Un Peuple Oublié

Chapitre 30 : Chapitre 29 _ Courrez à la ruine et à la fin du Monde!

3693 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/06/2020 16:20

Après deux jours d'un galop épuisant, Naé avait fichtrement mal aux fesses.

Mais comme tout ceux qui l'accompagnaient, elle ne se plaignait pas.

Enfait, elle n'avait pas dit un mot depuis deux jours. Ni quand elle était secouée sur son cheval.

Ni pendant les très courtes pauses que s'accordaient les hommes pour dormir un peu. Elle était restée solitaire, et ne se mélangeait pas aux autres.

Elle écoutait de loin les maigres conversations quand il y en avait, mais se retenait bien d'y participer.

Elle était fatiguée. Émotionnellement.

Quand arrêterait-elle de perdre les gens qu'elle apprenait à aimer ?

Le départ de ses compagnons avait été aussi brutal qu'inattendu. Après avoir passé autant de temps avec eux, chaque jour, elle se sentait seule. Seule et abandonnée.


Elle avait du mal à comprendre les raisons qui les avaient poussé à partir ainsi, comme des voleurs, sans rien en dire à personne, et même pas à elle.

Mais elle espérait qu'elles devaient être sacrement costaudes.

Elle ne les reverrait certainement jamais pour leur demander, de toute façon. Si elle ne mourrait pas dans cette bataille à venir, surement seraient-ce eux qui trouveraient la mort.

Elle ne leur en voulait pas, et pourtant, elle essayait de faire son deuil. Lentement. Et elle savait que ce n'était que le début.

L'elfe lui manquait terriblement. Elle avait l'impression qu'on avait déchiré une partie de son âme.

Et pourtant, c'était comme si elle pouvait sentir qu'il était toujours vivant. Qu'il allait bien. Elle ne savait pas comment l'expliquer, mais elle le savait. Elle le sentait, voila tout.

Elle connaissait les paysages qu'ils traversaient. Plusieurs fois elle s'était rendue à la cité Blanche, mais jamais en pensant y mourir. Cela rendait bien sur tout, ... plus puissant. Plus beau. Plus lent.


Alors qu'elle se savait encore bien loin de la cité, elle commença à entendre les tambours de guerre.

Ainsi donc, la bataille avait déjà commencé. Au fur et à mesure que les hommes les entendaient, l'allure s'accélérait. La peur d'arriver trop tard...


Enfin, quoi que bien trop longtemps après, l'armée du Rohan arriva sur la colline, leur donnant une vue sur le combat.

C'était comme une immense marrée noire qui semblait se fracasser avec violence contre la roche blanche de la cité.

Les orques étaient beaucoup trop nombreux. Et malgré la peur qu'elle aurait dû ressentir à cet instant, elle ne put s'empêcher de trouver cette scène magnifique. Elle se laissa envahir par les bruits de toutes ces âmes qui attendaient leur mort, le grincements de toutes ces armures, le souffle de la vie qui s'en allait... Et elle se sentait prête. Prête à faire, ce pourquoi elle était là. Prête à participer à la Grande Guerre.


La voix de Theoden brisa les pensées de la jeune femme.

-En avant ! Ne craignez aucune obscurité. Debout ! Debout, chevaliers de Théoden ! Les lances seront secouées, les boucliers voleront en éclats ! Une journée de l'épée...une journée rouge avant que le soleil ne se lève ! Au galop ! Au galop ! Courez à la ruine et à la fin du monde ! A mort ! 

- A MORT ! Crièrent en coeur tous les cavaliers.

- A MORT !

- A MORT !

- Pour Eorlingas !


Mort. Ce mot résonna en elle comme un vide. Comme un néant. Et elle sentit l'excitation monter. L'adrénaline. Tel un cours d'eau qui va se briser sur un amas de cailloux et de pierres, les cavaliers s'élancèrent au galop.

Le choc des deux armées fut brutal, mais les orcs étaient à pieds, et ils ne pouvaient réellement se défendre contre un ennemi à ce point plus haut qu'eux.

Naé faisait valser son épée légère, et elle avait fait sortir la petite lame de son autre bras, pour pouvoir se protéger avec si besoin.


Les morts se firent par centaines, dans les rangs noirs, et cela redonnait l'espoir aux hommes qui n'en avait plus.

Le sang giclait partout, le bruit des os piétinés par les chevaux résonnaient dans la tête de l'elleth comme un grésillement qu'on ne peut éteindre.

Elle entendait le rythme saccadé de ses battements de cœur, qui s'accéléraient au fur et à mesure du combat.

