Prends garde

Chapitre 10

7350 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/11/2016 06:07

Le deuxième soir de leur relation, Derek décida d’emmener Stiles au cinéma. L’adolescent n’y vit aucun inconvénient si ce n’était les films qui étaient à l’affiche. Il avait déjà vu les films à gros succès une ou deux fois avec Scott et les autres. Quant aux films indépendants, ce n’était pas sa tasse de thé. Il y avait bien cette comédie avec quelques acteurs très connus. Cependant, il n’était pas certain que cela pouvait intéresser son petit-ami loup-garou. Le principal intéressé se contenta d’afficher un large sourire et de hocher la tête d’un signe entendu.

Dans la file pour la billetterie du cinéma, attendant sagement leur tour, Derek Hale tenait la main de Stiles qui regardait autour de lui, cherchant des têtes connues ou des élèves de l’école de Beacon Hills. Tout ce qu’il put entr’apercevoir était des couples de tout âge, quelques enfants et deux ou trois têtes qu’il connaissait de l’école et dont il ignorait totalement le nom. Il sentit Derek lui tirer légèrement sur le bras pour le faire avancer. Il haussa les épaules d’un air résigné et suivit le loup. L’employée de cinéma, une jeune fille aux cheveux blonds attachés en un chignon sévère, les dévisagea un court instant tandis que l’Alpha demanda deux billets pour le film comédie. Stiles avait déjà vu cette fille au bureau de son père. Elle avait conduit en état d’ébriété et avait eu son permis retiré. Peut-être qu’elle reconnaissait le fils de celui qui l’avait condamné à rester piéton quelque temps. Derek paya en essayant de paraître plus courtois que froid comme à son accoutumée. Stiles profita d’une demi-seconde pour tirer la langue à la vendeuse qui lui décocha en retour un regard noir. L’adolescent ne put s’empêcher de pouffer de rire tandis que le loup, fronçant les sourcils, lui lança un regard rempli de reproches.

Les billets en main, ils se dirigèrent vers la salle de projection, arpentant plusieurs couloirs, passant à côté de groupes de personnes qui s’agglutinaient contre la porte d’entrée de leur propre salle, attendant l’ouverture pour avoir la meilleure place. Stiles ne fut pas surpris en constatant que la salle de projection de leur film était totalement vide. Il y avait deux autres couples assis à deux extrémités de la salle. Derek parcourut les alentours du regard et, avant même qu’il eût le temps de décider d’un parfait emplacement, Stiles tira sur sa main pour l’entraîner un peu plus loin, montant les estrades, se faufilant dans une rangée et prenant place de telle manière à être assez loin des deux autres couples — qui ne pouvaient pas les voir à moins de se retourner — et à pouvoir apprécier de cet emplacement situé presque parfaitement à la moitié de la rangé de fauteuil. Derek prit place à la droite de Stiles qui sortit son téléphone pour l’éteindre avant d’enlever son manteau et le poser sur le siège à sa gauche. Derek observa en silence un instant les gestes de l’adolescent jusqu’à ce que celui-ci décide d’étendre les jambes et de mettre ses pieds sur le haut du siège en face de lui. Derek réprima un soupir d’exaspération avant de donner une petite claque sur le genou de son compagnon pour lui faire comprendre qu’il ne devait pas se mettre comme ça. Stiles leva les yeux au ciel avant de reprendre une position à peu près normale, croisant les jambes, posant sa tête sur sa main droite d’un geste qui se voulait agacé. Derek n’y prêta aucune attention.

Un des couples de la salle se blottit, un bras entourant les épaules de l’autre. Une des deux personnes posa la tête sur l’épaule de son camarade. Stiles trouva que cette expression d’affection était parfaite dans la catégorie « niaiserie » dans le coin de son cerveau. Derek lui caressait les doigts avec les siens tandis que leurs mains étaient toujours entrelacées. Il consultait son téléphone : il avait quelques messages d’Isaac ainsi que de son oncle. Stiles détourna les yeux du couple — il lavait surnommé le couple « gnangnan » dans un coin de sa tête — et regarda Derek parcourir son téléphone à l’aide de sa seule main libre. Se sentant observé, le loup leva les yeux vers le fils du Shérif.

