Franjo Slaviček en Amérique

Chapitre 1 : Rencontre imprévue

3199 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 07/08/2025 13:35





Avertissement : les personnages de Ghost Whisperer et de Naša mala klinika peuvent paraître différents par rapport à la manière dont ils sont présentés dans leurs univers d’origine respectifs.





Par un dimanche ensoleillé de mai 2010, marché de la ville, Grandview, États-Unis d’Amérique.


Melinda Gordon, l’antiquaire qui voit les esprits, et son mari, Jim Clancy, docteur généraliste depuis cinq ans à l’hôpital Mercy(1), main dans la main, flânent dans le marché. Ils regardent les différents produits sur les étalages. Rien n’attire leur regard. La petite brunette a à l’œil leur fils Aiden, cinq ans, qui regarde tout autour de lui avec curiosité. Près d’un étalage, le couple aperçoit un grand homme, fin vingtaine, peut-être début trentaine, vêtu d’une veste beige déboutonnée sous laquelle se voit une chemise blanche. Il tourne lentement sa tête, comme s’il observait minutieusement en silence les fruits et légumes sur les étalages. Sur sa tête ronde, des lunettes bleu marine.

Jim pense en clignant des yeux. Il me semble que c’est le nouvel interniste de l’hôpital… Le Croate dont je n’arrive pas à prononcer le prénom… Celui qu’on surnomme Frank par commodité…

Le mari de Melinda s’exclame : 

— Bonjour, Frank ! 

L’interpellé se retourne vers le couple, les sourcils levés. Il sourit furtivement puis corrige son interlocuteur dans un anglais impeccable, sans aucun accent : 

— Mon prénom n’est pas Frank, mais Franjo…

Jim, petit sourire aux lèvres, réplique : 

— Bon, enfin, tu as compris…

— C’est correct, Jim… 

L’époux de Melinda confirme d’un geste positif discret.

L’interniste reprend : 

— Je comprends très bien que mon prénom et mon nom sont très difficiles à prononcer pour vous, les Américains… 

Jim demande d’un air intéressé : 

— C’est quoi déjà ?

— Franjo Slaviček(2)… C’est pourquoi j’ai accepté le surnom de Frank, qui serait une version prononçable pour mes collègues américains…

— Ce n’est pas seulement moi qui te désigne par le surnom de Frank, mais tous nos autres collègues, Jules, Jay, Ryan, Bob, Dennis(3)

— Je le sais, et je n’en suis pas fâché… Je préfère mieux, comme je te l’ai déjà dit, d’être appelé Frank plutôt que d’entendre Franjo mal prononcé.

Jim pense qu'il est très compréhensif… C’est pourquoi il est sympathique à toute l’équipe de l’hôpital.

Il s’éclaircit la gorge puis dit d’un ton chaleureux : 

— Ainsi, Frank, que cherches-tu au marché ?

Son interlocuteur répond : 

— Rien de particulier… Je fais mes commissions…

— Et bien, reprit Jim en serrant la main droite de sa femme, je te présente mon épouse, Melinda Gordon…

La brunette, avec son sourire le plus aimable, réplique : 

— Enchanté, Monsieur…

— Pareillement pour moi…

Jim reprend la parole : 

— Et notre notre fils…

Il regarde autour de lui en murmurant : 

— Où est-il ?

Il finit par remarquer que le gamin est devant eux, en train de déambuler avec curiosité, les yeux grands ouverts. Jim le rappelle d’une voix forte : 

— Aiden, reviens immédiatement !

Le garçonnet, honteux, rejoint aussitôt ses parents. Il n’apprécie pas que son père hausse le ton sur lui, puisque cela lui donne l’impression qu’il le gronde.

Jim, lueur de fierté dans ses yeux bleus, le présente en le désignant d’un geste de la main : 

— Frank, voici mon… 

Melinda donne un léger coup de coude à Jim, qui se corrige : 

— Euh… Notre fils, Aiden…

Il se penche vers son fils puis murmure : 

— Aiden, s’il te plaît, sois poli et salue mon collègue Frank…

Le garçon relève sa tête et murmure timidement : 

— Bonjour, Monsieur !

Franjo, attendri par la manière dont le fils de son collègue s’adresse à lui, pense en croate. Comme il est vraiment mignon ! Ça me rappelle à quel point je voudrais moi aussi fonder une famille… Sauf que je n’ai pas encore trouvé mon âme-sœur…

Il s’éclaircit la gorge puis dit au garçon : 

— Bonjour, Aiden ! Alors, quelle est ta matière préférée à l’école ?

