In Medias Res [vignettes] - Star Wars Knights of The Old Republic

Chapitre 6 : Des liens inattendus et des illusions brisées

7263 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 18/06/2023 15:51

Bonjour !


Voici la suite. J'ai essayé de faire le maximum pour donner les infos nécessaires qui auraient dû être développées dans la version complète. Il faut aussi que je "travaille" l'intégration de Sivir, qui est un personnage que j'ai inventé, qui ne fait pas partie du jeu.

Pour rappel, cette version de l'histoire s'arrête sur des scènes choisies. Il y a donc souvent des ellipses (parfois importantes) entre les chapitres. Cette version "vignette" est très peu axée sur l'action (que je n'aime pas écrire, je l'admets).



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Il nous avait fallu un peu plus d’une heure pour quitter la ville basse de Taris et rejoindre l’appartement que Carth avait investi peu après le crash de notre capsule de sauvetage. Par chance, Bastila ne m’avait pas adressé la parole pendant notre petit périple. Elle semblait n'avoir que des mots aimables à me dire, donc le silence qu'elle avait maintenu tout au long de cette heure de trajet était une bénédiction que je savourais chaque seconde.


J'avais veillé à ne pas prendre une longueur d'avance sur elle, craignant d'attirer l'attention indésirable. Dans la partie haute de la ville, où de nombreux soldats Sith faisaient leur ronde, nous déambulions côte à côte, à une distance relativement rapprochée, donnant l'apparence d'un couple d'amis rentrant d'une soirée animée et trépidante. Bastila avait à cet égard détaché ses cheveux, pour éviter que l’on s’attarde trop sur son visage. Je ne savais pas si cela avait été d’une très grande utilité, mais il était primordial de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher quiconque de reconnaître la célèbre Jedi, proie du Seigneur Noir.


Lorsque nous rejoignîmes enfin l’appartement, Bastila salua très laconiquement un Carth presque euphorique, lança un regard furtif, indifférent, je le savais pertinemment, envers Mission, Zaalbar et Sivir. Ces trois-là, après l'infiltration quelque peu musclée de la base des Beks, avaient pu, avec l'aide des Beks Cachés, trouver un moyen de rejoindre la Ville Haute pour se mettre à l'abri des hommes de Brejik. Le chef de gang avait tout mis en œuvre pour les retrouver, déployant tous les moyens possibles pour récupérer son précieux accélérateur. Et dieu sait que le grand Zaalbar n'était pas prêt à se retrouver une fois encore prisonnier de quelconques groupes de voyous. Lorsque Sivir et moi avions quitté la base des Beks, on nous apprenait que Mission avait disparu. Probablement dans les égouts de la ville Il ne nous avait pas fallu longtemps pour la retrouver : le petite Twi'lek n'avait en réalité pas du tout disparu. C'était son compagnon Wookie qui avait eu quelques problèmes. Zaalbar avait malheureusement été capturé par des Gamorréens, probablement des esclavagistes ou des fourreurs. Bien entendu, nous nous étions tous attelés à sauver l'ami de Mission. Nous l'avions retrouvé enfermé dans un minuscule sas crasseux des égouts. Il s'était par la suite mis en tête qu'il me devait sa vie, et avait donc accepté de m'aider dans mes périlleuses entreprises.


Après que Carth eut remis quelques vêtements civils propres à Bastila Shan, elle s’empressa de s’enfermer dans la petite salle d’eau de l’appartement. Elle en ressortit une quinzaine de minutes plus tard. Naïvement, j'avais espéré que ce moment de rafraîchissement lui aurait procuré un certain apaisement, et que nous pourrions enfin avoir une Bastila Shan légèrement plus chaleureuse. Mais, comme elle-même l’avait déjà si délicatement sous-entendu, je n'étais qu'un imbécile. Nous étions tous installés autour de la seule table de l'appartement, attendant patiemment le retour de notre cher commandant. Bastila revint parmi nous, affichant une expression presque plus méprisante que celle qu'elle arborait à chaque fois qu'elle était contrainte de me parler. Lorsqu'elle arriva près de nous, elle agrippa le dossier d'une des dernières chaises, la recula fermement et s'y installa. Je la vis poser ses mains jointes sur le plateau de la table, et je l’entendis pousser un soupir supérieur, si ce n’était suffisant. Elle daigna enfin lever les yeux vers nous, balayant son auditoire d'un regard glacial, puis elle prononça finalement ces mots tant attendus :


« Eh bien ? » s'exclama-t-elle avec impatience. « Est-ce qu’il y a quelqu’un ici pour m’expliquer la situation ? Ou est-ce qu'il faut que je vous tire les vers du nez à chaque fois, pour la moindre information ? »


