Un Peuple Oublié

Chapitre 9 : Chapitre 8 _ Le Repos

2669 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/06/2020 15:26

Les jours s'écoulaient lentement, Aragorn avait prit la décision de rester en Lothlorien le temps de se remettre de ce début de voyage difficile. La compagnie passait donc ses journées à se reposer, reprendre des forces, où essayer de se perfectionner dans l'art du combat. Haldir n'était pas revenu parler à l'elleth, mais la saluait poliment chaque fois qu'il la voyait.

Dans cette forêt le temps était comme suspendu. Comme s'il s'écoulait différemment.

Chacun semblait se remettre des émotions qui les tiraillaient, et Naé passait du temps avec Boromir.

-Je me rends compte que l'anneau a une emprise sur moi, s'était-il confié, un jour. Plus que sur vous, ou même les hobbits. Sans doute est-ce la preuve de ma faiblesse d'esprit.

-Je n'en sais pas grand chose, et ne cherche pas à savoir, mais il semblerait que sa force de volonté propre soit de plus en plus grande. Nous la ressentons tous... Je me sens bien plus à fleur de peau et agressive depuis le début de cette quête... Chacun y est vulnérable à sa façon, et vous ne pouvez vous le reprochez...

-Comment êtes vous arrivée au milieu de tout ca?

-Un peu comme vous j'imagine. Un acte en entraînant un autre, une ribambelle de conséquences...

Il sourit.

-Mon frère me manque. Cela aurait dû être lui. Je suis sur qu'il y aurait une meilleure résistance. Il a toujours été le plus fort de nous deux, mentalement ... dit-il en souriant, nostalgique.

-Arrêtez de vous accabler pour des choses qui ne sont pas de votre fait. Cela allégera vos nuits, et votre esprit.

Mais bien qu'elle arrivait parfois à le faire rire, elle sentait qu'il était de plus en plus sombre, et contrarié. Comme s'il s'enfonçait chaque jour plus loin dans ses pensées.


Legolas semblait quant à lui se détendre au fil des jours, et l'elleth ne put cacher sa surprise lorsque elle entendit pour la première fois l'éclat de son rire.

Ils ne s'étaient pas adressés la parole depuis la nuit de leur arrivée, et, au-delà de son physique glacial, elle commençait tout juste à lui reconnaître un certain charme, ou du moins vu de loin.

Bien sur, physiquement, il dénotait des elfes celestes. Plus large d'épaules, moins svelte, les traits du visage plus masculins, et les yeux d'une teinte un peu plus orageuse. Plus appétissant, en somme.

Les elfes celestes étaient de toute façon bien trop doux, presque naïfs, ressemblant à des enfants surprotégés par leur Reine Mère.

Bien qu'elle soit contente de leur accueil, Naé n'avait pour eux pas beaucoup d'estime. Sans doute y avait-il là un peu de rancœur d'avoir été jugée jadis..

Et en plus, ils ne mangeaient pas de viande. Quelle drôle d'idée. Elle le respectait, bien sur, mais ne le comprenait pas.

Le soleil venait de se lever, et cela faisait déjà un bon moment qu'elle se trouvait sur le terrain d'entrainement, seule. Après une nuit agitée et une longue course dans les bois pour se redonner un peu d'énergie, elle s'entraînait au tir à l'arc, sur une distance de 40 pieds.

La cible fixe n'était pas difficile à atteindre, mais au fur et à mesure des jours, elle commençait à s'engourdir. Elle avait besoin de bouger, de courir, de se dépenser.

Ici, les jours se ressemblaient trop et cela jouait sur son moral. Elle n'en disait pas un mot aux autres, bien qu'elle se sentait devenir de plus en plus irritable. Mais elle savait que les hobbits avaient besoin de plus de temps pour se remettre.


Haldir arriva derrière elle et la félicita de son adresse. Puis, après quelques paroles plaisantes, ils décidèrent de s'entraîner ensemble un moment.

