Une courte immortalité

Chapitre 6

Catégorie: T

Dernière mise à jour 16/03/2012 19:59

Sirenia – All my dreams : http://www.youtube.com/watch?v=xguuotbbhAM

 

Le soleil se levait doucement, éclairant ce milieu océanique calmement. Cependant, Jack Sparrow et son « équipage » étaient déjà levés et s'affairaient sur le bateau. La journée s'annonçait calme et ensoleillée avec suffisamment de vent pour voyager en paix. Rien d'alarmant à signaler, donc.

Gibbs mettait les voiles et Jack s'occupait de la barre tandis qu'Angelica surveillait l'horizon. Elle aidait peu, or elle se chargeait fréquemment de cette tâche-là, prête à leur faire signe si une terre apparaissait au loin, même si elle était incapable de formuler des mots simples, tels que « terre en vue ». Quand bien même elle serait en mesure de parler, qu'aurait-elle à dire ? Elle ne possédait même pas de souvenirs de sa « vraie » vie qui s'était envolée deux ans plus tôt, à en juger ce qu'on lui avait dit.

La mer huileuse ne laissait aucune place à la terre. Avec leurs réserves d'eau et de nourriture, ils pourraient encore tenir trois ou quatre jours, ce qui leur laissait du temps devant eux, cependant il leur faudrait mettre pied à terre avant l'épuisement des provisions, ou bien ils se fatigueraient trop. Chacun sur ce navire en était conscient et faisait tout pour arriver à leur destination. Ils économisaient la nourriture ainsi que l'eau, afin de survivre le plus longtemps possible. Ils se promirent qu'une fois à terre, ils s'offriraient un festin.

Le vent faisait voler ses longs cheveux qui auraient bien besoin d'être lavés, comme les deux hommes autour d'elle. Chacun d'entre eux empestait la transpiration de même que la saleté, ce qui était normal au bout de presque quinze jours sans prendre le moindre bain. Ils ne se baignaient pas dans la mer tout autour d'eux, car ils pourraient s'éloigner du petit bateau. De plus, Angelica refusait de se baigner nue devant ces deux hommes, notamment Jack.

Angelica occupait aussi des journées en cuisinant. Elle s'était découvert un certain talent pour cette activité, ce qui lui laissait penser qu'elle aimait passer du temps à préparer les repas autrefois. Voir que les deux hommes mangeaient de la nourriture sans la cuisiner avant l'avait quelque peu prise de court. Comment acceptaient-ils de manger ainsi ? N'en avaient-ils pas assez, alors que la cuisine était infinie et variée ? Les deux hommes ne manquaient jamais de se régaler de ses repas. Voir leur plaisir lui procurait la satisfaction d'un travail bien fait.

Cette vie sur ce bateau était décidément paisible. Ils n'avaient croisé quasiment personne, l'océan étant si vaste… Il s'étendait au loin, sans que rien ne pût l'arrêter. Parfois, la terre leur faisait obstacle. Si une chose était certaine, c'était qu'Angelica aimait cette vie de liberté. Elle avait parfois l'impression que ces longs mois dans cet endroit sombre et humide n'étaient qu'un rêve lointain. Pourtant, sa toux ensanglantée lui rappelait toujours le contraire.

La jeune femme de trente ans reposa la longue-vue, sentant ses poumons l'irriter. Elle attrapa l'un de ces mouchoirs épais qu'elle conservait toujours sur elle dans ces moments-là, puis se mit à tousser, en crachant du sang au passage. Fort heureusement, elle n'en crachait pas suffisamment pour en laisser dégouliner, ce qui alerterait les deux hommes, déjà occupés par leurs tâches. Elle ne voulait pas qu'ils sussent. Ils ne pouvaient rien faire de toute manière, son destin était déjà scellé.

Y penser l'effrayait. Elle n'avait pas envie que cela se produisît. Elle souhaitait simplement continuer cette vie tranquille où elle n'avait rien à craindre. Était-ce trop demander ? Était-elle égoïste ? Ceux qui l'avaient capturée et retenue captive durant tout ce temps étaient probablement à sa recherche depuis deux mois. Sa disparition les avait assurément alarmés, surtout qu'elle leur était utile. Et il était presque temps. Il arrivait à grands pas, le moment où…

« Capitaine, j'ai sorti le Pearl ! Depuis deux mois qu'il est planqué sous le parquet… »

Le... Pearl ? Comme dans Black Pearl ? Pourquoi ce nom lui semblait-il familier ? Où l'avait-elle déjà entendu ? Une image d'un grand bateau majestueux voguant sur les flots apparut dans son esprit. Était-ce un somptueux navire ? Où l'avait-elle déjà vu auparavant ? Ce nom évoquait aussi en elle une bataille… Et… Une… Bouteille ? D'ailleurs, qu'est-ce que Gibbs voulait dire, lorsqu'il parlait de sortir le Pearl ? Il était bien plus grand que ce bateau où ils se trouvaient actuellement, et il ne pourrait évidemment pas être caché sous un parquet.