Elle avait perdu toute notion de temps, prise de cette frénésie si particulière qu'elle connaissait tant.

Elle ne dirigeait pas son cheval, le laissant se frayer un chemin à travers les visages immondes qu'elle rencontrait.

Ses coups déchiraient le vent, tout autant que les membres, mais elle n'avait plus peur. L'adrénaline résonnait dans son ventre, et la poussait toujours en avant, sans réfléchir un seul instant.


Les nazguls poussaient des hurlements de mort dans le ciel noir, obligeant chacun à se concentrer pour ne pas se laisser briser les tympans. Leurs dragons rachitiques faisaient des percées dans les rangs des hommes, attrapant plusieurs chevaux avec leurs énormes griffes.

Alors que les hommes gagnaient du terrain, et que l'espoir était entrain de renaître dans leurs rangs, résonna soudain un nouveau cor.

Naé décapita un nouveau monstre, puis se figea.

Elle connaissait ce son, bien qu'elle espérait se tromper.


Relevant la tête, elle comprit qu'elle avait eu raison.

Les Haradrims. Les légions du Harad. Des guerriers bien plus entraînés que ne pouvaient l'être les Rohirims, ou les Gondoriens. Et en plus de ça, monter sur des Oliphant ?

Naé n'en crut pas ses yeux. Jamais elle n'aurait pensé revoir ces bêtes monstrueuses.

Elle connaissait bien les coutumes de cette horde venue de loin, elle y avait séjourné quelques années. Et finalement, cela ne la surprenait guère qu'ils aient répondu à l'appel du Mordor.

Les cavaliers se regroupèrent face à ce nouvel ennemi, et ce fut une première erreur. Les monstrueuses montures n'avaient qu'a tourner la tête pour massacrer une dizaine de chevaux et de cavaliers.

La panique fut totale.

L'elleth sortit son arc, et visa les hommes perchés sur les oliphants. 1. 2. 3. Tiens, elle n'avait pas pensé à compter avant.

De toute façon il n'y avait plus personne à impressionner. 10. 11.12.


Touchant l'homme qui menait la bête, celui ci tomba sur le coté, entraînant sa monture du coté gauche, jusqu'à ce qu'il aille se fracasser sur un autre monstre.

Deux oliphants au sol, les hommes reprirent espoir.

Un troisième tomba à son tour. A l'autre bout du champ de bataille.

Puis un quatrième.

Voyant qu'elle allait manquer de flèches, l'elleth ressortit son épée et sa lame, et se remit à trancher ce qui lui arrivait à portée.

Mais les flèches pleuvaient autours d'elle, et très vite, Ametis fut touché. Il partit au galop, paniqué, et fonçait droit vers les pieds d'un des monstres géant.

Ne voulant se laisser entraîner, la jeune femme glissa de coté, et se retrouva au sol, en une roulade contrôlée.

A présent à hauteur de ses ennemis, elle perdait sa position de supériorité, et il fallait être vive pour à la fois se défendre, et repérer tout ce qu'il se passait autours.

Si elle ne prenait pas garde, elle pourrait bien finir écrasée par un énorme pied.

La perte de son œil l'handicapa alors bien plus qu'elle ne l'aurait pensé.


Elle bougeait, sans cesse. Ne pas laisser de cadavres s'amonceler à ses pieds.

Du sang noir giclait sur son visage, et lui laissait un goût de mort dans la bouche. Elle prit un instant pour regarder autour d'elle.

Elle vit les Rohirims se faire piétiner, ou transpercer, même dévorer.

Elle vit la violence du mal dans son état brut.

Elle entendit des hurlements de désespoir de ceux qui s'apprêtaient à mourir.

Reprenant son souffle, elle décapita un nouveau monstre face à elle.

Puis elle ferma les yeux, et se laissa envahir par ses instinct.

Ne plus penser.

Ne plus entendre.

Ne plus sentir.

Elle ressentait simplement.

Elle ressentait la vibration de ses lames lorsqu'elles tranchaient les chairs.

Elle ressentait la faible chaleur du soleil qui essayait de percer à travers un ciel obscurci.

Elle ressentait le tremblement du sol à chaque pas d'oliphant.

Elle ressentait les blessures qui petit à petit la fatiguaient.

Quelques unes de ses chairs avaient été tranchées, mais aucune douleur à laquelle elle ne survivrait pas.


Soudain, elle entendit un bruit inconnu jusqu'alors.

Comme un grincement de vent, qui s'approchait à toute allure. Elle s'immobilisa une seconde, attendant de voir quelle horreur allait encore débarquer.

