Les Sims: La Famille Duchamps.

Chapitre 1 : Episode 1: Arrivée

5862 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 16/10/2025 23:39

« Maryline, mets les écouteurs que je t’ai offerts ! »

« Cynthia, je n’aime pas avoir de la musique quand je lis ! »

Sur la banquette arrière d’une voiture grise roulant direction Sunset Valley, les deux sœurs — Maryline, l’aînée, et Cynthia, la cadette — se chamaillent à l’arrière, pendant qu’à l’avant leur mère au volant, Hélène, se retourne et tonne :

« Moins de bruit à l’arrière ! »

« Mais maman, Cynthia m’empêche de lire mon roman. Elle fait trop de bruit. »

« Mais alors, METS DES ÉCOUTEURS ! » réplique celle ci.

Eric, le papa, s’immisce tout de suite dans la conversation, pendant que la voiture prend un virage.

« C’est vrai, Cynthia, sois à l’ÉCOUTE de Maryline, tu vois bien qu’elle se LIVRE. »

Hélène pousse un ricanement masqué par le bruit du clignotant. Maryline fronce les sourcils et Cynthia sourit avec gêne. Elles ont l’habitude de ce genre de blague de la part de leur père.

« Papa, pitié, arrête », demande Maryline en refermant son livre, créant un courant d’air agitant ses cheveux, pendant que Cynthia lui tapote l’épaule.

« Tu le connais, il n’arrêtera pas tant qu’il ne sera pas fatigué. »

« Excusez-moi, mesdemoiselles, de vouloir apporter de la joie pour ce déménagement. »

Cynthia ajuste ses cheveux châtains et vérifie que son collier au motif d’abeille soit bien attaché. « J’espère qu’un apiculteur voudra bien de moi dans cette ville. »

« Il n’y a aucune raison, ma chérie », commente Hélène en tapotant ses doigts sur le volant. « Tu es pleine d’enthousiasme, et puis tu aimes les abeilles ! »

« Merci, maman ! Mais je ne connais personne. »

« Tu présenteras tes talents, je suis sûre qu’un apiculteur voudra bien de toi. De plus, on m’a dit... »

La voiture tangue un peu en roulant sur un ralentisseur. La famille peut apercevoir le panneau d’entrée de la ville, un soleil souriant : « Bienvenue à Sunset Valley. »

« Fichu ralentisseur », peste Hélène.

« Et toi, Maryline, comment tu te sens pour l’entrée à l’université ? Lettres, c’est ça ? Professeure comme ta maman ! »



Sa fille aînée rougit légèrement, mettant son nez dans son livre, et répond timidement : « Je passe déjà mes études, et puis après on discutera si je veux devenir prof… Pas dans un lycée comme toi maman... »

Cynthia l’interromp.

« ...Puis maman, elle est prof de maths ! Une prof à la maison, c’est déjà trop ! »

Hélène roule des yeux avec un léger sourire. « Mais sans ma mutation, nous ne serions pas dans une meilleure ville. Il n’y a pas que des mauvais côtés, Cynthia. »

« C’est vrai. »

« On arrive dans une dizaine de minutes », annonce Hélène.

Un léger silence s’installe dans la voiture. Chacun retourne à son occupation, jusqu’à ce qu’Eric regarde la personne assise derrière lui : un jeune homme avec un casque sur les oreilles, plongé dans sa série « TrekSims », juste à côté de Cynthia.

C’est le dernier de la famille : Paul.

Eric lui tapote le bras. Le jeune homme retire son casque et fait un signe interrogatif.

« Et toi, Paul, comment sens-tu le déménagement ? »

Paul réalise un signe indiquant qu’il ne sait pas, suivi d’un petit haussement d’épaules.

« T’en fais pas, mon grand, ça va bien se passer », lui assure son père.

Le jeune homme lève un pouce en l’air.

Hélène intervient en claquant légèrement des dents. « Vous voyez, les filles ? Quand on est en voiture, j’aimerais que vous preniez exemple sur lui. »

Les occupants de la voiture éclatent de rire, y compris Paul, même s’il ne produit que des petits sons.

Depuis sa naissance, il n’a jamais parlé — juste des petits sons ou étouffements — et s’exprime toujours en langage des signes, que toute la famille a dû apprendre pour l’accompagner, bien qu’il comprenne parfaitement ce qu’on lui dit de vive voix.



