Les Train Twins

Chapitre 26 : La folie d'un homme

11786 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 05/12/2021 23:57

Chapitre 26


La folie d’un homme

 

Ce matin là, Jacky et Al s'étaient levés plus tôt que d'habitude, l'aube était encore loin. A neuf heures tapantes, au Plateau Indigo, aurait lieu l'assemblée annuelle de la Ligue Pokémon de Kanto qui réunissait tous les champions d'arènes et les maîtres pokémon impliqués dans l'organisation. En tant que Prof. Pokémon de la région, Jacky était convoqué, Florine aussi en théorie, mais pour ce genre de choses, les deux scientifiques ne se déplaçaient jamais ensemble, l'un des deux restait toujours au laboratoire.

Al possédait de nombreux pokémon vol, moins qu’autrefois car elle en avait relâché beaucoup et d’autres étaient morts de vieillesse, mais elle et son mari avaient encore l’embarra du choix pour les voyages aériens. Comme souvent, elle choisissait son dracolosse, il était si grand qu’il pouvait porter Jacky et Al qui, vu son embonpoint, pesait autant que les deux jumelles réunies. Le couple s’installa sur le dos du pokémon dragon. Il jeta quelques regards tendus en direction de la pâture du laboratoire et des arbres. C’était diffus mais il sentait quelque chose d’anormal... Il n’eut pas le temps de prévenir sa dresseuse, elle lui demanda de décoller.

En vol, ils croisèrent le cornèbre au grelot coque de Kyle. Il revenait de sa ronde nocturne dans les campagnes. Dracolosse poussa un cri à son intention.

« Drawwouw !

- Crôa crôa ! »

* Gling gling gling.*

L’oiseau noir décida de refaire un tour par le village avant d’aller se poser sur son arbre habituel devant le laboratoire.

Près de la grande place du village, un homme d’une bonne vingtaine d’années était installé sur un banc public en face de l’arène du Bourg Palette, avec une thermos de café et un muffin dans les mains. Le type vêtu d’un survêtement gris avait des écouteurs dans les oreilles, ils étaient reliés à son téléphone fourré dans sa poche. Il avait l’allure d’un simple joggeur matinal. Il but une gorgée de son café et regarda d’un œil faussement distrait Violine Léon sortir de l’arène et s’envoler avec son togekiss.

« La championne vient de décoller en direction du plateau indigo... » Marmonna le type dans le petit micro pendu au fil de ses écouteurs. Dans le creux de son oreille, quelqu’un lui répondit :

« Parfait. Mise en place du plan. Rejoins-nous et attends mon signal. »

La voix masculine était un peu plus aiguë que la sienne, mais terriblement ferme et sèche. L’homme referma son thermos et le laissa tomber dans son sac à dos, immense mais presque vide. Il prit la direction du laboratoire d’un pas décidé et rapide sans être pressé. Cornèbre le survola et le regarda d’en haut, ce n’était pas un gars du coin.

 

Florine prit son petit-déjeuner debout dans la cuisine. Seb ne s’absentait quasiment jamais sans Florine, une semaine par an tout au plus et encore, le plus souvent pour rendre visite à ses parents quand sa femme travaillait vraiment trop pour l’accompagner. Quand il n’était pas là, Florine ne prenait pas la peine de faire du thé ou de préparer un repas correct juste pour elle. En neuf ans, elle avait perdu toutes ses habitudes de mère célibataire, Seb gérait le foyer de A à Z et il était tous ses repères. Elle était trop fière et trop grincheuse pour lui dire avec des mots. Même dans l’intimité, après leurs ébats conjugaux, il était rare qu’elle se laisse aller au romantisme, pourtant elle était parfaitement consciente que son monde tournait autour de Seb et grâce à lui. Cinq minutes lui suffirent pour grignoter un fruit, un morceau de pain rassis et un verre de lait. Elle soupira en enfilant sa blouse pendue dans le couloir en pensant à tout ce qu’elle avait à faire aujourd’hui, au moins elle pouvait compter sur l’aide de Jenny.

« Jane ? Cria Florine en bas de l’escalier.

- Je suis levée maman, j’arrive !

- C’est bon, pas d’urgence. Tu t’occuperas de rentrer les pokémon nocturnes et de sortir les diurnes. Je viendrai t’aider pour la nourriture, mais là j’ai besoin d’une heure pour mettre à jour la base de données.

- Okay ! » Lança Jenny, sa voix résonna dans le couloir et la cage d’escalier.

Seule dans la chambre des jumelles, Jenny était en train de s’habiller. Une fois revêtue de son pull, elle grimpa sur son lit pour regarder par le velux. Jenny aimait le calme qui régnait au laboratoire lorsqu’il n’y avait presque plus aucun humain, surtout au moment du lever du soleil quand les pokémon nocturnes dominaient la pâture. Les pokémon, bien que domestiqués voire dressés, vivaient là tranquillement en harmonie, presque en autonomie. C’était un paysage paisible et réconfortant… En apparence.

Jenny descendit au laboratoire pour récupérer les pokéballs des papinox, noarfangs, malosses et autres pokémon vivant la nuit. Certains lui paraissaient de plus en plus nerveux, pire que les jours précédents, en particuliers les vivaldaims dont l’instinct de survie leur permettait de sentir la présence des prédateurs sur de longues distances. Mais les attitudes les plus étranges provenaient des pokémon spectre. Eux, très clairement, ils étaient à la limite de l’affolement.

« Niéé...

- Fanfanto !

- Brraaa ni...

- Mais qu’est-ce que vous avez tous ce matin ? » Finit par demander Jenny, une pokéball dans chaque main prête à rappeler deux polichombr.

« Poli poli ! »

La dresseuse ne comprenait pas le langage des spectres, mais elle était très intriguée, qu’est-ce qui pouvait les mettre dans cet état ? Elle décida de laisser sortir Chu pour lui poser directement la question.

« Rai rai !

- Chu, dis-moi : pourquoi tes amis sont aussi nerveux ? Maman dit que ça fait des semaines que ça dure.

- Rai ? Chu ! Chuchu rairai ! » Expliqua le pokémon en penchant la tête sur le côté. Jenny fronça les sourcils, elle n’était pas certaine d’avoir compris.

« Tu dis qu’ils sentent une présence hostile ?

- Rai !

- Un pokémon ?

- Rai rai, répondit Chu avec gravité. (Pas seulement.)

- Alors un humain ?

- Rai ! » Approuva le raichu avec une intonation plus aigüe.

Le secret pour comprendre un pokémon apprivoisé était de regarder ses mimiques et d’écouter attentivement son intonation. Ils maitrisaient souvent les rudiments les plus simples du langage humain et de nombreuses espèces essayaient de les imiter. Ainsi, "oui" et "non" étaient assez facile à comprendre. Jenny mordilla ses lèvres, un humain hostile dans les parages avec des pokémon, et ce depuis plusieurs semaines. Ce n’était pas bon, pas bon du tout…

Jenny avait toujours connu Kanto et le laboratoire en paix, mais les membres de sa famille lui avaient raconté leur vie à l’époque de la Team Rocket. Quand ses grands-parents faisaient leur voyage initiatique, la mafia infestait la région. Puis, alors que ses parents étaient adolescents, une guerre civile avait éclaté après la mise en place de la Néo Team Rocket. L’organisation criminelle avait essayé de prendre le pouvoir par la force dans le pays, en renversant le gouvernement et en attaquant frontalement le Conseil des Quatre.

A chaque fois que les temps étaient troublés, le laboratoire du Bourg Palette était pris pour cible, les gangsters savaient qu’il y avait de nombreux pokémon à voler ainsi que des données scientifiques parfois classées confidentielles. C’était d’ailleurs principalement à cause de cela que l’arène de Cramois’île avait été déplacée au Bourg Palette. Le centre de recherche sur les pokémon fossiles fut déplacé à Jadielle, pour bénéficier de la protection de Régis Chen et il n’y avait plus aucune raison de maintenir sur une île déserte une arène pokémon vouée, entre autre, à la protection des habitants et des bâtiments critiques.