Un discret sourire se dessina sur mon visage pendant que j'observais discrètement mes compagnons. Mission, jusque-là troublée par l'arrivée de Bastila Shan, abandonna son air effrayé pour arborer une expression presque indignée. Sivir gardait le silence, mais des reliefs s'élevant de chaque côté de ses mâchoires trahissaient une immense crispation. Zaalbar, je n'en étais pas certain, mais il me sembla percevoir un léger grognement émaner de sa part. Quant à Carth, il fixait son Commandant, les bras croisés, perplexe. Il était évident qu'il ne se laisserait pas intimider aussi facilement. Je ne le quittais plus des yeux, j’attendais qu’il prenne la parole ; en tant que second dans notre ersatz de hiérarchie, c’était son rôle de répondre à la supplique du Commandant. Cependant, il restait silencieux, son regard fixé sur la Jedi, les sourcils froncés. À ce moment-là, je supposai qu'il s'agissait d'un jeu d'ego, une lutte pour savoir qui céderait en premier. Mais cela ne correspondait pas au comportement habituel de Carth. Il était un homme respectueux de la hiérarchie, loin d'être un soldat prêt à se rebeller à la moindre remarque ou au moindre ton désobligeant de ses supérieurs. Il devait y avoir un passif entre les deux, quelque chose dont je n’avais pas connaissance, expliquant ainsi l'attitude légèrement irrévérencieuse du lieutenant envers la Jedi. Le militaire, qui commençait à afficher la grimace caractéristique d’un homme déçu, poussa finalement un soupir sonore avant de prendre enfin la parole d'un ton délibérément soutenu, son regard presque effrontément verrouillé sur celui de la Jedi :


« Madame, la situation est la suivante : vous avez intégré l'Endar Spire, l’Endar Spire est en miettes, la plupart des capsules de sauvetage se sont écrasées si violemment qu’il y a peu d’espoir de retrouver d’autres survivants. Les Sith ont envahi et barricadé la ville pour vous retrouver, restreignant drastiquement les libertés de ses habitants. De notre côté, nous nous sommes écrasés dans la Ville Basse. J’ai traîné mon ami ici présent, inconscient, jusque cet appartement abandonné, dans lequel il a passé plusieurs jours dans le coma. A peine quelques heures après son réveil, il a tout entrepris pour vous retrouver : il a subtilisé des papiers à des Sith pour pouvoir rejoindre la ville basse, il a collaboré avec un gang de la Ville Basse, qui l'a envoyé, avec l’aide de nos trois amis également ici présents, dans les quartiers généraux du gang rival, pour leur voler une pièce mécanique qui lui a permis de remporter la course de fonceurs dont vous étiez le prix. Et vous voilà. Avec nous. Saine et sauve. »


Bastila croisa les bras à son tour, et soutint le regard austère de Carth. J’étais certain d’avoir vu la Jedi serrer les dents, lorsqu’il débitait ces paroles, particulièrement au moment où le Lieutenant lui reprochait tacitement d’être la responsable de tous ces morts et de l’occupation de Taris par les Sith. Ce qui faisait sens, mais peut-être était-ce une condamnation quelque peu sévère. Peu importait, ce glorieux moment de remise en place, dont j’aurais aimé être l’auteur, avait en moi soufflé un puissant ouragan de satisfaction. Si puissant que je ne sus retenir un rire comblé, que je tentai malgré tout d'étouffer sous une fausse quinte de toux.


Bastila détourna brièvement la tête vers moi, me fixant intensément pendant quelques secondes, avant de reporter son attention sur Carth.


« Qu’avez-vous prévu pour la suite ? » demanda-t-elle sur un ton moins impitoyable.


« Rien, » répondit Carth d'un ton neutre, ce qui suscita un froncement de sourcils désapprobateur chez la Jedi. « Nous nous sommes d’abord creusé la tête pour vous sortir de là. Maintenant que vous êtes avec nous, nous allons pouvoir réfléchir à une façon de quitter Taris. »


« Vous n’avez pas prévu de plan pour nous enfuir ? » interrogea Bastila, semblant être au bord d'une violente explosion de colère. « Vous me dites que nous sommes tous coincés ici sans la moindre idée pour quitter Taris ? »


« Exactement, » ajoutai-je soudainement, exaspéré par l'attitude de la jeune femme. Tous les regards se tournèrent alors vers moi. Bastila me fixait si sévèrement que j'étais persuadé qu'elle ne laisserait pas un tel affront impuni. J'en avais oublié que j'étais désormais un militaire, directement soumis à l'autorité de la personne que je m'apprêtais à affronter. Tant pis. Après tout ce qu’on avait tous traversé pour la sortir de sa cage, je ne me fichais pas mal de la suite de ma carrière.


« Comme vous l'a expliqué le Lieutenant, lorsque nous nous ne remuions pas ciel et terre pour vous retrouver, j’étais dans le coma et Carth s’efforçait à ne pas me laisser dépérir. Excusez-nous de ne pas avoir pris le temps de réfléchir à la suite, nous étions un peu occupés à essayer de survivre et à éviter d'être capturés par les Sith, qui sont sur les dents depuis le crash de votre croiseur. »


Un silence.


Contre toute attente, alors que je m'attendais à un déferlement de remontrances, le regard de la Jedi s’apaisa, et elle dirigea son attention sur ses mains, toujours jointes, sur le plateau de notre table. Elle sembla réfléchir, et finalement elle laissa ma très inappropriée contribution de côté. Carth profita de ce moment de flottement pour me lancer un regard solidaire, et m’adressa un sourire discret avant de regagner le Commandant des yeux. Je la vis triturer la peau entre ses doigts, intensément plongée dans sa propre réflexion.


« Nous avons deux problèmes capitaux à régler, » finit-elle par annoncer. « Trouver un vaisseau, et trouver un moyen de s’échapper de la planète sans que les Sith nous repèrent. Ils ont très probablement installé des systèmes de détection automatiques et des points de contrôles tout autour de Taris. On ne leur filera pas entre les doigts facilement. » Carth fit un hochement de tête entendu, mais ne répondit rien à cette affirmation. Nous semblâmes avoir tous finalement retrouvé un calme essentiel à l’élaboration d’un plan pour quitter Taris.