L’interpellé hausse les épaules.

Melinda intervient d’une voix douce : 

— Monsieur, Aiden n’ira à l’école primaire qu’au mois d’août cette année…

Franjo réplique, avec un sourire convivial : 

— Je comprends très bien, Madame Gordon…

Il pense. Au moins, Jim et sa femme semblent être de bons parents… Je ne doute pas, étant donné qu’il est très professionnel au travail… Il doit être ainsi sérieux en tout…

Elle murmure, sourire au visage : 

— Mais je comprends tout à fait votre question…


L’épouse de Jim remarque la présence d’un esprit errant à la droite de Franjo qu’elle observe avec discrétion. Un homme âgé, peut-être vers la soixantaine, au visage ridé et aux cheveux gris, avec des petites lunettes rondes dorées sur son nez. Il est vêtu d’un complet bleu marine et d’une chemise blanche.

Elle pense en anglais, perplexe. Qui est-il ? Que veut-il ?

L’esprit la fixe à son tour, intrigué qu’un vivant le voit, Il balbutie en croate, les sourcils levés d’étonnement : 

— Madame, vous me voyez ?

Elle lève ses mains en un geste exaspéré, comme pour dire « Désolé, Monsieur, mais je n’ai pas compris ce que vous m’avez dit. »

Jim, qui a remarqué le geste de sa femme, murmure à son oreille : 

— Mel, est-ce encore un esprit ?

L’interpellée confirme d’un mouvement de tête positif.


À ce moment précis, un esprit apparaît à la droite de l’esprit qui suit Franjo Slaviček : un homme d’âge mûr, aux traits sévères, vêtu comme un aristocrate du siècle passé. Intrigués par sa présence, Melinda et l’esprit qui suit l’interniste tournent leurs têtes vers lui.

L’esprit leur sourit furtivement puis ajoute en anglais et en croate : 

— Je suis un Observateur polyglotte. Et je serais votre traducteur…

Il se tourne légèrement vers la passeuse d’âmes pour poursuivre en anglais : 

— Madame Melinda Gordon, je vous traduirais les propos de Monsieur Slaviček en anglais, afin que vous comprenez ce qu’il vous dit…

Il se retourne ensuite vers l’esprit et ajoute : 

— Pour vous,  Monsieur Ivan Slaviček, je traduirais les questions que vous posera Madame Gordon.

Tous les deux confirment d’un geste positif.

Jim enlace sa femme et murmure en anglais : 

— Mel, qu’est-ce qui se passe ?

Elle répond : — Deux esprits…


Le collègue de Jim regarde d’un air surpris Melinda, qui semblait fixer quelqu’un ou quelque chose à sa droite. En y jetant un coup d’œil rapide vers la direction, sauf qu’il ne voit rien, l’interniste croate demande : 

— Est-ce que quelqu’un peut m’expliquer ce qui se passe ?

— Oui, répondit l’époux de Melinda. En fait, Frank, ma femme vient de voir un esprit…

La brunette confirme d’un geste positif puis elle ajoute en dressant l’index puis le majeur de sa main droite : 

— Non pas un esprit, mais deux, dont l’un qui nous servira de traducteur…

Franjo, dont le regard se promène de Melinda à Jim et inversement, dit : 

— Et alors ? 

— L’un d’eux parle dans une langue que je ne connais pas… C’est pourquoi l’autre me servira de traducteur…

— Ainsi, Madame Melinda Gordon voit les esprits ? Est-ce une blague ?

Elle précise, en faisant un geste des mains vers elle : 

— Non ! C’est la vérité… Je les vois depuis mon enfance, en raison d’un don que j’ai hérité de ma mère et de ma grand-mère maternelle, qui, elles aussi, pouvaient communiquer avec les esprits errants, qui ont encore des affaires à régler avec les vivants. Et moi, je sers de messagère afin de communiquer aux vivants ce que disent les défunts. L’essentiel étant que ces âmes perdues partent dans la Lumière, dans l’au-delà(4), vous comprenez ?

— Oui, je comprends très bien… Et je crois bien qu’il est possible que des individus particuliers puissent voir ce que la plupart des gens ne voient pas. Pourquoi pas ? 

