La Lettre
Cette fanfiction participe au défi d’écriture de deuxième chance du forum fanfictions.fr : « La Lettre » (mai 2018)
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Salut Hinata, tu te souviens de moi ? Tu sais Kiba, ton coéquipier qui est devenu ton ami puis ton amant et enfin, un étranger. Celui qui a réussi à gâcher notre relation quasi-parfaite pour un simple coup d’un soir. Un bel enfoiré en somme. Si tu savais comme je regrette… je regrette tellement d’avoir succombé à la panique et de t’avoir blessée ainsi. Jamais je n’aurais dû faire ça, c’était une énorme connerie et je m’en veux encore aujourd’hui.
Dix ans plus tard, tu t’imagines ? Ça fait une décennie que je me réveille chaque matin en me disant « Putain, pourquoi t’as fait ça mec ? Pourquoi t’as été aussi con ? Pourquoi t’as trompé la femme parfaite ? Celle qui te rendait pleinement heureux, celle qui te comblait d’un amour véritable, d’une joie intense et d’un bonheur sans pareil ? Celle qui jamais, ô grand jamais ne t’aurait fait souffrir comme toi tu l’as fait ! »
Ce texte, je m’en suis fait un mantra que je me répète sans cesse, en attendant que cette atroce culpabilité ne s’efface complétement. Au fond de moi, je cherche à me punir parce que le silence oppressant que tu as laissé lors de mes aveux n’était pas suffisant, bien qu’il fût plus dévastateur que de banales insultes ou une ruée de coups de poings. J’ai donc décidé de m’infliger moi-même cette part de douleur que je méritais tant. A l’époque, je savais pertinemment que par ta gentillesse sans faille, tu étais dans l’incapacité me faire regretter quoi que ce soit, ou même de te venger voire de me blesser. Tu étais bien trop indulgente pour ça et me faire du mal à titre de vengeance ne t’aurait rien apporté. C’est incroyable, je t’ai trompé et c’est limite si ce n’était pas toi qui t’en excusais…
Tu as toujours été trop bien pour moi Hinata, depuis le début. Je l’ai toujours su et je n’arrêtais pas de me le ressasser. Tu étais un mélange de bonté, de compassion, de douceur et de générosité à toi toute seule. Il fallait que je prenne pleinement conscience qu’une fille comme toi nécessitait beaucoup d’efforts, et pas des moindres. Je savais que pour gagner ton cœur, il ne me suffisait pas de simplement claquer des doigts. Non, ça allait bien au-delà de tout ça, tu valais beaucoup mieux que toutes ces filles qui croisaient mon chemin et qui disaient amen à tout. Alors, j’ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour être à la hauteur et me montrer digne de toi, de ton intérêt, de ton amour. J’ai réuni tout mon courage, ma force et ma volonté pour pouvoir y arriver.
J’étais prêt à tout pour toi, juste pour que tes yeux se posent sur moi l’espace d’un court instant. Je voulais sentir mon corps entier se faire transpercer par ce regard à la fois pur et brûlant, qui provoquait en moi une intense décharge électrique dont je ne me remettrais pas. C’était comme si je me sentais réellement vivre pour la première fois de ma vie, comme si jusqu'alors, je n’avais jamais pris conscience de la vraie valeur de la vie et que grâce à toi, je découvrais ce qu’il y avait de plus beau sur cette terre.
Oui, c’était sans aucun doute le seul moment de ma misérable existence où mes sens s’éveillaient, mon cœur battait véritablement, mon sang bouillait dans mes veines et où tout semblait avoir un sens. J’étais enfin heureux et vivant, pour de vrai. Tu me rendais tellement amoureux, je voulais vivre rien que pour toi et pour te rendre la pareille. Je voulais faire de toi la femme la plus épanouie et comblée de ce monde et faire en sorte que tu ne manques de rien. J’aurai pu tenter l’impossible pour toi car au final, rien ne l’était vraiment avec toi. J’avais l’impression d’être invincible et prêt à tout affronter. Tu étais ma force, mon alter ego. Mon énergie, c’est en toi que je la puisais.
Te voir sourire, apercevoir ton visage rayonner, tes yeux s’illuminer, entendre ton rire, sentir tes doigts effleurer ma peau… Tout ça suffisait amplement à me faire sentir bien, comme si je me nourrissais uniquement de tes ondes positives. Je n’avais besoin de rien d’autre que de toi. J’aurai pu finir à la rue, démuni, brisé, mourant de faim que je m’en contrefichais royalement. Tout ce qui m’importait était que tu ailles bien, physiquement et moralement. Ton bonheur était purement et simplement le mien.
