L'Océan des Vérités

Emmy est la première à réagir. Elle sort de la maison suivie par Descole et poursuit l'observateur. Malgré tous leur efforts, ledit observateur réussit à s'enfuir en montant dans un hélicoptère violet. Emmy le regarde s'envoler en fronçant les sourcils et serrant les poings.

- Argh, il va le payer celui-là !

- Viens on rentre, ça ne sert à rien de rester ici. On ne peut rien faire.

- Attends une seconde, regarde !

La jeune femme s'abaisse et ramasse un petit objet scintillant dans l'herbe humide. C'est une plaque argentée avec trois motifs : des vagues, une étoile et un soleil. Emmy le tient dans le creux de sa paume et l'observe en long, en large et en travers.

- Ça me fait penser à Ambrosia...

Descole détourne la tête, soupire et commence à partir.

- Hé ! Attends moi ! 

La jeune femme referme sa main sur la petite plaque et rejoint Descole. Celui-ci a la tête baissée et les mains fourrées dans les poches de son pantalon.

- Qu'est-ce qu'il y a ? J'ai l'impression que quelque chose te rend triste.

- C'est juste qu'on va devoir revivre tout ça, j'en suis sûr. Tout ce qu'on a fait et tout ce qu'on s'est mangé en pleine face. Je ne suis pas sûr de vouloir y retourner.

- Descole...

- Il y a tellement de choses que je...

Emmy s'arrête et le prend dans ses bras. Elle ferme les yeux.

- N'y penses plus. Tout est fini. J'ai eu du mal à tourner la page, à refaire ma vie sans mon oncle, sans le professeur, sans nous.

- Emmy, qu'est-ce que tu racontes ?

 - Tu ne me facilite pas la tâche. J'essaie juste de te dire qu'au fond, tu m'as manqué. Tout m'a manqué.

- Mais Emmy...

- Je sais ce que tu as fais. Je sais ce que j'ai fais. Et j'ai décidé de pardonner à tout le monde. J'ai pas réussi à te haïr.

Descole reste sans voix. Il étreint Emmy avant qu'elle ne s'écarte de lui afin de repartir.

- On y va ?

- Oui, c'est mieux.

Ils partent dans un silence léger, le genre de silence qui s'installe quand la parole ne suffit plus. Arrivés chez Descole, Emmy reste sur le pas de la porte, clef de voiture à la main.

- Tu pars à cette heure ?

- Il faut bien que j'y aille.

- Reste cette nuit. La route est dangereuse par ici et le peu de voiture qui parviennent dans cet endroit roulent comme des folles.

- Je ne voudrais pas te déranger.

- Tu ne me déranges pas le moindre du monde. Au contraire, c'est un plaisir de t'avoir à mes côtés, même si je ne pensais jamais dire ça un jour.

- Tu m'en diras tant ! rie Emmy, remise d'aplomb.

- Bon, laisse moi te cuisiner quelque chose.

- Laisse-moi t'aider, j'adore cuisiner !

- Ce n'est pas de refus !

Le duo se dirige vers la cuisine spacieuse et sortent deux casseroles. Emmy fait bouillir l'eau et y jette les pâtes pendant que Descole fait mijoter la sauce. Au bout de dix minutes tout était prêt. Ils s'installent à table et discute vivement, apprenant à mieux connaître l'autre. Une fois toute la nourriture engloutie et la vaisselle faite, Emmy enlève son sweat-shirt et son jean et se jette sous les couvertures. Elle ferme les yeux et commence à repenser à sa soirée en compagnie de Descole. Tout cela lui rappelait quand elle discutait avec lui alors qu'il était sous l'apparence de Desmond Sycamore. Au final, elle se dit qu'il était toujours le même, peut-être moins sarcastique même si elle appréciait cette partie de lui. Emmy s'endormit sans entendre Descole lui souhaiter une bonne nuit et remonter légèrement sa couette comme son oncle Léon le faisait étant plus petite.

Le lendemain matin, la jeune femme émergea lentement. Elle se lève et file dans la salle d'eau. Elle regarde son reflet dans le miroir, se disant qu'une fois arrivée chez elle, il faudrait qu'elle trouve une solution pour effacer toutes ces cernes. Une fois prête, elle descend les escaliers et tombe nez à nez avec Descole préparant le petit déjeuner.

- Bonjour Emmy. Sers-toi et fais comme chez toi.

- Merci.

Elle s'installe, étouffe un bâillement et commence à se servir du thé. Elle boit une gorgée et observe Descole s'asseoir en face d'elle et boire sûrement un énième thé au vue de l'état de fatigue dans lequel il est.

- Mal dormi ? questionne la jeune femme

- Insomnies fréquentes.

- Je vois, j'ai connu.

Elle finit son thé et mange deux trois biscottes puis se lève, lave sa tasse et s'étire.

- Bon, il faut que je retourne à Londres pour préparer ma valise de demain.

- Il faut que je fasse de même. Mais du coup, tu travailles aujourd'hui ou pas ?

- Jamais au studio le mercredi matin. Tant pis, je fermerais pour cette fois, les clients comprendront. Encore merci, pour hier et ce matin c'était vraiment sympa. J'ai un peu l'impression de partir comme une voleuse mais j'ai un bout de route à faire. A bientôt Hershel.

- A bientôt, Emmeline.

- Contente que tu m'appelles Emmeline. Allez, à plus !

Elle prend ses clefs et monte dans sa voiture. Elle sort de la propriété et prend la route. A mi-chemin, elle se rappelle qu'elle a oublié de prendre la petite plaque argentée. Elle espère que Descole la trouvera facilement et n'oublieras pas de la prendre lui. Concernant Descole justement, il est toujours assis dans sa salle à manger, en se disant qu'Emmy était vraiment une pile électrique, toujours en mouvement et surtout toujours de bonne humeur. Il allait passer un agréable moment avec elle, il le savait.