Mieux vaut être libre dans une petite maison qu'esclave dans une grande.

Aussitôt leur accord passé, Largo retourne voir Sybille qui est toujours auprès de son Bulbizarre et du staff du Centre Pokémon. La jeune femme s’est retournée, les traits tirés par le stress et l’angoisse, en voyant le jeune dresseur arrivé, l’air dur et impassible.

« Comment va-t-il ? Demande-t-il en tout premier lieu en désignant le Bulbizarre.

-Heu… je… bégaye-t-elle, prise de court et incapable de réfléchir convenablement.

-La blessure n’est pas mortelle mais il a besoin de soin de toute urgence s’il on veut limiter les dégâts, répond à sa place l’Infirmière Joëlle.

-Très bien, j’ai réussi à négocier avec De Drago. Si je gagne un combat pokémon contre lui il vous laissera le réaffronter durant la Ligue d’Hoenn, relate-t-il calmement.

-Et si… vous perdez ? Demande-t-elle d’une petite voix angoissée et pleine d’appréhension.

-Disons que je devrais mettre ma dignité de côté, réplique mystérieusement le dresseur, ce qui ne manque pas de surprendre Sybille qui ne comprend pas.

-Mais ça n’arrivera pas, je connais le genre de dresseur qu’est De Drago, ces types ne connaissent rien de leurs pokémons si ce n’est leur nom et type, et encore, explique-t-il ensuite.

-Donc vous… vous pourrez le battre ? Vous êtes bien sûr de vous ? Demande Sybille qui commence à doucement reprendre espoir.

-Je ne vais pas vous mentir, le risque zéro n’existe pas, mais je pense que ça devrait le faire, tente de la rassurer Largo tout en restant honnête.

-Je vais aller l’affronter, vous vous allez suivre l’Infirmière Joëlle et votre Bulbizarre, lui ordonne-t-il ensuite.

-D’accord mais… vous êtes sûr que…

-Votre Bulbizarre a plus que jamais besoin de vous, allez au Centre Pokémon et je m’occupe du reste. Je viendrais vous chercher quand ce sera fini, vous avez ma parole, la coupe-t-il avec douceur mais fermeté. La jeune femme hoche la tête d’un air entendu mais terriblement stressée, puis elle emboite le pas au staff du centre. Largo la regarde faire en soupirant, agacé et légèrement stressé il doit se l’avouer. Après tout la liberté de cette fille est entre ses mains, il doit donc battre De Drago, mais pour ça, il doit rester calme, concentré et réfléchi.

-Tout va bien ? Demande alors une voix dans son dos. Surpris alors qu’il était un peu perdu dans ses pensées, Largo sursaute, et se retourne d’un air agacé. Il déteste être surpris de la sorte. Bastien prend aussitôt un air contrit.

-Elle est terriblement anxieuse mais ça va, se contente de répondre Largo. Bastien hausse les sourcils et hoche la tête, à mi-chemin entre l’embarras et la surprise.

-On en doute pas une seconde et ça n’a rien d’étonnant, mais on faisait allusion à De Drago, précise Jenny.

-Oui, bien-sûr, rétorque Largo, gêné. Mais il se reprend très vite et évite de se formaliser sur le petit sourire amusé et moqueur des deux policiers.

-J’ai passé un accord avec De Drago, et s’il le tient, Sybille pourra le réaffronter lors de la Ligue d’Hoenn, dans environ neuf mois, reprend-il hâtivement.

-Le réaffronter ? S’exclame Bastien, incrédule.

-Je ne suis pas une experte en combat pokémon, mais je trouve que c’est une très mauvaise idée, renchérit Jenny, également incertaine.

-Non, peut-être pas, mais elle mérite de pouvoir se battre à armes égales avec ce sale type. Et en neuf mois, je peux l’amener à un niveau suffisant pour qu’elle puisse affronter et battre De Drago, et gagner sa liberté, réplique Largo avec conviction.

-Gagner sa liberté ? Répète Bastien, trouvant ça visiblement ridicule.

-Vous croyez peut-être que des dynasties de pourritures comme la famille De Drago sont arrivés là où ils sont grâce à l’honnêteté et à l’honneur ?