Angelica se retourna lentement, comme si elle était gelée, pétrifiée. Elle ne pouvait pas s'en empêcher. Pourquoi réagissait-elle de la sorte ? Elle avait déjà entendu ce nom quelque part et l'avait reconnu, quand bien même monsieur Gibbs n'avait pas donné son titre entier. Le Black Pearl, plus fréquemment surnommé le Pearl. C'était un navire connu, il était le seul capable de faire une chose… Mais quoi ? Pourquoi ne parvenait-elle pas à s'en rappeler ?

Dans les mains de Joshamee se trouvait une bouteille. Mais pas n'importe laquelle. À l'intérieur, une sorte de nuage sombre enveloppait un bateau maltraité par la tempête. C'était comme une réplique réduite de cet imposant vaisseau qui était apparu dans son esprit. Pourquoi paraissaient-ils porter une telle attention à cette bouteille ? Pourquoi l'avaient-ils cachée sous le plancher ?

Angelica restait immobile, les yeux écarquillés. Elle ne pouvait détacher son regard de ce modèle réduit que monsieur Gibbs tenait. Elle n'y parvenait pas. Son esprit était vide à ce moment précis, elle ne pensait plus à rien. Elle était simplement obnubilée par cet étrange bateau. Elle l'avait déjà vu auparavant… Où ? Quand ? Comment ? Pourquoi Gibbs et Jack y tenaient-ils tant ? Sans s'en rendre compte, elle lâcha la longue-vue qu'elle tenait dans sa main. Celle-ci tomba au sol, en manquant de briser le verre. Elle n'y portait aucune attention et ne s'en était même pas rendue compte.

 

Jack s'occupait tranquillement de la barre, se contentant d'aller tout droit, en attendant qu'Angelica remarquât une terre quelque part. Il se trouvait à l'arrière du bateau, tandis que la jeune femme se tenait à l'avant, à l'affût de la moindre parcelle de terre habitée ou pas. Même une île déserte lui suffirait, ils seraient en mesure de trouver de l'eau ainsi que des fruits, voire même du gibier. Et elle pourrait leur cuisiner de délicieux plats…

Le capitaine gardait son regard posé sur la jeune Espagnole devant lui. Depuis deux mois qu'ils voyageaient ensemble, elle n'avait jamais ouvert la bouche pour prononcer le moindre mot. Comme si elle en était incapable. Elle persistait à communiquer avec ses mains ou bien des gestes de la tête, même si elle comprenait parfaitement ce qu'on lui disait. C'était comme si elle n'arrivait pas à formuler des phrases, que c'était devenu hors de sa portée. Comme si elle avait oublié.

Quand bien même Angelica ne parlait plus, il se doutait de certaines choses : elle avait perdu la mémoire. Elle avait regardé l'océan avec un tel étonnement, la première fois, comme si elle ne l'avait jamais vu auparavant. Elle se comportait comme une enfant naïve et ignorante. C'en était presque effrayant. Pourquoi ne se souvenait-elle pas ? Comment avait-elle pu oublier ? Avoir été enfermée l'aurait transformée à ce point ?

Jack aurait voulu retourner à Valence et donner une bonne leçon à ces Espagnols. Parce qu'à présent, Angelica faisait partie de son équipage, et il refusait qu'on fît du mal à ses compagnons d'armes. Cela n'avait rien de particulièrement personnel. Il lui fallait des matelots en pleine forme, pas des… Coquilles vides comme elle. Il aurait pu se débarrasser d'elle depuis longtemps, or il n'avait rien fait. Il ne fallait pas oublier le problème du Black Pearl.

Dans tous les cas, avec ou sans mémoire, Angelica se comportait toujours aussi froidement avec lui. Elle ne criait pas comme lors de leurs retrouvailles, cependant elle évitait de se retrouver seule ou proche de lui, et lui envoyait des regards durs, lui intimant de la laisser en paix. Elle était destinée à le haïr, cela semblait inévitable. Enfin, d'un côté, il fallait l'admettre, c'était un peu sa faute si elle s'était retrouvée dans cette prison.