Un coup de lance dans le bas du dos lui arracha un cri, tandis qu'elle se retourna pour décapiter son adversaire.

Un frisson la parcourut alors, comme un courant d'air froid semblait s'être immiscé dans les rangs.

Elle passa la main dans son dos, et la vit tachée de sang.


Elle jura pour elle même. Cela ne serait jamais arrivé si elle avait eu ses deux épées. Ou ses deux yeux. Elle aurait été bien plus meurtrière, et elle le savait. Mais elle faisait ce qu'elle pouvait. Et cela devait suffire pour le moment puisqu'elle était toujours en vie.

Puis, elle entendit soudain l'armée noir crier.

Chacun de ses membres sembla se précipiter vers l'avant, comme pour s'enfuir. Mais que pouvaient-ils fuir ?

Elle regarda au loin et crut voir.. un fantôme. Quel était encore ce maléfice ?

Non pas, un seul, mais une armée de fantôme. Comme une brume automnale, dansante, qui semblait engloutir le mal comme une marée meurtrière.


Comment était-ce possible ?


Alors qu'elle abaissait ses armes, un des fantômes s'arrêta soudain devant elle. Il resta immobile un instant, alors que tous ses congénères continuaient d'avancer.

Naé eut alors l'impression qu'il fouillait son âme, et il pencha lentement la tête sur le coté, comme s'il se demandait ce qu'il avait à faire.

Comme s'il se demandait si Naé était une ennemie ou une alliée.

Elle restait la. Immobile, se demandant comment combattre un fantôme. S'il décidait qu'elle était une ennemie, elle n'avait aucune chance d'en réchapper.

Doucement, elle rangea alors sa lame dans le mécanisme de son bras gauche. Son pouls s'accélérait, et elle comprit qu'il allait l'attaquer quand il fit un pas en avant. Il s'apprêtait à abattre son épée à deux main sur le crane de la jeune femme, quand quelque chose passa devant elle à toute allure.

Ouvrant les yeux, elle vit que l'épée ennemie avait été arrêtée par une autre lame dans sa course.

-Non.


La voix d'Aragorn résonna dans sa tête, alors que la créature s'envola aussitôt très loin, comme si elle n'avait jamais été la.

-Je n'ai jamais été aussi contente de vous voir, lâcha-t-elle, le son de sa voix la surprenant elle même.

Le rôdeur sourit, et, comme soulagé l'un et l'autre, ils s'enlacèrent un instant.

-Venez, reprit-il, gêné de son propre geste.

Elle sourit, et le suivit, dans un champ de massacre où il n'y avait à présent plus un seul orc vivant.


Ils slalomaient entre les cadavres, et les membres coupés, pour se rapprocher des murs de la cité.

Le massacre avait été terrible, dans les deux camps.

Essayant de ne pas y faire attention, elle ne pouvait empêcher son œil de scruter les cadavres des Rohirims, priant silencieusement pour ne pas reconnaître leurs visages.

La plupart portaient encore leurs heaumes, mais elle pouvait voir la lueur de terreur encore présente dans leur yeux ouverts.

Certains visages lui était familier, et elle sentit un goût de bile monter dans sa bouche.

L'adrénaline du combat quittait peu à peu son corps, la laissant ressentir à nouveau.

Son dos la brûlait un peu plus à chaque pas, et la douleur se réveillait peu à peu dans ses membres.


Les hommes descendaient de leurs chevaux, et s'enlaçaient les uns les autres, alors que certains lançaient des cris de victoire.

D'autres se précipitaient vers les cadavres, essayant de réveiller un ami ou un frère.


Puis, d'un coup, comme une éclaircie aux sensations qui l'assaillaient, Naé prit enfin conscience que la bataille était finie, et tomba à genoux.

Aragorn s'approcha d'elle, inquiet. Puis se détendit quand elle se mit à rire.

Elle explosa d'un rire nerveux et pourtant tellement léger.

Ils avaient survécu.

Le soulagement la fit continuer à rire quelques minutes, alors que beaucoup autours d'elle l'imitèrent. Le rôdeur tomba à genoux à ses cotés, se mettant à sa hauteur, et lui sourit.

-C'est vous pas vrai ?

Il ne comprit pas sa question.

-Vous nous avez sauvez.

De nouveau, elle s'inclina autant qu'elle le pouvait et mit une main sur son coeur. Il sourit et elle vit ses yeux s'embuer.

Doucement, elle essaya de se remettre debout, mais sans succès.

La douleur dans son dos atteignait peu à peu son apogée, et il était de plus en plus difficile de l'ignorer. Le rodeur la prit alors par la taille, et la leva, pour qu'elle puisse s'appuyer sur son épaule.