« Tu devrais l’éteindre, fit l’adolescent en désignant l’appareil de son menton. La dernière fois, Scott avait oublié de le faire et ça a sonné en plein film. Évidemment, durant une scène silencieuse et avec du suspens du genre “le méchant va venir découper en rondelle les héros dans une minute à l’autre”. Lydia a tellement eu peur qu’elle lui a donné un coup sur tête avec son sac à main. C’était assez drôle en fait.

— Je ne crois pas que dans le nôtre il y ait un meurtrier, répondit doucement Derek avec un léger sourire. »

Stiles haussa les épaules avant de s’étirer en long et en large, libérant par la même occasion la main du loup-garou.

« C’est sûr que dans un film de comédie, il n’y a aucun risque que je sursaute et que je vienne me blottir contre toi à la recherche de réconfort, fit remarquer l’adolescent. Et même si cela avait été un film d’horreur, crois-moi, j’ai une bonne résistance à tous les gens d’effet de suspens et aux effets spéciaux un peu effrayants. (Il baissa d’un ton, l’air un peu penaud), mais par contre, je n’arrive pas à supporter la vue du sang. Que ce soit à la télé ou… dans la vie. C’est pas un peu bizarre ? »

Derek afficha un sourire timide avant de se pencher pour l’embrasser. Stiles se raidit à son contact, ne ferma pas les yeux et étouffa un début de phrase incompréhensible entre leurs lèvres.

« Ce n’est pas bizarre, affirma doucement Derek en s’écartant de lui.

— Pourquoi dans les films d’horreur, il faut toujours que ces crétins se séparent en plusieurs groupes alors que le méchant est prêt à tous les tuer ? »

À la surprise de l’adolescent, le loup pouffa de rire. Il secoua la tête de gauche à droite avant d’ébouriffer doucement les cheveux de Stiles et de lui passer un bras sur les épaules afin de l’attirer un peu plus contre lui. L’adolescent poussa un long soupir et se laissa border. L’Alpha lui caressa la joue du bout des doigts de sa main posée sur son épaule. Dans un geste espiègle, Stiles tenta de le mordre. Il eut l’occasion que d’effleurer l’auriculaire. À ce moment-là, la salle s’assombrit doucement et Derek frôla à nouveau du bout des doigts le visage de l’adolescent. Cette fois-ci, tandis que la projection débuta, Stiles réussit à attraper un doigt avec ses dents. Derek ne fit aucun geste pour se libérer, observant d’un œil curieux l’adolescent. Celui-ci, comme figé, réfléchit à ce qu’il devait faire de cet index entre ses lèvres. La chaleur humide de la bouche de Stiles autour de son doigt fit frissonner l’Alpha de la tête au pied. Il se pencha vers le visage de l’adolescent pour l’embrasser tout près du nez. Il déposa des baisers le long de sa joue, sur le menton avant de s’attarder sur la peau délicate du cou de l’hyperactif.

À l’écran, le film avait commencé sur un long défilé de montagnes et de routes avec quelques noms d’acteurs qui s’affichaient les uns après les autres. Un des personnages principaux introduisait l’intrigue, assis dans un canapé dans un salon blanc.

Stiles essayait de se concentrer sur cet acteur racontant ses déboires avec les femmes tandis que le loup continuait à l’embrasser à la base du cou, sa barbe de quelques jours lui chatouillant doucement la peau. Sans vraiment y prêter attention, la langue de l’adolescent effleura le bout du doigt prisonnier ; alors que l’un des acteurs claqua la porte à un autre et que Derek mordilla gentiment son petit-ami, Stiles ferma les yeux avant de se mettre à sucer cet index du bout des lèvres. La main libre de l’Alpha s’insinua sous le pull de l’adolescent jusqu’à se poser sur la hanche du côté opposé.

