Alola ! Les vacances de la Méga-Évolution !

Chapitre 45 : Après la nuit (partie 2)

3677 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 26/09/2020 14:52

Les premières lueurs de l'aube animaient les ruines de l'Autel d'ombres étranges et révélaient la scène dans une nouvelle lumière. La nuit avait semblé vouloir emporter avec elle le souvenir des dernières heures de lutte acharnée, les laissant hagards et engourdis, tels deux naufragés brusquement propulsés sur un rivage calme après la tempête. 

Dos au mur, Alain avait fixé sans relâche le symbole lunaire au centre de la plateforme, paralysé par un vide profond et un épuisement tel qu'il chassait toute douleur. Le jeune homme avait songé plus d'une fois à fermer les yeux, mais il s'était malgré tout fait violence et avait fini par prononcer ces mots :

- On doit y aller.

À ses côtés, Danh, la tête en arrière, avait soupiré de lassitude.

- Pas tout de suite, juste encore un moment... s'il te plait...

Alain avait vaguement acquiescé. Après tout, son coéquipier, tout bon combattant qu'il était, n'avait plus vraiment la constitution de ses vingt ans. Cela dit, raison de plus pour éviter de s'éterniser...

Alors qu'il tentait de tracer mentalement le chemin le plus court menant à la ville la plus proche, une forme sombre à l'horizon avait attiré son attention : en plissant les yeux, Alain avait pu reconnaitre la silhouette d'un volatile.

« Un Guériaigle ? »

Mais avant qu'il ait pu l'examiner davantage, l'oiseau avait à nouveau disparu derrière les cimes des arbres.

« Étrange », avait-il songé. 

 Le Pokémon vol ne comptait pas parmi les espèces qu'il avait pu croiser en ces lieux. Enfin, il s'agissait sûrement d'un simple hasard ; nul besoin de s'attacher à de faux espoirs. Après tout, si personne n'avait répondu à leur appel de détresse jusqu'à maintenant, il y avait fort à parier que leur message n'avait jamais atteint sa destination.

-Eh ! l'avait silencieusement interpelé Danh. 

Le Doyen avait désigné la muraille en ruines d'un air préoccupé. 

- Y'a quelqu'un là-bas, relâche pas ta vigilance.

En alerte, Alain avait aussitôt posé le regard sur les décombres et avait tout juste eu le temps de voir une silhouette disparaître derrière un pan de mur intact. 

Tout en essayant de se relever, Danh avait soufflé entre ses dents serrées :

- Je vais... aller voir.

- Je viens avec vous, avait immédiatement fait le Kalosien en se levant à son tour.

- Merci gam... Alain. 

Le jeune homme avait tendu son bras valide à son aîné et tous deux avaient prudemment entamé la descente des marches en pierre.

Tout en marchant, Alain avait rapidement fait l'inventaire de leurs forces et en était arrivé à la conclusion suivante : le combat n'était pas une option. Il fallait à tout prix privilégier la fuite ou du moins, ménager l'effet de surprise le plus longtemps possible, afin de mettre en place une offensive rapide et espérer défaire les assaillants d'un seul coup, en cas d'extrême nécessité.

Arrivé à la fin de l'escalier, Alain avait aidé Danh à passer la dernière marche et tous deux s'étaient précipités dans l'ombre de la muraille, à l'affût du moindre bruit suspect. Le silence de l'aube naissante, à peine troublé par le chant d'éveil des Plumeline, ne leur avait rien appris sur la position de leur potentiel assaillant, du moins, jusqu'à ce que des crissements de pas retentissent dans leur dos et qu'un rayon de lumière balaye l'autre côté du mur. La main posée sur sa Poké Ball, Alain avait attendu fébrilement le départ de l'inconnu et avait réprimé un soupir de soulagement lorsque les pas s'étaient à nouveau éloignés. Alors, le jeune homme avait lancé à Danh un regard entendu :

La voie était libre, c'était maintenant ou jamais.

Mais alors qu'ils s'apprêtaient à courir en direction du pont reliant le lac au jardin d'Ula-Ula, les deux hommes s'étaient brusquement trouvés aveuglés par le faisceau d'une lampe torche.

- Hé là ! s'était écriée une voix d'homme. Oh...

- Qui êtes-vous ? avait fait Alain d'un air menaçant, prêt à envoyer un Pokémon au combat.

Mais avant qu'il ait pu s'emparer de la moindre Poké Ball, Danh avait stoppé son geste d'une main ferme.