« Pour le moment, d’ici, nous n’avons aucune solution. Nous allons devoir à nouveau compter sur les Tarisiens, » répliquai-je factuellement, en désignant du regard Mission, Sivir et Zaalbar qui assistaient silencieusement à cet échange. Le Lieutenant et le Commandant tournèrent tous deux la tête vers moi, arborant une expression patiente mais expectative.


« Il nous faut à nouveau partir en quête de personnes capables de nous aider. »


« Vous pourriez peut-être retourner voir Gadon, » ajouta Sivir, sortant de son silence poli. « Je ne sais pas si lui peut vous aider dans cette tâche, mais il doit très certainement connaître du monde, ou au moins avoir des informations utiles. »


Bastila fronça les sourcils, visiblement dans une certaine incompréhension que Carth qui semblait avoir remarquée, ne tardant pas à dissiper :


« Gadon Thek, le chef du gang rival de celui qui vous avait capturée, Madame. Il nous a été d’une aide inestimable », précisa l’homme avec pédagogie. Bastila hocha à son tour de la tête, et nous laissa continuer.


« Ça me semble être la meilleure option pour le moment, » reprit Carth, qui entreprit de se lever de sa chaise, prêt à se mettre au travail. « Toute information est bonne à prendre. »


« Vous oubliez qu’on n’a plus le précieux sésame qui nous a permis de rejoindre la Ville Basse sans nous faire arrêter par les Sith, » répliquai-je, arrêtant Carth dans son initiative, qui retrouva alors sa position assise. « Je ne suis pas contre l'idée d'une nouvelle sauterie entre Sith, mais je ne pense pas qu'ils en organisent une autre de sitôt », ajoutai-je en poussant un léger rire, soulignant ma plaisanterie.


Du coin de l’œil, j’aperçus Bastila m’adresser un regard confus. Carth se contenta de me lancer un sourire crispé, certainement pour retenir un éventuel et bien malvenu accès de rire. Sivir, quant à elle, ne prit pas cette peine.


« Nous, on sait se faufiler, » intervint Mission, en désignant Sivir. « L’accès à la Ville Basse a toujours été très contrôlé. L’arrivée des Sith n’a rien changé. Ils ont juste pris la place des employés qui se chargeaient de ça avant. Et, croyez-moi, ils ne sont pas beaucoup plus malins. On peut rejoindre la Ville Basse et interroger Gadon pour vous. Vous, vous pourriez chercher des renseignements dans les alentours pendant que, nous, nous nous occupons des bas-fonds de Taris. »


Zaalbar poussa quelques grognements défavorables. Le Wookie n’aimait visiblement pas savoir Mission embarquée dans des histoires délicates sans lui. L’adolescence posa affectueusement la main sur le bras de son ami, et, le regard tendre, elle ajouta :


« Ne t’en fais pas, Zaalbar. Ce ne serait pas la première fois que je fais quelque chose comme ça. Je n’ai jamais eu de problème, tu le sais bien. »


« Ce n’est pas une preuve qu’il ne se passera rien cette fois-ci, » répliqua légitimement Carth. Zaalbar poussa un nouveau grognement, cette fois-ci en approbation avec les propos du Lieutenant.


« Ou sinon, vous pouvez tous rester cachés ici indéfiniment, » rétorqua froidement la jeune fille qui semblait vexée.


« Elle a raison, » annonça Bastila d’une voix impériale. « On ne partira jamais d’ici si on ne prend aucun risque. »


La Jedi se leva, et agrippa la veste de pilote que je lui avais confiée après la course. Elle l’enfila par-dessus ses vêtements civils, tout à fait communs, et initia le pas vers un râtelier de fortune que nous avions constitué au fil de nos périples tarisiens. Je la vis saisir une dague qu’elle glissa je-ne-savais-comment à l’intérieur de l’épaisse veste, et revint vers nous :


« Allons, » dit-elle fermement, mais sur un ton malgré tout plus aimable qu’au début de cet échange. « Au travail. »


Mission et Sivir se levèrent et se dirigèrent vers une cantine qu’elles avaient investie à leur arrivée dans l'appartement. Elles y sortirent un certain nombre de pièces d'équipement en tout genre. Zaalbar suivit la petite Twi'lek, comme s’il voulait la protéger un maximum, au moins jusqu’au moment où ils seraient obligés de se séparer. Carth et moi étions restés assis, tous les deux les bras croisés, à fixer notre Commandant, perplexes.


« Vous ne comptez pas sortir d’ici Commandant, rassurez-nous ? » demanda Carth.


« Bien sûr que si, Lieutenant. Il faut qu’on trouve un moyen de quitter Taris », répondit la jeune femme sévèrement. Elle semblait parfaitement comprendre là où Carth voulait en venir. Mais elle semblait également résolue à n’en faire qu’à sa tête.


« Vous nous pensez incapables de gérer ça sans vous ? » questionnai-je alors avec un soupçon de vexation et d’impertinence.


« Non, » me dit-elle d'un ton acéré, un regard assassin me transperçant de toute part. « Mais je refuse catégoriquement de rester ici à ne rien faire pendant que vous vous exposez tous aux dangers de l'extérieur. »


L'insolence qui m'avait consumé jusqu'à présent disparut si soudainement que je pouvais presque la ressentir physiquement. Peut-être était-elle en fin de compte capable de porter de l'estime à quelqu'un d'autre qu'elle-même.