Doucement, ils se remirent en marche, le poids de l'elleth soutenu par son ami.

Au fur et à mesure qu'ils avançaient, elle essayait de ne pas regarder le sol, et finit par ouvrir la bouche sur la question qui lui brûlait les lèvres ;

-Que s'est-il passé ? A Dunharrow...

-Le seigneur Elrond est venu m'apporter l'épée. L'épée de Narzil. Les elfes l'ont reforgé. Il savait que cela me permettrait d'avoir autorité sur les morts de la montagne... Je ne voulais pas les entraîner, ni vous ni les autres dans ce qui n'était que des suppositions... Mais il avait raison.

-Ca en deviendrait presque agaçant, sourit-elle, trop faible pour en vouloir à qui que ce soit.


Ils avançaient lentement, ralentis par le poids de l'elleth.

Sa blessure continuait à saigner, et la descente d'adrénaline faisait grandir sa douleur à chaque pas.

Mais là encore, elle serra les dents et ne dit rien. Nombreux devaient-être les blessés plus amochés qu'elle, qui avaient besoin de soin d'urgence.

Et d'ailleurs, elle ne comprenait pas pourquoi Aragorn s'évertuait à la porter jusqu'au château plutôt que d'organiser les hommes.

Mais de nouveau, elle ne dit rien.

Petit à petit se rapprochant, elle s'aperçut que les fantômes semblaient attendre, sagement, en un demi cercle presque parfait au pied de la cité.

Elle sentit le bras de son ami se tendre sous son épaule, et comprit que c'était lui qu'ils attendaient.

Devant eux se tenaient son très cher nain, et son elfe plus cher encore. Le fait de le revoir lui provoqua l'effet d'un coup de poing dans la poitrine. Il se tenait droit, et ne semblait pas blessé. Il était à peine taché, si peu qu'elle douta même qu'il ne se soit battu.


Ses cheveux étaient toujours bien ordonnés, et aucune goutte de sang ne venaient tacher son visage.

Elle ne put retenir un sourire de soulagement lorsqu'elle le vit, et fut rassurée de voir qu'il lui sourit en retour.

Mais avant qu'elle ne puisse aller se précipiter dans les bras de ses amis, une voix brumeuse s'éleva.

-Libérez nous.

S'arrêtant, Aragorn enleva doucement son bras de l'elleth, mais avant qu'il n'ait eu le temps de vérifier qu'elle tenait bien debout, Legolas s'était précipité à sa place, soutenant son amie.


Elle respira alors son odeur, et ce fut comme si cela la soulagea de toutes ses peines.

-Merci, lui murmura-t-elle à l'oreille, de façon à ce qu'il n'y est que lui qui entende ses mots.

Ils se regardèrent alors un instant, et se sourirent. Et ce fut comme si cela avaient suffit à n'importe quel mot.

-Mauvaise idée, très pratique ces aides de camp. Même s'ils sont morts.

Un souffle de vent froid fit alors frissonner les hommes, et Aragorn sourit ;

-Je considère votre serment accompli. Allez, soyez en paix.

Sur ces simples mots, le vent se leva, et emporta l'armée des morts comme s'ils n'avaient été que poussière.

Un autre soupir de soulagement passa les lèvres du rodeur, à croire qu'il avait craint jusqu'au dernier moment que ses mots ne suffisent pas.


Puis, doucement, et sans une parole, les compagnons entrèrent dans la cité.


L'elleth était toujours soutenue par l'elfe, et cela lui apportait une paix qu'elle n'espérait plus, réduisant sa douleur, elle ne pouvait s'empêcher de regarder son compagnon et de se nourrir de ses traits comme si elle les découvrait pour la première fois.

Gimli se tenait derrière eux, et ne disait rien. Il regardait le sol, et les cadavres qu'ils dépassaient. Il évita le regard des veuves et des enfants quand ils remontèrent dans la cité. Il grimpèrent jusqu'au château, et ouvrirent la grande porte.


Les blessés étaient peu à peu ramenés ici, au fur et à mesure qu'on les trouvait.

Des femmes s''activaient à les soigner comme elles le pouvaient, lavant des blessures, en pansant certaines, recousant des plaies, ou amputant des membres.

Les blessés gémissaient, tandis que d'autres pleuraient. Les femmes murmuraient quelques paroles réconfortantes, ou donnaient des directions à ceux qui les aidaient.

Malgré toute cette agitation, quand Aragorn entra dans la pièce, tous les visages se tournèrent vers lui, avant de reprendre leur activité.