- Professeur Euphorbe, avait acquiescé le Doyen d'Ula-Ula sans grande conviction.

« Euphorbe ? »

Le nom lui avait paru familier. Cet homme interloqué, à la peau mate et au look baba cool était donc le fameux professeur Pokémon de la région d'Alola.

- Que... ! Danh ? 

- Qu'est-ce qu'il se passe ici ?! avait surgi une voix de femme. 

La nouvelle arrivante s'était plantée aux côtés du professeur et les avaient détaillés avec incrédulité avant de jeter un regard interrogateur à son partenaire qui lui avait répondu par un hochement de tête.

La jeune femme avait porté la main à sa chevelure ivoire avant de s'exclamer :

- Merci Arceus, les informations de Vicky étaient exactes !

Exténué, Danh avait pris appui contre la paroi et avait soufflé :

- Alors vous avez fini par recevoir notre appel de détresse ?

- Non pas tout à fait, avait répliqué Euphorbe, on vous expliquera mais pour l'instant...

L'air préoccupé, le professeur s'était tourné vers la femme qui l'accompagnait.

- Pimprenelle, tu peux contacter la base de Poni ?

- C'est déjà fait, avait répondu cette dernière en approchant l'appareil de son oreille.

Durant le court temps d'attente, le professeur avait tenté de maintenir un semblant de conversation, tout en se grattant l'épaule d'un air gêné :

- Au fait, désolé pour la frayeur, mais on ne savait vraiment pas à quoi s'attendre...

Prenant place aux côtés de Danh, Alain s'était apprêté à répondre qu'il n'y avait aucun mal et qu'ils s'étaient seulement montrés prudents, lorsque Pimprenelle l'avait devancé :

- Vous n'étiez pas trois ? 

Pris au dépourvu, le Kalosien s'était aussitôt détourné des yeux inquisiteurs de la jeune femme. Au fond, il avait su sa question légitime : il aurait bien été forcé d'y répondre tôt au tard, seulement...

- On est au complet, avait rétorqué Danh à son grand soulagement, et... je sais que ce que je vous demande est difficile, mais j'aimerais que vous vous contentiez de garder vos questions pour plus tard... 

Cette fois visiblement inquiets, Euphorbe et Pimprenelle n'avaient toutefois pas insisté.

- Entendu.

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- Une collision contre un rocher, vous dites ? lui avait demandé l'infirmier en chef.

Le bras droit déplié sur la tablette en inox, Alain avait mollement acquiescé.

À l'arrivée de l'hélicoptère de rapatriement, le jeune homme n'avait pas tenu à mentionner sa blessure, par peur de se retrouver embarqué dans une longue série d'examens avant d'avoir pu vérifier certaines choses... Mais voilà, Danh avait vendu la mèche, tout en le gratifiant d'un regard désapprobateur. 

L'infirmier avait ajouté qu'il était incapable de lui assurer qu'il s'agissait d'une fracture, bien qu'il le suspectât fortement et qu'une radio était le seul moyen de le confirmer. Toutefois, l'homme avait préféré procéder à une immobilisation préventive ; il avait précautionneusement manipulé le bras droit du dresseur pour le ramener contre lui, réveillant ce faisant l'abominable douleur. Et tandis que la vilaine ecchymose à son avant-bras disparaissait sous la manche de l'attelle, Alain avait fini par se dire que sa prise en charge n'était peut-être pas une si mauvaise chose... 

Il avait ensuite repris place en face du couple de professeurs pour laisser aux infirmiers le soin d'ausculter le poignet de Danh. 

Au cours du trajet, Euphorbe et Pimprenelle avaient eu le temps de leur préciser davantage le déroulement des événements :

En tant que Maître provisoire (en l'absence du tenant officiel du titre), le professeur Euphorbe s'était rendu à la Ligue Pokémon juste après avoir repoussé une vague d'Ultra-Chimères sur les côtes de Poni. Après tout, ce haut lieu d'Alola était demeuré désert au moment de l'invasion et il en allait de sa responsabilité de le protéger. Aussi, Euphorbe avait cru bon de s'arrêter brièvement au Mont Lanakila pour vérifier l'état du bâtiment. Hélas, sur le chemin du retour, le professeur s'était retrouvé coincé par une Ultra-Chimère isolée au niveau de l'Observatoire du Mont Hokulani et était intervenu juste à temps pour tirer son épouse désarmée d'un mauvais pas. En effet, Pimprenelle avait eu le malheur de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment : juste après avoir récupéré des données pour Molène à l'observatoire, la jeune femme s'était laissée surprendre par la créature sans aucune Poké Ball sous la main.