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Ils arrivent enfin devant leur nouvelle petite maison située au 5, rue PaPatrik. Hélène gare la voiture juste devant la porte du garage, pendant que les deux filles se dépêchent de sortir pour aller chercher leurs affaires dans le coffre.

Paul, lui, sort délicatement, prenant le temps de ranger son casque, fixant leur nouvelle maison, un bâtiment en deux parties, entouré par un petit jardin et les autres lotissements, tous bien décorés. Il entre en premier à l’intérieur de la maison par la porte avant, ouvrant la bouche avec un grand étonnement.

Tout est déjà meublé, de la cuisine à la salle à manger jusqu’aux chambres, tout est là ! Paul se tourne vers ses sœurs et ses parents en train de décharger la voiture. Hélène, portant un carton contenant ses affaires, devine ses pensées, lui explique :

« Lorsque nous avons payé la maison, nous avions l’option de la meubler entièrement à notre arrivée. Ce qui a rendu plus facile le déménagement ! Viens, je vais te montrer ta chambre. »

Hélène entre en premier à l’intérieur de la maison, rapidement suivie de Paul, puis de Maryline et Cynthia, les cartons à la main, toutes aussi surprises de l’ameublement de leur nouveau lieu de vie.

Eric observe le quartier : des maisons similaires, des odeurs d’effluves et un soleil magnifique. Il regarde de plus près les jardins, souriant faiblement. Le déménagement lui a fait perdre son métier adoré de paysagiste, et il espère rapidement pouvoir retrouver son travail.

Après un soupir et une dernière inspection dans la voiture, vérifiant qu’il n’a rien oublié, Eric prend le dernier carton contenant ses croquis et ses sachets de graines qu’il compte planter pour réaliser le jardin de la nouvelle maison.

Soudain, un bruit de moteur, une moto retentit. Eric a à peine le temps de se retourner pour regarder d’où vient ce bruit que la motarde lui jette le journal du jour en pleine figure, ce qui manque de le faire tomber.



« Hey ! Mais ça ne vas pas ! »

« Livraison du journal de Sunset Valley tous les matins ! » puis la motarde repart immédiatemment.

Entendant les cri de Eric, le reste de la famille, Hélène en première, sort dehors et voit le journal posé par terre et le visage de Eric tout rouge.

« Papa ? Qu’est ce qui s’est passé ? » demande Maryline prenant le journal entre les mains, son attention attiré par une photo de l’université « FemmeFik ».

Hélène pose ses deux mains sur le visage de son mari« Enfin chéri, tu sais bien qu’il ne faut jamais se mettre devant la porte.. »

« ...le matin du journal, je sais. » conclut il agaçé.

« Mais enfin pourquoi ils font pas une appli et des notification sur téléphone ? » questionne Cynthia se penchant au dessus de l’épaule de Maryline. « Et puis pour les vieux ils continueraient a l’envoyer. »

« Parce que c’est obligatoire » explique le père. « Information pour tous, sois disant. »

« Mais pourquoi pas dans une boite aux lettres ? » ajoute Maryline.

« Parce que comme ça ils savent que tu l’as reçu et ils se protègent juridiquement contre les plaintes. »

« Attend attends..Papa. » Cynthia se met devant lui. « Il y a quand meme pas des gens qui portent plainte pour un journal ?! »

« Oh oh ! » il éclate de rire. « Si tu savais...Tu n’es pas la seule a pinailler pour rien sauf que eux, ils sont capable d'aller jusqu'au procès. »

« Hey ! Ça veut dire quoi ça « Pinailler pour rien» ?! »

« Que ton papa t’aime beaucoup » dit Hélène en frottant les cheveux de sa cadette.

Il entre à l’intérieur de la maison, écarquillant les yeux à la vue du canapé assez grand pour que toute la famille puisse s’y asseoir et de la nouvelle télé écran plat, avec la Simsbox déjà branchée. Il peut apercevoir au loin la cuisine et le frigo déjà en place.


« Ça coûte beaucoup de simflouz, mais c’est bien pratique : ni camion de déménagement, ni grand carton. On gagne un temps vraiment précieux », explique Hélène, jetant un coup d’œil en direction des chambres, en particulier celle de Paul, ou il s’est déjà installé.


Éric regarde la Simsbox avec la même envie que Cynthia, à côté de lui.