« Commandant, vous l’avez dit vous-même, nous devons prendre des risques, » ajouta Carth avec sa pédagogie si caractéristique. « Mais ça ne signifie pas que nous devons tout tenter, quitte à nous mettre dans des situations impossibles. On ne risquera pas votre capture par les Sith. »


Le Lieutenant se leva enfin de sa chaise et fit quelques pas en direction de la Jedi. Il adopta une posture rigoureusement militaire et, aussi respectueusement que possible, il s'adressa à nouveau à sa supérieure :


« Pardonnez-moi, Madame, je m’apprête à outrepasser mes fonctions : je vous demande de rester ici jusqu'à ce que nous trouvions un moyen de partir. Si Zaalbar est d'accord, il pourrait veiller sur vous. »


Le Wookie, même à distance, nous entendit clairement et tourna brusquement la tête vers notre table, nous observant tous les trois de ses grands yeux bruns. Puis, il regarda Mission qui lui adressait un sourire malicieux. L'adolescente hocha la tête, ce qui fit grogner doucement le Wookie. L'idée ne lui plaisait guère, mais il ne voulait pas décevoir Mission. Depuis que nous l'avions libéré de la cellule où les Gamorréens l'avaient enfermé, il s'était persuadé qu'il nous devait la vie. Je ne savais pas jusqu'où Zaalbar était prêt à aller pour nous rembourser cette dette qu’il s’était inventé, mais il semblait en tout cas disposé à nous aider à quitter Taris. Je n’aimais pas l’idée de profiter d’un tel compromis, toutefois nous ne pouvions pas nous permettre le luxe de refuser l’aide de ces généreux compagnons de route. Bastila soupira d'abattement et répondit :


« D’accord. Ça ne me plaît pas, mais c’est effectivement plus sage ainsi, » déclara Bastila avant de s'éloigner de la table. Elle retira la veste et la dague qu’elle avait cachée, et partit s’installer dans un coin du séjour, où elle s’assit en tailleur. Avant de probablement se plonger dans une espèce de méditation chère aux Jedi, elle s’adressa une nouvelle fois à nous :


« Néanmoins, si les choses tournent mal, je vous somme de chercher un moyen de me contacter ou de venir me trouver. »


Puis, nous ne l’entendîmes plus. Le Commandant semblait s’être totalement immergée dans sa transe, et devint presque, à nos yeux, aussi peu vivante que tous les autres meubles de cet appartement. Je l’observai avec curiosité une courte minute avant de, moi aussi, préparer quelques affaires puis de quitter notre refuge. Carth, Mission, Sivir, Zaalbar et moi-même nous équipâmes de minuscules communicateurs synchronisés entre eux, de façon à ne jamais perdre le contact de l’un de nous. Puis nous quittâmes l’appartement, laissant un Zaalbar amer mais résigné avec une Bastila Shan qui, par chance pour lui, ne semblait pas lui réserver une journée-spectacle de ses plus belles humeurs.


Mission et Sivir quittèrent très vite notre trio. Nous avions bien essayé d’en savoir plus sur leur itinéraire, mais les jeunes femmes, excédées par ce raz de marée de paternalisme, s’étaient sauvées en ne nous adressant à peine un regard. Carth et moi reprîmes alors notre route vers les lieux les plus bouillonnants du district dans lequel nous étions cloîtrés. 


Alors que nous nous approchâmes du quartier commerçant, un Twi’lek vint nous arrêter dans notre marche, et, de ses deux mains, nous invita à nous éloigner de la foule. Méfiants, mais malgré tout collaboratifs, nous nous exécutâmes presque instinctivement. Le Twi’lek sortit alors d’une petite sacoche, qu’il portait en bandoulière, un petit bloc de données qu’il nous tendit discrètement. Carth et moi échangeâmes un regard confus, puis nous tournâmes la tête vers ce mystérieux personnage, qui ne nous avait même pas adressé la parole :


« Qu’est-ce que vous nous voulez ? » demandai-je avec une pointe d’agressivité.


Le Twi'lek effectua de petits mouvements de hanches et d'épaules soulignant une certaine impatience. Il était visiblement pressé, et pressant. D’un geste vif, il secoua le bloc de données, nous invitant à le saisir une bonne fois pour toutes. Carth, voyant que notre type était de plus en plus mal à l’aise, agrippa finalement le bloc, et nous vîmes le Twi’lek partir aussitôt d’un pas soutenu. J’aurais également juré l’avoir entendu souffler juste avant de nous quitter. Je l’observai s’éloigner jusqu’à ce qu’il disparût dans la foule. Puis je dirigeai mon attention vers Carth et ce fameux bloc de données.


« Vous croyez que c’est prudent de le consulter ? » demandai-je avec inquiétude.


« Je ne sais pas ce qui est prudent et ce qui ne l’est pas ici, » répondit platement le Lieutenant, qui avait visiblement déjà effectué les manipulations pour consulter l’objet. De là où je me trouvais, je ne pouvais pas lire ce qui était inscrit. Je me contentais de fixer Carth et d’attendre ses conclusions.


« Canderous Ordo ? » interrogea-t-il dans le vide. « C’est un nom qui m'est familier. C'est un mercenaire, non ? » demanda-t-il ensuite, les yeux rivés vers moi. J’opinai du chef.