Une actrice aux cheveux blonds vénitiens passa un coup de téléphone à un des héros tandis que le loup aspira la peau pâle de son petit-ami avant de l’effleurer avec les dents. Le cœur battant à tout rompre, Stiles réprima un râle, se mit à lécher de façon sinueuse l’index, essayant toutefois de se concentrer sur les dialogues et autres sons venant de la projection pour éviter de perdre totalement pied. Derek se pencha un peu plus contre l’adolescent, parcourant chaque parcelle de peau de son cou de ses lèvres. Sa main libre quitta la hanche pour descendre et se faufiler sous le t-shirt de Stiles. Sous ce contact, l’hyperactif frissonna des pieds à la tête avant d’aspirer et de lécher goulûment le doigt du loup-garou qui fut bientôt rejoint par un autre que l’adolescent accueillit avec la langue sans ménagement.

À l’écran, la voiture d’un des personnages secondaires percuta un arbre sous une pluie battante. Un des couples trouvait le film beaucoup trop ennuyeux et préférait s’embrasser tandis que l’autre à l’autre bout de la salle n’en perdait pas une miette, la tête de l’un sur l’épaule de l’autre.

Placés plus haut qu’eux dans les rangées, Stiles et Derek Hale n’avaient pas vu plus de dix secondes du dit film. Les bras de l’adolescent étaient posés contre l’appui-tête de son siège. Ses jambes étaient décroisées, les pieds appuyant de toutes leurs forces contre la rangée devant eux. Derek était presque totalement tourné vers le fils du Shérif, ne se préoccupant pas des sons et de la musique venant de la projection ou des murmures des autres spectateurs. Son ouïe était concentrée sur la respiration de Stiles et sur les gémissements que ce dernier essayait tant bien que mal d’étouffer entre diverses succions sur les doigts de l’Alpha.

Derek se mit à alterner morsures et baisers dans le cou de Stiles avant de remonter vers son menton et de lui lécher la joue tout près du nez tandis que l’hyperactif ne put réprimer un gémissement, prêt à mordre les doigts entreprenants de l’Alpha pour tenter de garder le peu de raison qu’il lui restait.

Cela faisait juste deux soirs qu’ils étaient ensemble. Derek perdait tout contrôle de lui-même en touchant Stiles qui se raidissait sous ses caresses avant d’abandonner à son tour toute résistance. S’ils ne se trouvaient pas en ce moment même dans une salle de cinéma, un lieu public, le loup aurait déjà déshabillé entièrement son petit-ami avant de le plaquer contre le sol et de s’unir à lui comme il en avait toujours eu envie de le faire depuis leur rencontre.

La respiration haletante, Stiles retira doucement les doigts de sa bouche non sans les avoir léchés goulûment une dernière fois et entoura le cou de l’alpha de ses bras frêles avant de l’embrasser langoureusement. Derek attira l’adolescent un peu plus contre lui, lui caressant le dos sous le t-shirt tantôt avec douceur tantôt avec force. Il quitta ses lèvres pour lui mordre la base du cou avant de l’embrasser à nouveau passionnément. Stiles n’arrivait plus à penser ou à respirer. Il ne contrôlait plus rien. Même son instinct de survie qui le commandait d’être sur ses gardes depuis des semaines n’avait plus la force de résister face aux caresses incessantes et remplies d’affections sincères de l’Alpha.

Serrés l’un contre l’autre, ils continuèrent à s’embrasser durant le reste du film, tentant tant bien que mal de rester conscients de la nature de l’endroit où ils se trouvaient. De temps à autre, Derek Hale brisa leur étreinte pour s’attarder sur le cou de son vis-à-vis tandis que ce dernier lui massa la nuque du bout des doigts, la tête légèrement penchée en arrière, offrant sa peau délicate au loup.

À la fin du film, Stiles se trouvait assis sur les genoux du loup avec qui il échangeait des baisers devenus chastes. Quand ils sortirent de la salle de projection, l’adolescent dont les joues étaient légèrement rougies eut besoin que de deux choses : boire et d’un peu d’air frais. Derek, quant à lui, serrant la main de son petit-ami fermement dans la sienne, eut juste envie de le raccompagner dans son loft et de reprendre là où ils s’étaient arrêtés. Cependant, l’Alpha mit cette idée dans le coin de la tête, préférant reprendre le contrôle de lui-même et surtout, il ne voulait pas brusquer Stiles. C’était peut-être idiot compte tenu du fait que l’adolescent avait semblé être réceptif aux caresses. Néanmoins, le lycanthrope l’avait senti se crisper à chacun de ses baisers. On n’était jamais trop prudent.

