L'elfe Noire et la Communauté de l'Anneau

Chapitre 18 : Quand les destins s'entremêlent

2497 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 27/12/2019 15:14

Dire que la Communauté fut étonnée aurait été un euphémisme. Ses membres étaient sidérés par cette apparition. La surprise passée, Eliana répondit à l’étreinte avec douceur, avant de repousser un peu son interlocuteur. Ainsi, ses compagnons de route purent découvrir un elfe aux longs cheveux noirs comme l’ébène. Si, comme tous les elfes, son corps semblait parfait, une cicatrice lui barrait le visage. Sur ses bras étaient visibles des runes, qu’il ne semblait pas prendre la peine de cacher. Il souriait tendrement à la princesse, comme réellement heureux et soulagé de la revoir. Discrètement, Aragorn jeta un coup d’œil au prince de la Forêt Noire, dont le visage s’était imperceptiblement fermé. A cet instant entra Haldir, arme dégainée. Il ne semblait pas apprécier qu’un elfe se trouve ici. Pourtant, il ne fit aucun geste pour le faire sortir, se contentant de surveiller la situation. Pendant quelques instants encore, le silence régna dans la pièce, tandis qu’Eliana et l’inconnu se dévisageaient mutuellement. Finalement, la princesse prit la parole.


« -Vimeris… Que fais-tu ici ?

-Je suis venu voir la situation actuelle de la Communauté. Ton frère te croit morte Eliana. Il a senti votre lien disparaître. Il se doutait que la Communauté passerait par les forêts de la Lorien. Alors il m’a envoyé aux nouvelles… Je suis heureux de te voir en vie. »


Emue, la princesse elfe lui fit un faible sourire. La présence de Vimeris la rassurait tout en l’inquiétant au plus haut point. Elle allait pouvoir avoir des nouvelles de son peuple grâce à lui.


« Excusez-moi… Pourriez-vous nous dire qui vous êtes ? »


La voix douce d’Aragorn brisa les pensées de la jeune elfe. Elle se tourna pour faire face aux visages étonnés de ses compagnons. Ils semblaient méfiants envers cet inconnu mais n’osaient rien tenter, voyant qu’Eliana ne le considérait pas comme un ennemi. Mais, au lieu de répondre, Vimeris lui lança un regard inquiet. Eliana comprit qu’il se demandait ce qu’il pouvait dévoiler, et jusqu’où avait été ses propres confessions. Se redressant doucement, elle décida de le présenter à sa place.


« Voici Vimeris. C’est un elfe Nimrôl, capitaine de la garde royal et bras droit de mon frère. C’est aussi son meilleur ami. Il est venu aux nouvelles. Vimeris, voici mes compagnons. Sam, Merry, Pippin et Frodon sont des Hobbits, des Semis-Hommes. Boromir est le fils de l’intendant du Gondor. Gimli, fils de Gloin et Legolas, prince de la Forêt Noire. Et enfin… »


Indécise, Eliana s’arrêta. Comment devait-elle présenter Aragorn ? Par le nom qu’il portait chez les elfes ? Son nom de Rôdeur ?


« Aragorn, fils d’Arathorn, héritier d’Isildur. Vous avez sûrement besoin de vous retrouver. Nous allons vous laisser un moment. »


Alors que la Communauté sortait de la pièce, Gimli menaçant peu subtilement Vimeris de le tuer s’il faisait un quelconque mal à Eliana, la jeune princesse porta son regard sur Legolas. Ce dernier la fixait aussi, en silence. Brusquement, la princesse se sentit mal à l’aise alors qu’il partait à son tour. Les yeux de Legolas n’avaient plus leur teinte habituelle. Ils avaient la couleur de l’orage.


« -Tu as des amis très … protecteurs. C’est tout toi de te lier avec un nain. Comment vas-tu ?

-Je vais mieux. Dame Galadriel a soigné la plupart de mes blessures. Mais je suis encore trop faible pour reprendre la route avec eux. Je les rejoindrais plus tard. Et les nains sont de bonnes compagnies. Gimli a toujours le mot pour détendre l’atmosphère. »


Soudainement, Vimeris tendit brusquement la main. Il saisit le bijou qui pendait autour du cou de son amie. En le voyant, sa respiration se bloqua.


« -C’est…

-Le pendentif symbole d’immortalité. Les Valars m’en ont fait cadeau. 

-Raconte-moi tout. »


Pendant de longues minutes, Eliana raconta aux capitaines des elfes noirs ce qu’elle avait vécu depuis son départ pour Fondcombe. La réaction de Legolas, l’attaque des Crébains, la source des druides, Organda, sa rencontre avec Mélian. Vimeris l’écouta attentivement, l’interrompant parfois pour lui poser des questions. Quand elle eut fini son récit, il resta silencieux quelques instants, assimilant tout ce qu’elle lui avait expliqué. Finalement, il se contenta de la serrer à nouveau avec force dans ses bras.  Eliana savait que son ami n’était pas un grand adepte des démonstrations, elle profita donc au maximum de cette étreinte rassurante. Elle avait la sensation d’être retournée chez elle, quand elle passait ses journées à jouer avec sa famille. Après quelques secondes, il reprit la parole.