Encore aujourd’hui, il fallait se méfier des voleurs de Pokémon, Jenny le savait. Elle fronça les sourcils avant de scruter les environs de son regard bleu intense. Elle ne voyait rien, vraiment rien. Chu sentait bien quelque chose mais lui non plus ne voyait rien, tout comme les vivaldaims, quant aux spectres ils étaient trop paniqués et trop faibles pour les aider. Jenny se décida à laisser sortir ses six pokémon. Elle avait mis de côté son wailord pour prendre son tortank. Elle gardait également avec elle la pokéball de son septième pokémon, ronflex. Ce n’était pas un pokémon très vivace, ni très performant au combat, mais au moins il pouvait marcher sur la terre ferme contrairement à Lord. Elle devait fouiller les environs, ce n’était pas prudent de le faire toute seule, mais ce jour-là il n’y avait personne pour l’aider et c’était précisément pour cette raison qu’il ne fallait plus trainer. Jane avait une mauvaise intuition, si des voleurs voulaient s’en prendre au labo, le moment idéal c’était bien le jour où tous les maîtres pokémon du Bourg Palette étaient absents et où il n’y avait plus qu’un professeur sur deux.

 

L’homme en jogging gris arriva enfin au pied du grand escalier reliant la route au laboratoire. Il contempla les marches en gardant les mains dans les poches.

« J’suis arrivé... » Marmonna-t-il dans son kit mains libres, il attendit la réponse dans l’oreillette, elle ne vint pas. Son interlocuteur restait silencieux, il observait attentivement Jenny dans la pâture, encerclée par ses six pokémon, à quelques mètres de lui seulement.

« Patron ? » Finit par demander le type en jogging au bout d’un long moment sans réponse.

Jenny laissa son ronflex et son tortank devant l’éolienne du laboratoire, elle ordonna à Sweet de se percher sur le toit et commença à s’éloigner, escortée par Chu, Loki, Gali et Myria. Lorsqu’elle et ses quatre pokémon furent assez loin dans la pâture, l’homme invisible déclara dans son micro caché :

« On y va. »

L’homme en jogging commença à monter tranquillement les marches menant au laboratoire. Cornèbre le survola. Dans la pâture, tout restait calme, sauf que les pensionnaires du labo commencèrent à s’endormir les uns après les autres. Ronflex et Tortank regardèrent leurs colocataires s’allonger par terre pour dormir ou s’écrouler plus brutalement.

« Tort-an ! »

Ronflex se dit que c’était peut-être l’heure de la sieste, Tutur à ses côtés étaient dans tous ses états par contre. Un nuage de poudre bleue se répandit dans la prairie et chatouilla leurs narines, ronflex s’endormit aussitôt paisiblement. Tortank dressa ses canons en cherchant frénétiquement une cible sans la trouver et s’écroula avant d’avoir pu attaquer, lui aussi victimes des spores soporifiques.

Sweet assista à la scène, impuissant. Il décida de s’envoler pour aller chercher sa dresseuse. Il poussa un cri aigu, le cornèbre au grelot coque l’entendit et scruta la pâture, tous ces pokémon qui s’endormaient soudainement et massivement ce n’était pas normal. Cornèbre prit de l’altitude et changea de cap, il prit la direction du nord à toute vitesse.

L’homme en jogging arriva devant le bâtiment, il avait pour consigne de rentrer par l’entrée principale et de fouiller la partie résidentielle. Au même moment, Jenny qui était quasiment arrivée devant la porte de la maison de Al et Jacky se retourna en entendant son altaria crier. Il volait dans sa direction et semblait très agité. Jenny ne remarqua pas immédiatement que les autres pokémon de la pâture étaient endormis, ils étaient immobiles mais il n’y avait toujours aucun intrus à l’horizon.

« Qu’est-ce qu’il y a Sweet ?

- Alta !!!

- Rai rai ! » Gronda raichu en faisant grésiller ses joues. Il se mit à courir et à lancer des éclairs aux hasards. Comme dans une bataille navale à l’aveugle, il fit mouche.

« Niooon ! »

Un nuage de poudre dodo jaillit du néant au museau de Chu et il tomba au sol endormi. Jenny se précipita vers lui mais s’arrêta nette au bout de deux petites secondes, elle venait de comprendre que les ennemis étaient invisibles. Pourtant ce cri était celui d’un lampignon, elle en était certaine, or ce pokémon ne connaissait aucune technique pour se rendre invisible.

« Gali flammèches ! »

Le braségali lança de nombreuses flammèches au hasard. Les méninges de Jenny tournaient à plein régime, comment était-ce possible ? Même un pokémon spectre ne pouvait pas faire ça.

Au loin, la porte du laboratoire sous l’éolienne s’ouvrit, personne n’y entra ou n’en sortit. Soudain, devant les yeux hébétés de Jenny, apparurent dispersés dans la pâture une douzaine de pokémon inconnus au bataillon : un hypnomade, un blancoton, un roserade, un desséliande, un lampignon, un noadkoko, un blizzaroi et un lippoutou. Ce dernier ouvrit grand la bouche dans l’intention de chanter une berceuse pour endormir Jenny et ses alliés. Coup de chance pour la rouquine, Lockpin réagit en uppercut et fit taire le pokémon humanoïde. Braségali eut moins de chance et Hypnomade l’hypnotisa.

« Loki à la maison !!! » Hurla Jenny en sautant sur le dos de son pokémon. Dans un réflexe prodigieux, il agrippa les jambes de sa dresseuse resserrées autour de sa taille et courut jusqu’au labo en la portant, il pouvait aisément éviter ses ennemis, désormais visibles. Myria lança une attaque vent glace sur ceux qui tentaient de l’approcher pour l’endormir elle aussi, avant de s’élancer derrière sa dresseuse et Loki, elle ne pouvait pas tenir tête seule à ce groupe spécialiste du sommeil, le plus prudent était de suivre Jenny.

Sweet s’était envolé, bien décidé à aller chercher de l’aide, mais dans les airs, il fut pris en chasse par un corvaillus, un tropius et un rapasdepic sortis de nulle-part eux aussi. Malgré son niveau élevé, Sweet pouvait difficilement tenir tête à trois pokémon en même temps. Il fut ramené au sol de force par ce triumvirat et contraint de les affronter simultanément.

 

Dans son laboratoire, Florine, les bras chargés de documents à analyser, jeta un coup d’œil distrait vers l’escalier, la double porte vitrée au rez-de-chaussée venait de s’ouvrir, pourtant il n’y avait pas âme qui vive, ni humain, ni pokémon. Elle haussa un sourcil circonspect, si même la porte automatique commençait à déconner elle n’était pas sortie de l’auberge… Elle baissa les yeux sur ses papiers et les feuilleta debout devant son bureau. Deux hommes, un ténéfix, un mushana et un zoroark apparurent brutalement au milieu du laboratoire à deux mètres devant elle comme dans un mirage. Elle sursauta en laissant tomber la moitié de ses documents. Loyal, son aquali se mit à grogner.

« Bordel mais vous êtes qui vous ?!? Brailla la professeure avec sidération.

- Entrave. » Dit froidement le plus petit des deux hommes aux cheveux blonds très clairs.

Tous les muscles de Florine se contractèrent, elle poussa un cri de stupeur endolorie, elle était figée dans une position improbable, elle ne restait debout que par la force mystérieuse de l’entrave du ténéfix. Loyal se rua sur le spectre pour l’attaquer avec une technique morsure mais le ténéfix fut plus rapide que lui et esquiva.

« Hypnose. »

Le mushana utilisa son pouvoir pour endormir tour à tour Aquali puis Florine. La professeure s’écroula au sol cette fois. Le dresseur de ténéfix et de mushana s’avança d’un pas lent. Avec la pointe de sa chaussure, il souleva doucement le visage de Florine et fit basculer sa tête sur le côté.

« On se retrouve enfin Florine Léon… » Murmura-t-il avec une grimace sinistre.

Stoïque, son complice l’observa du coin de l’œil.

« Ça va aller patron ?

- Oui, répliqua froidement l’homme au ténéfix. Vous appliquez le plan à la lettre. Je vous rejoindrai quand j’en aurai fini avec elle.

