Un Peuple Oublié

Chapitre 35 : Chapitre 34 _ Les Conseils d'un ami

2088 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/06/2020 16:26

Le mois qui s'en suivit s'écoula rapidement. Aragorn avait beaucoup à faire, évidemment, il dirigeait les travaux de restauration un peu partout dans la ville, et tous les hommes l'écoutaient sans broncher. Il se déchargeait néanmoins beaucoup sur Faramir, bien sur, et sur Naé. Les soldats la connaissaient, et la respectaient, et il avait l'impression que ce rôle lui plaisait, finalement. Bien qu'il ne l'aurait jamais imaginé dans une place comme celle ci. Elle qui lui était toujours apparut froide, solitaire, égoïste même... Il sourit en pensant à combien il s'était trompé. Elle s'était tout simplement protégée. De tout. Mais à présent il n'y avait plus rien à fuir ou à combattre...


Les hobbits passaient leur temps tous les quatre, profitant de leur retrouvailles bien mérité. Frodon avait bien sur souvent besoin de se retrouver seul. Les souvenirs de l'anneau pesait lourd sur son cœur, et avait marqué profondément son âme. Il partait quelques fois pendant des heures, visiter les alentours de la cité, et profiter d'un peu de silence et de paix. Après avoir passé si longtemps avec cet objet maléfique, personne ne l'en blâmait. Pas même Sam, qui attendait jour après jour qu'il lui propose de venir avec lui. Cela arrivait de temps à autre, mais pas aussi souvent qu'il ne l'espérait.


Merry et Pipin quant à eux s'initiaient à l'art de la musique, s'essayant à faire des chansons de leurs récits d'aventures. Des chansons gaies, bien sur. Des chansons pour faire danser les gens, et ramener un peu de joie contre les souvenirs de l'horreur que chacun avait connu. L'horreur de la guerre, celui de la perte, ou simplement de trop de violence...


Naé et Legolas aidaient les hommes le jour, à remettre en état chaque maison, chaque mur, et chaque rempart de la belle cité, et pour cela, il y avait encore du travail. Chacun y mettait du sien. Et la nuit, ils partaient souvent tous les deux, dans la nature alentours que l'elleth avait apprit à connaitre. Ils ne se séparaient presque jamais, profitant du temps ensemble, rattrapant toutes ces journées séparés. Leurs chamailleries quotidiennes faisaient désormais rire leurs compagnons, au lieu de les agacer, et ils semblaient plus heureux que jamais.


Eowyn était restée à Minas Tirith, prétextant à son frère qu'elle voulait aider à organiser le grand couronnement, bien que celui ci ait bien entendu deviné la raison qui se cachait derrière. Elle se rapprochait jour après jour de Faramir, et d'aucun dirait que leur relation semblait s'approfondir.


Gimli aidait de temps en temps pour les rénovations, bien qu'il se contentait souvent de donner son avis, une bière à la main. Il aimait passer du temps avec ses deux acolytes elfes, se moquant d'eux avec malice. Il avait trouvé, dans ces deux êtres, des amis si précieux à son cœur qu'il appréhendait de devoir s'en séparer. Il savourait de voir le lien qui les unissait, et se sentait toujours très fier d'y avoir (sois disant) participé. 


Chacun savait que lorsque le couronnement aurait lieu, et que le quatrième âge commencerait, chacun repartirait chez lui. Gimli retournerait à Erebor, les hobbits en Comté, Legolas dans la forêt Noire, Gandalf on ne savait où, et Naé encore moins...

Personne n'en parlait. Tous savait, mais tous taisaient le sujet.


Tellement de préparatifs étaient à faire, les gens se bousculaient aux portes de la ville. Chaque boutique était affairée à quelque chose. Les boulangers préparaient pains et gâteaux en nombre. Les brasseurs brassait tellement de bière qu'on aurait pu y noyer la cité. Les tisserands et les tailleurs s'occupaient de nombreux costumes. Les paysans avaient ressemé tous les légumes d'hiver, en espérant que le froid n'arrive pas trop vite.


Les invités arrivaient petit à petit dans la cité, profitant quelques temps de l'humeur festive qui y régnait.