«- Je suis respectueux de te voir ainsi malgré toutes les épreuves que tu as traversé. Peu de personnes, elfes ou autres, aurait pu en faire autant.

-Eirion l’aurait fait. Comment va-t-il ?

-Mal. Il te croit morte, une partie de lui est aussi en train de mourir. Et la situation du royaume ne l’aide pas. De plus en plus d’elfes croient les belles paroles de Sauron et Saroumane. Certains ont déjà rejoint le Mordor. Et le reste du peuple souhaite te voir. Ils ont peur et veulent entendre leur princesse. C’est en partie pour ça que l’on m’a envoyé ici. Les elfes de Lothlorien sont les mieux informés de ce qui se passe en Terre du Milieu. Si tu étais morte, ils l’auraient su. Je suis heureux de voir que ce n’est pas le cas. »

 


Quelques heures plus tard, Eliana se promenait dans les jardins ombragés de la Lorien. Elle avait reçu de Galadriel l’autorisation de marcher tant qu’elle ne faisait pas de mouvements brusques. Elle était songeuse. Les paroles de Vimeris l’avaient profondément ébranlé. Son peuple avait besoin d’elle. Elle avait cru que s’éloigner de lui permettrait de les protéger du danger, mais ne s’était-elle pas trompée ? N’avait-elle pas, au contraire, facilité la tâche des partisans de Sauron ?


« Ne froncez pas les sourcils ainsi, dame Eliana. Cela enlaidi votre beau visage. »


Surprise, la princesse d’Organda se retourna pour se trouver nez à nez avec Haldir. Ce dernier la regardait tranquillement, comme s’il n’ignorait pas les tourments qui la travaillaient.


« Il est très difficile de connaître à l’avance les conséquences de nos actes. Vous ne devez pas vous sentir responsable de ce qui se passe en votre royaume en votre absence. Nul ne pourrait vous blâmer d’avoir tenté de protéger ceux qui vont sont chers en vous éloignant et, par conséquent, en éloignant le danger qui vous guettait. Les partisans de Sauron et Saroumane se seraient réunis même si vous étiez resté. Désormais, vous ne pouvez que rassurer le reste de votre peuple. »


Devant tant de sagesse, Eliana reste silencieuse. Elle savait que le Gardien de la Lorien avait raison. En partant, elle avait pensé protéger son peuple des êtres qui la recherchaient. Mais les partisans de Sauron n’avaient pas besoin de son absence pour se réunir. Par contre, son retour pourrait les ébranler. Nul doute que nombre d’entre eux devaient la croire morte, si son frère le croyait aussi. Suite à ses pensées, elle sentit sa détermination revenir.


« Merci Seigneur Haldir. Vos paroles m’ont éclairé. Désormais, je sais ce que je dois faire. »


L’elfe blond hocha simplement la tête. Il connaissait mieux que personne la peur de devoir prendre de mauvaises décisions pour son peuple. Alors qu’il allait à nouveau la laisser à ses pensées, il se retourna avant de disparaître totalement derrière le feuillage.


« Je connais quelqu’un qui aimerait sûrement que vous le rassuriez. On m’a dit que vous pourriez le trouver près du terrain d’entrainement des archers. »

 

La nuit avait commencé à tomber lorsque la princesse d’Organda arriva à proximité des cibles de tir. Celui qu’elle cherchait était effectivement là. Adossé à un tronc noueux, il contemplait les étoiles qui glissaient leur lumière à travers les feuilles des grands arbres. S’il s’aperçut de sa présence, il n’en montra rien et Eliana pu le détailler à loisir. Cet elfe avait tout pour lui. La beauté physique mais aussi morale. En le côtoyant, elle avait découvert un être d’honneur, loyal à ses convictions et à ceux qui lui étaient chers. Elle savait par exemple, qu’il ne trahirait jamais Aragorn, même sous la torture. Elle appréciait cette partie de lui. Bien sûr, sa beauté elfique était aussi pour quelque chose dans le tourbillon de sentiment qu’elle ressentait. La princesse savait que sa mort et son entrevue avec Mélian lui avaient fait réaliser de nombreuses choses sur elle-même. Et notamment son attachement particulier pour le beau prince de la Forêt Noire. A quoi bon le nier ? Elle était amoureuse. Amoureuse du représentant d’un peuple qui la détestait. Amoureuse d’un être que les Valars et l’entièreté des peuples de la Terre du Milieu considéraient déjà comme un héros. Et elle avait l’intuition que, si elle ne voulait pas le perdre, elle devait lui dire.


