Alola ! Les vacances de la Méga-Évolution !

- Elles… elles sont revenues ? 

- Je ne sais pas de quoi tu parles, répondit posément Alain pour tenter d’apaiser les craintes du jeune adolescent pris au piège sous l’amas de débris. Mais est-ce que tout va bien ? Tu es blessé ? 

- Je… je ne crois pas… ! rétorqua-t-il en vitesse. Attendez vous devez m’écouter… ! Il faut que… ! 

- Chrys ! 

Alain fut bousculé sans ménagement par une tornade en bermuda orange fleuri et écarté de l’ouverture. 

- Tili ? 

Un profond soulagement avait transparu dans la voix du garçon. 

Gladio s’avança à son tour et vint tapoter l’épaule de son rival.

- Tu le connais ? l’interrogea-t-il perplexe.

- Évidemment ! s’écria Tili. C’est Chrys ! 

- Euh…Chrys…? 

- Chrys ! Le Capitaine ! 

- Hein ? Quoi ? s’exclama l’adolescent. Mais qu’est-ce qu’il fait ici !?

- Je peux tout vous expliquer, reprit le rouquin d’une voix mal assurée. Mais est-ce que vous pouvez d’abord m’aider à sortir de là ? Il déglutit. C’est qu’il fait vraiment noir ici…

Chrys leur tendit en premier à travers l’ouverture, une sorte de station radio surmontée d’une longue antenne tout en prenant garde à ne pas l’abîmer ( objectif atteint au terme d’une manœuvre périlleuse qui faillit coûter un œil à Gladio), avant d’agripper fermement les bras de ses deux camarades. Bientôt, au prix de quelques efforts supplémentaires, Tili et Gladio parvinrent à tirer le jeune Capitaine hors de la cavité. 

Clairement éprouvé, Chrys se laissa tomber à terre, en nage, et inspira de grandes goulées d’air. 

- Est-ce que ça va ? s’enquit Tili en s’agenouillant à ses côtés.

- Oui… Je vais bien, haleta le rouquin qui reprenait gentiment des couleurs. 

Le dresseur d’Archéduc posa la main sur son épaule gauche et lui demanda :

- Qu’est-ce qui s’est passé ici ? Comment tu t’es retrouvé là ? 

Chrys soupira d’un air las. 

- Tu vois ce genre de situation où tu aimerais pouvoir presser « reset » dans la vraie vie ? 

Tili hocha la tête, les sourcils froncés, témoignant de sa concentration. 

- Eh bien, c’est exactement ce qui m’est arrivé ! Après l’attaque, on a remarqué que mon antenne avait été endommagée. Togedemaru et moi on était en train de se rendre sur place pour la réparer, lorsqu’ au milieu du chemin, j’ai réalisé que je n’avais pas pris la bonne taille de clé… Togedermaru est parti me la chercher et moi, j’ai continué à marcher jusqu’à tomber sur cette scène apocalyptique digne d’un décor d’affrontement de boss de fin… À ce moment-là, l’avant du bateau était encore en un seul morceau et je me souviens avoir pensé « Chouette, on a eu de la chance, je vais pouvoir récupérer mon dispositif sans problème ». Je me suis avancé sous la pointe pour aller le chercher et là, d’un seul coup, tout à lâché ! s’exclama-t-il, la voix se décalant vers les aigus. Je…je me suis retrouvé enterré vivant sans même avoir le temps de réaliser ! 

- Tu as eu de la chance de t’en tirer à si bon compte, déclara Nikolaï. 

Le scientifique se baissa pour ramasser l’antenne et se mit à l’examiner. 

- Ou…oui ! 

Chrys essuya son front ruisselant de sueurs froides d’un revers de main. 

- C’est une simple antenne relais... constata le chercheur en la reposant. 

- C’est bien ça m’sieur, acquiesça le Capitaine qui se releva tant bien que mal, supporté par Tili. 

Il chancela et fit quelques pas en direction du dispositif d’une démarche presque aussi assurée que celle d’un Tiplouf sous l’emprise de l’alcool… Alain, qui estimait sa stabilité à peu près comparable à celle d’un château de carte dans un cyclone, redoutait de le voir s’écrouler d’un moment à l’autre… En effet, la gravité semblait l’attirer plus fortement qu’une Manon sur une patinoire… 

Mais le garçon tint bon et tomba à genou devant l’appareil avant de poursuivre, haletant :

- Ce…cette antenne, n’est… pas qu’une simple antenne… Molène et moi l’avons modifiée pour nous ménager une porte de sortie au cas où l’antenne principale serait détruite… et nous avons bien fait ! Elle n’est certes pas aussi performante que sa prédécesseur, mais elle est désormais notre dernier moyen d’interagir avec les capteurs restants autour de la faille depuis le QG ! Enfin… pour autant que j’arrive à réparer les dégâts causés par l’attaque…

- Tu n’arrêtes pas de mentionner une attaque depuis tout à l’heure, remarqua Alain, tu pourrais nous en dire plus à ce sujet ? 

Le garçon eut l’air stupéfait.

- Que… Comment ? Vous n’étiez pas là ?

- Négatif, répondit Gladio en secouant la tête. 

- Nous venons d’arriver, compléta Tili. Bien sûr on se doutait bien que les maisons ne s’étaient pas écroulées toutes seules mais…

- Nous aimerions entendre ta version des faits, conclut Nikolaï. 

- D’accord, acquiesça Chrys, je… je vais tout vous raconter depuis le début. 