Stiles aperçut la vendeuse blonde de la billetterie, toujours à sa poste. Il se demanda quand se terminait son travail, avait-elle le droit de visionner un film sans payer et si elle avait de nouveau son permis de conduire.

Derek proposa tout de même à l’adolescent de l’emmener au loft sans pour autant émettre la moindre raison si ce n’était de passer du temps ensemble. Ce dernier déclina l’offre après avoir consulté l’heure sur son téléphone et s’être souvenu que son père devait être dans le canapé du salon à l’attendre.

Stiles se doutait que le loup souhaitait finir autrement cette soirée. Il n’était absolument pas contre. Cependant, et comme pour le reste de leur relation éphémère, il n’arrivait pas à faire abstraction de cette peur constante de Derek Hale qui lui nouait l’estomac. Même si son cerveau arrivait à l’oublier sous le feu de la passion. C’était tellement ironique et stupide.

Pour l’heure, il voulait s’en tenir qu’à une soirée cinéma. Le reste viendra plus tard — ou peut-être ne viendra pas. Arrivé à la Camaro noire, Stiles se tourna vers son propriétaire qui lui tenait la main, les doigts entrelacés :

« Tu sais, je me disais que ce serait bien si tu m’envoyais des messages durant la journée. Du genre, pour me mettre de bonne humeur avant de partir à l’école. Un le matin et un avant de me coucher. Pas des trucs super philosophiques ou quoi. Ne te sens pas obligé non plus de m’écrire un roman. Juste un truc du genre “passe une bonne journée”. Ou… bref, tu trouveras bien un truc quoi. »

Derek acquiesça doucement avant de lui déposer un baiser sur le sommet du crâne et de lui ouvrir la portière de la voiture. Stiles s’y engouffra non sans lui avoir soufflé un merci. Derek fit le tour du véhicule avant de s’y faufiler à son tour, derrière le volant. Stiles consulta les messages sur son téléphone. Son père voulait savoir quand il comptait rentrer vu que le lendemain, bien évidemment, il avait cours. L’hyperactif pianota une réponse bateau au Shérif de Beacon Hills avant de se tourner vers le loup-garou qui mit le contact.

« C’est quand la pleine lune, encore ? » 

Derek se frotta les yeux du bout des doigts avant de démarrer la voiture :

« Vendredi soir. Les Alphas ne craignent pas la pleine lune, si c’est ce que tu veux savoir.

— Non, pas vraiment, répliqua doucement l’adolescent en rangeant son téléphone dans la poche de son pantalon. Ce serait à moi de craindre ce genre de choses, non ? Avec Scott, Isaac et peut-être d’autres loups dans cette ville de fous… et peut-être même Jackson s’il décide de revenir ici en fusée juste pour me mordre la jambe de rage.

— Isaac sait se contrôler. Quant à ton ami Scott McCall, il a mainte fois prouvé que sa petit-amie archère était capable de le calmer. Je ne me fais pas de souci.

— Isaac sait vraiment se contrôler ? répéta Stiles en faisant volontairement fi de la partie sur son meilleur ami. Même si on l’enferme dans la cave ?

— Stiles, pourquoi on ferait un truc pareil ?

— Je ne sais pas. Je te demande juste d’imaginer.

— Et bien j’imagine très bien Isaac en pleine crise de panique. Ce n’est pas parce qu’il est devenu un loup-garou qu’il n’est plus claustrophobe.