- Bien patron… »

Une discrète lueur inquiète perçait dans les iris sombres du sbire, mais il n’osa pas poser de question ou faire de remarque supplémentaire. L’homme blond devait avoir à peu près le même âge que Florine. Il s’abaissa pour récupérer les pokéballs accrochées à la ceinture de Florine. Il les verrouilla toutes et les confia à son subalterne. Le type brun portait un grand sac à dos vide sur les épaules. Il fourra les pokéball de la professeure dedans et rafla rapidement toutes les autres pokéballs qui trainaient à vue dans le laboratoire, il ne devait pas trainer. Son chef ne bougeait pas, il se contentait de contempler en silence Florine allongée sur le sol, un horrible rictus au coin de la bouche, ses yeux bleus aussi pâles que ceux d’un momartik étaient animés d’une lueur sadique et sordide.

 

Lockpin déposa Jenny à côté de son ronflex et de son tortank endormis dans la pelouse. Elle voulut entrer dans le laboratoire avec son lockpin et Myria, mais un ectoplasma apparut brusquement et lui barra le passage. Lockpin ne pouvait rien faire contre un pokémon spectre, alors Myria se lança à l’assaut de fantôme. Jenny et Loki firent le tour de la maison, elle songea un instant à dévaler l’escalier de ciment et aller chercher de l’aide par la route. Finalement, elle entra par la porte principale avec son lockpin, elle avait son téléphone sur elle, si elle arrivait à se cloitrer dans une pièce, elle pourrait appeler les secours, et il fallait prévenir sa mère. Elle fonça directement à la bibliothèque face à l’entrée en s’enferma à l’intérieur. Elle sortit son téléphone de sa poche de blouse. Fry ou la police ? Elle décida en une seconde, ce serait la police.

« Lock-pin grrr ! » Grogna Loki.

Jenny se retourna vivement, un fouet liane claqua sur sa main. La douleur fut foudroyante et elle lâcha le smartphone. Une autre liane surgit de l’ombre et vola le téléphone. Le saquedeneu confia à son dresseur en jogging gris le précieux appareil. Jenny s’en voulait, elle s’était jetée dans la gueule du lougaroc sans même vérifier que personne n’était déjà entré dans la pièce, elle n’avait pas vu le bandit en train de fouiner dans la salle des archives. Loki se plaça devant Jenny, il n’osait pas attaquer pour autant. Il ne connaissait pratiquement que des attaques physiques, face à un saquedeneu, il risquait de se faire ligoter et son exploforce risquait de ravager la bibliothèque.

« Poudre dodo ! » Ordonna le type en jogging.

Loki réagit aussitôt, il utilisa un vœu-soin sur lui et sa dresseuse, ils ne s’endormiraient pas avec ça. L’intrus serra les dents, dans le plan initial la professeure était censée être seule au laboratoire, il ne s’attendait pas à devoir affronter une top-dresseuse, même s’il ne lui restait qu’un seul pokémon, alors que lui en avait encore quatre en réserve après saquedeneu. Jenny et le bandit se toisaient. Lui, semblait contrarié, mais aussi un peu perturbé par la jeunesse et la beauté de Jane. Elle, était beaucoup plus tendue que lui, mais elle essayait d’analyser la situation. Elle devait récupérer son téléphone pour appeler les secours et fuir, par la fenêtre ou la porte. Comme les deux humains se fixaient comme deux haydaims mâles avant leur joute, Jenny finit par le questionner d’une voix sévère ressemblant presque à celle de Florine.

« Qui êtes-vous ? Qu’est-ce que vous voulez ?

- Nous sommes venus pour les pokémon ! » Répondit le type en essayant de se donner un air menaçant. Jane n’était pas dupe, il n’avait pas envie de se battre. Le regard dur de la jeune fille ne plaisait pas au voyou, il voulait l’intimider.

« J’te conseille de rester tranquille et de coopérer si tu veux rester en seul morceau et retrouver ta maison en bon état !

- Chant canon ! »

L’attaque perturba saquedeneu et son maître, les étagères vrombirent sous l’effet des ondes sonores de lockpin. L’homme en jogging se dépêcha de sortir une nouvelle pokéball, il voulait préserver son saquedeneu car il avait encore besoin de lui, mais il n’eut pas le temps de lancer sa capsule. Un magirêve entra brusquement dans la pièce en passe-muraille et surprit Jenny et Loki. Face à un spectre, le lockpin était impuissant, ne restait plus que l’option fuite. Jenny se jeta sur la porte et la déverrouilla.

« Viens Loki ! »

A peine sortie de la pièce, un homme très mince et très grand planqué derrière la porte l’attrapa au passage.

« Kyah !!! »

Loki essaya de le frapper pour récupérer sa dresseuse, mais le saquedeneu enroula des lianes autour de ses pieds et le fit tomber à plat ventre, puis Magirêve l’assomma avec une puissante rafale psy.

 

« Patron ! On a chopé la fille ! »

Privée de tous ses pokémon, Jenny ne pouvait plus se défendre. Le saquedeneu la maintenait fermement, escorté par le type immense et le voleur en jogging gris, ils trainèrent Jane jusqu’au laboratoire.

« Maman !!! » S’écria la rouquine en découvrant le corps inerte de sa mère sur le sol.

Affolée, elle scruta le reste du laboratoire. Un type brun à l’allure marginale était en train de fouiller les placards, il ramassait les pokéballs qu’il trouvait et les jetaient dans son sac. Un homme blond aux yeux très clairs se tenait debout à côté de Florine, il avait du mal à détacher son regard rempli de haine de la professeure. Il était entouré de son ténéfix, de mushana et d’un zoroark. Jenny comprit en le voyant que c’était grâce à lui et ses illusions que les assaillants étaient passés inaperçus.

« En voilà une belle jeune fille, encore plus jolie que sa mère. » Minauda le "patron" en pinçant le menton de Jenny. La jeune fille essaya de dégager son visage, mais il la serrait tellement fort entre ses doigts qu’elle n’y arriva pas.

« Lâchez-moi espèce de raclure ! Gronda Jenny dans un rugissement digne de sa sœur et de sa mère.

- Ne t’en fais pas, tu ne m’intéresses pas, c’est ta mère que je veux. »

Jenny tentait de jouer les fières à bras, elle pensait avoir à faire à de vulgaires voleurs de pokémon, mais elle pâlit en voyant le sourire en coin terrifiant de ce quadragénaire aux cheveux presque blancs. Elle commençait à redouter de quelque chose de pire.

« Emmenez-la dans le salon, faites en ce que vous voulez mais ne la laissez pas s’échapper. Et maintenant dégagez.

- O… Ok patron. » Répondit le plus grand des sbires, apparemment perturbé par la déclaration de son chef. Il leur avait explicitement ordonné de le laisser seul dans le laboratoire avec Florine, il en avait besoin pour mettre en place sa petite mise en scène. Jenny ignorait de quoi il retournait exactement, mais son instinct et ses capacités d’analyse allumaient des alarmes dans tous les sens dans son esprit. Une angoisse sourde cognait dans sa poitrine, jamais elle n’avait ressenti une telle peur de toute sa vie. Ce type au regard glacé en voulait à la vie de sa mère.

Le cri strident de Jenny retentit dans toute la maison, tel un hurlement de nosferapti et déchira les tympans des deux sbires qui l’entraînaient de force avec eux dans le salon.

« Non !!! Maman !!! Qu’est-ce que vous allez lui faire ?!? Maman !!! Maman !!! »

L’un des voleurs claqua violemment la porte du salon pour ne plus importuner son patron avec ces cris hystériques. Le quatrième larron resté dans le laboratoire avec le leader fila vers l’éolienne et emprunta l’escalier en colimaçon. Dans sa tête, la même phrase tournait en boucle comme un soutra : "Applique le plan et ne pense à rien d’autre Yves."

Ne restait plus dans le laboratoire que le chef de la bande en compagnie de ses trois pokémon. Il sortit deux autres pokéballs qu’il dégoupilla.