Le garçon se releva, s’assit sur une pierre et déposa l’antenne à ses pieds avant de poursuivre :

- Euh… Eh bien, tout a commencé lorsque nos capteurs se sont brusquement affolés suite à une montée en flèche du taux d’Ultra-Particules autour de l’Autel du Soleil. Les équipes de la Police Internationale et les dresseurs présents sur place nous ont rapporté avoir aperçu une ombre gigantesque planant au-dessus d’eux et l’instant d’après, ça a été l’invasion ! La faille s’est mise à cracher des centaines d’Ultra-Chimères d’espèces différentes ! On savait qu’on serait peut-être amenés à en affronter, bien sûr, mais rien ne nous avait préparé à ça ! Il y en avait tellement que c’en était presque grotesque ! On se serait cru piégés dans un « mode survie » sans avoir la moindre possibilité de revenir au menu principal… Danh et les autres ont bien essayé de les retenir, mais ils ont très vite été submergés et le front s’est étendu à l’île entière. Nous avons tout juste eu le temps de faire évacuer les civils avant l’arrivée de l’essaim dévastateur... Les créatures menaient clairement la danse et nos forces ont été rapidement balayées, nos installations détruites... Nous n’avions alors plus qu’une seule crainte : qu’elles ne franchissent les frontières de Poni et ne partent s’attaquer aux îles alentours ! Pourtant, tout à coup, pour une raison inconnue, elles se sont mises à battre en retraite et sont tout simplement retournées d’où elles venaient ! 

- Hein !? Quoi ?! s’écria Tili en haussant les sourcils. Tu veux dire que les Ultra-Chimères sont rentrées d’elles-mêmes dans la faille, sans aucune raison !? 

- Oui, je sais ! C’est à ne rien n’y comprendre… soupira le Capitaine qui jouait nerveusement avec un boulon orphelin récupéré sur la rive. 

- Tout cela me paraît pour le moins… inquiétant… déclara Nikolaï pensif. Quelles sont les chances pour que des centaines d’Ultra-Chimères se regroupent au même endroit, exactement au même moment pour lancer une attaque parfaitement coordonnée… ? 

- Presque nulles… rétorqua gravement Gladio. Elles doivent forcément obéir à quelque chose… ou à quelqu’un…

- Mais à quoi !? À qui !? s’exclama le dresseur d’Archéduc qui s’était mis à faire les cents pas. Et pourquoi se replier alors qu’elles avaient clairement l’avantage !?

- Il s’agissait peut-être d’un avertissement, intervint Alain.

D’un moyen de leur faire comprendre qu’ils n’avaient aucune chance, que leurs assaillants pouvaient les écraser selon leur bon vouloir, les soumettre en un seul coup… Méthode la plus efficace pour étouffer toute forme de révolte ou de combativité dans l’œuf…. songea le jeune homme.

 Méthode que lui n’aurait pas hésité un seul instant à mettre en œuvre….

- Peut-être… répondit Chrys. On ne sait toujours pas à qui on a affaire, mais nous devons faire en sorte de nous tenir prêts à les accueillir lorsqu’ils reviendront. 

- Oui, on ne va pas se laisser faire ! s’exclama Tili, déterminé à en découdre. 

- Et qu’en est-il des autres ? demanda Gladio. Ceux qui se trouvaient à l’Autel au moment de l’assaut ? 

- Oh… C’est… le rouquin prit un air peiné et fixa le sol. Beaucoup des nôtres ont été blessés au cours des affrontements… Ceux qui le pouvaient encore sont restés en première ligne afin de guetter l’arrivée d’une « nouvelle vague » et les autres ont été rapatriés à l’étage inférieur du Centre-Pokémon pour y être soignés. Nous y avons également établi en urgence notre centre de commande. 

- On devrait y aller, déclara Gladio en se tournant vers Nikolaï. 

Le scientifique acquiesça d’un air entendu. 

- Allez-y, les encouragea Chrys qui paraissait à peu près remis de ses émotions. Vous trouverez un ascenseur menant au sous-sol derrière la réception. Je vous rejoindrai dès que j’aurai terminé de réparer l’antenne ! 

- Tu es sûr de vouloir rester seul après ce qui vient de t’arriver ? lui demanda Alain, pas vraiment certain qu’abandonner à elle-même, une personne venant de vivre une expérience potentiellement traumatisante était la meilleure chose à faire... 

- Ah je… 

Un éclair d’hésitation passa dans le regard du garçon.

- Non, tout ira bien ! se reprit-il aussitôt. Togedemaru arrivera d’une minute à l’autre et je ferai bien attention cette fois-ci ! 

- Si tu es sûr de toi…

- Moi je reste ! déclara Tili intraitable. On ne sera pas trop de quatre pour affronter des Ultra-Chimères mal lunées… Hein, pas vrai Archéduc ? 

- Hou, rhou ! acquiesça le hibou de type plante. 

- Merci les amis, fit le rouquin reconnaissant.

- Bien, alors soyez prudents, nous nous retrouverons là-bas, dit Nikolaï avant de tourner les talons.

- Et surtout, réfléchissez avant d’agir, ajouta Gladio non sans arrières pensées.

- Mais oui, tu me connais ! On sera aussi prudents que d’habitude ! lui sourit Tili en retour. 

- C’est bien ce qui m’inquiète… 

Les trois dresseurs et leurs Pokémon étaient sur le point de partir, lorsque soudain Chrys s’écria :

- Oh hé attendez ! J’oubliais, pour accéder à l’ascenseur, il vous faut un mot de passe. 

Le jeune Capitaine se releva et vint le leur confier à voix basse : 

- Il s’agit de la « Comptine du Pikachu ».