« Ça nous laissera le temps de nous installer... Le loyer est déjà payé ? »


« Bien sûr ! Viens m’aider à ... »


Trop tard : son mari et Cynthia ont déjà allumé la console et s’affaissent sur le canapé, impatients de tester leur nouvelle console, au grand agacement d’Hélène, qui se met devant l’écran.


« Je ne vous gêne pas ? »


« MAMAN ! » Cynthia proteste bruyamment. « Tout est déjà meublé, on peut jouer ? »


La mère Duchamps met ses mains sur ses hanches, fronçant les sourcils, et débranche immédiatement la télé. « Vous allez dans vos chambres. Éric, tu m’aides à déballer les affaires. Cynthia, va avec ta sœur en repérage dans la ville. La rentrée n’est que dans une semaine. »


« Mais... » protestent en même temps le père et la cadette.


« EXÉCUTION ! »


« Tu n’es vraiment pas drôle, Hélène. On a besoin de se reposer. »


« Il a raison, maman ! »


Hélène les pointe du doigt. « C’est vrai que ne rien faire assis, c’est vraiment fatigant. Ce n’est pas vous qui aviez conduit pendant 3 heures. »


« Ça m’aurait pas dérangée, moi... » murmure Cynthia avec un sourire évocateur.

« Passe ton code d’abord. »

« C’est dans les plans. »



Eric, dépité de manière exagérée, se dirige vers la chambre parentale avec Hélène. Celle-ci est munie d’un lit double, une fenêtre au fond, ainsi que l’ordinateur portable de Marie soigneusement rangé avec son plateau d’échiquier, la passion de sa femme. L’odeur des produits ménagers est encore présente.

Il pose son carton sur le lit et sort ses carnets de croquis, ainsi que ses dossiers de paysagiste et enfin, son journal intime, qui est reconnaissable par le smiley de l’arbre dessiné dessus.

Hélène interrompt le rangement en voyant son mari sortir ses affaires. Celui-ci pousse un soupir triste et perd son sourire habituel, chose qu’il ne fait jamais devant les enfants.

« Tu crois qu’au journal il y a un boulot pour moi ? »

Elle met sa main sur son épaule. « J’en suis sûre. Et quand tu auras assez de simflouz, je suis sûre que tu pourras te relancer. »

Eric pousse un soupir et referme le carton, le glissant sous le lit, prenant soin de le cacher sous un drap. Il tend l’oreille et peut entendre Maryline ranger ses livres et Cynthia traîner son sac de Lego.

Il change de sujet. « Et toi, comment tu te sens ? Prête à reprendre du service ? »

« Eric... »

« Je suis sérieux. »

« Je suis prête à reprendre du service. Je suis un peu anxieuse de rencontrer mes futurs collègues, mais tu sais... les relations sociales... » Elle s’assoit sur le lit, prenant son mari dans ses bras.

« Je suis sûre que quelqu’un recherche un jardinier à embaucher. »

« Peut-être... » Son mari pose sa tête sur son épaule, regardant le tapis sur le sol, les yeux vides. « J’ai pas intérêt à rester planté là... »

Un bisou est donné sur son front. « C’est un joli jeu de mots, chéri... Si ça peut permettre de remplir ta jauge de besoin. »

Il ricane tout en gardant un visage triste. « Je fais ce que je peux... »



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« Bon, là c’est l’arrêt de bus ! » Maryline note sur son téléphone. Elle se trouve avec Cynthia en face de l’arrêt de bus de la rue « PaPatrik ». Les nuages ont commencé à recouvrir le soleil, et elles ont croisé quelques habitants pour l’instant. Cynthia est un peu agitée : elle a oublié d’aller aux toilettes et tente de cacher sa gêne en gigotant, racontant un peu tout et n’importe quoi.


Paul, qui les accompagne derrière elle, hausse les sourcils, demandant à plusieurs reprises à Cynthia si elle se sent bien. Maryline, quant à elle, est trop concentrée à noter son futur itinéraire pour aller à l’université et tient toujours entre ses mains le fascicule avec la mascotte, une petite reine souriante.

« Dis... » Cynthia tente de cacher sa gêne. « ...Qu’est-ce qu’elle a de spécial, cette université ? »

Maryline se retourne, sautillant. « Mais enfin, Cynthia, c’est FemmeFik ! »

« J’ai toujours pas compris... » répond Cynthia, s’asseyant, suivie de Paul réalisant un signe interrogatif.