-Je n’aurais pas dit les choses comme ça, mais Bastien à raison, rien ne dit qu’il tiendra parole s’il perd votre combat, rajoute encore une fois Jenny.

-Il n’y a qu’une seule façon de le savoir, alors définissez-nous une zone de combat qu’on puisse en juger nous-même, décide d’abréger Largo qui aimerait que ce combat soit le plus vite derrière lui. Bastien hausse les épaules et regarde Jenny, attendant qu’elle donne son feu vert.

-Le Centre Pokémon dispose d’une zone de combat réglementaire, je vais vous y escorter, déclare alors Jenny.

-Je vais à l’arène chercher l’assistant du champion, mieux vaut un arbitre officiel et qualifié pour ce genre d’évènement, prévient Bastien avant de s’exécuter. Jenny hoche la tête, puis fait signe à De Drago d’approcher.

-Suivez-moi, ordonne-t-elle à Largo, puis elle se dirige vers le Centre Pokémon suivi du jeune homme qui ne peut retenir un discret soupire d’appréhension.

Cimetronelle est l’une des agglomérations de Hoenn les plus dures à atteindre, entre autres à cause de la météo particulièrement pénible et capricieuse des routes 119 et 120 qui l’entourent. Les dresseurs les moins aguerries arrivant généralement de la première, la mairie et l’Infirmière Joëlle se sont donc entendues pour que le Centre Pokémon soit le premier bâtiment officiel qu’ils rencontrent. Il faut donc moins d’une minute à Largo, Jenny et De Drago pour y arriver. La zone de combat est très bien entretenue, pas un déchet, pas une branche, pas une feuille ne le parasite. Mais ça ne l’étonne pas, en règle générale les agglomérations en prennent grand soin pour que les dresseurs évitent de se battre autre part et commencent à faire de gros dégâts matériels et humains dans la commune.

-Bien. Un arbitre officiel va arriver et prendre en charge votre affrontement, prévient Jenny en se tournant vers les deux dresseurs.

-En attendant, j’ai moi-même quelques règles auxquelles j’aimerais que vous fassiez attention. Premièrement, veillez à ce que votre affrontement ne dépasse pas de trop les frontières de la zone de combat. Je peux comprendre que l’évolution d’un combat ne soit pas totalement de votre fait, mais veillez à canalisez vos pokémons au plus près des frontières. Ensuite, je ne tolérerai aucun comportement de la part de vos pokémon susceptibles de mettre en danger la population. Il y aura des spectateurs et pas de délimitations comme sur une zone de combat officielle, alors gardez le contrôle, sinon croyez-moi vous le regretterez et peu importe le statut que vous avez, reprend-elle en jetant un regard à De Drago sur la dernière mise en garde. En guise de réponse, ce dernier se contente de sourire effrontément.

-Pourquoi faites-vous appel à un arbitre officiel ? Demande-t-il alors, visiblement curieux.

-Nous estimons que les enjeux le nécessitent. Ça vous pose un problème ? Demande Jenny, les sourcils froncés.

-Non, aucun, tant que ça ne traîne pas, répond-il sans perdre son air suffisant.

-Bien, un point sur lequel nous sommes d’accord alors, affirme-t-elle calmement. Un peu plus tard, Bastien et l’assistant du champion arrivent, et Largo constate que Chris est toujours en poste. Christian McCawley, ou Chris pour les intimes, était un jeune militaire de la Air Force Alola, du moins jusqu’à son renvoi de l’armée pour un motif du genre conduite dangereuse invoqué par sa hiérarchie. Mais Largo n’a jamais eu le mot de la fin. En effet, bien qu’étant une incorrigible grande-gueule, Chris est toujours resté très évasif sur le sujet, voir carrément taciturne, ce qui est pourtant l’antithèse de son caractère d’ordinaire fougueux et impétueux. Du moins jusqu’à ce que l’on change de sujet. Ainsi Largo le connaît depuis qu’il a huit ans, et jusqu’à son départ il y a quatre, il n’a rien appris de plus à ce sujet. Chris est arrivé à Cimetronelle il y a donc dix ans, en quête d’aventure, de sensations et d’un travail. Monsieur Thalwind, le champion, a rapidement remarqué que c’est un amoureux aussi bien d’aviation que des pokémon, et étant lui-même un ancien militaire, cela a dû influer sur sa volonté de le recruter. Et bien que ce soit un sacré tapageur, il n’a jamais eu de gros conflits avec son supérieur. Chris, c’est celui avec son père qui a transmis à Largo les valeurs du voyage, de l’amour des pokémons ainsi que l’importance d’être libre dans sa vie et dans ses choix, comme l’aurait fait un grand-frère. Lorsqu’avec Bastien, Chris se campe devant le trio formé par De Drago, Jenny et Largo, ses yeux s’arrêtent sur ce dernier et ses sourcils se froncent de suspicion.