Ils.étaient seuls sur le terrain, et il sortit son arme. Affronter un elfe était chose rare, et elle en profita donc pour visualiser ses techniques, et en apprendre des choses nouvelles. Il était certain à présent qu'il était plus vieux qu'elle, il avait une très bonne maîtrise, mais son manque de pratique jouait en faveur de l'elleth. Il s’essoufflait plus vite, ses gestes étaient plus lents, et lorsqu'il se retrouva une épée sous la gorge, tous deux sourire. Avec respect, elle lui tendit une main pour se relever.

-L'habilité des elfes Noirs n'est apparemment pas qu'une simple légende

Elle rit.

-C'est la pratique qui joue en ma faveur. Depuis combien de temps ne vous étiez vous pas entraîné hein ?

Il eut l'air réellement surprit de sa question, et réfléchit.

-Plusieurs années, il est vrai.

-Plusieurs dizaines, oui

-Peut être même centaines, rit-il

-Vous allez finir par vous encroûter. Une chance que vous ne vous soyez pas blessé tout seul.

Ils rirent ensemble.

-Cela ne fait pas partie de notre quotidien. Je préfère l'art de la conversation, ou celui des livres, lorsque ma vie n'est pas menacée.

Naé reprit un air sérieux.

-Vos journées doivent vous sembler bien longues...

-Et les vôtres doivent passer bien trop vite.

Elle haussa les épaules.

-Nous avons l'éternité.

-Peut être un jour, aspirerez vous à autre chose.

-Je ne sais pas faire grand-chose d'autre.

Il sourit tendrement, comme s'il s'adressait à une enfant.

-Evidemment. Sinon vous seriez déjà morte.

Un instant de silence plana entre eux, tandis qu'ils se mirent à marcher jusqu'à la compagnie à travers les arbres.

-Vous me le rappelez beaucoup, vous savez, reprit-il

-Qui donc ? Demanda-t-elle, curieuse.

-Legolas.

Elle faillit s'étrangler.

-Je n'ai rien à voir avec cet espèce de ...

Elle fut interrompue par l'éclat de rire de son interlocuteur.

-Un jour, vous comprendrez.

Ils revinrent ensemble au camp, sous le regard suspicieux du Prince. La compagnie venait de se lever et déjeunait, ils se joignirent alors à elle. La joie et la bonne humeur planait autour de la table. Haldir les faisait rire en leur racontant certaines mésaventures. Son air éternellement sérieux même en racontant des idioties provoquait le rire de tous.


Lorsque chacun reprit ses occupations, Naé entreprit d'aller voir Aragorn, pour lui demander quand il pensait partir. Elle fut arrêtée en chemin par Legolas, qui semblait contrarié.

-J'ai vu que vous aviez passé du temps avec Haldir ce matin. Commença-t-il

-Quelle importance ? Puis, elle ne put s'empêcher de le titiller. Vous aviez prévu de déjeuner en amoureux ?

-En seriez vous jalouse ? Lui dit-il en levant un sourcil.

Déçue, elle comprit qu'il était de trop bonne humeur, et qu'il ne serait pas facile de le faire sortir de ses gonds.

-En aucun cas, je suis certaine d'être plus à son goût. Répondit-elle avec un clin d’œil.

Il sourit et cela fit à l'elleth l'effet d'un choc électrique.

-Alors vous m'envoyez navré de vous apprendre que les fillettes orgueilleuses et mal élevées, ce n'est pas son truc.

Blessée dans son amour propre, elle fut la première à perdre le sourire.

-Vous n'avez décidément aucune chance avec lui dans ce cas.

Elle s'apprêtait à tourner les talons avant que cette discussion, (qui était soit dit en passant la première depuis quelques semaines) ne dégénère.

-Ma vie sentimentale vous tracasse-t-elle à ce point ? Ou êtes vous simplement inquiète de savoir s'il reste une place dans mon lit ?

Elle leva les yeux au ciel. Qu'est-ce qu'elle espérait ? Qu'il la laisserait avoir le dernier mot ?

-Votre frustration constante est une preuve de la solitude de vos nuits. Lui dit-elle en se retournant face à lui.

Elle conserva une expression neutre, mais fulminait intérieurement. Puis elle rajouta ;

-Ou alors votre compagne ne sait décidément pas comment s'y prendre.