Naé aperçut alors Gandalf, non loin d'elle, qui semblait s'apprêter à sortir, mais quand il les vit, il s'approcha du petit groupe.

Il mit quelques secondes à comprendre qu'il s'agissait de Naé, les traits cachés par une chevelure blanche qu'il ne connaissait pas. Il interrogea les autres du regard, avant de se reprendre.

-Est-ce grave ?

Ce fut Legolas qui répondit,

-Rien dont je ne saurai m'occuper.

Les yeux du vieil homme passèrent d'un elfe à l'autre, d'abord plein de surprise, puis de ... mécontentement.

-Dans ce cas...

Evidemment. On avait besoin de monde ailleurs. Là bas. Dehors. Aux pieds de la cité, dans les champs du Pelenor. Nombre de blessés attendaient qu'on leur porte secours.


Legolas finit par poser délicatement Naé sur le sol, et constata qu'elle avait fermé les yeux.

D'épuisement ou de douleur, il n'aurait su le dire, mais elle ne semblait pas inconsciente.

Aragorn mit une main sur son front et constata qu'il n'était pas plus chaud qu'à l'accoutumé.

Doucement, les deux hommes défirent la spallière, puis le petit bout d'armure qui recouvrait le torse de leur amie. Puis la chemise, et enfin le corset.

Naé n'avait plus la force d'ouvrir les yeux.

Elle était comme... vidée. De toute énergie et de toute volonté. Ses blessures lui faisaient mal, bien sur, et celle dans le bas de son dos lui brûlait la chair, mais c'était aussi le soulagement. D'avoir retrouvé ses amis, de se libérer de cette certitude de mourir. Tellement de poids s'étaient envolé de ses épaules, qu'elle accusait le coup comme elle le pouvait.

Elle sentit la froideur de la pierre humide sur sa peau nue lorsqu'ils la déshabillèrent, et cela lui fit du bien.

Aragorn la retourna ensuite avec délicatesse pour la mettre sur le ventre, et pouvoir observer son dos.

Quelques secondes passèrent ensuite, où elle se sentit partir dans un profond sommeil, n'entendant plus les voix autours d'elle.

Puis tout à coup, une douleur encore plus atroce la réveilla.

Une brûlure si intense qu'elle ouvrit les yeux et hurla brièvement.

Ils étaient entrain de suturer la plaie a l'aide d'un fer rouge, après l'avoir désinfectée au mieux en y versant de cet alcool absolument infect qu'ingurgitaient tous les soldats.

Moins d'une minute plus tard, le fer était loin et l'elleth s'était déjà redressée et avait revêtue sa chemise, regagnant un peu d'intimité.

Aragorn lui avait adressé un signe de tête, puis était parti en direction de la grande porte, accompagné de Gimli. Voyant qu'elle n'était plus en danger, l'homme avait préféré aller s'affairer ailleurs, laissant son amie au soin de Legolas.

-Tiens, bois en une gorgée.

L'elfe lui tendit la gourde d'où venait l'alcool. Sans même répondre, elle lui prit des mains et en avala une grosse rasade.

-Est-ce que ca va ? Ajouta-t-il.

Elle le regarda, et ne put s'empêcher d'approcher sa main du visage du prince. Elle effleura alors les traits de son visage comme s'il s'agissait d'un rêve, et qu'elle avait besoin de toucher pour vérifier. Il sourit avec tendresse.

-Je vais t'amener dans un vrai lit, tu pourras te reposer.

Complètement abasourdie et sonnée, elle ne répondit pas, et le laissa la porter comme s'il avait s'agit d'une enfant qu'on porterait pour mettre au lit.

Elle était endormie d'ailleurs bien avant qu'il ne la borde, et ne se réveilla pas lorsqu'à son tour, il effleura son visage, et lui déposa un chaste baiser sur le front, avant de s'éclipser sans un bruit. 

Elle avait besoin de repos, et personne ne discuta cela.


Legolas allait la voir régulièrement, surveillant sa fièvre, et profitant simplement de sa proximité, mais il en ressortait chaque fois déçu. Il aurait aimé lui parler de ce fameux soir, à Dunharrow. Il aurait aimé lui parler de la bataille. Lui dire que tous les compagnons étaient bien vivants et sain et sauf. Lui apprendre qu'Eowyn, la femme à qui elle avait un jour proposé une épée, avait tué le Roi sorcier d'Angmar.


Mais il ne pouvait pas. Jour après jour, elle dormait.

Et elle dormait encore, le jour ou le conseil prit la décision de se rendre en Mordor.

Et même le jour d'après, lorsque l'armée des Hommes, se mit en marche pour de bon. 


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