Melinda, rassurée, serre la main de Jim et réplique : 

— Merci de votre compréhension…

Elle fait une courte pause puis dit : 

— Frank, puisque les deux esprits sont encore là, celui qui est à votre droite, le plus près de vous est un homme âgé, ce que je peux déduire par ses rides et ses cheveux gris. Il est un peu plus grand que vous. Il a des yeux marron et porte des lunettes dorées. Il est vêtu d’un complet bleu marine, d’une chemise blanche et de chaussures cirées. De plus, il parle une langue que je ne comprends pas… C’est pourquoi un Observateur polyglotte, selon ses propres mots, va traduire pour moi en anglais…

Franjo baissa la tête, gêné. Il murmure : 

— Madame Gordon, la description que vous me faites de l’entité correspond…

Il termine sa phrase d’une voix émue : 

— À celle de mon grand-père paternel… Ivan Slaviček, mort il y a… quatre mois… le 20 janvier dernier…

Melinda réplique d’un ton chaleureux : 

— Si ma question n’est pas trop indiscrète, que pouvez-vous me dire au sujet de votre grand-père ?

Il relève sa tête et répond : 

— Mon grand-père Ivan Slaviček… est mort au cours de son sommeil… Il… était… un homme de bien… qui était simple, altruiste… Un médecin très professionnel… Je n’ai rien de mal à dire de lui… Mais pourquoi me suit-il ?

— Ne vous inquiétez pas, il est usuel, du moins, selon mon expérience en tant que passeuse d’âmes, que les esprits errants suivent des proches… Si ce n’est pas le cas, ils hantent la dernière personne qu’ils ont vu ou dont ils se souviennent… Sinon, ils hantent l’endroit où ils ont vécu de lorsqu’ils étaient vivants, ou encore le lieu de leur mort(5)

— Votre explication est vraiment intéressante… Qu’est-ce que mon grand-père veut de moi ?

Elle hausse des épaules et répond : 

— Pour être honnête, je l’ignore… C’est ce que j’essaie aussi de comprendre… Mais pour cela, je dois engager la conversation avec votre grand-père… Et je vous rapporterai ses propos… En fait, la traduction de l’Observateur…

— Excusez-moi, si vous permettez une dernière question…

— Oui…

— En quoi l’Observateur se différencie des autres esprits ?

— Les Observateurs, selon ce que j’ai compris… sont des esprits qui observent tout ce qui se passe parmi les vivants… Parfois, ils savent agir sur eux…

L’Observateur polyglotte intervient en anglais : 

— Oui, c’est exact.

Franjo confirme sa compréhension.

Melinda murmure : 

— D’ailleurs, Frank, l’Observateur approuve ce que je vous ai expliqué… J’espère que vous avez terminé avec vos questions, afin que je puisse discuter avec votre ancêtre…

— Oui, oui ! Je n’ai plus de questions…

Elle fait un geste de la main vers le grand-père de Franjo et dit : 

— Monsieur… je peux vous aider à accomplir votre dernière volonté… Que je transmettrai à votre descendant…

Elle fait un geste vers Franjo et termine sa phrase : 

— … qui est aussi curieux que moi de savoir pourquoi vous restez encore parmi les vivants…

L’Observateur polyglotte traduit les propos de Melinda, en plus de lui expliquer que cette dernière voit les esprits en raison d'un don qu’elle a.

Ivan, après avoir entendu la traduction et les explications, répond en croate d’un ton sérieux : — Je veux que Franjo porte ma bague, qui se trouve dans une boîte à bijoux dans notre maison.

L’Observateur traduit en anglais.

La passeuse d’âmes manifeste sa compréhension d’un geste positif, se retourne vers l’interniste et lui rapporte les propos d’une voix émue.

Franjo commente en anglais d’un air songeur : 

— En tous cas, ça fait du sens… J’ai en effet vaguement entendu de mon père que son père, je veux dire mon grand-père Ivan, a porté une bague… Si je ne me trompe pas, elle est en or, avec un muguet stylisé sur le chaton…

Son ancêtre demande à l’Observateur ce qu’il a dit ; celui-ci lui répond. Ivan hoche la tête.

L’épouse de Jim, en serrant la main gauche de ce dernier, intervient d’une voix chaleureuse : — Votre grand-père approuve ce que vous avez dit…

D’un air enjoué, l’interniste croate réplique en anglais : 

— Très bien ! Alors ma mémoire ne me fait pas défaut ! C’est rassurant !

Il fait une courte pause puis ajoute, en regardant d’un air bienveillant Melinda : 

— Mais pourquoi veut-il que je la porte ? Pouvez-vous lui poser la question ?

Elle réplique d’une voix douce, avec son plus beau sourire, en lâchant la main de son mari : — Il vous entend…

Il balbutie, en mettant ses mains dans les poches de sa veste : 

— Merci du détail…

L’esprit errant répond, après avoir entendu la traduction : 

— Je veux qu’il la porte, car elle est prophylactique.