-Peut être devriez vous me montrer vos talents dans ce cas.

Elle n'en crut pas ses oreilles, et ne put masquer la surprise qui traversa son visage le temps d'un instant, ni la légère teinte rosée dont se tachèrent ses joues.

-Je ne vous connaissais pas si direct.

-Vous ne me connaissez pas du tout. Mais vous aviez pourtant l'air d'être de celles qui écartent facilement les cuisses l'autre soir.

Elle dut prendre une grande respiration pour ne pas lui trancher la gorge, là maintenant, mais ce serait sans doute trop difficile à expliquer à la Dame Blanche.

-Peut être pourrions nous continuer cette charmante conversation sur le terrain d'entrainement, que je puisse arracher votre langue une fois pour toute.

-Si cela suffisait à vous rendre supportable.

Ils mirent quelques instants à arriver sur place. En rage, Naé prit deux épées légères qui avaient été mises à disposition, et l'attendit. De nombreux elfes se trouvaient là, autours d'eux, entrain de perpétuer leurs entraînements quotidiens, ainsi que Boromir et Aragorn qui combattaient un peu plus loin. Legolas arriva, prit les mêmes armes qu'elle, et se mit en position.


Pendant les premières secondes, ils se fixèrent, essayant de prévoir les mouvements de l'autre. Elle savait qu'il était un excellent combattant, bien meilleur qu'Haldir avait pu sembler l'être ce matin, bien qu'elle n'avait jamais pu l'observer en combat. Aussi ne savait-elle absolument pas quelles étaient ses techniques ou ses parades.

Elle se jeta sur lui, les épées en avant. Il riposta sans difficulté et le duel commença. Le bruit de leurs lames s'entrechoquant témoignait de la puissance de leurs coups. Il fit un pas sur le coté, et tenta une attaque à la hanche, qu'elle esquiva aisément. Leurs lames semblaient flotter dans les airs, extensions de leurs propres corps, tandis qu'ils se lançaient dans une danse macabre. Elle se jeta au sol, essayant de lui couper les jambes, mais un salto élégant l’éloigna du danger, et le temps qu'il contre attaque, elle s'était déjà relevée. Aucun des deux n'arrivait à toucher l'autre, et la rapidité de leurs mouvements les rendaient aveugles au monde autour d'eux.

Ils bougeaient aussi rapidement l'un que l'autre, et cela demandait à Naé toute sa concentration pour réussir à suivre ses gestes.

C'était un adversaire redoutable, bien plus qu'elle ne l'aurait cru, et l'admettre lui brûlait la bouche. Elle vibrait sous l'impact des lames, tandis qu'une énergie incroyable s'empara d'elle. L'adrénaline, sans doute, et elle vit au sourire malicieux qu'il arborait qu'il la ressentait lui aussi. Lorsqu'il attaquait, elle paraît ses coups, et il esquivait les siens avec une agilité naturelle. Ils arrivaient à prévoir les gestes de l'autre avant même qu'il n'y pense. Elle pouvait entendre le souffle du prince, sentir la chaleur de son corps lorsqu'il contenait ses coups.

Ils enchaînaient leurs attaques, leurs parades, et après de longues minutes, elle sentit la chaleur de l'effort la submerger. Elle se recula, et se débarrassa de sa cape, se retrouvant ainsi en simple chemise blanche légère, qui recouvrait son corset. Elle s'attendait à ce qu'il en profite pour l'attaquer par surprise, mais il avait fait de même de son coté.

Elle prit donc quelques instants pour le regarder, ou plutôt le contempler.

Ses cheveux étaient désordonnés, des gouttes de sueur semblaient perlées le long de son cou et le haut de son torse. Sa chemise froissée blanche faisait ressortir l'intensité de ses yeux bleus et la perfection de son teint, et laissait même apercevoir quelques uns des traits de son torse qu'elle devait cacher.

Il avait dû deviner sa pensée puisqu'une lueur surprise et intriguée se dessina dans ses yeux.