« FemmeFik est la plus grande université de littérature de la région ! Et le meilleur cursus pour devenir écrivain ! » Elle regarde le fascicule avec envie. « Depuis le temps que j’en rêve... C’est une première étape pour moi. Ils organisent des concours, et les diplômés ont des contacts avec les éditeurs ! »

« Mais pourquoi FemmeFik ? ! » Cynthia gigote des jambes, tentant d’oublier son envie pressante. Paul lit les horaires de l’arrêt.

« Parce qu’elle a été fondée clandestinement par des femmes en 1778, lors de la révolution simsricaine, en particulier pour l’éducation des filles — c’était interdit à l’époque. Puis elle a été transformée dans les années 60, et voilà ! Dès le début, cette université a formé les meilleures et les pionnières. »

« Dont tu fais partie, je suppose », commente Cynthia, perplexe.

« Mais non, je ne suis pas aussi orgueilleuse. » Elle rougit. « J’espère juste que je pourrai publier un livre, qui sait, gagner un concours... qui sait... »

« Bah ! Tu te prends la tête, réussis juste tes études. » Cynthia commence à tapoter sur ses jambes, l’envie se faisant de plus en plus pressante.


Paul, inquiet, lui parle en langue des signes : « Tu vas bien ? »

Elle s’agite. « Oui ! Oui, je vais bien ! »

Maryline hausse les épaules, puis regarde la carte sur MapSims avant de rétorquer à sa petite sœur : « Réussir les études... Tu dis ça comme si c’était simple… »

Cynthia se lève soudainement, s’agitant de plus en plus.

« Mais enfin, qu’est-ce que tu as ?! »

« Je reviens ! »

Cynthia se met à courir en dehors de l’arrêt de bus sous le regard interloqué de sa fratrie. Maryline range son téléphone dans sa poche, Paul hausse les épaules alors qu’ils perdent Cynthia de vue.


Levant un sourcils, l’aînée en profite pour s’asseoir et admirer l’université visible depuis sa position. Elle est presque aussi grande que la mairie.

« Tu te rends compte, Paul ? Je vais être une véritable Femmefikeuse... »


Celui-ci regarde le petit tas de pâquerettes qui pousse entre les bouts de goudron cassés, se penchant dessus.

« Et toi, Paul ? Dernière année de lycée avant le bac ? »


Il hoche la tête, se tournant vers elle avec une légère appréhension. Il signe dans sa direction : « Oui, mais j’ai peur. »

« Ne t’en fais pas, Paul, tu es suffisamment bon dans les études ! » Elle joint ses deux mains, humant l’air d’été puis se demande si le parc central est ouvert.

Paul continue de signer et partage ses craintes : « J’ai peur d’être tout seul. Pas d’échouer. »

« Oh Paul... Je suis sûre que tu trouveras un copain, ou peut-être une... copine ? Tu sais, de nos jours, tu as des applications de texte à voix haute, ou tu peux apporter une petite ardoise pour écrire. »

Paul lui répond, un peu agacé, toujours en signant : « Communiquer, ça peut se faire, mais moi, j’aimerais des amis... Ceux que j’avais n’ont pas gardé contact à cause du déménagement... »

« Oh Paul... Je suis sûre que quelqu’un voudra bien... »


Elle est coupée immédiatement par une voix de femme qui pousse un hurlement de colère. Cela vient de la petite maison derrière l’arrêt de bus.

« MONSIEUR SOT ! VOUS ÊTES ALLÉ TROP LOIN ! » Une femme, la cinquantaine probablement, sort de sa maison et lance une pierre sur la vitre du voisin, au grand choc de Paul et Maryline.

Un homme du même âge ouvre la fenêtre dans un grand fracas, retroussant sa moustache. « Mais enfin, Madame Gogo, ça va pas, de balancer des cailloux comme ça ? ! »

« Vous êtes allé trop loin ! Votre chien a pissé sur mon arbre ! »

« Mais n’importe quoi ? ! Vous croyez pas que j’ai autre chose à foutre ! »

« L’odeur d’urine envahit toute la rue ! OSERIEZ-VOUS NIER ? ! »

Monsieur Sot renifle fort l’odeur. Effectivement, ça sent l’urine — odeur que Maryline et Paul sentent aussi avec un immense dégoût.

Monsieur Sot sort de sa maison et s’approche de la clôture qui sépare sa maison de celle de Madame Gogo d’un pas presque militaire.

« Mais j’ai rien fait ! Et si je voulais pisser chez vous, je vous aurais pissé directement dessus, ça aurait été plus rapide ! L’odeur vous va si bien ! »


Madame Gogo le rejoint immédiatement vers la clôture.