Heureusement, les Pokémon d'Euphorbe étaient parvenus à venir à bout de la bête à la cuirasse rouge et le couple s'était retranché à l'intérieur du bâtiment vitré à la nuit tombée, pour souffler un peu. Cependant, leur repos avait été de courte durée ; un appel du Centre Pokémon de Poni leur avait signalé la disparition de trois dresseurs partis pour Ula-Ula au crépuscule et dont ils demeuraient toujours sans nouvelles. Comme pour confirmer leurs craintes, les capteurs de l'observatoire s'étaient alors brusquement affolés, montrant un pic d'énergie au niveau du Lac du Halo Lunaire, pour revenir au calme plat après quelques secondes à peine. La conversation avait tourné court et le couple avait aussitôt pris la direction du Jardin d'Ula-Ula à dos de Poké Monture.

Pourtant, une question demeurait encore : comment les occupants du Centre de Poni avaient-ils su qu'ils se trouvaient sur Ula-Ula sans avoir eu le moindre contact avec eux ?

À cette interrogation, Pimprenelle avait répondu que l'information était venue d'une jeune dresseuse secourue au cœur du Canyon de Poni qui prétendait les avoir côtoyés peu de temps auparavant. La nouvelle avait immédiatement éveillé l'attention d'Alain qui s'était empressé de demander plus de détails à ce sujet. Malheureusement, les deux professeurs n'avaient pu le renseigner davantage et le jeune homme avait été forcé de prendre son mal en patience jusqu'à la fin du trajet.

Après ce qui lui avait paru une éternité, Alain avait finalement pu distinguer les lumières de l'île artificielle du Paradis Æther, ainsi que celles de la piste d'atterrissage, au sommet du bâtiment principal. Mais aussitôt qu'il eut mis pied à terre, une cohorte de personnel en tenue blanche l'avait entraîné vers l'aile des soins ; le Kalosien avait à peine eu le temps de lancer un regard de détresse à Danh qui s'était contenté de répondre par un haussement d'épaule résigné. 

La suite n'avait été qu'une succession d'examens médicaux de toutes sortes, ponctués d'attentes et de question pénibles auxquelles Alain s'était efforcé de répondre malgré son état comateux (probablement renforcé par un cocktail d'antidouleurs...). Lorsqu'enfin on l'avait autorisé à prendre une douche - sous réserve de garder son attelle au sec -, la matinée était déjà presque arrivée à son terme. 

Enfin, près d'une demi-heure plus tard, le dresseur avait été convoqué une nouvelle fois auprès du radiologue pour le diagnostic final. Sans surprise, on lui avait annoncé une double fracture de l'avant-bras ; une fracture somme toute fréquente qui, dans son cas, ne nécessitait pas d'opération chirurgicale, mais une immobilisation de quatre semaines au minimum. 

Alain avait accueilli la nouvelle sans grande réaction et s'était contenté de fixer la cassure bien nette sur l'imagerie en prenant vaguement note des recommandations émises par son interlocuteur en attendant de se rendre dans un véritable hôpital à Kalos. Au terme de cette conversation à sens unique, on lui avait proposé d'occuper l'une des chambres médicalisées au bout du couloir ; offre qu'il avait aussitôt acceptée sous peine de s'endormir sur place. Bien qu'à cinq portes de là, la marche jusqu'à la chambre avait pris la forme d'une dernière épreuve insurmontable dans son état du moment. La vue troublée, les membres lourds, Alain était parvenu à la porte 516 avec la force d'un octogénaire asthmatique. Tout en luttant pour insérer la clé dans la serrure, devenue minuscule pour une raison quelconque, le Kalosien avait cru sentir une présence dans son dos. Qu'il s'agisse d'une hallucination ou non, Alain avait fait volte-face pour voir toutes ses préoccupations ressurgir instantanément. 

Vicky...

La sous-directrice de la Fondation Æther se tenait à quelques mètres de là, l'air désemparée.

- Oh je... Excuse-moi, je ne voulais pas te surprendre, avait-t-elle fait penaude. J'aurais aimé pouvoir te parler plus tôt, mais comme tu étais encore en consultation je...

- Ça ne fait rien, avait rapidement rétorqué le jeune homme. 

Tant de questions s'étaient bousculées dans son esprit. Alain avait été incapable de mettre de l'ordre dans ses pensées, si bien qu'aucune d'elles n'avait quitté ses lèvres. 

