôt le matin. Elle mettait une robe et portait un chapeau pour l'occasion, on allait dans une forêt pour y marcher de longues heures. On grignotait au bord de la rivière et puis on occupait l'après-midi à cueillir un bouquet de saison pour notre mère...


La brune fixe le visage de son compagnon, intéressée et absorbée par ce qu'il raconte, un fin sourire aux lèvres. Il est rare qu'il se livre sur son passé alors elle est forcément intéressée d'en savoir plus sur lui, d'autant plus après avoir lu la lettre de son père qui montre à quel point Petra était importante pour lui.


Le pire c'est que je ne me souviens pas de beaucoup de noms de fleurs... J'écoutais pas vraiment quand elle me donnait leur nom ou m'expliquait certaines choses, haha...


La jeune femme a son sourire qui s'élargit parce que ça l'amuse de comprendre qu'il n'a pas tant changé que ça depuis l'enfance.


...Sauf d'une fleur particulière qui s'appelle « le sabot de Vénus ». Il tourne légèrement la tête en direction de Mikasa. Tu connais ?


Elle répond négativement d'un léger signe de tête, prête à entendre son exposé.


C'est la plus grande orchidée qu'on peut trouver dans nos forêts et la plus rare aussi. Apparemment il faut minimum six ans pour que cette plante fasse sa première fleur. Ses pétales sont d'un rouge foncé magnifique, comme la robe d'un grand vin rouge. A chaque premier dimanche de l'été on essayait d'en trouver une mais ce n'était pas toujours une réussite... Raconte-t-il.


Leur feu de camp produit un violent craquement et de petites braises s'envolent puis retombent lentement.


...Au début du printemps on allait cueillir des bouquets de jonquilles, c'était l'une des fleurs préférées de notre mère parce qu'elle adore le jaune et sa forme. Ajoute Thomas.


Et en automne, qu'est-ce qu'il y a comme belles fleurs ? Demande Mikasa, non sans intérêt puisqu'une idée commence à germer dans son esprit.


Mmmmmmh... Il y a le pétunia, dans la forêt où on allait il y avait une espèce magnifique. Blanche avec les veines de ses pétales qui sont d'un bleu foncé qui tire vers le violet.


Mikasa se redresse puis va jusqu'à son sac de couchage pour s'y glisser. Elle s'adosse ensuite au tronc de l'énorme arbre. Thomas fait de même.


Je crois que cette fleur me dit quelque chose, il devait y en avoir dans le jardin de ma maison. Reprend la jeune femme, pensive.


Le soldat Ralle prend un instant pour réfléchir puis soupire.


Découvrir le monde et de nouveaux paysages doit être génial mais il y a tellement de beauté là, juste sous nos pieds... Toutes ces fleurs avec leurs parfums, leurs couleurs, leurs formes... Je crois que tes parents avaient tout compris. Répond-il.


Elle sourit mais n'ajoute rien. Elle s'enfonce dans son duvet en laine rembourré au niveau de la tête puis replie les bords sur son corps avant de sortir ses bras. Thomas la regarde faire avec un petit sourire.

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