— C’est tout de même de l’arnaque ce truc, soupira Stiles en s’étirant en long et en large avant de bâiller à s’en décrocher la mâchoire. »

Derek choisit de ne pas répondre à la remarquer de l’adolescent, préférant prendre la route vers la demeure de Stilinski. Il aurait voulu lui expliquer longuement sur le fait que la morsure pouvait aider à guérir des problèmes physiques comme l’asthme pour Scott ou l’épilepsie pour Erika, mais que cela n’avait absolument aucun effet niveau psychique (et il n’avait aucune idée de la raison d’ailleurs). Bien évidemment, Isaac avait été prévenu sur le fait qu’il aura toujours cette phobie tandis qu’Erika, bien qu’elle eût retrouvé confiance en elle, aurait toujours les souvenirs des humiliations et leurs effets sur son esprit.

C’était sans doute une des raisons pour laquelle Stiles refusait la morsure. Il savait que cela ne lui apporterait absolument rien. Il serait un as à la Crosse tout comme Scott, la rapidité, la force, la guérison assurée des blessures les plus graves ; cependant, ce qui lui pourrissait l’existence sera toujours là à savoir ses attaques de paniques, ses crises d’angoisses, ses cauchemars les nuits quand son père ne donnait pas de nouvelles à cause de son travail ; la peur d’être abandonné ou de perdre quelqu’un. À quoi cela lui servirait-il de perdre son humanité pour si peu en fin de compte ?

Stiles était quelqu’un qui avait besoin de stabilité. Être un loup-garou était tout sauf quelque chose de stable. De plus est, il était fort probable que la lycanthropie exacerberait le côté angoissé et stressé de l’adolescent. Les nuits de pleine lune, il aurait peur de perdre le contrôle et de s’en prendre à son père ou à Lydia. Poussé à bout, il aurait peur de ses propres réactions. Même si Scott avait mis du temps à se contrôler et avait demandé de l’aide à Derek Hale, il n’était pas certain que Stiles en fît autant. Il était trop fier pour cela tout comme, il n’avait jamais l’envie d’embêter les autres avec ses propres problèmes. Stiles aimait simplement être humain, dans une meute de créatures surnaturelles. C’était tout simplement ça. Et Derek l’aimait bien trop pour lui infliger cela.

Sauf que tout cela n’était que du passé. Derek avait craqué et l’avait mordu par désespoir, croyant que cela était la meilleure solution à leur problème. À son problème. Il avait encore peur de lui malgré tout ce qu’ils avaient vécu. Malgré les sentiments sincères du loup-garou, l’adolescent se crispait, se montrait tellement indifférent aux démonstrations affectives, comme s’il se refusait à éprouver la même chose de peur de perdre le contrôle. Tout semblait être une question de contrôle avec Stiles Stilinski. S’il ne pouvait pas contrôler quelque chose, si quelque chose échappait à sa logique ou à son instinct, alors il en avait peur ; il fuyait même. Réflexe d’instinct de survie sans doute. Pourtant, son meilleur ami était un loup-garou et il ne l’avait jamais craint. Tout comme il n’avait jamais eu peur ni de Jackson ni d’Erika ni de Boyd ou même de ce stupide Isaac. Alors pourquoi Derek ? Parce qu’il était un loup-garou adulte ? Parce qu’il n’avait aucun moment de faiblesse ? Bien au contraire même. Derek cumulait les erreurs et les moments de faiblesse depuis qu’il avait recentré Stiles. Juste, peut-être, qu’il ne le montrait pas. Jusqu’à maintenant.

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Stiles se réveilla d’un sommeil sans rêves, allongé dans le lit de Derek Hale. Il battit des paupières avant de porter la main sur son front et de se tourner sur le côté. Il avait l’impression que sa tension artérielle était à un niveau catastrophique. Sa tête lui donnait la sensation d’être sur un bateau en pleine tempête ; ses oreilles bourdonnaient et son cou lui faisait souffrir comme si toute sa peau à ce niveau le tiraillait dans tous les sens. Le t-shirt qu’il portait n’était pas à lui ; il était bien trop ample. L’adolescent bougea d’un côté puis de l’autre, cherchant la bonne position pour tenter de contenir cette nausée qui commençait à lui étreindre la gorge. Il avait l’impression d’avoir très peu dormi, comme si son corps recherchait la paix, l’immobilité absolue et rien d’autre. Il ne se souvenait de rien mise à part la dispute dans l’ascenseur et Scott qui ne comprenait rien, assis à la table de la cuisine. Il avait récupéré sa jeep ; ça, il en était sûr, mais le reste était flou. Le visage d’un Derek extrêmement peiné lui revint en mémoire à mesure que les minutes s’écoulèrent. Leur rupture avait dû le toucher nettement plus que l’aurait voulu Stiles. De toute façon, cela avait été inévitable. Derek était amoureux de lui. L’adolescent n’avait pas eu besoin de ce message à l’école sur son téléphone pour s’en rendre compte. N’importe qui l’aurait compris. Même Scott si ce dernier avait été dans la confidence du leur couple passé.