Bon, d'accord, c'était entièrement sa faute. Mais ce n'était pas comme si c'était voulu ! Il n'avait pas volontairement envoyé les Espagnols à sa poursuite. Ce n'était pas comme s'il avait remarqué qu'il y avait eu un témoin à ce moment-là, lorsque le père et la fille avaient bu l'eau de la Fontaine de Jouvence. Enfin, cela ne l'aurait pas empêché de l'abandonner là-bas. Pourquoi s'embêter avec une femme, de toute manière ? Il voulait montrer à Gibbs qu'il se trompait lorsqu'il disait qu'il avait eu tort de l'abandonner : la preuve, il n'avait rien ressenti. Enfin, c'était ce qu'il disait.

Quiconque connaissait Jack avait eu vent de sa lâcheté. Cette dernière ne l'avait absolument pas empêché de retourner sur l'île un an plus tard, afin d'obtenir de la part d'Angelica un moyen de libérer son vaisseau. Le Black Pearl ne méritait pas un tel sort, un navire aussi magnifique était digne de voguer sur les mers des Caraïbes. Si Barbe Noire n'était pas déjà mort, il le renverrait encore plusieurs fois à la mort. Et Barbossa de même.

Son fichu ex-second avait perdu le Pearl comme un débutant. Il avait laissé Teach prendre le dessus et le réduire à cette taille avec Jack le singe. Non pas qu'il se souciait de ce macaque, il pouvait crever, il s'en moquerait parfaitement. Barbossa aurait mieux fait de rester mort. Pourquoi Tia Dalma l'avait-elle ressuscité ? Cette maudite sorcière ! Et elle prétendait que c'était pour le sauver de l'antre de Davy Jones. Ah ! La bonne blague. Il s'en serait très bien sorti tout seul, comme d'habitude.

Après s'être rendu compte qu'Angelica s'était envolée nul-ne-savait-où, Jack, avec l'aide de monsieur Gibbs, s'était mis à la recherche de son maudit second qui l'avait abandonné sur une île déserte bien des années plus tôt. Après des mois à farfouiller sur l'océan, ils étaient enfin parvenus à retrouver le Queen Anne's Revenge, dont Barbossa avait pris le commandement. Comme il faisait le fier, avec son nouvel équipage ainsi que sa nouvelle épée. Angelica l'aurait tué si elle l'avait vu à cet instant précis. Comment réagirait-elle, d'ailleurs, en le voyant ?

Par précaution, Joshamee avait pris deux autres bouteilles contenant un navire chacun au moment où il avait récupéré le Black Pearl. Ils avaient brisé l'une des deux au-dessus de l'océan, or le navire s'était comme évaporé dans un nuage de fumée au loin. Heureusement qu'ils n'avaient pas fait la même bêtise avec leur précieux navire, ou bien les conséquences auraient été plus que regrettables. Il ne leur restait plus qu'un essai pour parvenir à l'extraire de sa prison de verre.

Barbossa ne savait même pas qu'il pouvait mettre des bateaux dans des bouteilles jusqu'à leur arrivée. Tous ceux capturés par Barbe Noire avaient donc disparu, sinon il serait tombé dessus, au bout d'un an et demi sur ce navire. Il avait examiné la bouteille cobaye qu'il restait, puis l'avait brisée avec son épée magique qui lui permettait de faire bien des choses, comme souffler le vent ou bien ressusciter les morts.

Pourtant, à nouveau, le bateau était parti en fumée. Cela semblait sans espoir. Comment réussir à trouver une solution ? Si seulement Angelica n'était pas partie de cette île… Maudite fût-elle. Par sa faute, ils devaient naviguer sur ce petit bateau depuis deux longues années. Cela aurait certes pu être pire, toutefois le capitaine Jack Sparrow refusait de s'abaisser à ce niveau. Sa réputation chuterait si on le savait capitaine d'un tel navire, avec un équipage si limité.

La découverte inattendue d'Angelica lui avait redonné de l'espoir. Enfin, ils allaient pouvoir récupérer leur bâtiment, après deux ans de recherche. Néanmoins, son comportement l'avait dissuadé de lui montrer son trésor : elle fuyait sans cesse, se recroquevillait sur elle-même et se contentait de hurler. Que faire ? Se souvenait-elle seulement du moyen pour libérer le Pearl ? Son instinct lui avait dit de ne pas le lui montrer. Pour le moment.