-Largo ? Demande-t-il alors avec hésitation, et trois pairs d’yeux se tournent vers le jeune dresseur. Mais Bastien se reprend rapidement, se rappelant qu’il est originaire de Cimetronelle.

-Vous vous connaissez ? Demande par contre Jenny, suspicieuse et surprise. Largo a tout juste le temps d’ouvrir la bouche que Chris lui prend la parole.

-Bien-sûr ! C’est Largo Thalwind, le fils de mon patron ! L’intéressé ferme les yeux et soupire d’agacement.

-Ravi de voir que tu n’as pas changé Chris, finit-il par déclarer d’un air désespéré. Chris, tout d’abord surpris, comprend rapidement sa boulette.

-Tu voulais rester anonyme, c’est ça ? Elude-t-il, gêné.

-Oui, enfin c’était avant ton entrée fracassante, réplique Largo, résigné. Chris affiche une moue navrée.

-Désolé p’tit.

-C’est rien. Et maintenant ? Demande Largo à Jenny. Chris fronce légèrement les sourcils. Le fils du champion n’est pas d’un tempérament rancunier et il l’a toujours connu plutôt ouvert et chaleureux, alors pourquoi cette froideur ?

-Vous êtes l’assistant du Champion d’Arène de Cimetronelle ? Également arbitre agréé par la Ligue Pokémon ? Demande la policière.

-Oui madame, Christian McCawley, mais appelez-moi Chris, répond-il en offrant son plus beau sourire agrémenté d’un petit clin d’œil.

-Bien. Je souhaiterai vous réquisitionnez le temps d’un combat, explique-t-elle sans se formaliser sur sa tentative de charme.

-Ah ouais ? Du genre ? Un combat officiel ? Demande Chris, curieux et surpris.

-Pas exactement. Nous souhaiterions que vous arbitriez le combat qui opposera le dresseur Largo Thalwind au Duc Thomas De Drago, explique Jenny.

-Sérieux ? S’exclame le jeune assistant en arquant les sourcils.

-Oui, pourquoi ? Quelque chose ne va pas ? S’inquiète la flic.

-A moi, non, répond-il en souriant, un sourire amusé sur les lèvres.

-C’est vous le Duc de chez-pas-quoi ? Demande-t-il ensuite soudainement à De Drago d’un air désinvolte. Surpris que l’on s’adresse à lui ainsi, De Drago arque les sourcils. Mais il se reprend assez vite.

-Je suis le Duc de Frimapic et mon père est le propriétaire des magasins Shop ! Articule-t-il en bombant le torse.

-Ouais bref. J’en déduis que c’est vous le nœud-nœud qui va se faire botter le cul dans les règles de l’art, devine Chris sans tenir compte du titre de son interlocuteur.

-Et qui vous dit que c’est moi qui vais perdre, rétorque l’aristocrate avec un sourire assuré.

-Vous voulez rire ? Ce gosse n’est pas un Thalwind pour rien, et si vous avez suivi la conférence de l’Ile du Lys dans la Vallée, vous avez dû voir comment il envoie du bois le p’tit, rétorque Chris, amusé. De Drago a perdu son sourire. S’il suit plus ou moins attentivement les compétitions des Ligues Pokémon, il ne prête aucune attention aux épreuves éliminatoires, il n’a donc aucune idée des talents et surtout du classement final de son adverdaire…

-Trêve de bavardage, êtes-vous prêts messieurs ? Semble s’impatienter Jenny. Largo et De Drago regarde Jenny, puis ils s’affrontent du regard. Tout indique qu’ils sont prêts à en découdre…