« Oui, on l'a vu trainer avec quelques hommes dans les égouts de Taris. Je ne sais pas du tout ce qu'il fabriquais, mais apparemment, on ne l'intéressait pas plus que ça. »


« Il veut vous voir. Il veut que vous le retrouviez dans la cantina de notre district en soirée. Il aurait quelque chose à vous proposer, je cite : ‘’une offre que vous ne pourrez pas refuser’’. »


Je fronçai les sourcils à une telle annonce. « Qu’est-ce que ça veut dire ? C’est une menace ? » 


« Une menace ou une bonne nouvelle, » précisa Carth, que je sentais prêt à accueillir toutes les opportunités qui pourraient nous permettre d’avancer, ne serait-ce que d’un millimètre. Le Lieutenant me lançait alors un regard presque suppliant. Qu’avais-je à dire ? Cette demande me concernait, mais c’était à lui de décider. Je n’aimais clairement pas la tournure que pouvaient prendre les choses. Se retrouver dans une cantina avec un célèbre mercenaire mandalorien travaillant depuis quelques années pour Davik Kang, le patron de l'Echange, la plus grande organisation criminelle de la planète. N’importe qui trouverait l’idée suicidaire. Mais notre situation ne nous promettait rien de mieux si on ne faisait rien pour nous en sortir.


« On va boire un verre alors ? » dis-je en esquissant un sourire désabusé, mais malgré tout sincère. Carth répondit à mon sourire et vint me tapoter franchement l’épaule en signe de camaraderie. Nous engageâmes alors la route vers la fameuse cantina, où nous nous apprêtions à attendre l’arrivée de ce cher Mandalorien.


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En attendant l'arrivée de Canderous, nous avions saisi l'occasion d'un moment de calme relatif pour déguster chacun un verre que nous considérions avoir pleinement mérité. Carth et moi, malgré notre rapport hiérarchique, commencions à baisser certaines barrières, et à nous envisager de manière plus informelle, voire amicale. D’ailleurs, depuis quelque temps, nous ne nous appelions plus systématiquement par notre grade militaire, mais bien par notre prénom respectif. Les aventures que nous avions vécues ensemble nous avaient rapprochés, et, même s’il demeurait toujours un certain égard professionnel, je pouvais dire que nous nous apprécions.


Carth murmura discrètement : « J'ai bien cru qu’on ne la retrouverait jamais. » Il prenait soin de ne pas nommer sa supérieure en public. « Ca aurait marqué la fin de cette guerre, et l'inévitable chute de la République. »


Je gardai le silence pendant un moment, jetant un regard à mon compagnon. Puis, avec exagération, je levai les sourcils et affichai une expression perplexe sur mon visage. Cela trahissait ma profonde confusion intérieure. Les échanges froids que j'avais eus avec Bastila jusqu'à présent restaient en travers de ma gorge. Bien qu'elle fût un maillon essentiel pour la survie de la République, à ce moment précis, j'avais enterré toute estime que j'aurais pu avoir pour elle avant de la secourir un peu plus tôt.


Je lui répondis enfin, laissant transparaître l'ironie dans mes paroles : « Oh oui, un drame. Et quelle merveilleuse rencontre, par ailleurs. Un vrai petit bonheur. On s'en souviendra longtemps, c’est certain. »


Carth me fixa avec une certaine incompréhension, très inattendue. Il fronça les sourcils, puis prit la parole :


« Oui, je sais qu’elle n’a pas été facile tout à l’heure. Mais mettez-vous à sa place. Imaginez la responsabilité que l’Ordre et la République ont placée sur ses si jeunes épaules. Il y a de quoi être un peu sur les nerfs. D'ailleurs, je regrette de m'être laissé emporter par mon agacement plus tôt, dans l'appartement. »


e restai silencieux, observant Carth avec confusion. Celui-ci me rendit exactement le même regard et reprit :


« Vous êtes toujours sur cette petite déconvenue à bord du vaisseau ? Allons, vous n’allez pas vous faire un avis définitif sur cet évènement insignifiant ? » demanda Carth, veillant à ne pas mentionner explicitement l'Endar Spire dans un lieu aussi fréquenté qu'une cantina.


Je lançai à nouveau un regard incrédule à Carth. Après tout, il avait passé beaucoup de temps avec Bastila à bord de l'Endar Spire. Comment pouvait-il être aussi indulgent envers elle ? Cela n'avait aucun sens, à moins qu'elle ne lui réserve un traitement différent de celui qu'elle m'avait réservé.


« Vous plaisantez ? » ajoutai-je.


« Comment ça ? » me répondit Carth. « e ne comprends pas où vous voulez en venir, Corem. Certes, elle n’est pas d’une première approche très engageante, mais c’est quelqu’un de très estimable. Elle est bien plus sage qu'on se l’imagine, et, pour l'avoir spécialement côtoyée avant qu'on arrive ici, je dirais même qu’elle sait être d’une compagnie humainement enrichissante. Elle m’est apparue comme quelqu’un de fiable, digne de confiance, capable de prendre du recul sur les évènements et sur ses propres agissements. »


Je restai bouche bée. Je n’en croyais pas mes oreilles. Je fixai Carth pendant quelques instants avant de répondre à ses dernières paroles, qui, de mon point de vue, semblaient provenir d’une autre dimension.


« De qui on parle, là ? » demandai-je d'un ton sarcastique. Carth me scrutait sans dire un mot, comprenant bien sûr que ma question ne nécessitait pas une réponse réelle.


« Vous voulez dire qu'elle vous a déjà laissé parler sans vous démolir et vous piétiner juste après ? Est-ce que la femme que j’ai sauvée est bien cette même femme dont vous me faites l’éloge ? Vraiment, éclairez-moi, Carth, » ajoutai-je.