Cependant, depuis deux mois, Angelica avait progressé quant à ses réactions : elle tremblait moins, se tenait de plus en plus droite, et surtout, communiquait plus, à sa manière, en tout cas. Jack s'était dit qu'elle se remettrait bien vite à parler, et, qu'à ce moment-là, il lui poserait la question. En attendant, il préférait attendre, d'autant plus qu'elle continuait de l'éviter, à ne pas le regarder dans les yeux.

Alors, pendant qu'elle se tenait de dos, Jack la regardait. C'était dans ces moments-ci qu'il avait l'impression de retrouver la bonne vieille Angelica, celle qu'il avait toujours connue. Elle ne changeait décidément pas, malgré tout ce qui lui était arrivé. Il la connaissait depuis bien longtemps, en y pensant. Il se souvenait encore de son séjour en Espagne, jusqu'au moment où il était parti. La revoir deux ans plus tôt alors qu'elle avait volé son identité avait fait resurgir en lui des souvenirs, tel que celui-ci.

Le capitaine Sparrow haussa un sourcil lorsqu'il la vit tousser. Une petite irritation, peut-être ? Il ne connaissait pas tous les effets de la Fontaine de Jouvence, ni, donc, si elle pouvait tomber malade. Normalement, elle devrait quand même y survivre, étant donné toutes les années qu'elle conservait en elle-même. Était-elle seulement encore consciente qu'elle possédait la vie de son père ? Pourquoi avait-elle subitement agrippé un mouchoir ? Et pourquoi en portait-elle un sur elle ? Et pourquoi…

Ses pensées furent interrompues par l'apparition de Gibbs avec le Black Pearl dans ses mains. Pourquoi cet idiot l'avait-il sorti ? Le bruit de la longue-vue qui tomba au sol attira à nouveau son attention vers Angelica, laquelle se tenait là, immobile, les yeux écarquillés, comme si elle avait vu un mort, son père, par exemple. Jack regarda une fois de plus le Pearl puis posa les yeux sur elle pour finir. C'était bien la bouteille qu'elle regardait. Enfin quelque chose qui la faisait réagir !

Avant qu'il ne pût réagir, Angelica se précipita à l'intérieur du bateau puis s'enferma dans la pièce qui lui était réservée. Pourquoi s'était-elle comportée de la sorte ? Pourquoi fuir ? Il voulut se jeter à sa poursuite, néanmoins il s'en empêcha. Elle reviendrait d'elle-même, et pour voir le Black Pearl. Jack posa une fois de plus son regard sur la bouteille. Cette fois-ci, il lui ferait cracher toutes les réponses nécessaires.

Le capitaine prit la bouteille des mains de son second qu'il congédia, puis alla à l'intérieur du bateau, dans une pièce commune et principale où se trouvait au milieu une table. La mer calme ne la ferait pas tomber, aussi la posa-t-il dessus, avant de disparaître dans un coin. C'était comme s'il posait un morceau de fromage afin de faire sortir une souris de sa cachette dans le but de se jeter dessus, tel un chat.

 

Sans qu'elle s'en rendît compte, le soleil s'était déjà couché et l'obscurité se faisait de plus en plus imposante. Seule la lumière de la lune éclairait cette calme et douce mer vineuse. Angelica, allongée sur son lit, décida de se lever. La vue de cette étrange bouteille l'avait totalement bouleversée. Depuis, elle s'était mise à voir des images dans sa tête, de toutes sortes.

Elle avait vu ce bateau, le Black Pearl, sur l'océan. Son équipage se battait avec d'autres pirates provenant d'un autre navire, le Queen Anne's Revenge. Les deux capitaines croisaient leurs épées, le perdant perdit l'une de ses jambes. Puis, son bateau fut embouteillé. Elle s'en souvenait, car elle était présente à ce moment précis. Elle se battait avec l'équipage du Queen Anne's Revenge. Avec son père, Barbe Noire.

Des souvenirs refaisaient surface, à son grand bonheur. Elle avait presque du mal à y croire. L'autorisait-on enfin à retrouver sa véritable identité avant le moment venu ? Pouvait-elle au moins connaître son passé ? Cette perspective la soulagea. Au moins elle connaîtrait une partie de sa vie. Elle était née Angelica Arcandiaz. Sa mère était décédée alors qu'elle était encore bien jeune.

