Life is Strange : Le Gardien du Temps

Chapitre 25 : Réminiscence

2923 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 05/07/2019 10:01

Réveille-toi, Max. Réveille-toi, bordel !

 

La créature allait être sur moi d’une seconde à l’autre. Je n’avais qu’une seule solution pour m’en sortir, remonter le temps le plus loin possible, je devais échapper à cette chose à tout prix. Je me concentrais comme jamais auparavant et utilisais mon pouvoir de toutes mes forces.

Pendant quelques secondes je cru pouvoir m’en sortir. J’entendis le vrombissement et ressentis le tournis qui accompagnaient mon pouvoir, je vis la créature reculer. Mais très vite elle se remit en marche, droit vers moi. J’avais beau retourner en arrière, elle n’y était plus sensible. Je continuais encore mais en vain. En désespoir de cause je tentais alors une autre approche ; comme Pharos me l’avait montré j’utilisais mon pouvoir sur la créature. Ce n’était pas l’espace-temps lui-même que je devais faire revenir en arrière mais uniquement celui de la créature. Elle se stoppa net.

 

Ça fonctionne ! Dieu merci, ça marche ! Quoique tu fasses ne t’arrêtes surtout pas, Max !

 

L’intrus continuait obstinément à avancer, ses pas raclant le sol de ma chambre. Ma joie fut de courte durée quand je compris que ce duel de volonté n’allait pas tourner en ma faveur. J’étais épuisée, encore ivre et j’utilisais mon pouvoir depuis trop longtemps. Ma vision se troublait face à mon mal de crâne grandissant et ce n’était plus qu’une question de secondes avant que je ne relâche mon emprise.

 

La porte de ma chambre s’ouvrit soudainement dans un fracas, toute ma concentration vola en éclat. Warren se tenait devant l’entrée, les yeux noirs baigné par la faible lumière du couloir. La créature retourna sa tête dans un angle impossible et lui feula dessus. Pharren leva alors la main, tenant fermement quelque chose dans sa paume et cria un mot que je ne compris pas. Il y eu alors une explosion de lumière. Lorsque je rouvris les yeux, la créature avait disparue et Pharren se tenait à mes côtés.

 

« Max, tu vas bien ? Est-ce qu’elle t’a touchée ? », demanda mon ami de sa voix impersonnelle.


Pour toute réponse, je vomis à ses pieds. Mon cerveau n’arrivait plus à fonctionner correctement. Ces dernières heures plein d’ivresse, de terreur et d’épuisement avait finalement eu raison de mon esprit. Je ne pouvais pas répondre, mon esprit était toujours hanté par la vision cauchemardesque de la créature. Des larmes coulaient sans que je puisse les retenir et je n’arrivais plus à respirer. Je tentais de grappiller quelques bouffées d’air mais mes émotions m’oppressaient. Je cru que j’allais mourir étouffée.

Pharren posa ses mains sur mes tempes, son regard obscur fixé sur moi. J’ignore ce qu’il fit, mais mon esprit sembla quitter mon corps martyrisé. Je sombrais alors dans le néant.

 

Je fis un sommeil sans rêves, mais surtout sans cauchemars. Mon réveil fut accueilli par une migraine atroce, une langue pâteuse et une vive douleur au menton. Il me fallut quelques instants pour me sortir de mon mini coma. Les souvenirs de la veille commencèrent à me revenir mais tout me paraissait embrouillé.

Je sortis de mon lit à une vitesse qui ne pouvait être qualifiée que de pathétique et filai en direction des douches. Il était tôt et il n’y avait personne dans les couloirs. Je remarquai à peine Juliet dans la salle de bain et je répondis à son bonjour par un vague grognement, peu disposée à entamer la conversation.

La sensation de l’eau chaude coulant sur mon corps fut salvatrice. Je laissai mon front reposer sur le carrelage du mur tentant de me remémorer la soirée d’hier. Le peu dont je réussis à me rappeler n’était pas glorieux ; de nombreux, beaucoup trop nombreux, verres d’alcool. Rien que d’y penser j’avais le coeur au bord des lèvres.