Scott.

Stiles était allé chez lui après avoir récupéré sa voiture parce que son meilleur ami lui avait demandé de venir. Cette histoire de liste. Bon sang, Stiles avait été vraiment idiot. Et surtout égoïste dans un sens. Il devait arranger tout cela. Il n’avait plus aucune envie de se venger d’Isaac ou de lui créer de misères. Il s’en occupera dès qu’il en aura l’occasion.

Scott et Isaac.

Ils étaient ensemble maintenant, d’après ce que Stiles avait compris même si tout portait à croire que son meilleur ami était toujours très amoureux d’Allison Argent — ce qui avait le don de rendre l’hyperactif très perplexe. Il était clair à ses yeux que Scott et Isaac s’entendaient plutôt bien, mais de là à sortir ensemble, c’était plutôt inattendu. Bien sûr, Stiles ne remettait pas vraiment en cause de cette affirmation ; néanmoins, plus les heures passaient depuis qu’il était au courant de tout cela, plus il trouvait cela plutôt louche. Et il n’avait aucune idée de comment aborder la chose avec Scott sans que celui-ci demande justement comment son ami avait pu être au courant et surtout par qui. Ce qui ramènera indéniablement tout à Derek Hale.

Derek.

Stiles ne savait plus du tout où il en était. Il avait décidé de rompre avec lui, car c’était la meilleure chose à faire. Leur relation ne marchait pas. Néanmoins, il avait mal au cœur à y repenser, comme si cette rupture n’avait pas eu l’effet escompté. Il avait cru qu’une fois séparé, il verrait les choses plus simplement. Derek l’effrayait dans une certaine mesure. Cependant, il devait bien l’avouer qu’il appréciait certains moments avec le loup. Il n’arrivait pas à comprendre cette différence justement entre ces moments partagés avec l’Alpha où l’adolescent se crispait et tous les autres où il se serait damné pour être lové dans ses bras. À cause de ce dilemme dans un coin de sa tête, Stiles considérait que leur rupture avait été comme une sorte d’erreur. Cela ne marchait pas entre eux ; cependant, quelque chose soufflait à l’hyperactif qu’il se trompait lourdement. Ce n’était pas comme si c’était lui qui courait après Derek et que ce dernier l’envoyait sur les roses à chacune de ses tentatives désespérées pour être avec lui. C’était bien tout le contraire. Ce fut Stiles qui avait mené la danse dans cette histoire, peut-être même un peu trop. Pour l’heure, il était totalement perdu. Pourquoi cela devait-il être aussi compliqué ? Pourquoi ne pouvaient-ils pas être comme Scott et Alison, des amoureux « transis » ? Non, bien sûr que non. Il fallait que tout soit compliqué, difficile, à s’en taper la tête contre le mur.

Stiles avait très mal au niveau du cou, comme si sa peau avait été très sèche et qu’il tentait de tourner la tête. Les battements de son cœur tambourinaient au creux de ses oreilles, l’empêchant par la même occasion de se rendormir.

L’adolescent poussa un long râle d’exaspération avant de tirer la couverture à lui et d’enfuir la tête en dessous de celle-ci. Il ne se posa même pas la question de savoir où il se trouvait ou ce qu’il faisait exactement dans la chambre de Derek Hale un matin où il était censé avoir cours. Il ne se posa pas la question sur la raison de ce t-shirt ne lui appartenant pas. Tout ce qu’il voulait en ce moment était de fermer les yeux et de dormir. Il était terriblement exténué. Il n’avait aucune envie ni l’énergie de réfléchir ou de laisser son imagination vagabonder ou ses angoisses remonter sur le pourquoi du comment de cette douleur à la limite du supportable au niveau de sa gorge. Sa mémoire était fermée à toute investigation sur les événements de la soirée.