Dans le salon, Jenny hurlait, prisonnière du saquedeneu appartenant au type en jogging. Son complice, plus grand et surtout plus âgé que lui, lança :

« On ne doit pas trainer. Je vais l’endormir, mais surtout tu continues de la ligoter. Profites-en pour fouiller la maison en la gardant avec toi, ne la laisse pas sans surveillance, on ne sait jamais.

- Eh c’est pas toi le boss ! Râla le jeune en jogging.

- Ce n’est pas le moment Liam ! Répliqua l’autre voleur. On a moins de trente minutes devant nous, cette gamine devait pas être là et on doit s’en tenir au plan de Jérôme !

- Il a dit qu’on pouvait en faire ce qu’on voulait non ? »

La grande perche sans nom comprit immédiatement où son collègue voulait en venir en voyant naître la lueur lubrique dans son regard. Il jeta ensuite un bref coup d’œil à Jenny. Il était inquiet, pas pour elle mais à cause d’elle, visiblement sa présence leur posait problème. Lui et l’autre brun du laboratoire étaient en train de monter en pression de minute en minute, ils avaient hâte de partir. C’était flagrant, même pour l’esprit affolé de Jenny. Le plus jeune des voleurs au contraire semblait détendu, il pensait qu’il avait la partie facile du plan. Son complice ne trouvait pas cela très malin, mais il fallait faire avec, le temps pressait.

« Et pis t’arriveras pas à l’endormir, elle est protégé par le vœu-soin de son lockpin, reprit le dénommé Liam.

- Je n’ai pas d’temps à perdre avec ça, grommela son acolyte en prenant la porte. Fais pas de connerie par pitié, tiens t’en au plan ! »

Et le grand type fila vers le jardin en détachant son gros sac à dos.

Avec ces brefs échanges, Jenny avait réussi à comprendre quelques bricoles. Le chef du groupe était le blond au regard mauvais qui avait séquestré sa mère, les trois autres lui obéissaient. A en voir leurs grands sacs vides, ils étaient effectivement là pour voler les pokéballs. Ce qu’elle ignorait toujours, c’était les détails précis du plan…

Yves, l’homme brun aux cheveux longs un peu plus âgé que les autres était un spécialiste de l’hypnose, il avait surtout avec lui des pokémon psy et spectre. Il était chargé de voler les pokéballs stockés dans la tour de l’éolienne. Le grand brun maigrelet sentait fort la terre et les pokémon plantes, sa spécialité. Lui, il devait voler les œufs rares dans la couveuse, c’était le seul à avoir des connaissances dans ce domaine. Le dernier type, avec son jogging gris, son bouc et ses cheveux gras était le plus jeune. Liam devait piller la partie résidentielle de la maison. De part cette affectation, il s’était retrouvé à surveiller Jenny, son saquedeneu l’aidait bien pour cette mission, il la saucissonnait fermement des épaules aux mollets, elle pouvait à peine trotter.

Deux choses préoccupaient Jenny plus que le reste, d’abord le fait qu’elle allait perdre ses propres pokémon, cette seule pensée la dévorait de l’intérieur. Un mélange de peur et de colère agitait les neurones et les entrailles de Jenny. Elle essayait de garder son sang-froid pour pouvoir réfléchir, mais c’était extrêmement difficile. Elle aurait aimé trouver une solution mais laquelle ? Elle n’avait plus ses pokémon... Ensuite, son esprit lui renvoyait sans cesse à l’image de sa mère allongée sur le sol au pied de ce type sinistre. Si les trois sous-fifres étaient clairement des voleurs de pokémon, pressés et stressés, qui était leur chef et pourquoi s’était-il enfermé avec sa mère ?

Le type en jogging s’approcha de Jenny et l’extirpa de ses pensées.

« Alors ma grande… Puisqu’on est juste tous les deux on va discuter un peu. » Déclara le voleur en regardant Jenny avec un rictus de dominant peu engageant.

« Si tu m’évites des efforts inutiles, je serai gentil. Où sont les pokéballs, les bijoux et l’argent liquide ?

- Va te faire voir, maugréa Jenny.

- Mauvaise réponse. »

L’homme gifla Jenny avec force, son pokémon qui la maintenait en détention eut un mouvement de recul à cause du choc. Jenny avait mal, mais elle était plus déterminée que jamais à ne rien dire. La douleur ne l’effrayait pas, pas autant que de perdre ses amis pokémon et sa mère en tout cas. Contrairement à ses complices pressés par le temps et méthodiques, ce type-là ne réalisait pas vraiment où il se trouvait. Le Bourg Palette avait beau être un petit village à l’aspect pittoresque en surface, il était le lieu de résidence principal de deux professeurs Pokémon et de quatre maîtres pokémon. Malgré la réunion au Plateau Indigo, quelqu’un allait forcément venir les délivrer elle et sa mère, peut-être que Sweet avait réussi à s’enfuir, il fallait juste tenir bon jusque-là. Jenny se raccrochait à cet espoir fragile lorsque la deuxième gifle s’abattit sur son autre joue.

« Tu vas répondre oui ou merde ? Il faut que je frappe plus fort ? Ou peut-être que tu préfères que je passe à autre chose ? Je sais faire chanter les petits pijako dans ton genre...»

Jenny capta à la seconde le changement d’ambiance : ce regard salace, cette main indécente posée sur son entrejambe, son sourire vicieux et tordu, le sbire commençait à ressembler à un tauros en rut. Cette fois Jenny sentit le dégoût lui assaillir le ventre.

"Oh non pas ça..." Songea l’adolescente. Il était hors de question que ce type répugnant lui fasse quoi que ce soit capable de ruiner à vie son équilibre mental et de détruire son plaisir. Elle devait se protéger, trouver une échappatoire.

« Alors ma beauté ?

- Y a rien à voler ici, tout est dans le labo ! Clama Jenny. Qu’est-ce que vous allez faire à ma mère ?

- Aucune idée, enfin si, à mon avis Jérôme va lui faire ce que j’ai envie de faire avec toi. D’ailleurs puisqu’on a un peu de temps devant nous... »

Le délinquant indiqua à son saquedeneu de libérer le bas du corps de Jenny. C’était une mauvaise idée, elle commença à se débattre suffisamment fort pour tenir tête au saquedeneu et à donner des coups de pieds vers l’avant, son agresseur ne pouvait pas s’approcher sans risquer de se prendre une savate dans les valseuses.

« Aller ! Laisse-toi faire si tu n’veux pas que je te fasse mal !

- Ne m’approche pas espèce de groret dégueulasse !!! »

Elle trébucha et saquedeneu en profita pour lui nouer à nouveau les chevilles en attendant qu’elle se calme. Le dresseur du saquedeneu sortit un smartphone de sa poche et l’agita sous le nez de Jenny.

« Tu sais, quand on vous a vu débarquer toi et ta sœur, le patron s’est renseigné sur vous. On a bien apprécié ton petit strip-tease sur scène dans l’Archipel Orange... Tu m’feras pas croire que t’es du genre farouche.

- Tu ne connais pas l’expression "on ne touche qu’avec les yeux" ?

- Ouais c’est ça... Cracha le sale type avec une grimace vicieuse. Je suis galant, alors je te laisse le choix : ou tu te désapes toute seule, ou et je me débrouille avec mes pokémon. C’est toi qui vois. »

Il dégoupilla deux nouvelles pokéballs et libéra un mangriff maigre et un élecprint. Il demanda ensuite à son saquedeneu de libérer Jenny. Le pokémon plante fixa son dresseur avec une expression laissant clairement sous-entendre qu’il trouvait cette idée stupide, son dresseur prenait trop de risques. Jenny était tétanisée, même une fois libérée de l’étreinte de saquedeneu. Le bandit avait l’air d’attendre une réponse, un geste, quelque chose. Elle eut malgré tout un peu de temps pour cogiter. Si elle tentait de s’échapper ou de se défendre, élecsprint l’électrocuterait ou saquedeneu la ligoterait à nouveau. Le plus sage était sans doute d’essayer de négocier, Jenny était douée pour la manipulation, mais elle ne savait pas comment s’y prendre avec un délinquant. Elle joua la seule carte capable de bloquer une partie des pervers lorgnant sur elle.