 

« Salut, Max », fit une voix suave derrière le rideau de douche.

 

Je glissais et manquais de peu de tomber.

 

« Dana ?! Tu m’as fichu une de ces frousses ! ».

 

Mon pauvre cœur était mis à rude épreuve ces derniers temps. Je serais extrêmement chanceuse si je ne mourrais pas prochainement d’une crise cardiaque.

 

J’entendis ma camarade rire à gorge déployé.

 

« Quand tu auras fini de te doucher, passe me voir dans ma chambre. Il faut qu’on parle. »

 

Je soupirai mais coupai l’eau. J’ignorais ce qu’elle voulait mais n’allais pas pouvoir y échapper. Je m’habillai et sortie de la douche. Le miroir me renvoya mon image. Le résultat n’était pas aussi désastreux que je ne l’aurais cru, mes cernes s’étaient accrues et j’avais le teint blafard mais au moins mes yeux n’étaient pas injectés de sang. Je fronçais les sourcils en découvrant un bleu au menton.

 

Sans y faire plus attention, je me mis en route vers le dortoir, m’appuyant pratiquement au mur pour me tenir debout.

 

Ma tête me fait tellement mal. Qu’est-ce qui m’est arrivée hier soir ? Argh, j’ai besoin d’un anti douleur. Et de repos, beaucoup de repos.

 

Arrivé à la chambre de Dana, je toquai faiblement et entrai sans attendre la réponse.

Je m’effondrai sur son lit dans un soupir de bonheur.

 

C’est décidé, je ne bouge plus et je fusionne avec ce matelas si moelleux. Ô doux matelas, épouse-moi !

 

« Toujours pas remise d’hier soir ? », demanda Dana amusée.

 

Je lâchai un râle d’agonie pour toute réponse. Ma petite balade dans le dortoir m’avait épuisée.

 

« Tiens avale ça, tu te sentiras mieux », dit-elle en me tendant un verre d’eau et une petite pilule blanche.

 

Je ne me fis pas prier et ni une ni deux j’avalai le comprimé. Avec un peu de chance il ferait vite effet.

 

« Alors, c’était comment ? »

 

« Je viens de le prendre, laisse-lui le temps de faire effet. »

 

Dana roula des yeux.

 

« Pas le médicament. Hier soir. Warren et toi… Je vous ai vue partir ensemble, ça avait l’air… chaud. »

 

De vagues images traversèrent mon esprit mais tout était trop confus pour que je me rappel de quoique ce soit.

 

« Les choses étaient plutôt intense entre vous, non ? »

 

Je me figeai et répétai bêtement :

 

« Intense ? Intense comment ? »

 

« Et bien, tu as passé la fin de la soirée à lui faire du rentre dedans. »

 

« Oh non. »

 

« Oh que si. Ça a même viré au graveleux à la fin. »

 

Oh mon Dieu. C’est pas vrai qu’est-ce que j’avais fait ?

 

Sans une once de pitié elle m’acheva :

 

« Je n’imagine pas même pas ce qu’il a dû se passer une fois que vous êtes partis. En fait si, j’imagine très bien », dit-elle, hilare face à mon embarra.

 

La vision de nos échanges passionnés s’imposa dans mon esprit.

 

« Ce n’est pas ce que tu crois. », bredouillais-je gauchement.

 

« Oh Max, je t’en prie tu n’as pas à te justifier. Ne sois pas si coincée, on a plus 14 ans. »

 

« Quoi ?! », fis-je, outrée.

 

Mon amie me pris par le bras et m’emmena devant le miroir.

 

« Qu’est-ce que tu vois ? »

 

« A part mon immense gueule de bois qui n’est pas prête de s’en aller si tu continues de me trainer dans tous les sens ? »

 

Elle fit comme si je n’avais rien dit :

 

« Moi, ce que je vois c’est qu’une fille d’habitude réservée et qui a vécue de mauvais moment s’est un peu lâchée dans une soirée. Ce n’est pas un crime de s’amuser de temps en temps, tu sais. »

 

« Mais je sais m’amuser, ne me fais pas passer pour une mormone ! », dis-je sur la défensive.

