La Vie d'Asmita de la Vierge

Chapitre 2 : Première sortie

1670 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/11/2016 16:58

Sage soupira pour la énième fois de la matinée. Cela faisait une semaine qu’Asmita, le Chevalier de la Vierge avait terminé son entraînement dans son pays d’origine : l’Inde. Une semaine aussi qu’il avait reçu sa belle armure. Et une semaine qu’il restait cloîtré à méditer dans une salle obscure de son nouveau chez-lui. Le jeune garçon était à présent âgé de quatorze ans et restait tel qu’il l’avait rencontré : obsédé par son précieux Bouddha et renfermé sur lui-même. Il lui avait même confié que la présence d’autrui le gênait, le perturbait. Tous semblaient indignes de sa gracieuse personne.

 

« Grand Pope ? Quelque chose vous perturbe ? »

 

Sage leva la tête, fatigué à force de se torturer l’esprit au sujet du jeune Indien. Il n’avait même pas senti le Cosmos de Sisyphe approcher. Il fit un sourire crispé au Sagittaire, le dos douloureux.

 

« C’est cet Asmita, le nouveau qui vous perturbe ? poursuivit-il.

  • Tu as tout compris. Son comportement m’inquiète. Il maigrit, ne semble pas correctement se nourrir et passe son temps en lotus à ne rien faire.
  • A méditer, Grand Pope, corrigea son interlocuteur.
  • Ouais, à méditer … Sérieusement, ce comportement m’agace ! J’exige qu’il se fasse des amis et rencontre ses frères d’armes ! Immédiatement ! exigea-t-il, tapant du poing sur le vieux bureau branlant.
  • Calmez-vous Grand Pope, ce sera fait selon votre demande, ne vous inquiétez pas …
  • Je viens vérifier par moi-même ! Je te parie deux-mille drachmes qu’il méditera une fois de plus ! »

 

Le vieillard se leva et descendit d’un bond souple, devançant Sisyphe et marchant d’un air furieux vers la sortie de son propre temple. Haussant les épaules, celui-ci le suivit, décidant de ne pas intervenir. Sage,  s’il s’énervait pourrait très bien le réduire en bouillie, malgré sa grande sagesse. Il sourit imperceptiblement. Au fond, l’ex Cancer était tout bonnement inquiet pour la santé du nommé Asmita, ça crevait les yeux. Vu sa présente vitalité, ils arrivèrent rapidement au sixième temple.

 

« Asmita de la Vierge ! hurla la voix grave de l’homme énervé.

  • Oui Grand Pope ? répondit celle de la jeune Vierge, approchant à petits pas, un verre de jus de pommes à la main.
  • Je … heu … Sors dehors tout de suite ! Je veux que tu rencontres tes petits compagnons et que tu deviennes ami avec eux !
  • On sort rarement dedans, chantonna-t-il s’excellente humeur. »

 

Un juron proféré en une langue inconnue lui éclata aux oreilles, et il sourit, fier de lui, passant devant Sisyphe qui restait planté là comme un idiot. Faisant demi-tour, l’adolescent se planta devant lui et leva son visage pâle et maigre vers le sien, plus doux et amical. L’aîné sourit, heureux d’être enfin remarqué et de ne plus servir comme décoration d’intérieur.

 

« Je m’appelle Sisy …

  • Peu importe, le coupa le blondinet d’une voix ferme, le verre de jus de pommes toujours dans la main, ton Cosmos semble perturbé, et cela me perturbe moi-même ! Fais-toi soigner et écouter, tu ne peux rester comme cela à envoyer de mauvaises ondes à autrui ! »

 

Sur ce, il planta là le pauvre Sagittaire qui en resta coït d’étonnement. Il s’improvisa donc  son guide, le menant silencieux aux arènes. De nombreux jeunes s’entraînaient déjà sous un soleil de plomb en cette chaude matinée d’été. Ici, en Grèce, la chaleur épuisait certains, mais en réjouissait d’autres, comme l’attestaient deux gamins, un aux étranges cheveux bleus mal coiffés qui rayonnait de joie et un autre aux jolies mèches vertes et aux lunettes sur le bout du nez, quelques gouttes de sueur perlant sur son front pâle. Sisyphe s’éclaircit la voix, et commença une phrase à voix basse. Immanquablement, personne ne l’entendit. Rougissant, il décida de crier un « oh ! », amenant inévitablement tous les regards vers lui. Encore plus gêné, il poursuivit, bégayant :