Carth avait l’air de se noyer dans cette atmosphère de profonde incompréhension. Il comprit enfin que je ne faisais pas référence à cette incartade sur l’Endar Spire.


« Elle vous a encore malmené ? » questionna le Lieutenant.


« Parce qu'avec vous, elle est toujours aimable ? » demandai-je immédiatement.


« Eh bien, comme je vous l'ai dit, si on met de côté son attitude de tout à l'heure, je e n'ai pas tant de reproches à lui faire, » admit le Lieutenant, presque gêné, qui, visiblement n'avait pas le droit au même traitement que moi.


Vexé, je détournai le regard vers mon verre posé sur le plateau de la table, le tenant fermement entre mes mains. Je secouai la tête avec exaspération, laissant échapper un soupir d'impuissance, puis je repris :


« C’est bien ce que je pensais. Je ne lui reviens pas. Soit. On n’est pas obligé de tous s’aimer, mais elle n'a pas le droit de me rabaisser à chaque occasion qui se présente, qu'elle soit ma supérieure ou non. Bon sang, moi aussi je me suis démené comme un fou pour la sortir de là ! Je ne demande même pas qu'elle me remercie, mais j'aimerais qu'elle cesse de s'acharner sur moi sans raison valable. »


« Je ne sais pas quoi vous dire, » confessa le Lieutenant, les yeux dans le vague. « Si jamais elle tentait à nouveau de vous nuire, de quelconques façons, je vous soutiendrai. Je ne suis pas un officier général, mais j'ai l'oreille de certains hauts gradés. Mais je ne suis pas très inquiet. Elle est butée, mais ce n'est pas quelqu'un de mauvais. »


« Merci Carth, » repris-je avec reconnaissance. « J'apprécie. »


« Ne me remerciez pas. Je vois bien ce que vous valez. Et même si j'ai une certaine estime pour elle, je ne permettrai pas qu'un homme aussi fiable que vous soit injustement maltraité. Même par elle. »


Je regardai mon Lieutenant avec gratitude. Je décidai de lever très légèrement mon verre, comme pour faire honneur à l'homme en face de moi. Carth imita mon geste, un sourire bienveillant aux lèvres. Nous bûmes alors chacun une gorgée de notre breuvage respectif, et cessâmes notre échange, portant attention à l'arrivée prochaine du mystérieux Mandalorien, qui fit son apparition une dizaine de minutes plus tard. 


« Il est là, » indiquai-je à Carth d'un murmure.


Le mercenaire était à une vingtaine de mètres de nous, tournant la tête de tous les côtés, très certainement à ma recherche. Carth leva alors une main timide pour indiquer notre présence à l'homme, qui dirigea alors son attention vers notre table. Il afficha d'abord un air incertain, à la vue de mon Lieutenant, qu'il n'avait pas sollicité. Cependant, lorsqu'il sembla m'apercevoir à son côté, il initia le pas vers nous. 


Canderous Ordo était un type plutôt impressionnant : malgré une taille plutôt standard, il avait des épaules et un buste particulièrement larges. Et le vêtement sans manche qu'il portait révélait une musculature dessinée et volumineuse. Il avait un visage très symétrique, une mâchoire carrée, un regard assez peu chaleureux. En bref, un type qu'on n'éviterait de trop ennuyer. Néanmoins, ses cheveux grisonnants et ses quelques rides ne pouvaient cacher le fait que l'homme n'avait plus vingt ans. Pourtant, alors que je l'observais traverser la cantina pour nous rejoindre, il était clair qu'il éveillait les craintes autour de lui. Clients et personnel se retournaient à son passage, tous affichant une expression inquiète. Ordo était connu ici. Tous le monde pouvait reconnaître le Mandalorien lorsqu'il surgissait.


« Vous aviez peur de venir seul ? » aboya tout à coup le Mandalorien, qui avait finalement rejoint notre emplacement.


Abasourdi par un tel ton, je lançai un regard surpris vers Carth, qui me le rendit aussitôt. Décidément, j'étais manifestement destiné à rencontrer les personnes les plus désagréables de ce système. Je tournai alors la tête vers l'homme de main, qui, se tenant debout à côté de notre table, soutenait mon regard avec impatience.


Je regardai Canderous avec audace, jouant le jeu qu'il avait lancé. « Et alors ? » lui dis-je d'un ton provocateur. « Je ne suis pas un combattant. Je ne suis qu'un type ordinaire. Quelle honte il y a à vouloir se montrer prudent lorsqu'on se trouve face à un Mandalorien, qui plus est le bras armé du seigneur du crime local ? » ajoutai-je avec insolence, maintenant mon regard fixé sur Canderous.


Quelques courtes secondes passèrent, et je vis l'homme soudainement adopter une expression presque enthousiaste, un sourire amusé remplaçant la moue fermée qu'il affichait jusque-là. Il se tourna, saisit une chaise à une table derrière nous par le dossier, et vint s'installer à côté de nous. Il leva ensuite une main et claqua des doigts en direction d'un serveur proche, celui-ci hochant la tête avec zèle, et trottina vers le bar où un Rodien s'affaira aussitôt à la confection d'une boisson. Canderous dirigea ensuite son attention vers moi, toujours souriant. 