Melinda, qui écoute attentivement la traduction de l’Observateur, ramène son attention vers le collègue de Jim et dit d’une voix qui se veut calme : 

— Votre grand-père veut que vous portez sa bague, car elle est prophylactique…

— D’accord ! réplique en anglais l’intéressé.

Elle lève son index droit et demande : 

— Si vous permettez, Frank, une question…

Son interlocuteur fait un geste rotatif du poignet pour l’inciter à développer.

Elle continue : 

— Si votre grand-père veut que vous portez sa bague, saviez-vous où se trouve-t-elle ?

Franjo répond d’un ton chaleureux en sortant ses mains des poches de sa veste et en les agitant devant lui : 

— Bien sûr que oui !

Jim intervient : 

— C’est-à-dire ?

— À Zagreb, où ma grand-mère vit…

— Tu comptes la récupérer au plus vite ?

Mine pensive, l’interniste demeure silencieux avant de répondre : 

— À vrai dire, je ne pourrais pas avant un an…

— Pourquoi ? s’exclamèrent Jim et Melinda à l’unisson.

— Parce que je ne suis pas un résident permanent… Je n’ai qu’un visa de travail pour me perfectionner. La durée est d’un an. Après ce délai, je reviens à Zagreb…

Il s’interrompt puis reprend d’une voix songeuse : 

— Je pense que si je quitte les États-Unis d’Amérique maintenant ou dans deux mois, je ne pourrai pas terminer mon perfectionnement. Je préfère ne pas risquer l'annulation du visa ou avoir des difficultés administratives.

Jim réplique, en serrant la main de sa femme : 

— Je comprends très bien, Frank, ton point de vue…

Melinda intervient, les yeux grands comme des soucoupes : 

— Mais vous n’oublierez pas, après un an, de récupérer la bague de votre grand-père ?

Franjo soupire puis dit d’un air assuré : 

— Ne vous inquiétez pas, Madame Gordon, je n’oublierai pas… Je me laisserai une note dans mon agenda pour être sûr.

— Oui, mais comment pourrai-je savoir si votre grand-père partira dans la Lumière ? Je n’imagine pas faire un voyage dans un pays dont je ne connais pas la langue…

L’Observateur intervient en anglais : 

— Madame Melinda Gordon, je vous en informerai.

Étonnée, la brunette tourne rapidement son regard vers l’entité qui vient de parler, mais elle ramène son attention vers le collègue de Jim. Elle murmure : 

— L’Observateur vient de dire qu’il m’informera dès que votre grand-père partira dans la Lumière…

Jim réplique d’un ton enjoué, en enlaçant sa femme : 

— Nous pouvons alors considérer cette histoire presque comme réglée !

Les deux esprits et les deux autres adultes confirment ses propos. Et Ivan et l’Observateur disparaissent de la vue de la passeuse d’âmes.


Puis, Franjo, Jim et Melinda s’échangent des formules de politesse et l’interniste continue de déambuler dans le marché. De même pour Jim et sa famille, qui retournent ensuite dans leur maison avec quelques achats. Franjo revient après avoir fait ses commissions dans un petit appartement loué le temps de son passage dans ce pays. Il inscrit dans son agenda, à la date de son départ, dans sa langue maternelle « Bague de grand-père Ivan à retrouver et à porter ». Il pense, en refermant l’agenda, si au moins cette bague pourrait vraiment m’aider à trouver un emploi stable et une épouse, je serai vraiment comblé ! Mais je doute que ce soit possible ! 



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(1) Dans cette fanfiction, nous considérons que, pour Ghost Whisperer, Jim est devenu docteur sans qu’il passe par la possession du corps de Sam Lucas.


(2) Franjo Slaviček est l’interniste de Naša mala klinika. Il est le médecin le plus sérieux de cette série et il a passé un certain temps aux États-Unis d’Amérique. C’est précisément ce voyage que nous développons dans cette présente fanfiction. Ce n’est que plus tard qu’il sera en relation avec Lili Štriga, une dermatologue aussi sérieuse que lui, qu’il mariera et avec laquelle il aura un fils.


(3) Il s’agit des prénoms de quelques médecins qui apparaissent de manière épisodique dans la série américaine, à savoir les Docteurs Jules Huffman, Jay Hayes, Ryan Heller, Bob Norris et Dennis Nakamura.


(4) C’est un résumé de ce que fait Melinda dans Ghost Whisperer.


(5) Cette explication est conforme à celle de la série américaine.


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