 

« Excusez cet écart, je vais à présent vous présenter votre nouveau petit compagnon ! Voici Asmita de la Vierge ! »

 

Un silence lourd répondit à son ton presque théâtral. Le Sagittaire se mordit la lèvre, les yeux clos, se trouvant ridicule. Son effet était totalement raté. Le jeune Indien avança de son propre chef, décidant de prendre le relais, un léger sourire moqueur sur les lèvres vis-à-vis de son gentil présentateur.

 

« Comme l’a si bien dit Sissi, je me nomme Asmita, je viens d’Inde et je suis l’actuel Chevalier de la Vierge.

  • C’est Sisyphe pas Sissi, grommela la voix mécontente de l’intéressé.
  • Hum … enchanté, ricana un garçon aux cheveux bleus ébouriffés, trouvant cela drôle d’avoir un pair aussi clair de peau pouvant concurrencer le Verseau. J’espère que tu t’amuseras … avec nous.
  • Pourquoi t’as les yeux fermés ? demanda une toute petite voix, celle d’un bleuté restant un peu à l’écart.
  • Je suis aveugle.
  • Ooooooh … »

 

Trouvant que la discussion devenait peu à peu stérile, Asmita s’éloigna d’un pas aérien, étranger aux paires d’yeux qui le suivaient. Le port de tête noble, les cheveux ramenés derrière ses délicates oreilles, il ne vit pas la personne qui se trouvait devant lui et la percuta de plein fouet.

 

« Alors Asmita ? déclara Sage d’un ton doucereux, agacé par ses manières hautaines, tu aimes tes petits amis ?

  • Ils sont tous plus futiles les uns que les autres, sans façon. Si vous voulez bien m’excuser …
  • Sage ? murmura Sisyphe, les ayant rejoint entre-temps, vous me devez quelques deux-mille drachmes, n’oubliez pas ! Mais … que faites-vous avec cette pierre ?! Ouille ! »

 

Asmita soupira dans son coin, murmurant un « pitoyable ». Il ne se sentait pas à sa place ici. Le garçon qui lui avait parlé respirait la méchanceté et le sadisme, il avait également senti un autre Cosmos hostile, d’autres méprisants. Mais qu’importe ? Malgré les paroles de Sage, jamais il ne serait ami avec des gens de ce genre. Il s’assit contre un pilier du centre d’entraînement. Puisqu’il devait rester jusqu’à la fin, il ferait mieux de méditer un peu. Cependant, quelqu’un n’était pas de cet avis et approcha. La Vierge daigna à lever son joli minois vers lui.

 

« Tu irais bien avec mon frère, dit l’inconnu.

  • Ton frère ?
  • Deutéros, mon jumeau. Au fait, je suis Aspros, le Chevalier des Gémeaux, pour te servir, hu hu … Si tu as besoin de quoique ce soit, n’hésite pas à demander.
  • Merci bien … »

 

Il se sentait soudain mal à l’aise en sa présence, il avait entendu parler des Gémeaux et du rejet qui frappait le deuxième. Il eut une pensée douce envers le deuxième, qu’il savait persécuté et mal aimé. Le « chanceux » s’en alla en sautillant rejoindre ses amis, et Asmita cogita à cela. Son frère … peut-être finalement qu’une personne pourrait lui convenir ? Lui aussi aurait aimé se trouver un ami, un seul ami. Il se jura de faire des recherches sur ce Deutéros pour constater de lui-même. De toute façon, savoir le quotidien d’homme rejeté de la société l’intéressait fortement pour en discuter plus tard avec Bouddha. Hochant la tête doucement, il sourit intérieurement. Oh que oui, ce deuxième Gémeau serait dès à présent son premier centre d’intérêt. 

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