 

Elle me regarda de la tête aux pieds, la moue sceptique :

 

« Franchement c’était si terrible ? Mise à part ta gueule de bois, j’entends. »

 

Je méditais ses paroles un instant.

 

« Non, c’était sympa, c’est vrai. »

 

« Et avec ton Don Juan ? »

 

Je lui lançai son oreiller à la tête mais alors qu’elle avait bu bien plus que moi, elle était quand même dans un meilleur état et l’évita facilement.

 

« Allez raconte un peu ! Ça restera entre nous, promis ! Croix de bois, croix de fer », me dit-elle dessinant une croix sur son cœur.

 

Ce fut à mon tour de lui lancer un regard dubitatif. Non pas que je n’avais pas confiance en Dana pour garder notre conversation entre nous mais plutôt que je n’avais pas l’habitude de discuter de ce genre de choses. Excepté avec Chloé. Mais cette dernière n’était plus là et même si elle me manquait tous les jours, je ne pouvais pas me fermer au reste du monde. J’hésitai quand même plusieurs secondes, mal à l’aise sur ce genre de sujets.

 

« C’était bon, heu… je veux dire bien, c’était bien ! », piaillais-je d’une voix suraiguë.

 

« Houlala, bon ? Dis m’en plus ! »

 

Je bouillais intérieurement, maudit lapsus !

 

 

Dana ne me laissa partir qu’au bout d’une interminable description de mes activités nocturnes avec Warren. Elle avait pris un malin plaisir à me tourmenter. Peut-être étais-je plus pudique je ne l’avais pensée ? Malgré tout, notre soudain rapprochement me faisait plaisir. Cela me faisait plaisir de pouvoir discuter de tout et de n’importe quoi avec Dana, même si c’était surtout à mes dépends

Le médicament commençait enfin à faire effet, mon mal de crâne diminuait sensiblement. Maintenant que j’étais capable de parler correctement je décidai d’appeler mes parents mais pour ça je devais d’abord mettre la main sur mon portable. Je finis par le trouver sous mon lit, n’ayant pas la moindre idée de comment il avait pu atterrir là.

 

Comme d’habitude, j’avais reçu des tonnes de SMS, mais je constatais avec déception que je n’en avais reçu aucun de la part de Warren. Je repensais à notre moment… torride. Ses lèvres sur les miennes, son odeur. J’enfouie ma tête dans mon oreiller. Même seule dans ma chambre, ma propre audace me faisait rougir.

 

Je fais tellement pitié, je réagis comme une gamine de douze ans alors qu’on s’est juste embrassés ! Pas étonnant que Dana me prenne pour une mormone.

 

Alors que je gisais mi-honteuse, mi-excitée sur mon lit, je me rappelais que nous avions été interrompu par un appel.

 

Merde, Warren doit m’en vouloir à mort d’être partie sans dire un mot ! J’ai complètement oublié de le prévenir. Pas étonnant qu’il ne t’ai pas écrit, pauvre cruche !

 

Je tournais en rond dans ma chambre, cherchant un moyen de m’excuser auprès de lui lorsque je remarquais que le sol avait été griffé. Il me semblait pourtant ne jamais avoir remarqué cette marque. Perplexe je haussai les épaules, cherchant toujours un moyen de résoudre mon problème. Mais un autre détail me frappa. Ma plante, Lisa était morte. J’étais pourtant sûre qu’elle se portait encore bien il y quelques jours.

Lorsque je m’approchais pour l’examiner je vis alors qu’il ne restait plus rien d’elle, pas la moindre feuille, juste son pot rempli de terre. Je fouillai le pot afin de trouver une explication et j’y trouvais une graine. Quelqu’un était-il rentré dans ma chambre pour me jouer une mauvaise farce ? Ça n’avait aucun sens, pourquoi arracher ma plante pour l’échanger contre une graine ? L’auteur de crime infâme n’avait laissé aucune trace de son passage, pas même un peu de terre sur le sol.