« Je suis mineure... Dit-elle en se frottant nerveusement le bras.

- Je suis au courant, mais on ne dirait pas quand on te voit... »

Le type avait l’air abruti, surtout en comparaison de ses complices, mais les engrenages encrassés de son esprit finirent par s’activer. Il avait déjà fait de la prison pour vol de pokémon, ça ne lui faisait pas peur d’y retourner, en revanche il se souvenait du sort réservé par ses codétenus à ceux qui touchaient les enfants. Il eut un frisson d’effroi, ces mauvais souvenirs réussirent à chasser la plupart de ses idées malsaines. Il essaya malgré tout de cacher son trouble à Jenny pour garder son ascendant sur elle. Pédophile non, machiste oui, elle devait comprendre qu’elle était à sa merci.

« Ok ok. Je vais faire mon gentleman alors, se railla le sale type. Si tu me refais ton petit numéro de l’île Citrus rien que pour moi, je te promets de ne pas te toucher. »

 

Dans le laboratoire, Florine commençait à se tortiller sur le sol.

« Ça y est ? Tu te réveilles enfin ? » Lança une voix masculine impatiente et clairement hostile. Florine avait la tête lourde et sa vision était encore floue. Elle se redressa lentement, elle avait l’impression de peser une tonne, tous ses muscles étaient encore engourdis par l’entrave. Elle n’avait pas la force de se remettre debout. Lorsqu’elle ouvrit complètement les yeux, elle ne savait plus où elle était. Etait-ce un effet de l’entrave ou de l’hypnose ? Ce qu’elle voyait n’était pas cohérent. Elle devrait être dans son laboratoire, elle en était certaine, mais à la place elle était assise sur le sable d’une plage à marée basse. Elle apercevait les toits d’une ville au loin et deux phares dressés, un ancien et un récent. Elle grimaça en regardant autour d’elle. Il y avait aussi d’étranges cristaux dressés en palissade sur le sable et elle entendait un son étrange, comme le chant d’un zarbi… La plage était déserte ou presque, il n’y avait en face d’elle qu’un homme aux cheveux et aux yeux très clairs accompagné d’un ténéfix. Elle leva les yeux pour le regarder. Malgré son physique angélique, l’expression de son visage n’avait absolument rien de sympathique.

« Vous êtes qui ? Lâcha Florine en fronçant les sourcils.

- Tu ne me reconnais pas ? »

L’homme perdit immédiatement son sourire malfaisant et ses tremblements de rage redoublèrent. Son visage prit une teinte carmin, sa colère transpirait par chacun des pores de sa peau, il était clairement très irrité que Florine ne le reconnaisse pas. La professeure cherchait dans sa mémoire, elle était plutôt physionomiste mais ce visage ne lui semblait pas familier. Et c’était quoi ce décor improbable ? Une hallucination certainement… Son esprit changea de tactique : qui pouvait lui en vouloir au point de l’attaquer chez elle avec une telle préméditation ? La Team Rocket ? Elle n’existait plus. Elle remontait le cours du temps, mais pas assez vite au goût de son agresseur, il lui donna une violente gifle à la limite du coup de poing, pourtant il ne voulait pas abimer le visage de Florine. Finalement, malgré le stress, un souvenir lointain émergea dans l’esprit de la professeure.

« La plage d’Oliville…

- Tu retrouves la mémoire… Ricana le sale type, lui, retrouvait le sourire.

- T’es le gamin qui…

- Que t’as humilié ouais ! Jérôme Vecken ! Retiens mon nom espèce de garce ! »

Il la frappa à nouveau et Florine, égale à elle-même, dissimula sa peur derrière la rage et le mépris.

« Bon sang mais on était gosses ! Passe à autre chose et casse-toi !

- J’attends ce moment depuis si longtemps que je ne sais pas par où commencer… » Jubilais son agresseur, il passait trop facilement de la joie à la colère pour être sain d’esprit.

« Oh si tu savais à quel point je te hais... Tu te souviens de notre première rencontre ? J’espère que ça va te revenir, moi je m’en souviens comme si c’était hier. »

Il désigna le décor d’un geste ample. Le type monologuait comme un méchant dans un film, aux yeux de Florine il avait l’air totalement zinzin, dangereux mais zinzin. Elle porta discrètement la main à sa ceinture, bien évidemment comme elle le redoutait on lui avait retiré ses pokéballs. Yves avait également raflé toutes les pokéballs qui trainaient dans le laboratoire, il ne restait plus aucun pokémon disponible dans la salle, il avait juste omis d’inspecter attentivement la mezzanine puisqu’elle servait de chambre d’enfant.

Lentement, sans que Florine n’en prenne réellement conscience, son corps changea, tout comme celui de son agresseur. Ils rajeunissaient tous les deux à vue d’œil. En quelques secondes, elle avait retrouvé sa jupe à carreaux bleue et sa petite chemise blanche, de nouveau ample car il n’y avait plus aucune poitrine pour exercer une pression sur les boutons. Le petit blond en face d’elle avait de nouveau neuf ans. Là, elle le reconnaissait enfin, même si son souvenir était lointain. Il faisait partie d’une bande de gamins issue des quartiers pauvres, lui, son grand frère et un de leurs copains rêvaient de rejoindre la Team Rocket à l’époque.

« J’avais à peine neuf ans, je devais cambrioler l’arène d’Oliville, mon frère affrontait le tien pour faire diversion. Je me suis enfui avec les badges, mais tu m’as rattrapé. Sous prétexte de les récupérer tu m’as déshabillé, j’étais immobilisé et tu m’as foutu à poil en plein hiver, à la vue de tous… Tu devais déjà être une sacrée tordue à l’époque pour avoir des idées pareilles. J’ai attendu ma vengeance si longtemps… Aujourd’hui je la tiens.

- T’es un malade ! Un vrai malade ! Gronda Florine, comme chez Jessy, la colère était toujours plus puissante que la peur, même dans les moments les plus critiques.

- T’as pas compris dans quelle position t’étais je crois bien. » Il pinça le visage de Florine entre ses mains pour la regarder plus attentivement. Elle voulut se débattre mais ténéfix lança une nouvelle entrave et la paralysa dans la souffrance.

« Tu as détruit ma vie, alors je vais détruire la tienne. »

Une nouvelle angoisse jaillit dans le cœur de Florine, Jenny était au laboratoire, elle risquait d’être blessée elle aussi. Et Robin ? Seb était bien parti avec Robin chez ses parents ? L’espace d’un instant, elle supplia une puissance mystique en laquelle elle n’avait jamais cru de protéger ses enfants de ce malade mental en face d’elle.

« J’ai pas détruit ta vie, on ne s’est pas vu depuis trente ans !

- Tu ne m’as pas vu, mais moi je t’ai vu et j’ai vu ta famille aussi… Tes frères ont dissous la Team Rocket, j’ai perdu Allan et Bruno par votre faute à vous les Léon. Mais tout à commencer par toi, à cause de toi… »

Le petit garçon se jeta sur la très jeune Florine, il s’assit sur le bas ventre de son ennemie et la chevaucha comme deux gamins en train de se bagarrer dans une cour d’école. Il se pencha en avant pour que son visage soit aussi proche que possible de celui de Florine. La professeure retombée en enfance pouvait sentir son haleine, elle pouvait distinguer chaque nuance de bleu et de gris dans ses yeux glacés.

« Cette humiliation… J’y pense tous les jours depuis trente ans… »

Il approcha encore sa tête et souffla dans le cou de Florine. Elle sentit le bout du nez de Jérôme frôler sa peau, sans l’entrave de ténéfix, elle en aurait frissonné de répugnance. Le caïd humait le parfum de Florine, il prit une mèche de ses cheveux roux entre ses doigts et les entortilla avant d’enfin se pencher à l’oreille de Florine.

« Je veux ma revanche... »

- T’es complètement fou… Souffla Florine avec une grimace apeurée encore pleine de dédain.