La veille au soir de l'événement tant attendu, Gandalf errait dans les couloirs du château, réfléchissant, et se remémorant ces derniers mois. Il y avait quelque chose qu'il fallait qu'il fasse et il n'en avait pas vraiment prit le temps. Alors, de couloirs en couloirs, il cherchait Naé.

Il savait qu'elle était seule ce soir, Legolas et Gimli était occupé avec des invités de leur peuple respectif, aussi parcourra-t-il la moitié du dédale avant de la retrouver.


Elle était dans la petite cours, où lui avait conseillé de se rendre Faramir. Apparemment il la connaissait bien. Allongée dans l'herbe du petit jardin, elle fixait la lune.

Elle était en manche courte, et au vu de la fraîcheur ambiante, Gandalf fronça les sourcils, il savait qu'elle avait toujours eu horreur du froid.


Il la regarda un instant, puis s'annonça en se raclant la gorge.

Elle tourna la tête, et laissa échapper un sourire.

-Gandalf, le salua-t-elle.

-Naélane, lui répondit celui ci.

Il s'approcha, et s'assit sur le petit banc de pierre au centre du jardin. Il regarda alors à son tour la lune, et soupira.

-Elle vous a toujours fascinée, n'est-ce pas? Lui demanda-t-il, bien que ce ne soit pas réellement une question.

Elle rit de sa remarque.

-C'est la lumière qu'elle renvoie qui me fascine...

Il sortit alors sa pipe et son herbe d'un des dessous de sa robe. Et lentement, il entreprit de la remplir, et de la tasser.

-Il est difficile de vous voir seule.

-Serait-ce un reproche?

-Une simple constatation. Mais peut être est-ce ma faute... Je sens que vous êtes en colère après moi.

-En colère? Non, pas du tout je ... Elle réfléchit un instant à ses paroles. Oui, peut être un peu, c'est vrai.

Elle s'attendait à ce qu'il lui demande pourquoi, mais il n'en fit rien. Il alluma sa pipe et en tira deux grandes bouffées. Elle leva les yeux au ciel, exaspérée par son indifférence, et reprit;

-Azazel. Vous saviez qu'il avait été prit.

-Prit? Non ... Il s'est rendu. Il a honoré sa part du marché.

-Alors vous saviez tout? Et vous n'êtes pas intervenu? Ne l'en avez pas dissuadé?

-Le pire marché du monde reste un marché, dit-il calmement.

Elle sentit la colère monter en elle, et se concentra sur sa respiration pour la ravaler sa rage.

-Pourquoi ne pas me l'avoir dit?

-Vous n'étiez pas prête à l'entendre. Il sembla hésiter une seconde. Vous auriez couru jusqu'aux portes Noires à la seconde où vous auriez su. Et vous seriez morte, là bas. Ou pire, Il vous aurait prit votre âme, à vous aussi.

-Cela aurait peut être été préférable... ronchonna-t-elle.

-A l'époque peut être auriez vous pu le penser. Mais maintenant... ?

Elle réfléchit une seconde, amère.

-Alors c'est tout. Pas d'excuses?

Il rit.

-S'il vous en faut je peux vous en faire, mais vous savez que j'ai raison. Comme Azazel a eu raison... Il marqua une légère pause, le temps qu'elle digère la rudesse de ses mots, puis enchaina; Je n'aurais pourtant jamais pensé qu'il viendrait vous chercher. J'avais compris que vous étiez son Alaar, mais il n'était pourtant pas le votre. Je ne sais exactement la nature du lien qui vous unissait, mais il était puissant.

Elle soupira.

Evidemment, se dit-elle pour elle même. Il savait tout. Depuis le début. Cela ne la surprit pas, mais lui laissa un mauvais goût dans la bouche.

-Je ne suis pas en colère. Mais j'aurais aimé le savoir... Le doute. L'incompréhension. Vous ne pouvez pas savoir le mal que cela peut faire, vous ne les connaissez pas.

Il haussa un sourcil.

-Ah vous croyez?

-J'ai honoré ma dette, changea-t-elle de sujet.

-Oui, votre dette est payée, ma jeune amie.

Elle lui adressa alors un sourire sincère, et le dévisagea une seconde. Les braises de sa pipe éclairaient faiblement son visage, mais pour la première fois, elle le trouva fatigué. comme s'il vieillissait. Et cela lui fit peur.