J’eu la sensation d’avoir oublié quelque chose de très important, peut-être même grave. Plus j’essayais de me rappeler quoi, plus ma tête s’embrouillait. Ma migraine revenait à la charge.

Je mis ce mystère de côté, j’avais d’autres préoccupations pour le moment. J’envoyais plusieurs sms à Warren mais je n’eus aucune réponse de sa part.

Si j’avais été dans mon état normal, je me serais contentée de hausser les épaules face à son mutisme mais lessivée et à fleur de peau comme je l’étais, je craignais qu’il ne m’en veuille vraiment.

Je devais sortir de ma chambre au plus vite, j’avais besoin d’air.

 

 

Ma promenade me fit du bien. Je me résolu à me relaxer et à prendre quelques photos au passage. J’allais devoir m’y remettre sérieusement si je voulais pouvoir finir mon année.

Je ne cherchais pas à prendre de photos parfaites ou extraordinaires mais je me contentais plutôt de prendre de simples clichés. Celle où un écureuil était perché sur le haut de la statue située devant les portes du lycée me rendit particulièrement fière. Le petit animal tenait un gland entre ses minuscules pattes, tel Rafiki dans Le Roi Lion. Cette scène improbable m’avait tellement fait rire que j’avais failli ne pas réussir à prendre la photo à temps.

Je continuais mon activité lorsque j’aperçu Daniel à travers mon appareil photo, assis seul à une table en train de dessiner.

 

« Salut Daniel, qu’est-ce que tu dessines de beau ? »

 

« Salut Max. Je ne suis pas sûr d’arriver à grand-chose aujourd’hui », me dit-il avec un timide sourire.

 

Je lui demandai si je pouvais me joindre à lui et je m’assis en face, lorgnant ses croquis éparpillés parmi tout son matériel étalé sur la table.

 

« Je suis dans le même cas que toi. Je peux jeter un œil à tes dessins ? »

 

La plupart n’était que des ébauches de paysages mais je les trouvais très réussis. À dire vrai j’étais même un peu envieuse, mes talents pour cet art étaient beaucoup plus limités que ceux de Daniel.

 

« Je reste toujours admirative de ton talent, Daniel. Peut-être as-tu simplement besoin d’une nouvelle source d’inspiration ? »

 

La bouche de mon camarade s’ouvrit de surprise :

 

« Oh, tu as déjà eu l’occasion de regarder mon travail ? »

 

Je restais interloquée quelques instants, ne se rappelait-il pas que je lui avais servis de modèle quelque temps auparavant ? Puis je compris que j’avais de nouveau mélangé mes souvenirs. Cela n’avait jamais eu lieu dans cette réalité.

 

Je répondis vaguement, marmonnant quelque chose à propos de sa page Facebook. Décidant de changer de sujet je lui demandai s’il avait déjà pensé à changer de support. Il me tendit d’autres feuilles.

 

« L’aquarelle n’est vraiment pas mon fort. Mais j’ai essayé un peu avec un véritable stylo-plume et le... Oups ! Désolé, Max. », son coude avait heurté un pot d’encre toujours ouvert et celle-ci se répandit sur la table.

 

Alors que Daniel s’activait à nettoyer, je n’arrivais pas à détacher mon regard du liquide nébuleux. De nouveau, j’avais l’étrange sentiment de négliger quelque chose. Plus j’essayais de me souvenir, plus mon esprit s’embrumait. Pire encore, mes maux de tête revenaient, intenses.

La flaque sur la table continua de couler et quelques gouttes tombèrent sur mes chaussures.

J’eu un déclic : la vision de Warren possédé par Pharos se tenant au-dessus de moi dans ma chambre.

 

Il m’a touché la tête et…et…et… impossible de me rappeler la suite.

 

Pharos était manifestement responsable de mon amnésie, ou du moins y était lié. Et le meilleur moyen pour moi de lui parler était de le forcer à me contacter, pour ça rien de mieux qu’une petite séance de joujou avec le temps.

 

Comme je le suspectais, cela ne traina pas. J’avais à peine commencée à remonter le temps, que je fus projetée dans le monde sans vie de Pharos.

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