- C’est de ta faute !!! »

Il lui donna un coup de poing dans le ventre. Florine cria de douleur en s’étranglant à moitié. Soudain, le décor changea, ils étaient dans les cales d’un navire, c’était La Marina. Florine était plus âgée, Jérôme aussi, mais ça ne correspondait ni à leurs âges réels, ni à celui qu’ils avaient lorsqu’ils s’étaient affrontés sur le bateau les conduisant à Hoenn, ils avaient plutôt l’allure de jeunes gens de dix-huit ou vingt ans.

Jérôme lorgna sur la boutonnière du décolleté de Florine, partagé entre une espèce de désir charnel et une pulsion de meurtre, entre le dégoût de cette femme qu’il haïssait de tout son être et une attirance physique puissante. Il se redressa, un peu calmé, mais ce n’était que temporaire ou superficiel. Il ne tenait pas en place, signe évocateur de son esprit perturbé. Il fit un signe à son zoroark invisible aux yeux de Florine. Le maître des illusions fit apparaître deux zarbi dans les cales du Marina.

« J’ai mis du temps à les trouver et à les entrainer ! Déclara fièrement Jérôme entre ses deux zarbi représentant les lettres H et D. Mais tout ça en valait la peine, ils décuplent les pouvoir de zoroark et leur barrière de cristal est indestructible. Personne ne pourra venir t’aider, toi et moi nous sommes enfin seuls pour régler nos comptes… »

Il la pointa du doigt et une force mystique souleva Florine, elle était comme suspendue dans les airs :

« Ténéfix, combo-griffe ! »

Le pokémon lacéra les vêtements jusqu’à atteindre la peau de Florine. La professeure poussa un petit couinement déchiré en sentant les multiples coupures, pour l’instant superficielles, sur ses bras. Sa blouse redevint visible et tomba en lambeaux à ses pieds. Sa chemise à moitié déchirée laissait apparaitre dans un étroit soutien-gorge mauve sa poitrine encore ferme malgré ses deux grossesses.

« Encore une fois !

- Téné ! »

Cette fois la couche de vêtements était trop fine pour protéger efficacement la peau, le cri de douleur de Florine fut beaucoup plus strident. Un petit filet de sang se mit à couler depuis son omoplate le long du galbe de ses seins.

Florine ferma les yeux, essayant d’encaisser son supplice. Une larme de rage, de peur, de désespoir et de haine coula le long de la joue droite de Florine. Elle finit par rouvrir les yeux, ses iris vert luisant de colère.

« Je te tuerai pour ça… » Murmura t’elle d’une voix caverneuse. Le fou sadique s’approcha d’elle, il agrandit son sourire, un sourire dément.

« Oh non, tu n’en auras pas l’occasion… »

Jérôme et Florine avaient retrouvés leur apparence normale d’adultes, mais le décor une nouvelle fois changea pour revenir à Oliville. Jérôme Vecken caressa les seins de la professeure en suivant le tracé des gouttes de sang. Il retira son doigt et le lécha avant d’ajouter de sa voix cristalline et cynique.

« Pour la bonne et simple raison que c’est moi qui te tuerai quand j’en aurai fini avec toi… »


Kyle Chen se trouvait dans le pré de sa ferme, à proximité du petit étang où ses pokémon allaient s’abreuver. Il se levait souvent avant l’aube pour profiter du silence. Il aimait profondément sa femme, depuis l’enfance, elle était sa meilleure amie et sa raison de vivre, mais elle parlait trop. Vraiment trop.

A genoux devant un jeune carapuce, il examinait sa patte avant droite marquée par une coupure profonde, elle changeait le bleu pâle de la peau du pokémon en un rouge sang sombre et brunissant. Le pokémon grimaçait à chaque passage des doigts de l’éleveur, sa plaie l’élançait affreusement. Les yeux froids et gris de Kyle étaient rivés sur le bras du carapuce, un imperceptible froncement de sourcils laissa entrevoir son inquiétude.

« Ta plaie s’est encore infectée… Je vais devoir t’emmener au Centre Pokémon, l’infirmière Joëlle saura mieux que nous comment te soigner.

- Cara cara…

- Désolé, mais c’est ça ou tu vas perdre ton bras. Et aucun dresseur ne voudra d’un carapuce manchot.

- Cara… »

Sans sourire, Kyle caressa le sommet du crâne du carapuce pour le détendre. Kyle éprouvait de l’affection pour les pokémon, il ne savait juste pas comment leur montrer autrement qu’en les nourrissant et en les protégeant du danger. Un croassement familier lui parvint aux oreilles. Kyle relâcha la patte de Carapuce et leva les yeux au ciel.

Il vit un éclair rouge et une trainée de flammes traverser les nuages. Une petite tache noire grandissait peu à peu en se rapprochant du sol. Le tintement de son grelot coque autour de son cou se faisait de plus en plus net aux oreilles de Kyle. L’éleveur regarda son pokémon se poser à quelques mètres de lui, il perçut aussitôt la lueur d’angoisse dans les yeux de son cornèbre.

« Crôa crôa !

- Qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce que tu as vu ?

­- Crôa crôa crôa !

- Un problème au laboratoire ?

­- Crôa ! »

Kyle plissa les yeux, l’attitude de son pokémon n’augurait rien de bon, il l'avait rarement vu aussi affolé. La voix de Kyle, si froide et morne habituellement, fut percée d’une pointe de colère.

« Cornèbre… Est-ce que ça a quelque chose à voir avec la Team Rocket ?

- Crôa crôa crôa ! » (Mon instinct me dit que oui !)

Kyle avait compris. Cornèbre était son partenaire depuis presque trente ans maintenant, ils se connaissaient comme deux frères, en fait non : Kyle connaissait mieux Cornèbre qu’il ne connaissait son frère Kévin. Kyle se retourna vers sa maison, par la fenêtre de la cuisine il vit Aline préparer le petit-déjeuner des pokémon. Souriante comme toujours, elle avait l’air de chantonner tout en hachant fruits et légumes. Kyle reporta alors son attention vers Cornèbre.

« Je refuse de mettre la vie d’Aline en danger une fois de plus, elle et moi on a assez donné contre ces salopards…

- Crôa crôa crôa ! (Mais Florine risque de mourir !) »

Kyle le regarda de son air sévère avant de sortir son téléphone de sa poche.

 

Jessy et Fry survolaient la pâture du laboratoire sur le dos d’Etna. Fry mit une dizaine de secondes à comprendre ce qui clochait, mais Jessy, elle, le remarqua tout de suite. Les pokémon nocturnes étaient toujours sortis et dormaient, tout comme ceux de Jenny. Jessica reconnut immédiatement Gali, Chu, Tutur et Myria affalés par terre. Les seuls pokémon éveillés, Jessy ne les avait jamais vus. Elle ordonna à Etna de descendre vers le groupe de pokémon plante.

« Lance-flamme ! Balaye-moi cette racaille ! »

Fry se cramponna encore plus fermement aux hanches de Jessy, la dracaufeu fondit en piquet vers le sol, elle cracha son puissant jet de flammes sans jamais refermé sa gueule elle fila sur la plaine en carbonisant tour à tour roserade, blizzaroi, noadkoko, lampignon et desséliande. Seul le tropius était trop loin, le pokémon s’agitait nerveusement. Près de lui, Sweet était évanoui sur le sol, son corps inerte était encadré par un corvaillus et un rapasdepic.

Jessy compta rapidement les pokémon étrangers autour d’eux, elle en voyait dix, au mieux il y avait donc deux dresseurs, mais elle devinait aisément qu’il y en avait plus. Etna se posa au milieu de la pâture en crachant un dernier lance-flamme sur le lippoutou, perturbé par l’arrivée imprévue de dracaufeu. Jessy et Fry descendirent aussitôt de son dos, un hypnomade à proximité tenta une attaque hypnose, mais Etna fut plus rapide que lui, elle utilisa une déflagration et il tomba K.O. comme ses complices de type plante. Le blancoton fuyait en direction des trois pokémon vol posés près de la couveuse. Jessy allait se précipiter vers le laboratoire à son tour, mais Fry la saisit juste à temps par le poignet pour l’empêcher de filer.

« Arrête ! Cria-t-il.