« Un coup de poêle devrait vous calmer ! Vous n’avez pas apprécié que je gagne le festival ! »

Le vacarme retentit dans toute la rue. D’autres voisins s’en mêlent, et une voiture de police ne tarde pas à arriver... Tout comme Cynthia, qui court, toute rouge, vers sa fratrie.

« Hey ! On y va ? Je dois poster ma candidature d’apprentie apicultrice ! »

Maryline se lève. « Pourquoi tant d’empressement ? »

« Parce que... J’ai pas pu me retenir... »

Cynthia leur fait signe de marcher vite. Paul se met à côté d’elle, et Maryline commence à faire le lien…

« NE ME DIS PAS QUE TU AS… »

« Pas du tout. »

Paul fronce les sourcils pour la contredire.

Cynthia devient de plus en plus rouge.

« On peut y aller ? »


La fratrie se met à accélérer le pas pour s’éloigner au plus vite du vacarme provoqué par les besoins physiologiques de Cynthia. Cela leur permet de découvrir des petites ruelles et d’identifier le voisinage. Ils s’empressent au plus vite de prendre le bus pour aller vers les champs d’apiculture poster le CV de Cynthia…


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Le lycée « Faure-Haume » se tient non loin de l’université FemmeFik, de la mairie et bien sûr du légendaire Parc Central de Sunset Valley, une des raisons qui a poussé Hélène à accepter la mutation dans ce nouveau lycée. Il est aussi réputé pour ses tournois d’échec, un jeu dans lequel Hélène excelle.

Le principal, Benoît Fashaud, lui fait actuellement visiter le bâtiment, sa cour de récréation, ses différentes salles de classe, beaucoup plus grandes que celles de son ancien lycée. Quant à la cafétéria, la différence est également flagrante avec celle du passé.


Le principal semble être un homme courtois, légèrement hautain, aux cheveux plaqués et au costume impeccablement taillé.

« Comme vous pouvez le voir, Madame Duchamps, notre cafétéria répond aux attentes des élèves et du personnel. » Il pointe une carafe d’eau. « Et notre eau vient de la région. Nous favorisons les petits producteurs. »

Hélène passe une main sur ses cheveux noirs. « Merci, mais... je voulais en savoir plus sur mes futurs collègues... Avec qui vais-je travailler principalement ? »

« Hum... » Le principal se gratte le menton. « Madame Ankartté, professeure d’histoire-géographie, très sympathique et à l’écoute du personnel. Probablement Madame Juwa, professeure de français... »


Il se mord presque la langue, comme soudain agacé. « Et bien sûr... Monsieur Paremps, qui n’est pas encore arrivé. Il devait faire la visite avec nous... »

« Ça lui arrive souvent ? » demande Hélène, s’adossant contre le panneau donnant des consignes d’hygiène aux élèves et au personnel.

« Assez, oui... Il dit que c’est à cause de ses enfants qui n’arrivent pas à s’endormir... De toute façon, certains jeunes méritent qu’on les encadre bien plus... »


Hélène ne dit rien. Elle laisse le principal à ses sous-entendus. Ses pensées se tournent vers ses futurs élèves et vers Eric. A-t-elle fait le bon choix en acceptant la mutation ?

« ...Puis, vous savez, ces jeunes : hier, un jeune aurait uriné dans le jardin de Madame Gogo ! »

Hélène écarquille les yeux. À quel moment s’est-elle déconnectée de la conversation pour qu’on parle d’urine ?

« Les analyses d’urine de la police sont formelles ! C’est pour cela, Madame Duchamps, que nous avons besoin de personnel comme vous pour remettre la jeunesse sur le droit chemin ! »

« Oui, je suis bien d’accord avec vous... » répond-elle avec lassitude. « J’ai hâte de commencer... »


En parlant de jeune…

« Monsieur Fashaud, il y a quelque chose que j’aimerais vous demander... En parlant de jeune, mon fils Paul va entrer dans cet établissement... »

« Et vous aimeriez qu’on garde un œil sur lui ? » dit le principal, en mettant les mains sur les hanches, sûr de lui.

« Non... Mon fils Paul est muet, et j’aimerais juste informer ses futurs professeurs de cet état de fait et que c’est normal qu’il ne réponde pas. »

« Oui, j’ai lu son dossier. Je vous rassure, nos équipes pédagogiques le prendront bien en compte. » Monsieur Fashaud lève les mains d’un ton convaincu, avec un large sourire et continue.