Bon sang, il voulait juste dormir. Dormir pendant des heures, des jours, des semaines peut-être.

Il se tourna, le dos sur le bord du lit. D’un geste lent, il effleura sa gorge. Il l’examina du bout des doigts, retenant son souffle. On lui avait mis un pansement. À la texture poisseuse du tissu, Stiles comprit qu’il fallait le changer. Il devait saigner abondamment. Peut-être avait-il perdu beaucoup de sang ? Était-ce pour cette raison que sa tête paraissait lourde ; cette nausée persistante, cette fatigue si dérangeante ? Il avait beau torturer sa pauvre mémoire dans tous les sens, il n’arrivait pas à se souvenir de cette blessure. Peut-être que Derek l’avait trouvé dans cet état et l’avait ramené chez lui ? Non. Il l’aurait amené à l’hôpital, voir la mère McCall plutôt que de risquer que cela s’empire comme cela semblait l’être.

Derek…

Il s’était rendu au loft. C’était cela. Il devait y venir pour récupérer quelque chose. Son sac de cours, peut-être ? Il n’arrivait pas à se souvenir exactement. Il avait vu Derek Hale. Ils s’étaient parlé. Ils s’étaient un peu disputés. Juste légèrement. C’était normal. Derek avait paru ne pas accepter cette rupture. Et c’était tout ce qui était de plus normal. Stiles ne pouvait pas lui en vouloir de ce côté-là. Il aurait sans doute réagi de la même manière à cette place. Cependant, l’Alpha devait accepter cette réalité : ils n’étaient plus ensemble, point final.

Stiles se tourna et se retourna sous la couette, à la recherche d’une position où sa tête ne lui semblera pas être sur le point d’imploser.

Des baisers et des caresses entreprenants…

L’adolescent se frotta les yeux du bout des doigts en essayant de rassembler les morceaux de souvenirs qui émergeaient par à coups.

Une vive douleur à la base du cou. Comme une…

Morsure ?!

Stiles se redressa dans un sursaut avant de regretter son geste à cause de divers vertiges. Il se massa les tempes avant de tenter de s’extirper du lit. Ses jambes l’abandonnèrent et il se retrouva mains et genoux au sol. Il inspira un grand coup avant de se relever sans succès. Cette sensation de faiblesse le rendit amer ; l’adolescent rampa lentement en maugréant vers la salle de bain au fond de la pièce. Arrivé à la hauteur de l’évier, il se hissa le mieux qu’il put. Il ne leva pas tout de suite la tête vers le miroir, reprenant doucement son souffle, les battements de son cœur lui martelant les tympans. Il posa une main tremblante sur le pansement poisseux, ferma les yeux quelques instants, se préparant à tout et surtout au pire avant de les ouvrir lentement. Il avait une mine affreuse, d’une pâleur extrême ainsi que des cernes comme s’il n’avait pas dormi depuis des jours. D’un geste tremblant, il s’empara d’un bout de ce pansement dont la couleur avait viré au rouge foncé.

Il devait savoir. Il devait savoir si cela avait cicatrisé, s’il était devenu un… oui, il devait le savoir.

Il compta mentalement jusqu’à cinq avant de tirer sur le pansement d’un geste peu assuré et à la fois, assez brusque pour l’arracher de sa peau. Il réprima un cri de douleur avant de reprendre doucement sa respiration, une fois le choc passé. Il cligna lentement des yeux avant de tendre la main droite et toucher du bout des doigts son reflet dans le miroir.

Ce que recouvrait le pansement ressemblait bel et bien à des traces de crocs enfoncés dans sa chair. Son sang n’avait pas parfaitement coagulé et toute la plaie semblait fraîche, profonde et surtout, elle ne cicatrisait pas. Du moins, pas à la manière d’une créature comme Scott ou Isaac.