- Il faut retrouver Jenny ! Protesta Jessy en tirant férocement sur son bras.

- On ne se sépare pas ! Tu ne sais pas qui ils sont ni combien ils sont ! C’est trop dangereux ! Il faut sécuriser le périmètre ! »

Dans la forêt de Verchamps, Fry avait eu un aperçu de la capacité de Jessy à foncer tête baissée de manière suicidaire, il ne voulait pas revivre ça. Jessy exorbita les yeux, mais elle ne regardait pas Fry : elle regardait derrière lui. Un énorme ectoplasma était apparu soudainement dans un halo de lumière mauve sinistre.

« Non !!! » Hurla-t-elle en tirant Fry vers elle de toutes ses forces. Elle bascula en arrière en l’emportant avec elle, ils évitèrent de justesse l’ombre nocturne qui leur était destinée, à la place l’attaque frappa Etna dans le dos. La dracaufeu fit volte-face. Coincée sous le corps de Fry, Jessy lui agrippa les cheveux et appuya fermement sur sa tête pour l’empêcher de se redresser tandis qu’Etna crachait son puissant lance-flamme par-dessus-eux pour calciner l’ectoplasma. Le pokémon spectre recula de plusieurs mètres pour s’éloigner du brasier. A tâtons, Fry décrocha deux pokéballs de sa ceinture et les dégoupilla. Katy et Marvy en sortirent. Dès que Jessy relâcha la pression sur son crâne, il bascula sur le côté pour la libérer, elle se releva immédiatement en dégainant la copainball de son aquali. Fry contrairement à elle regarda tout autour de lui avant de se remettre debout. A peine avait-il aperçu l’ectoplasma, que son scarhino s’était élancé contre lui. Le spectre évita la tranche-nuit de l’insecte mais il ne put échapper à la fatal-foudre de Katy. La luxray était dans un état de fureur extrême : ce monstre avait osé attaquer son Fry adoré. L’attaque électrique mit K.O. l’ectoplasma qui se dissipa dans un nuage de fumée violacée.

« Médie ! Cherche Jane ! Utilise ton flair ! Fry, il faut réveiller les pokémon Jane !

- Ok ! John j’ai besoin de ton aide ! Cria Fry en libérant son ramboum. Mégaphone ! Réveille tout le monde ! »

L’attaque était désagréable pour tous les pokémon, mais elle eut le mérite d’extirper du sommeil la plupart des pokémon du laboratoire et ceux de Jenny, sauf ronflex. Jessy libéra Pit pendant qu’aquali reniflait le sol. Il y avait trop d’odeurs et celle de Jenny était ténue mais partout, impossible pour Médie de suivre sa trace.

Un type sortit par la porte de l’éolienne avec un gros sac à dos rempli de pokéballs. Lorsqu’il vit son lippoutou et son hypnomade gisant à terre devant les deux adolescents et leurs pokémon, il fonça tête baissée vers l’autre côté du bâtiment pour chevaucher son corvaillus.

« Rai rai ! » Grogna Pit qui le vit en premier pour signaler sa présence.

« Eh !!! » Brailla Jessy en frappant dans le bras de Fry pour qu’il la suive. Les deux dresseurs, Pit, Médie, Marvy et Katy poursuivirent le voleur de pokémon, quand un magirêve apparut devant eux pour leur barrer le passage avec une vague psy qu’il doubla avec feu ensorcelé.

« On décampe ! » Hurla le bandit à son corvaillus. En entendant ce cri, le dresseur de pokémon plante sortit précipitamment de la couveuse. Il vit son complice s’envoler. Katy et Pit tentèrent d’électrocuter le corvaillus mais ils étaient trop loin. Jessy vociféra à plein poumons.

« Etna ne le laisse pas s’échapper !!!

- Rrraaaawww ! »

La dracaufeu s’envola à la poursuite de corvaillus et de son maître. Aquali réussit enfin à abattre magirêve et Fry et Jessy déboulèrent devant l’autre voleur en train de grimper sur le dos de tropius. Il avait encore la pokéball de son blancoton qu’il venait de rappeler dans la main.

« Mégacorne ! » Ordonna Fry. Son scarhino frappa le tropius avec une telle force qu’il le fit tomber à la renverse lourdement et le mit K.O. Son dresseur chuta de sa croupe et le bas de son corps se retrouva bloqué par le lourd pokémon. Son sac à dos chargé d’œufs toujours accroché à ses épaules lui écrasait les omoplates et la nuque. Le rapasdepic affolé s’envola sans demander son reste et sans se préoccuper une seule seconde de son dresseur Liam.

Chu, enfin réveillé, accourut vers le petit groupe accompagné de Gali et de Myria, Jessy accroupie était en train de tirer violemment sur les cheveux du voleur pour le forcer à la regarder.

« Où sont ma sœur et ma mère connard ?!?

- La... La prof est au labo, la gamine au salon... »

Jessy lui écrasa la tête et se précipita vers la maison, mais elle fut moins rapide que les deux raichus. Chu n’eut pas la patience d’atteindre la porte, il s’arrêta devant la fenêtre du salon et fit exploser la vitre avec un tonnerre.

« Rai CHUUUU !

- Oh merde ! » Jura Fry en voyant les débris de verre voler dans tous les sens et Jessy se figer devant le rebord de la bouche béante de la grande baie. Un cri strident de Jenny s’éleva du salon, immédiatement suivi d’un :

« C’est quoi ce bordel ?!? »

Une tornade de poils jaune et brun jaillit dans le salon au milieu des éclats de verre brisé. Pit et Chu grognèrent et firent grésiller leurs joues pour impressionner le voyou et ses trois pokémon. L’homme au jogging avait attrapé Jenny et la maintenait devant lui comme un bouclier, en bloquant ses mains avec son bras gauche et en appuyant sur sa trachée avec le bras droit. Il était coincé dans l’angle de la pièce. Saquedeneu, Mangriff et Elecsprint firent face aux raichus en ligne comme ils purent, gênés par les canapés.

Jessy et Fry s’engouffraient dans la pièce par la fenêtre brisée, Fry aidé par son scarhino pour éviter de se couper, Jessy s’en fichait, ses mitaines la protégeaient en partie et elle était trop inquiète pour sa sœur. Le dernier voleur était tétanisé, il vit en arrière-plan le corvaillus de son complice, le plumage roussi, s’écraser sur le sol, avec son dresseur sur le dos. Le type hurla à s’arracher les cordes vocales, il s’était brisé les deux jambes dans la chute. Son sac à dos s’ouvrit et une centaine de pokéballs roulèrent dans la pâture. Liam fut extirpé de sa tétanie par le rugissement de Jessy.

« Lâche ma sœur espèce de tordu !!! »

Marvy déboula à son tour, il n’y avait presque plus de place dans le petit salon. Les trois pokémon du voyou grognèrent avant qu’il n’ait le temps de répondre, alors Fry lança d’une voix menaçante.

« T’as pas entendu la demoiselle ? Lâche-la !

- N... Non ! Balbutia le type un peu paumé. Et j’vais pas laisser des gamins me parler sur ce ton ! Saquedeneu poudre dodo ! »

Les raichu tentèrent de le paralyser avec une cage éclair mais ça n’avait quasiment pas d’effet sur le pokémon plante, en revanche Scarhino était résistant à la poudre dodo et Fry réagit au quart de tour.

« Casse-brique ! »

Marvy frappa le corps mou de saquedeneu puis l’attrapa et le jeta violemment par la fenêtre cassée.

« Je suis Fry Morgan, champion de la Ligue Orange pauvre crétin ! On t’a dit de la lâcher !

- Pit débarrasse toi de ce mangriff ! » Cria Jessy quasiment en même temps que Fry. Chu vint prêter main forte à son frère, ils foudroyèrent le mangriff avec une double attaque tonnerre. Elecsprint tenta de faire office de para-tonnerre mais il n’y parvint pas à temps. Katy bondit à son tour par l’ouverture béante et grimpa sur le canapé pour grogner sur élecsprint et l’impressionner.