« C’est noble de votre part et de celle de ses précédents professeurs de l’inscrire au public et de lui permettre de poursuivre. Je vous rassure, nous nous adapterons à son niveau. »

Hélène fronce les sourcils. « Excusez-moi. Il est tout simplement muet, il n’a aucune différence de niveau avec les autres. »

« Oui, oui, je comprends votre point de vue », répond-il nonchalamment, se dirigeant vers la machine à café du réfectoire. « Comme je vous l’ai dit, nous nous adaptons... »

« Vous m’avez très bien comprise. C’est ainsi que vous traitez les élèves un peu différents ?! »

Il laisse couler le café, humant son odeur forte, avant de se retourner vers Hélène.

« Écoutez, en tant que mère, je comprends que vous défendiez votre fils et vouliez croire à ce que vous dites, mais tous les enfants ne sont pas égaux et le premier cadeau que vous pouvez lui faire, c’est le reconnaître. Comme je l’ai dit, notre équipe pédagogique s’adaptera... »

« Je dirais plutôt que vous n’y comprenez rien. Le mutisme n’est pas... »


La porte de la cafétéria s’ouvre, et un homme essoufflé s’approche, la moustache brune mal taillée et les cheveux ébouriffés. Il tend la main vers Hélène dès qu’il la voit, pendant que le principal termine son café, avant de jeter son gobelet violemment.

« Bonjour, Monsieur Fashaud. Bonjour, Madame Duchamps... Je suis Monsieur Antoine Paremps. Je devais faire la visite... »

« Pourquoi êtes-vous en retard ? ! » gronde Hélène, toujours échauffée par les propos du principal précédemment.

« Je devais coucher mes enfants. Ma fille ne voulait pas s’endormir ni s’habiller. Vous savez ce que c’est... »

« De toute façon, on en avait fini ici. »


Hélène remet immédiatement en place son sac à main.

« Monsieur Paremps, ravi de vous avoir rencontré. Quant à vous, Monsieur Fashaud, nous reprendrons cette discussion... »

Elle marche d’un pas précipité, sans même dire au revoir, s’étant enfin fait une idée de ce « charmant » principal, pressée de sortir de la pièce. S’il y a bien une chose qu’elle déteste, c’est ce genre de sous-entendus !

« Mais enfin, qu’est-ce qu’elle a ? » demande Monsieur Paremps, se grattant les cheveux, d’incompréhension.

« Je lui fais la visite... ET VOUS COMPRENDRIEZ SI VOUS ÉTIEZ VENU À L’HEURE ! »

« Je couchais les enf... »

« Eh bien retournez-y ! »

« Et merde... »



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Le bâtiment est éclairés par le soleil à travers le plafond de verre, les employés de la mairie de Sunset Valley s’emploient chacun à leur petite tâche. Les gens leur rendent rarement visite, ou alors pour des litiges, ou très précisément Eric Duchamps, à trois jours de la rentrée pour sa femme et ses enfants (enfin, d’apiculture pour Cynthia). Celui-ci entre timidement à travers les portes vertes de la mairie. Il a mis un costume improvisé, et surtout a bu beaucoup de café.


Il s’approche avec douceur du tableau d’affiches indiquant les offres d'emploi. Peut-être y trouvera-t-il un a son compte. Le mieux serait un emploi dans les espaces verts…

« Je peux vous aider ? » Un homme à la tenue sombre se poste à côté de lui, son chapeau impeccablement mis en place. Éric se retourne, surpris.

« Heu… ça dépend… Vous n’embaucheriez pas par hasard ? »

« Quel type d’emploi recherchez-vous ? » demande très sérieusement l’homme.

« Un emploi pour nourrir ma famille. »


L’homme hausse un sourcil et esquisse un sourire. « Vous avez de l’esprit. J’aime bien ça. Mais qu’est-ce que vous aimez faire ? »

« J’étais paysagiste… »

L’homme tape dans ses mains. « Ah, mais c’est parfait, un ancien paysagiste ! Vous avez donc le sens de l’esthétique et savez travailler de vos mains. Écoutez, j’ai peut-être des petits boulots pour vous… »

« Des petits ? » demande Éric, méfiant.

« Oui, plusieurs tâches à confier. Je suis Vladimir Gothik. Et… »

« Éric… Éric Duchamps. Je pourrais être intéressé. » Ils se serrent la main. Éric est toujours décontenancé.