« Ils savent ce que je veux, » me dit-il avec fierté. Sans transition, il revint vers les dernières paroles que j'avais dites. « Pour un type ordinaire, vous avez fait beaucoup de bruit dernièrement. Et ce n'est pas qu'une métaphore. »


Je me contentai d'observer le Mandalorien, sans dire un mot. Carth faisait de même. Il n'était de toute façon pas le centre des attentions d'Ordo.


« Et dites un peu ! » poursuivit l'homme de main vivement, comme s'il venait subitement de penser à quelque chose. « Il est où le joli prix que vous avez remporté ? » me demanda-t-il avec un sourire, cette fois-ci, curieux. « Je peux vous assurer que tous les pilotes étaient très motivés cette saison. Vous la gardez chez vous ? Vous allez la revendre ? »


« Vous la voulez ? » dis-je alors avec urgence, proche de couper la parole au Mandalorien. « Si je pouvais, je vous en ferais cadeau, croyez-moi. Mais vous risqueriez de vite déchanter. Vous m'en voudriez, » ajoutai-je sur un ton entre la plaisanterie et l'exaspération réelle.


Carth m'assena alors un coup de coude assez violent pour me provoquer une vive mais courte douleur au bras. Je lui lançai un regard froid, et poursuivit en direction du Mandalorien, qui semblait de plus en plus jovial à notre contact.


« Mais apparemment, tout le monde n'est pas de mon avis. » 


Le serveur sollicité plus tôt par Canderous apparut à notre table, et vint déposer la boisson commandée devant l'homme de main. Avant de disparaitre, il s'inclina très légèrement, en signe de respect pour le Mandalorien, qui ne sembla pas y prêter attention. Il saisit aussitôt le verre et but une généreuse gorgée de son breuvage. 


« Si vous êtes venu pour négocier cette femme, » repris-je avec certitude et avec le sérieux que la situation nécessitait. « Vous perdez votre temps. Il est bien sûr hors de question que nous la cédions à qui que ce soit. »


Canderous me fixa alors, étrangement perplexe, puis fixa ensuite Carth ; il fit deux ou trois allers-retours ainsi, avant de répondre, sur un ton taquin :


« Comment ça 'nous' ? » commença-t-il, les sourcils exagérément levés. « Oh ! Mes excuses, » poursuivit l'homme en surjouant la surprise. « Vous vivez ensemble ? C'est une garde partagée ? Pardon, je ne m'en étais pas rendu compte ! C'est vraiment touchant. »


Carth et moi regardâmes l'homme avec une pointe de lassitude. 


« Je sais parfaitement qui vous êtes, tous les deux, » reprit le Mandalorien, qui s'était alors approché de nous, et avait adopté un volume bien plus discret. « Et je sais aussi que ce si joli prix n'est pas une simple officier de la République. Je suis d'ailleurs très surpris que Brejik ne l'ait pas reconnue. Enfin, ça ne fait que prouver une fois de plus que c'était un arriéré. Et, par ailleurs, vous croyez que je ne sais pas qu'elle a largement contribué, si ce n'est initié le bazar qui a suivi votre course ? »


« Vous n'êtes pas 'normal', et elle non plus. Et ça tombe bien, car, pour mon très prochain projet, il me faut des personnes atypiques, » déclara l'homme de main avant d'être presque coupé par Carth.


« Que voulez-vous ? » demanda l'officier qui paraissait préoccupé par les derniers propos du Mandalorien. Canderous lança alors son attention vers mon Lieutenant, et lui répondit avec sérieux :


« La même chose que vous tous. Je veux quitter cette fichue planète. Mais on sait tous que c'est impossible pour le moment. »


« Pourquoi nous solliciter si, à votre sens, c'est impossible ? Et pourquoi vous voulez quitter Taris ? » Poursuivit Carth.


« Parce que je sais comment rendre cet objectif atteignable. Mais ce ne sera pas une promenade de santé. Quant à mon souhait de quitter la planète : regardez un peu atour de vous ! Je n'ai plus rien à attendre de Taris. Les Sith ont placé une quarantaine stricte, des lois martiales ont été adoptées dernièrement. Ils feront tout pour retrouver votre amie. Et croyez-moi, les dignitaires républicains n'agissent pas contre les Sith ; Dreshan Norr est à la botte de Malak, il est prêt à tout pour préserver son rang. J'ai combattu lors des guerres mandaloriennes. Je sens quand quelque chose va mal tourner. Et les prochaines semaines, ou peut-être même les prochains jours vont être sombres, j'en suis sûr. »


Ces paroles provoquèrent chez moi un tressaillement de stupeur. Dreshan Norr. La passation. C'était lui ce jour-là, en charge de débusquer Tavhir de son terrier et d'installer Bastila Shan au commandement de l'Endar Spire. Il serait à la botte du Seigneur Noir ? Serait-il responsable de l'attaque de notre croiseur, juste au dessus de Taris, planète dont il était le représentant officiel ? Comme par hasard, lors du crash des capsules de sauvetage, l'armée Sith était déjà très confortablement installée, comme si elle n'attendait plus que le piège se refermât sur nous. L'idée était insoutenable, mais il fallait l'accepter : le Sénateur était un traître. 


« Bon sang ! » poussa vivement Carth, abattant son poing sur la table. « On s'est tous fait avoir ! »


« Du calme Carth, » répliquai-je avec douceur. L'homme ne réagit pas physiquement, mais sembla se tranquilliser. « Qu'avez-vous en tête, Canderous ? »


« Il n'y a qu'un seul moyen de quitter Taris. L'Ebon Hawk, » annonça l'homme solennellement.