Même si finalement, les vraies raisons de ta joie, de ton enthousiasme et de ton émerveillement se cachaient derrière ce blond aux yeux bleus que tu admirais discrètement de loin depuis des années. Je me souviens que chacun de ses gestes te fascinait, t’encourageait chaque jour un peu plus et tu ne pouvais t’empêcher de le prendre comme exemple. Il était ta source d’inspiration, de motivation, celui pour qui tu étais prête à te battre pour te démarquer des autres. Tout comme lui, tu te refusais d’abandonner quoi que ce soit, te débattant corps et âme jusqu’à la fin. Tu voulais plus que tout au monde qu’il réalise et aperçoive enfin la femme forte que tu étais devenue après tous ces efforts et ces entrainements de dur labeur.
Evidemment, rien de tout ça ne m’avait échappé et j’avais depuis longtemps déjà remarqué ce changement radical en toi, à quel point tu avais gagné en force et en assurance. J’ai toujours cru en toi et jamais je n’ai douté de tes capacités. En toute honnêteté, si j’avais ce besoin incontestable de vaincre ce mec c’était surtout pour que tu puisses m’accorder toute l’attention que tu avais pour lui. Je voulais pour une fois être le centre de tes préoccupations et que tu sois fière de moi. J’étais comme qui dirait jaloux, même si je ne voulais pas l’admettre.
En d’autres termes, je n’avais d’yeux que pour toi, qui n’en avais que pour lui. Et lui ? Il en regardait une autre. C’était devenu un cercle vicieux pour chacun de nous, priant pour que la personne pour qui notre cœur battait finisse par se lasser de l’autre et se décide enfin à se retourner vers nous. Et puis, je ne sais pas par quel miracle j’y suis parvenu, mais j’ai réussi. Avec du temps, de la patience et de la persévérance, j’ai réussi à te faire détourner les yeux de celui envers qui tu éprouvais un amour inconditionnel. Je crois qu’à ce moment, je n’avais jamais été aussi soulagé et euphorique de ma vie. J’avais cette impression d’avoir accompli la mission la plus difficile de toutes. Ma plus belle victoire.
A l’époque, je t’avais promis que tu ne le regretterais pas, que je serais à la hauteur de tes espérances et toujours là pour toi, quoi qu’il advienne. Je n’avais pas le droit à l’erreur et échouer ne faisait pas partie de mes plans, je me l’étais formellement interdit. J’étais déterminé à honorer cette parole d’or car l’enjeu était bien trop important et précieux à mes yeux. Cette promesse, je comptais bien la tenir plus que n’importe quelle autre faite par le passé. Je n’avais rien à perdre mais tout à gagner.
Mes sentiments pour toi n’ont cessé de grandir à mesure du temps passé à tes côtés. Je me surpassais, je me démenais, je faisais tout ce qui était en mon possible pour te prouver que tu avais eu raison de me donner ma chance. J’étais tellement reconnaissant, j’étais bien - même plus encore ! - et je ne voulais que rien ne change entre nous. Secrètement, j’espérais pouvoir faire ma vie ainsi, vivre, vieillir et mourir avec toi. Tout était parfait, tu rendais mon quotidien parfait avec ta bonne humeur, tes éclats de rire, tes mots réconfortants et tes douces caresses. J’étais fou amoureux. Je t’aimais plus que tout au monde Hinata, tu étais sans aucun doute ma raison de vivre, celle pour qui je me levais chaque matin et pour qui je pouvais tout donner sans rien attendre en retour. Jamais je n’avais éprouvé quelque chose d’aussi puissant envers une fille mais c’était profond, sérieux et sincère. C’était tout simplement magique, digne d’un conte de fée.
Puis un jour, un autre sentiment a pris le dessus, celui de la peur. Je n’avais que très rarement ressenti une pareille émotion alors, inévitablement, lorsqu’elle a fait surface, j’ai perdu tous mes moyens et tous mes principes se sont envolés, comme si ma promesse n’avait jamais existé. Je n’ai pas à me trouver d’excuse et rien ne justifie mon comportement mais aussi con que ça puisse paraitre j’ai eu peur. Peur de ces sentiments qui devenaient surpuissants pour moi, comme si mon corps n’avait plus la force ni la capacité de tout contenir. Peur d’être blessé, brisé ou même de me faire anéantir en un rien de temps.