Visiblement peinée, Vicky avait dû interpréter son silence comme un signe de ressentiment.

- En vérité, je voulais sincèrement m'excuser pour t'avoir embarqué dans nos problèmes. Si je n'avais pas insisté pour obtenir ton aide, tu ne serais probablement pas dans cet état. Tu as fait bien plus pour Alola que tout ce que j'aurais pu imaginer, alors que j'ai honteusement manqué à tous mes devoirs. La jeune femme avait détourné le regard. Y compris à la promesse que je t'avais faite... 

- Est-ce qu'elle va bien ? 

Prise de court, Vicky s'était interrompue avant de hocher la tête.

- Oui, avait fait la sous directrice avec bienveillance. Pour le moment, elle se repose à l'infirmerie. 

Alain avait acquiescé à son tour, délesté d'une partie du poids qui pesait sur ses épaules.

- Je vois.

- C'est un sacré caractère, avait ajouté Vicky, en souriant. Elle a refusé de quitter le Centre Pokémon de Poni jusqu'au bout. Même au bord du sommeil, elle continuait à dire qu'elle attendrait là jusqu'à votre retour : j'ai dû attendre qu'elle s'endorme pour de bon pour la ramener ici.

 Le jeune homme avait soupiré, tantôt gagné par l'exaspération, tantôt par un élan d'affection. 

- Ça lui ressemble bien...

Son interlocutrice avait acquiescé, sans toutefois poursuivre. 

Plantés au milieu du couloir aseptisé et la conversation s'épuisant, Alain et Vicky s'étaient rapidement trouvés enveloppés dans une atmosphère pesante. Le sourire affiché de la jeune femme ne parvenait pas à faire oublier ses yeux enflés, rougis et son inhabituel manque de formalité, témoignant de l'inévitable non-dit qu'Alain redoutait comme une bombe à retardement. 

Assailli par l'angoisse à mesure que le silence s'étirait, le dresseur s'était apprêté à mettre un terme rapide à leur conversation, lorsque Vicky l'avait retenu par ces mots :

- Danh m'a raconté ce qu'il s'est passé... au Lac du Halo Lunaire.

« Non ! Pas maintenant ! Pas comme ça ! »

Telle une bête traquée sous les projecteurs, Alain ressentait la fuite comme une nécessité. 

- Je voulais seulement te dire que... quoi qu'il se soit passé, ce choix a été celui de Beladonis, ni le tien, ni celui de personne d'autre.

Vicky s'était avancée doucement jusqu'à lui pour lui poser délicatement la main sur l'épaule.

- Tu n'as pas à te sentir coupable de quoi que ce soit, d'accord ? avait-elle ajouté d'une voix tremblante, malgré elle.

Après lui avoir souhaité un bon repos, la jeune femme s'était finalement retirée et ce n'est qu'après l'avoir vu disparaître qu'Alain avait pris conscience de sa main valide, douloureusement crispée autour de la poignée de porte.

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« Pourquoi... »

Les yeux d'Alain criaient au supplice, entraînant leur lot de maux de têtes et pourtant son cerveau semblait être passé en mode hyper éveil, rendant tout repos impossible. Et pour cause, à chaque fois qu'il fermait les paupières, le jeune homme avait le malheur de sursauter au moindre bruit. Un éclat de voix lointain, un cri de Goélise ou même des bruits de pas dans le couloir suffisaient à le ramener à son train de pensées infernal, jusqu'à ce qu'il sombre à nouveau et que le cycle se répète une fois de plus. 

Cette fois-ci, une rapide conversation d'infirmières de l'autre côté de la porte était à l'origine de son brusque retour à la réalité. 

À bout de nerfs, Alain poussa un grognement et se laissa retomber en arrière, le bras en travers du front. Cela ne suffit cependant pas à empêcher les visions de la batterie disparaissant dans les flots d'abonder, ni à chasser la culpabilité qui lui vrillait les tripes. 

Pour ne rien arranger, les effets des antidouleurs commençaient à se dissiper, si bien que le dresseur finit par abandonner complètement l'idée de rattraper son sommeil en retard. 

De plus en plus incommodé par les pulsations dans son bras droit, Alain se redressa pour de bon et se dirigea vers la porte.

Tant pis. Le début d'après-midi était déjà bien entamé ; il trouverait bien la force de tenir jusqu'au soir. Et après tout, peut-être que pour une fois, il arriverait à dormir un peu dans l'avion le lendemain...