Stiles se sentait un peu plus léger. Cependant, son état de fatigue et de faiblesse extrême était un tout autre problème maintenant. Il avait dû perdre trop de sang et… Derek n’avait pas eu la bonne idée de l’emmener à l’hôpital plutôt que le garder chez lui, au chaud, dans sa tanière, jusqu’à sa possible transformation. De dépit, Stiles donna un coup de poing dans le miroir — qui resta intact — avant d’étouffer un cri de douleur et de secouer vivement sa main droite.

Stupide loup-garou. Stupide Alpha. Stupide Derek Hale.

Le transformer de cette manière et surtout contre son gré. Bon sang, il croyait que Derek était différent, qu’il n’était pas comme son oncle à mordre les gens sous prétexte qu’il avait besoin d’une meute.

Si, Derek était différent. Il avait mordu Stiles non pas parce qu’il avait besoin de lui dans sa meute devenue très restreinte, mais juste parce qu’il avait cru que cela résoudrait tous leurs problèmes compte tenu du fait que l’adolescent avait insisté sur cette peur irraisonnée de l’Alpha. Comment ne plus avoir peur de cet Alpha ? En devenant son Beta. C’était la seule solution qui était venue à l’esprit de ce stupide Derek Hale. Non, vraiment, c’était la pire des solutions, même. Qu’espérait Derek en faisant cela ? Que Stiles allait lui tomber dans les bras en étant un loup-garou alors qu’il avait toujours dit et répété aimer son humanité plus que tout ? L’adolescent avait envie de hurler sa rage et son incompréhension à plein poumon, mais il n’en détenait plus du tout la force. La morsure n’avait pas fonctionné et c’était presque un miracle. Néanmoins, cela amenait un tout autre problème : comment Derek allait-il réagir face à cela et surtout, allait-il tenter de le mordre à nouveau ?

Il s’affala contre la paroi de la douche, juste à côté de l’évier, rapprochant son genou de sa poitrine avant de poser son coude sur ce dernier. Il passa une main tremblante dans ses cheveux ébouriffés avant de laisser échapper un lourd sanglot. Il avait juste voulu mettre les choses au point, expliquer calmement que non, leur relation ne pouvait pas fonctionner — surtout après ce qui venait de se produire même si Stiles avait de l’espoir dans le creux de son cerveau que celui qui l’avait mordu n’était pas Derek, mais un tout autre Alpha ce qui était de toute manière impossible.

Comment était-il censé s’en sortir face à un loup-garou si obstiné ? Jusqu’où Derek était-il prêt à aller pour faire de Stiles son amant pour le reste de son existence ?

Stiles ne savait plus quoi faire ou penser. Il avait juste envie de rester là, plaqué contre la paroi froide de cette douche encore humide et de sentir son sang encore un peu frais couler très doucement le long de sa gorge. Aimer Derek lui semblait si loin de son esprit. Aimer ce loup malgré cette peur au ventre était loin d’être la solution à cet épineux problème. Derek avait juste prouvé que cette peur qui paralysait Stiles quand ils échangeaient des caresses ou des baisers avait toutes les raisons du monde d’exister. Au lieu de rassurer l’adolescent sur ses angoisses, il avait fait que les exacerber en le mordant.

Au lieu de rapprocher Stiles de lui par ce geste, il n’avait fait que l’éloigner encore plus. C’était tout ce que Derek Hale avait réussi à gagner. Stiles avait envie de s’expliquer avec le loup, de comprendre ce geste à la fois insensé et terriblement stupide. Ils devaient discuter de tout cela même si l’hyperactif sentait que la discussion tournerait vite en rond.

Malgré cela, les sentiments de l’adolescent étaient tumultueux depuis leur dispute dans l’ascenseur comme si leur rupture avait eu l’effet totalement inverse sur lui.

Derek t’a mordu. Il t’a mordu, bordel. Déteste-le, c’est tout ce qu’il mérite.

Stiles avait beau se forcer, il ne pouvait tout simplement pas à détester l’Alpha malgré le fait qu’il en eût toutes les raisons de la terre.

Vraiment, pourquoi était ce si compliqué entre eux ?

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