« Ah, parfait ! J’ai besoin de quelqu’un pour s’occuper de mes jardins. En premier, vous serez payé en simflouz à la semaine, déclaré, bien sûr. »

« Comment ça, « déclaré bien sur » ? »

« On se comprend. »


Les deux hommes échangent un regard plutôt gênant.

« Eh bien, Monsieur Gothik, pour s’occuper de votre jardin, il ne vaut mieux pas rester planté là… »

Vladimir hausse de nouveau un sourcil, puis a un large sourire. « J’aime vos traits d’esprit ! Je crois qu’on va bien s’entendre. Écoutez, j’ai des tas de petits boulots différents à vous proposer. Ce n’est pas grand-chose, mais ça pourrait vous permettre d’avoir de l’argent, et mon manoir y gagne… »

« Ma… manoir ?! » Éric écarquille les yeux.

« Oui, mon manoir sur la colline. Vous l’avez sûrement déjà vu… »

« Je viens de déménager en ville », répond-il directement.

« Je m’en doutais. Sinon, vous ne chercheriez pas un emploi à la mairie. Ça fait des jours que j’espère tomber sur quelqu’un comme vous… Je crois que nous allons bien nous entendre… »


Il prend son téléphone. « Donnez votre numéro, je vous proposerai quelque chose pour en discuter. »

« Vous ne faites pas de numéro, vous ! » rit Éric.

« Pas de trait d’esprit quand je parle business », répond Vladimir, notant avec une vitesse stupéfiante le numéro d’Éric.

« Désolé. »


Et une dizaine de minutes plus tard, Éric sort de la mairie, ayant potentiellement trouvé un nouveau travail, temporaire, bien sûr, le temps de pouvoir un jour rouvrir son entreprise paysagiste.

Il marche vers le parc central.

« Héhé, les affaires reprennent ! »



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La nuit commence à tomber sur Sunset Valley ainsi que sur la nouvelle maison des Duchamps, désormais bien aménagée, et l’odeur du repas familial chatouille les narines de toute la famille, culminant au cri fatidique de leur père :

« À TABLE ! »


Maryline éteint son ordinateur, sauvegardant son histoire d’amour entre une prophétesse et un sorcier, et marche avec ses petits chaussons lapins vers la nouvelle salle à manger. Elle croise rapidement Cynthia sortant de sa chambre, les mains pleines de pâte à modeler qui s’est répandue sur son t-shirt en forme d’abeille, continuant son projet de construction, et enfin Paul, en pull de la fédération spatiale de TrekSims.


Hélène est déjà devant son assiette de poêlée de légumes, le visage fermé, presque colérique, à taper frénétiquement sur son assiette avec ses couverts. Éric termine de distribuer la poêlée aux trois assiettes restantes et se met en bout de table, juste en face d’Hélène, tandis que les deux sœurs se mettent côte à côte sur la gauche, en face de Paul, qui part se chercher un yaourt au miel.

Éric tapote sur la poêle.

« Chère famille ! J’ai une bonne nouvelle à vous annoncer ! Je pense avoir trouver un emploi ! »


Hélène lève la tête, surprise : « Tu ne m’en as pas parlé. »

« Je voulais vous l’annoncer à tous ! Ahem... »

Cynthia et Maryline le regardent, attendant sa réponse, et Paul termine son yaourt au miel.

« Monsieur Gothik, du manoir de la colline, m’a proposé d’être son... employé domestique. Je travaillerais de 8 heures à 16 heures dans son manoir. »

Il bombe le torse, fier d’avoir trouvé aussi vite !

« Eric... Il va te faire signer un contrat, au moins ? » s’inquiète Hélène. « Je n’aime pas l’idée que tu serves de domestique, et encore moins chez un inconnu... »

« Mais maman, c’est bien pour papa ! Tu craignais qu’il ne trouve pas de travail rapidement, et en plus, si c’est un manoir, il va pouvoir s’occuper des jardins », commente Maryline, buvant son verre d’eau.


Hélène adresse un regard inquiet à Eric. « Tu es sûr ? »

« C’est temporaire. Avec les simflouz accumulés, je pourrais relancer mon entreprise, et avec un peu de chance, il me laissera m’occuper de son jardin. Pratique pour l’exercice, puis je m’y connais en mauvaises graines », commente-t-il en direction de ses enfants.