L’intrus avait encore deux combattants en réserve mais il ne pouvait pas attraper ses pokéballs car ses deux bras étaient occupés à tenir Jenny. Il faillit la libérer mais réalisa juste à temps que c’était sa seule monnaie d’échange.

« Laissez-moi partir et je la libère ! Balbutia le type.

- Non ! Gronda Jessy. Libère la et on te laissera partir avec tes deux jambes, pt’être encore une dent ou deux et un demi bras.

- Tu crois que tu me fais peur ? » Cracha-t-il en se décidant à enlever son bras de la gorge de Jenny pour attraper une pokéball. Sans pression sur ses cordes vocales, Jenny put enfin murmurer sans quitter sa sœur des yeux.

« Si tu n’as pas peur d’eux, c’est que tu es vraiment débile... »

La réflexion perturba Liam un bref instant.

« Marvy mégacorne ! » Cria Fry en profitant de ce flottement. Scarhino démolit l’élecsprint. Le canidé profita de son dernier instant de lucidité pour électrocuter le pokémon insecte, mais il en fallait plus pour mettre Marvy à terre.

Un léopardus sortit de la pokéball lancée par Liam. Aussitôt Pit et Chu lancèrent des éclairs sur lui et le bandit fut obligé de se dépêcher de lancer sa dernière pokéball contenant un malosse. Luxray se fit un plaisir de se ruer sur le pokémon feu et lui montrer qu’elle mordait plus fort que lui.

« Souplesse ! » Cria Jessy.

Léopardus était complètement dépassé par la situation, en quelques secondes et quatre attaques, il fut vaincu par les frères raichus. Katy maintenait en respect le malosse en l’écrasant de tout son poids et en lui mordant le cou, elle sentait son pouls sous ses canines, si elle le voulait, elle pouvait même le tuer plutôt que le mettre K.O. Jenny sentit le type trembler dans son dos, il la maintenait encore plus fermement. Il n’avait plus de pokémon, il était vulnérable désormais.

« Si... Si vous m’approchez je... Je la butte... »

Fry était tendu, il regardait Jenny et comprenait difficilement son air impassible. Jenny n’accorda pas de regard à Fry, elle se concentrait sur sa sœur. Jenny était encore prisonnière mais elle n’avait plus peur, sa sœur était là et son raichu était là, elle ne craignait plus rien.

Le regard mauvais, les poings serrés, Chu faisait grésiller ses joues avec frénétisme.

« Rai... »

Le pokémon s’avança lentement vers le bandit, il aurait voulu l’électrocuter avec un voltage suffisamment élevé pour le tuer, mais il ne pouvait pas le faire sans blesser Jenny.

Les deux jumelles échangèrent un regard pénétrant, entendu, silencieux. Elles s’interrogeaient du regard pour savoir laquelle parlerait en premier.

« Si elle meurt, toi non plus tu ne ressortiras pas vivant de cette pièce. »

Le ton de Jessy était terrifiant, Fry ne l’avait jamais entendu parler de cette façon, avec un calme apparent, mais un fleuve noir de ressentiment suintant de ses lèvres. Discrètement, Jenny plongea sa main dans la poche de sa blouse, Liam ne voyait rien, toute son attention était concentrée sur Jessy, le léviator rouge du Bourg Palette. Le voleur l’avait dépouillée de ses pokéballs, toutes vides au moment de la fouille, il avait aussi dérobé sa sacoche, mais il n’avait pas fait attention au reste. Profitant de la vulnérabilité et de l’inattention de son ravisseur, Jenny sortit le tournevis qu’elle avait dans la poche et le planta dans la cuisse de Liam.

« Aaaarrrg !!! »

Le voleur lâcha Jenny en hurlant sa souffrance et elle plongea en avant pour rejoindre sa sœur. Aussitôt, Chu balança une attaque tonnerre sur le sale type qui avait osé toucher à sa dresseuse.

« Chu arrête ! Tu vas le tuer ! » Cria Jenny d’une voix forte. Liam était dans un état critique face contre le tapis. Jessy saisit sa jumelle par les épaules.

« Jane ! Tu vas bien ?!? »

Il n’avait pas échappé à Jessy et Fry que Jane était en sous-vêtements sous sa blouse, son pull, son t-shirt et son pantalon étaient posés sur le dossier du canapé, mais Jenny, elle, ne pensait qu’à sa mère.

« Il faut sauver maman ! Au labo ! »

Jenny se dégagea des mains de sa sœur et se précipita vers la porte menant au laboratoire. Les trois adolescents, leurs raichu et scarhino s’engouffrèrent dans la salle carrelée. Ils s’élancèrent vers l’escalier mais furent stoppés nets dans leur élan devant l’entrée du laboratoire scellée par de hauts cristaux mauves.

« Mais c’est quoi ce truc ?!? » Hurla Jessy en voyant la couche d’un pseudo cristal qui recouvrait les marches de l’escalier et une partie du mur.

« Poussez-vous les filles ! Marvy ouvre une brèche ! Mégacorne !

- Scarhinoooo ! »

Marvy fonça tête la première et frappa de toutes ses forces au point de se faire mal. Le cristal se fendit mais au lieu de s’émietter, il se reconstitua en un seul bloc solide.

« Merde ! Jura le champion, Jessy enchaina :

- Tonnerre ! »

Pit lança une attaque électrique puissante sur le cristal, indemne.

- Je vais passer par la mezzanine ! Cria Fry en retournant au pas de course dans la maison avec son scarhino et sa luxray.

- La fenêtre ! » Jenny tira sur la manche de sa sœur pour l’inciter à la suivre dehors. Les jumelles firent le tour du bâtiment. Toutes les vitres étaient recouvertes de cristaux, tout comme la porte de la mezzanine.

« Putain mais c’est pas vrai !!! Beugla Jessy. Etna ! Déflagration ! »

La dracaufeu tenta de briser la vitre avec sa plus puissante attaque feu, les carreaux explosèrent mais pas les cristaux.

« Graw ! »

Etna rugissait de frustration en s’acharnant sur les cristaux, en vain.

« Fry a peut-être réussi à entrer ! » S’exclama Jessy avant de retourner en trombes vers le labo. Elle croisa Fry en panique au pied de l’éolienne.

« A l’étage aussi c’est bloqué !

- Y a le même truc partout autour le labo ! Désespéra Jessy.

- J’ai jamais vu ça de ma vie !

- Moi si ! Cria Jenny. Ça ressemble au pouvoir caché des zarbi !

- Et faut faire quoi pour se débarrasser de cette merde ?

- La seule méthode c’est de supprimer les zarbi qui ont créé ces cristaux ! »

Les jumelles devinaient que les pokémon en question se trouvaient à l’intérieur de la prison de cristal avec leur mère et son agresseur, alors Jessy se précipita vers les cristaux et cogna dessus à s’en briser les mains.

« Maman ! Maman !!!

- Maman !!! »

 

Les jumelles hurlaient à l’entrée du laboratoire. Jérôme savoura ces cris avec un rire de dément. Il se fichait complètement de savoir comment allaient ses complices ou quels problèmes l’attendraient en sortant du laboratoire. Si Jessy et Fry étaient là, cela signifiait que la police et les renforts arriveraient bientôt, mais dans sa forteresse de cristal il était invulnérable et Florine était à sa merci. Il avait enfin sa vengeance.

La mère des jumelles gisait nue à ses pieds au milieu de ses vêtements en lambeaux et d’un mouchetis rougeoyant de son propre sang. Epuisée par les tortures de ténéfix, elle entendait les cris et les pleurs de ses filles comme un écho, sans savoir d’où ils venaient, elle ne voyait toujours que le sable d’Oliville. Elle avait compris grâce à la déflagration d’Etna, au tonnerre de Pit et à la mégacorne de Marvy, que les trois adolescents avaient eu le dessus sur les complices de Jérôme. Elle espérait encore au fond d’elle qu’ils trouvent un moyen de la secourir. Elle n’avait pas le choix d’y croire encore, elle se savait à quelques instants de la mort, et quitte à mourir, elle aurait voulu voir une dernière fois son laboratoire et le visage de ses filles, plutôt qu’une plage lointaine…

 

A suivre…

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