-Il y a néanmoins un autre sujet que je voulais aborder... dit-il soudain, rompant le silence, et prenant un air grave. Comme si ce qu'il s'apprêtait à dire le rendait triste.

-Je vous écoute.

-Je ne suis ni juge, ni partie, mais il me faut vous mettre en garde.

Elle haussa un sourcil, intriguée.

-Vous vous êtes beaucoup rapproché du fils de Thranduil, semblerait-il.

Elle hocha la tête, se demandant où il voulait en venir.

-Non pas que cela soit mes affaires, évidemment, mais.. Je vous apprécie, Naélane des mont brumeux, et je ne voudrais pas que vous souffriez inutilement.

-Venez en au fait.

-Les faits? Hum ... Oui bien sur. Et bien le fait est que vous êtes une elfe Noire. Et vous savez que les portes de Valinor vous seront à jamais fermées. Vous ne ressentirez jamais, ce que les autres nomment "l'Appel de la Mer". Vous passerez ainsi votre éternité sur cette terre, au milieu des hommes, alors que tous les autres elfes la quitteront...

Ses yeux s'écarquillèrent soudain. Evidemment. Comment n'avait-elle pas pu y penser plus tôt.

-Vous voyez où je veux en venir n'est-ce pas. Le prince Legolas le ressentira, cet appel. Que ce soit demain ou dans 100 ans, il voudra partir. Pas de sa propre volonté, non, mais d'une bien plus forte, qui résonnera dans ses entrailles et dans son âme. On ne refuse pas un cadeau des Valars...

Des larmes se mirent à perler dans les yeux de la jeune femme.

-Thranduil ne tolérera pas que son fils rentre avec une elfe Noire, bien sur, mais il saura s'opposer à son père pour vous. Mais s'opposer à son propre destin? Le condamnerez vous à choisir entre vous et la paix de son âme?


Les larmes dévalèrent soudain les joues de l'elleth.

Une tristesse, non, un désespoir, violent.

Sans nom, qui sembla lui briser les os tant elle avait mal tout d'un coup.

Elle voulut hurler mais aucun son ne sortit.

Elle retomba sur le sol, et sa tête frappa la terre, comme si elle était dépourvue de toute volonté.

Gandalf se mordit la lèvre.

Son but n'était pas de la blesser, bien sur, mais de lui faire prendre conscience avant qu'il ne soit trop tard. Avant que l'un ou l'autre ne soit blessé.

Mais face à une telle détresse, il comprit qu'il n'avait que trop retardé cette discussion. Beaucoup trop.

Elle se releva, et sans un regard pour le magicien, elle couru dans les rues blanches de la cité.

Elle dévala les pavés, et hurla aux hommes qui gardait la porte de la lui ouvrir.


Une fois dehors, elle continua à courir, les joues baignées de larmes.

Elle aurait voulu qu'il pleuve. D'un orage à faire tomber le ciel, pour que le monde comprenne ce qu'elle ressentait. Ce n'était pas de la douleur physique, non bien sur. Ni mentale, à vrai dire. C'était un déchirement. Le déchirement de son cœur et de son âme.


Il fallait qu'elle se débarrasse de l'un ou de l'autre, et son choix bien sur était déjà fait.

Comment vivre avec quelqu'un que l'on rendra malheureux?

Comment prétendre aimer si on sait d'avance que l'on va le briser?

Les larmes brûlaient ses joues, et ses poings étaient crispés.

Elle entendait son cœur battre de rage jusqu'au bout de ses doigts.

Comme le métronome régulier d'une haine qui ne faisait que croître, et s'intensifier.

Elle aurait préféré avoir à affronter 10 000 orcs, plutôt que cette vérité.

On ne peut se battre contre son destin... 

Elle ne s'arrêta pas de courir, non, avant d'être si loin de la cité qu'elle ne la voyait plus.

Là seulement, elle s'effondra. Elle écouta alors le monde alentours, les bruits d'oiseaux, le chant de l'eau, la caresse du vent sur les hautes herbes.

Et pour la première fois de toute sa longue vie, elle se mit à insulter les Valars.

De tous les noms, en toutes les langues. L'avoir fait survivre à tout ça pour finalement lui arracher le cœur?

Elle se jura alors de ne plus jamais prononcer leurs noms, ni de les implorer, ni même de se résoudre à accepter leur existence, et ce jusqu'à sa mort.


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