Paul signe : « Tu n’as pas peur ? »

Éric rit. « Mais pourquoi aurais-je peur ? »


Cynthia intervient. « Mais enfin, papa, tu sais bien qu’il y a des vampires, des loups-garous et des fantômes dans les manoirs ! »

« Ne t’en fais pas », Maryline la coupe. « Sunset Valley n’a pas encore installé l’extension qui les autorise à venir ici... »

« N’empêche, un gars qui s’appelle Gothik... Pas un hasard… En plus, il t'embauche comme ça. » Cynthia tourne sa fourchette, laissant tomber des bouts de pâte à modeler dans son plat.


Hélène tape sur la table. « J’y pense : aucun de vous ne s’est lavé les mains ?! »

« Heu... » Le reste de la famille hésite.

« Cynthia, tu te laves les mains en première ! » ordonne la maman Duchamps.

« Maman, je n’ai plus dix ans ! »

« Tu en as vingt et un ! C’est pire ! » commande-t-elle.

Le reste de la famille prend le temps de se laver les mains. Paul se les lave en dernier, pendant qu’Éric et le reste de ses sœurs retournent à table.

« Et toi, ma chérie, comment s’est passée ta journée ? »


Paul retourne devant son assiette et signe à Cynthia et Maryline : « Maman a l’air fâché. »


Hélène se met à grogner.

« Je vais lui en faire voir à ce sale Fashaud ! »

« Quel rapport avec Mussolini ? » demande l’aînée, terminant ses légumes.

« Benoît Fashaud, le principal qui m’a fait visiter le lycée. Celui-ci a des méthodes pédagogiques dignes du siècle dernier. Et il méprise la différence. »

Hélène commence à se faire un sandwich au jambon, écrasant le pain entre ses mains.

« Et j’espère que le personnel n’est pas comme lui. »

Paul tourne son regard vers son assiette vide. Il s’agit de son futur lycée. Cynthia lui murmure : « T’en fais pas, Paul, on t’embêtera pas parce que maman a embêté le principal. »

Paul lui réalise un pouce en l’air sous la table, de manière peu convaincue.

« Et toi, Cynthia ? Tu as pu postuler ? » demande Hélène.

Cynthia regarde son assiette et puis hausse les épaules. « Oui, j’ai postulé. Si tout se passe bien, je commence la semaine prochaine. »

« Je n’ai jamais compris cette passion que tu as pour les abeilles », demande Maryline, mettant sa main sur son menton.

« Elles sont essentielles à la biodiversité et il y a besoin de gens pour les protéger d'autant plus leurs nids sont vraiment bien construits, comme ceux des guêpes », explique Cynthia. Paul commence à ranger son assiette, de même qu’Éric.

« Les guêpes ? Beurk. » Maryline fronce les sourcils.


Cynthia pousse un soupir, commençant à ranger. « Elles sont aussi essentielles à la pollinisation, mais bon, la protection de la biodiversité, c’est sélectif chez beaucoup de personnes ! »

« Elles peuvent donner des allergies ! » proteste Maryline.

« Les chats aussi », objecte Cynthia. « J’aimerais bien que tu respectes ces animaux. »

« Les insectes ne sont pas des animaux... » L’aînée se met à ricaner.

« Si, ça en est », coupe glacialement Cynthia. « Relis tes cours de biologie. »

« Oh, ça va, calme-toi », Maryline termine de mettre son assiette dans le lave-vaisselle.

« Ce n’est pas parce qu’un être vivant n’est pas mignon qu’il n’est pas utile. » Cynthia termine elle aussi de mettre son assiette avant de se diriger vers sa chambre, se frottant les mains.


Maryline se tourne vers ses parents et Paul, haussant les épaules.

Éric se met à commenter :

« Elle a raison, Maryline. Les insectes sont des animaux. »

« Enfin, elle n’est pas obligée de me parler comme ça. Je n’ai rien fait. »

« Elle doit être stressée, ma puce », complète Hélène, regardant Maryline se diriger vers sa chambre. « Ce n’est pas facile, un déménagement, tu sais. »


Mais trop tard : Maryline est déjà rentrée dans sa chambre. Hélène pousse un soupir et donne un regard à Paul, qui reste près du lave-vaisselle, à côté de son père, qui lui tapote le dos.

« Tu sais quoi, Paul ? »

Ce dernier tourne la tête vers son père.

« Tu ne sais pas la chance que tu as de ne pas parler. »



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