Trouvant un peu de courage dans cette décision, Eliana s’approcha de l’être qui faisait battre son cœur. Ce dernier daigna enfin se tourner vers elle mais il n’eut aucune réaction positive à son encontre. Pas un sourire ou un signe montrant qu’il était heureux de la voir. Ses yeux avaient toujours la couleur de l’orage et la princesse eut la sensation qu’il lui reprochait quelque chose. Elle déglutit difficilement et chercha un sujet de conversation anodin.


« Les étoiles sont belles ce soir, n’est-ce pas ? »


Pour toute réponse, le prince se contenta de la fixer encore plus intensément. Sous la brulure de son regard, la jeune elfe perdit ses mots. Comment pouvait-elle soutenir ce regard bouillonnant de rage alors qu’un simple coup d’œil suffisait à emballer son cœur ? Quelques minutes passèrent avant qu’elle ne retrouve le courage de parler à nouveau.


« - Prince Legolas, je voudrais vous dire quelque chose…

- J’espère que votre fiancé sait que vous êtes ici. Je ne voudrais pas me mettre à dos un des représentants de ce peuple si respecté. »


L’ironie et la colère contenues dans ces mots firent frémir la jeune elfe. Legolas se fourvoyait complètement. Vimeris n’était pas son fiancé. Sentant qu’elle devait dissiper ce malentendu au plus vite, elle s’efforça de soutenir son regard et empêcha sa voix de trembler.


« - Vous vous trompez Prince Legolas. Vimeris est le meilleur ami de mon frère et un être cher à mon cœur. Mais il n’est en aucun cas mon fiancé. Mes parents, et mon frère par la suite, ont pensé à notre possible mariage mais aucun de nous deux ne ressentant quoi que ce soit de plus qu’une profonde amitié, ils ont abandonné. J’ai donné mon cœur à un autre homme mais j’ignore s’il désire l’accepter.

- Qui est-il ? »


Sa voix semblait plus douce à la princesse. Effectivement, la colère du prince de la Forêt Noire était un peu retombée et un fol espoir animait son cœur. Il s’était fait une fausse idée en voyant Eliana et son capitaine. Qui était cet homme que la princesse chérissait ? Un peu inquiet néanmoins, il regarda la jeune elfe prendre une grande inspiration.


« Un elfe au long cheveux blonds et aux yeux bleus. Un être qui me détestait pour ce que j’étais et qui, peu à peu, a semblé changer d’avis sur moi. Un être qui est loyal en ce qu’il croit. Je vous aime Prince Legolas. Mais il me semble que vous n’avez pas totalement oublié cette haine qui nous liait au départ. »


Stupéfait, Legolas ne réagit d’abord pas. Voyant cela, la princesse baissa la tête pour l’empêcher de voir ses larmes et tourna les talons. Il ne voulait pas d’elle. Alors qu’elle allait s’enfoncer dans le feuillage, une main se posa sur son bras et la retourna. Avant qu’elle ait le temps de réagir, les bras du Prince de la Forêt Noire enserraient sa taille et elle se retrouva collée contre son torse. Elle sentit ensuite la main de Legolas se poser sous son menton et la forcer à relever le visage. Elle rencontra alors les yeux les plus tendres qu’elle ait jamais vus. Le prince la regardait comme il ne l’avait encore jamais fait devant elle.


« Pardonnez-moi Eliana. Je vous ai blessé avec des paroles dites sous la colère et la peur. Vous ne pouvez savoir à quel point votre confession me rend heureux. Mes sentiments me sont retournés. Je vous aime, belle Eliana. Et mon cœur souffre déjà de repartir sans vous. »


Il n’y avait rien à répondre. Deux âmes qui se cherchaient désespérément depuis plusieurs semaines s’étaient enfin trouvées. Eliana ne s’était jamais senti autant en sécurité et à sa place dans les bras de Legolas. Le prince, quant à lui, eut l’impression que les presque trois mille ans d’existence qui précédaient ce moment pouvaient disparaître sans qu’il ne leur accorde la moindre importance.


Pendant quelques instants, ils restèrent comme ça, sans bouger, profitant simplement de l’instant. Eliana mourait d’envie de l’embrasser mais elle se retenait. Elle savait que les elfes sylvestres étaient beaucoup plus pudiques que son peuple et ne voulait pas risquer de choquer l’homme qu’elle aimait – et qui l’aimait en retour – en brisant les coutumes. Pourtant, le prince ne semblait pas lui-même réellement attaché aux traditions puisque doucement, un de ses mains se posa sur la joue de sa compagne alors que ses lèvres se rapprochaient. Au moment où elles se touchèrent, le monde aurait pu s’effondrer qu’aucun des deux ne s’en serait rendu compte. Ils attendaient ce moment depuis trop longtemps. Alors, ils profitèrent simplement de leur baiser.

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