« L'Ebon Hawk ? » répéta Carth.


« C'est un petit vaisseau cargo. Il est la grande fierté de Davik, car c'est certainement l'un des tas de ferrailles les plus rapides de la Bordure Extérieure. Seulement, depuis l'arrivée des Sith, le vaisseau n'a plus jamais quitté les hangars de Davik. Si on veut s'en aller, il nous faudra ce vaisseau. »


« C'est formidable ! » s'exclama Carth. « Votre statut au sein de l'Echange devrait nous permettre d'approcher le vaisseau facilement, non ? »


« Bien sûr. Mais il y a d'autres paramètres qu'il nous faut régler avant même de penser poser un doigt sur la tôle de ce coucou. »


Canderous tourna la tête, comme pour s'assurer qu'il ne trainait pas d'oreille indiscrète. Puis il regagna sa posture précédente, et, toujours aussi discrètement que possible, il reprit ses explications :


« On ne quittera jamais la planète en un seul morceau sans les coordonnées et les autorisations nécessaires. Si on décidait de s'envoler sans ça, les systèmes de défense Sith nous réduiraient en charpie avant même qu'on ait rejoint l'atmosphère. Il nous faut les codes d'autorisation de sortie. Et ces codes peuvent être récupérés dans la base militaire Sith du quartier administratif. »


« Vous songez à vous infiltrer dans une base militaire Sith ? » demandai-je avec perplexité.


« Moi, certainement pas, » répliqua le Mandalorien presque amusé par la question. « Vous serez très bien pour ça. »


« Je vois, » reprit Carth désabusé. « Ca a tout un tas de 'bonnes' idées, mais pour l'exécution, il faut repasser. »


« Je suis en mesure de vous fournir un vaisseau, » se défendit Canderous. « Je crois que c'est là un élément indispensable à votre fuite, non ? »


« La vôtre aussi, » ajoutai-je, les bras croisé, tentant au mieux de montrer mon mécontentement au mercenaire. 


« En effet, » admit-il. Quelques secondes passèrent, puis il reprit : 


« Je pourrais participer à cette petite sauterie. Mais dites-vous que mes moindres faits et gestes sont scrutés et rapportés à Davik. Si on apprend que je m'amuse à infiltrer une base Sith, soyez certains que Davik va très vite établir les liens et comprendre que je projette de voler l'Ebon Hawk. Et là, on peut tous dire adieu à notre saufconduit. »


Carth me lança un regard défait. Je poussai un soupir las et bus la dernière gorgée de ma boisson.


« Ca fait mal de l'admettre, mais ça se tient, » déclara finalement Carth. 


« Bon, est-ce que nous collaborons ? » pressa le Mandalorien.


« Est-ce qu'on a d'autres alternatives ? » dis-je sans attendre de réponse. 


« Parfait. Vous pouvez me faire confiance, » nous assura le mercenaire. « Pour démontrer ma bonne foi, je vous invite à rejoindre au plus vite le quartier commerçant, où vous pourrez trouver le commerce d'une 'cliente' qui doit de l'argent à Davik. Elle possède la boutique de droïdes, pas très loin de la base Sith. Vous lui demanderez de ma part de bien vouloir vous céder T3-M4, un petit tas de boulons à roulettes, capable de contourner certains systèmes de sécurité Sith. Il pourra vous faire entrer dans la base. Elle ne vous posera pas de question, ne vous en faites pas. »


« Vous nous demandez de dépouiller une pauvre femme de sa marchandise ? » questionnai-je alors, sur ton quelque peu scandalisé, ce qui sembla provoquer un certain agacement chez le Mandalorien, qui répliqua aussitôt avec pédagogie.


« Ce n'est pas 'une pauvre femme'. C'est une personne qui est venue trouver Davik pour de la trésorerie, et qui n'a pas été en mesure de rembourser dans les temps. Ce sont les affaires. Elle doit de l'argent, elle n'en a pas, nous compensons notre perte d'une autre manière. On ne l'a pas forcée à nous en emprunter. Après, si vous souhaitez payer le droïde, libre à vous. Il vaut cinq mille crédits. En temps normal, je serais venu récupérer cette argent après votre passage, mais j'avoue ne plus avoir grand chose à faire des petites transactions de l'Echange. Mais, dans l'immédiat, on a besoin de ce droïde. Et les malheurs de cette femme nous arrangent tous. »


J'aperçus Carth lever les sourcils en désapprobation. Mais il ne broncha pas. De mon côté, j'avais une furieuse envie d'envoyer le Mandalorien paître, et trouver une autre solution pour pénétrer la base. Néanmoins, force était de constater qu'on ne pouvait pas se permettre d'être exigeants. Ce que nous devions à présent faire était totalement immoral, mais nous n'avions pas le choix. Il fallait quitter Taris. La survie de Bastila Shan valait largement cet écart éthique ; d'ailleurs cette idée, qui devait pourtant me rasséréner, eut le don de m'irriter encore davantage. 


« Entendu, je marche, » finis-je d'une voix dépitée. Carth se courba pour venir me tapoter solidairement l'épaule avant de regagner sa position initiale et ajouta :


« Alors ne perdons pas plus de temps. En route, Corem. Nous en profiterons pour rappeler notre petit duo, qu'elles ne se mettent pas dans une situation compliquée pour rien. »


Je hochai la tête en approbation. Carth et moi nous levâmes de notre place et, après avoir salué brièvement le Mandalorien, quittâmes la cantina, en direction de la fameuse boutique.



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