Elle n'avait jamais rencontré son père, et ne savait de lui que sa « profession » : c'était un pirate. Alors, tandis qu'elle était encore jeune, elle avait pris la mer dans le but de le retrouver, ce à quoi elle était parvenue quelques années plus tard. Dès lors, elle avait adopté le nom de Teach. Comme tous les Espagnols, elle utilisait le nom de famille de son père ainsi que celui de sa mère, quand bien même elle avait cessé d'utiliser le dernier.

Néanmoins, un jour, celui-ci avait reçu une prédiction : il mourrait bientôt, tué par l'homme à la jambe de bois, qui n'était autre que l'ancien capitaine du Black Pearl, Barbossa. Le père et la fille se mirent alors à la recherche de la Fontaine de Jouvence, où son père fut tout de même abattu par cette fameuse personne. Peu après, elle s'était retrouvée sur une île déserte, jusqu'à l'arrivée de ces gens qui l'avaient retenue captive durant deux années.

Mais comment était-elle arrivée à cette île déserte ? Son père était mort juste devant la Fontaine de Jouvence, alors pourquoi ne s'était-elle pas sacrifiée pour lui ? Elle se rappelait avoir touché l'épée empoisonnée, ce qui la laissait confuse : comment se faisait-il qu'elle vivait toujours alors que son père bien-aimé avait perdu la vie ? Aurait-elle… Pris ses années ?

Était-elle restée jeune aux dépends de son père ? Était-elle une horrible personne ? Angelica avait du mal à y croire. Serait-ce la raison pour laquelle elle se sentait différente ? Ces années étaient-elles donc l'origine de cette voix en elle-même qui le lui soufflait sans cesse ? Était-elle destinée à vivre de nombreuses années, encore ? Cela expliquait la raison pour laquelle les Espagnols la traitaient différemment depuis le début. Pourquoi elle avait survécu malgré tout. Y parviendrait-elle encore ?

Angelica s'avança vers la porte de sa pièce qui faisait office de chambre. Il lui fallait retrouver cette bouteille qui ne méritait pas d'être. Elle voyait clairement que Jack ainsi que Gibbs s'y accrochaient fermement, quand bien même elle ne comprenait pas pourquoi, vu que le capitaine était Barbossa. Le Black Pearl ne méritait pas de rester dans cette condition. Ils cherchaient probablement un moyen de le libérer, et elle le connaissait.

La jeune femme n'eut pas besoin de chercher, elle trouva l'objet de ses recherches sur la table, au milieu de la pièce, bien en évidence. Trop en évidence. Depuis le début, Jack l'avait sûrement libérée afin de trouver une solution pour le Black Pearl. Cela signifiait par conséquent qu'il connaissait son lien avec Barbe Noire. Qui était-il ? Pourquoi n'apparaissait-il dans aucun de ses souvenirs, alors qu'elle était persuadée, et même plus que certaine, qu'il faisait partie de son passé ?

Même si elle était consciente que tout était calculé afin qu'elle le libérât, Angelica se saisit de la bouteille qu'elle examina. C'était bien celui que son père avait capturé et mis comme trophée, il n'y avait aucun doute là-dessus. Des bruits de pas se firent entendre derrière elle, et elle tourna la tête afin d'apercevoir Jack, qui se tenait dans l'ombre de la pièce depuis apparemment un bon moment. Il attendait sa venue.

« Si tu connais un moyen de le libérer, fais-le. S'il te plaît. »

Angelica, à présent face à lui, le fixa un long moment, avant de poser à nouveau son regard sur la bouteille. Elle ne pouvait pas les laisser s'accrocher à cette chose. Sans lui laisser le temps de réagir, elle lâcha la bouteille qui tomba sur le plancher en se brisant en mille morceaux. Un nuage sombre s'en échappa alors puis se dissipa dans l'air. Quelques instants plus tard, il ne resta plus que les morceaux de verre à balayer.

Jack, trop sous le choc, ne parvint pas à réagir. Que venait-elle de faire ? Pourquoi… Pourquoi ! Le Black Pearl… Son précieux navire… Pourquoi l'avait-elle détruit ? Comment allait-il faire, maintenant ? Avec cette épave et cet… Équipage ! Qu'avait-il fait pour mériter un tel traitement ? Et le Pearl… ! Comment osait-elle s'en prendre à son vaisseau ? Était-ce sa vengeance ? La voix d'Angelica, qu'il n'avait pas entendue depuis deux ans, le cloua sur place.

« Ce n'est pas le véritable Black Pearl, ce n'est qu'une illusion. L'authentique n'est plus. »

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