J’ai donc joué au con. La peur a pris le contrôle de mon être et c’est arrivé, l’irréversible s’est produit. Autant dire que sur le moment j’étais mal, très mal mais pas autant que lorsque j’ai vu ton regard s’assombrir à l’entente de cette confession. Là, c’était pire encore. Subitement, mon cœur s’est mis à se serrer si fort que j’ai cru qu’il allait exploser. Mon souffle s’est coupé court quand j’ai vu la tristesse s’installer dans ton regard et ma peau s’est faite transpercée par des millions de poignards aux lames acérées au moment où les larmes se sont mises à couler le long de tes joues. C’est là que j’ai réalisé que tout était fini, qu’il n’y avait plus de retour possible, que la confiance entre nous était brisée à tout jamais. J’ai commis l’impardonnable, j’ai trahi une importante promesse et je t’ai surtout trahi toi, Hinata.
Si seulement je t’avais prise dans mes bras ce jour-là, te promettant de ne plus jamais refaire ça. Si seulement je n’avais pas cédé à la peur, évitant de commettre la plus grosse connerie de ma vie. Si seulement j’avais été plus fort que ça, si seulement j’avais été une bien meilleure personne ! J’ai été minable, un incapable, un salaud. Je n’ai rien pu faire d’autre que de m’apitoyer sur mon sort, pleurer toutes les larmes de mon corps et te demander un pardon que je ne méritais pas et que je ne mériterais jamais. D’ailleurs, je n’aurais jamais dû te le demander, c’était complétement déplacé et insensé de ma part.
Je t’ai aimé Hinata, je t’ai sincèrement aimé. De tout mon cœur, de tout mon corps, de tout mon être, de toute mon âme. Tu es sans aucun doute la femme qui a pris le plus de place lorsque tu es entrée dans mon cœur, et celle qui a mis la pagaille dans ma vie quand tu en es brutalement sortie. Mais je ne t’en veux pas, c’était par ailleurs la meilleure décision que tu aies prise. Bien mieux que celle de m’avoir accordé ton amour ou ta confiance. En y repensant, tout ça c’était de la pure folie et on le savait tous les deux, on évitait juste de voir la réalité en face. C’était de la naïveté à l’état pur.
Est-ce que tout ça en valait vraiment la peine, d’après toi ? Est-ce que tu regrettes ces quelques mois passés avec moi ? Mettons juste de côté le fait que j’ai merdé, notre histoire a-t-elle compté pour toi autant qu’elle a compté pour moi ? Est-ce que toi aussi tu as vécu les meilleurs moments de ta vie ? Ou est-ce que c’était juste une manière de créer une nouvelle expérience qui n’a à présent plus aucune importance pour toi ? Je n’ai pas eu l’occasion de te poser toutes ces questions et elles me hantent encore aujourd’hui. Mais j’imagine que ça fait partie de mon châtiment et je l’accepte.
Tu sais Hinata, tu as été mon premier amour et ma première fois. Tu as été la première dans tous les domaines et peut-être même la dernière pour certains. Tu as chamboulé toute mon existence par ta simple présence, quelque chose que je pensais alors impossible avant même de te rencontrer. Que je le veuille ou non, tu occuperas toujours une place dans mon cœur, même si ce n’est pas celle dont espérais tant, mais au moins, tu y es et tu y resteras. C’est un peu ce qui me réconforte dans mon malheur, c’est assez pathétique, je dois l’avouer mais ça m’aide à tenir bon depuis toutes ces années.
Je ne sais pas ce que tu fais, ni où tu es en ce moment-même et encore moins avec qui. Mais je prie tous les dieux de ce bas monde pour que tes journées soient belles et ensoleillées, en espérant que ton cœur se soit remis de cette mauvaise expérience et que dès à présent, il bat pour quelqu’un qui est fait pour toi, quelqu’un qui te traite comme tu mérites d’être traitée. Comme une reine. J’espère sincèrement du fin fond de mon cœur que tu as retrouvé l’amour. S’il y a bien une personne à qui je souhaite tout le bonheur du monde, une belle et longue vie, c’est toi Hinata. Toi et personne d’autre.
Sois heureuse et amoureuse. Jusqu’à la fin des temps.
Kiba
Une fois son stylo posé sur le bureau, Kiba prit la feuille noircie par l’encre dans ses mains pour la relire une dernière fois, se concentrant sur chacun des mots. Il ponctua la fin de sa lecture par un lourd soupire et plia soigneusement le papier afin de le glisser dans une enveloppe. Puis, machinalement il la jeta dans une corbeille où s’était déjà échouée une bonne dizaine de lettres.