Honteuse de s'être faite surprendre, elle se jeta sur lui de nouveau, mettant fin à leur courte pause. Il s'élança sur le coté, glissa dans son dos avec élégance, et alors qu'elle le sentit se rapprocher d'elle pour l'immobiliser et lui caler une lame sous la gorge, elle donna un violent coup de tête en arrière. Le nez du Prince craqua, et elle en profita pour se retirer vivement de son étreinte mortelle.

Lorsqu'elle se retourna pour le regarder, elle vit qu'un filet de sang coulait de son nez, mais à voir le sourire étrange qu'il affichait, elle comprit que l'adrénaline l'empêchait d'en ressentir la douleur. Elle n'éprouvait pas de remords, il l'avait mérité.

Elle continua alors son offensive, lui envoyant une cascade de coups d'une brutalité étonnante, qu'il réussit à parer à chaque fois. Il passa ainsi quelques minutes, ne faisant que se défendre. Elle s'attendait à ses attaques et fut déstabilisée par la stratégie qu'il semblait adopter. Il en profita pour la charger, et la plaquer violemment contre le sol. Alors qu'elle s'apprêtait à rouler sur le coté pour se redresser, il l'arrêta d'un violent coup de coude et elle sentit sa lèvre se fendre sous l'impact, libérant un peu de sang.

Avant même de ressentir le picotement de la douleur, elle l’entraîna alors dans une roulade maîtrisée et se retrouva assise sur lui, ses épées croisées juste sous sa gorge. Il n'avait pas d'échappatoire, et il le savait.

C'était fini.

Elle avait gagné.

Fière de sa position dominante, elle reprit son souffle, lentement.

Elle pouvait voir le sang pulser sous la peau du cou de son adversaire, preuve de l’énergie qu'il avait mit dans ce combat. Il la regardait, et elle vit alors un sourire se dessiner sur le coin de ses lèvres, tandis que ses yeux changèrent d'expression.

Un désir lui y était adressé.

Pas ce désir froid, ou calculateur, non. Un désir brutal, presque bestial.

De celui qui a besoin d'être assouvi.

Elle sentit alors le bas de son ventre se contracter, et une chaleur l'envahir.

Elle se pencha alors près de son oreille, assez pour lui murmurer ;

-Vous aviez peut être raison pour une fois. Il semble que j'ai tendance à écarter les jambes pour n'importe qui.


Des applaudissements ponctuèrent sa phrase. Surprise, elle releva la tête et découvrit avec stupéfaction qu'une assemblée d'elfes s'était regroupée autour d'eux. Elle se releva en vitesse, gênée, alors que Gimli s'approcha d'elle ;

-Et ben ça, c'était un combat !

Legolas se releva en silence, pendant qu'Aragorn s'approchait à son tour.

-Je suis content de vous comptez l'un comme l'autre parmi nos alliés, dit-il en souriant.

-Évitez de vous abîmer la prochaine fois. La voix de Boromir paraissait tendue

Elle entendit vaguement Gimli protester que cela faisait partie du combat et ne rendait la victoire que plus belle, mais elle n'écoutait déjà plus. Elle regardait son adversaire, qui la fixait également. Il s'était passé quelque chose, entre eux. Elle pouvait le sentir dans tout son corps, et le voir dans le regard du prince.

Il inclina alors la tête, comme pour la féliciter de sa victoire, puis s'éloigna, silencieux.

Boromir insista alors pour qu'elle l'entraîne, et bien qu'elle n'avait pas la tête à ça, elle y passa tout le reste de la journée.

Elle lui apprit les parades et les attaques à sa portée qu'elle connaissait, l'obligeant à s'en servir contre elle.

Aragorn entraînait Sam à quelques pas de là, et le hobbit s'approchait de temps en temps, lui demandant des explications, des conseils, ou venait simplement regarder comment ils avançaient.


Ce soir là, elle ne ferma pas l'oeil. Les pensées se bousculaient dans sa tête, et elle n'arrivait plus à les remettre en ordre ou à les ravaler. Lorsque le Soleil se leva, elle était arrivée à deux conclusions.

La première était qu'elle désirait cet elfe. Elle le désirait terriblement, de façon irrationnelle et passionnelle.

Et la deuxième chose, était qu'elle le haïssait pour cela. Pour cette attirance qu'il avait fait naître en elle. 


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