Résolu, le jeune homme quitta définitivement la chambre 516 pour retourner dans le corridor désert. Sans sac à dos ni Poké Ball, le dresseur se sentait quelque peu démuni ; il progressa dans l'aile médicale sans réussir à se débarrasser de la désagréable sensation d'avoir oublié quelque chose d'important. Toujours est-il qu'Alain n'avait pas vraiment idée du plan précis de l'étage où il se trouvait... Aussi se mit-il en quête d'une quelconque carte du complexe. 

Toutefois, alors qu'il allait quitter la partie destinée aux soins des Pokémon, le jeune homme aperçut un écriteau tout particulier à l'intersection des deux couloirs :

INFIRMERIE

Alain se stoppa net.

« Se pourrait-il que... ? »

Selon les dires de Vicky, il y avait des chances pour que Manon se trouve juste là, derrière la porte qui lui faisait face.

Prudent, Alain examina les alentours. Après tout, son état n'était pas vraiment propice aux grandes balades... S'il était pris, on le renverrait sûrement d'où il venait. 

« Personne »

Il entra.

La salle dans laquelle il venait de pénétrer n'était pas bien grande : trois lits encerclés de rideaux tirés et quelques placards en bois blanc y constituaient l'intégralité du mobilier. De plus, malgré l'heure tardive, la pièce baignait dans un silence relatif ; les seuls sons à lui parvenir étaient les conversations étouffées provenant de la chambre adjacente.

Face à ce calme des plus plats, Alain se trouva un peu bête. 

Il avait espéré retrouver sa compagne de voyage et ainsi avoir accès à sa version des faits... Or, Manon ne semblait pas encore réveillée... il était même possible qu'elle ait déjà quitté l'infirmerie.

Le jeune homme soupira.

Dans les deux cas, il n'avait pas sa place ici.

Prêt à faire demi-tour, Alain s'apprêtait à abaisser précautionneusement la poignée, lorsqu'une petite tête ronde parut entre les rideaux du lit le plus proche.

- Rima ? 

 Aussi surpris l'un que l'autre, le dresseur et le Pokémon hérisson restèrent à se regarder dans le blanc des yeux jusqu'à avoir réellement intégré la présence de l'autre. Une fois ces quelques secondes de flottement passées, Marisson sauta au bas du lit pour se précipiter vers lui et lui enserrer la jambe.

- Ma maa ! lui dit-il en levant la tête pour le fixer de ses grands yeux inquiets. 

- Tout va bien.

Alain se baissa pour caresser la tête du Pokémon plante.

- Manon est là ?

Marisson acquiesça. Il l'entraîna vers le lit et écarta légèrement le rideau pour révéler la jeune fille paisiblement endormie. Sensible à cette nouvelle agitation, Manon baragouina quelques mots à voix basse et s'enroula davantage dans ses draps.

Soulagé, Alain repoussa la toile blanche en souriant doucement.

« Merci Arceus... »

Le jeune homme recula jusqu'à la chaise adossée au mur et s'y laissa tomber, bientôt rejoint par Marisson. À la demande du petit Pokémon plante, Alain se décala légèrement pour lui permettre de grimper jusqu'à lui. Une fois en haut, Marisson escalada son genou pour pointer son attelle d'un air interrogateur. 

- Rien de grave, lui chuchota-t-il.

Prudemment, le hérisson étendit la patte pour atteindre le tissu rigide.

Sous la légère pression, Alain grimaça malgré lui.

- Maa ? demanda Marisson en retirant sa patte aussitôt.

Le Pokémon s'empressa de lui désigner le couloir d'où provenaient les voix des infirmières en le fixant d'un air interrogateur.

- Ça va aller, ne t'en fais pas pour moi.

L'air grave, le Pokémon n'insista pas. 

Alain ne put s'empêcher d'être attendri par ce petit Marisson si sérieux. Depuis qu'il était sorti de l'œuf, le Pokémon avait toujours été à part : à la fois bienveillant et responsable Marisson avait toujours été apprécié de tous au laboratoire, humains comme Pokémon. 

En un sens, Manon et lui s'étaient bien trouvés.

Entouré de ses deux compagnons, Alain avait retrouvé un peu de quiétude. Certes, la douleur dans son bras était encore bien présente mais malgré cela, il accueillit ce moment de répit comme une agréable parenthèse. 

Cela faisait des jours qu'il ne s'était pas senti si... léger...


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