L'ombre du Mal

Chapitre 10 : Azura et Meridia

4533 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 21/11/2016 09:57

C'est le bébé licorne qui me tire de mes pensées. Il vient me lécher le visage, me faisant sursauter. Quand je me rend compte que c'est lui, je crie et m'essuie le visage avec ma main. Il penche la tête sur le côté, puis se dirige vers la porte avant de revenir vers moi. Je l'attrape par les crins en me relevant. Il se dirige en trottinant vers la porte. Je dois allonger le pas pour le suivre. Il sort de la tente, se dirige vers les ruines, tourne à droite à environ trois mètres de l'entrée, m'emmène vers une grotte taillée dans la roche quelques mètres plus loin et me fait signe de le suivre à l'intérieur. Je m'arrête et refuse. Il baisse les oreilles. Je m'agenouille devant lui. Il vient vers moi et me donne un coup de museau. Je lui gargouille les oreilles en lui disant:

-Désolée bébé... Je ne peux pas venir là-dedans. Pas toute seule. Je ne veux pas m'attirer d'ennuis.

Il attrape alors ma manche entre ses dents et me tire dans la grotte. Je crie, ce qui le fait baisser les oreilles. Au bout d'une minute, je lui dis:

-D'accord, d'accord... Tu as gagné, je viens...

Il me relâche, l'air triomphant. Je songe une nouvelle fois que cette licorne est loin d'être bête. Je me glisse dans l'étroit boyau de la grotte, la licorne devant moi. Lui comme moi n'avons pas la place de faire demi-tour. J'espère juste qu'il ne m'attire pas dans un piège...

   Après quelques mètres dans un passage assez étroit, quoique plutôt haut, le tunnel s'élargit. J'aperçois une lumière blanche à la sortie d'un virage. Quand j'arrive à la hauteur de cette étrange lumière, je vois le bébé licorne à moitié tourné vers moi, en train de m'attendre. Une sphère lumineuse au bout de sa corne éclaire le chemin.

-Mais où est-ce que tu m'emmène encore? lui demandai-je.

Pour toute réponse, il se retourne et avance dans le passage. Ses sabots résonnent bruyamment le long du passage.

   Quelques minutes plus tard, nous arrivons à une vaste salle souterraine. La licorne vient se placer à côté de moi. Je lui dis:

- Toi aussi, tu as peur?

Il me regarde avec ses grands yeux sombres. J'en déduis donc que oui. Je pose une main sur son encolure, un peu au-dessus du garrot. Il avance prudemment jusqu'au fond de la salle. Je marche à côté de lui. Tout au fond, nous prenons un autre passage. Je le suis à l'intérieur. Au bout du couloir, il y a une étrange statue gravée de motifs compliqués. Des fresques représentent des scènes de combat. Je m'approche de la statue. Elle représente un dragon, les pattes avant levées, ailes étendues. Il semble prêt au décollage. La statue est immense, au moins de la taille d'un éléphant. Juste degant les pattes arrières du dragon, il y a un piédestal sur lequel se trouve un guerrier de pierre. Il tient une épée levée devant lui. À ses pieds, des mots étranges sont gravés dans la pierre dans une écriture étrange. Mais, chose incroyable, j'arrive à la lire. Il y a marqué :

"Toi qui a su entrer ici, qui que tu sois,

Mage, guerrier, prince, paysan ou bien roi,

Tu a été choisi pour tirer cette épée.

Mais méfie-toi: pour mériter de la tirer,

Ton coeur doit briller de la même pureté

Que les licornes habitant dans cette forêt."

   La licorne s'est placée à côté de l'épée et me regarde, la tête penchée vers la lame. Je relis les vers sans comprendre. Il ne parle quand même pas de l'épée de pierre! Mais l'attitude de la licorne me fait penser que si. Il revient vers moi, m'attrape la manche et me tire vers l'épée. Je l'oblige à me lâcher et le suis en tremblant. Il pose le bout du nez sur l'épée de pierre. Une colonne de lumière blanche illumine la statue et le guerrier de pierre écarte les mains juste assez pour que je puisse y glisser les miennes. Mais je n'ose pas. J'ai peur de ce qu'il risque de m'arriver si j'y touche... Mais le regard insistant de la licorne me fait savoir que je dois le faire. Je ferme les yeux et touche la garde de l'épée de pierre.

   Au moment où je ferme les mains autour de l'épée, un tremblement se fait sentir et une lumière blanche brille. J'ouvre les yeux. L'épée est entourée d'un tourbillon de lumière. Sous mes yeux, elle perd son apparence de pierre pour devenir une belle épée à la lame rouge et à la garde et au pommeau noirs, incrustés de pierres précieuses, sûrement des rubis. J'entends alors une voix caverneuse s'élever devant moi.

- Bienvenue, fille des daedras, dit-elle.

Je sursaute en voyant la statue s'animer. Le guerrier de pierre s'incline devant moi. Je le regarde sans comprendre.

-Heu...dis-je, qui êtes-vous ?

-Je suis le gardien de Fireblood, répond-il.

-Fireblood? demandai-je.

-L'épée que vous avez dans les mains. C'est son nom.

-Et...pourquoi un tel nom?

- Vous le découvrirez bien assez tôt, me dit le guerrier de pierre. Je suis le gardien de l'épée. J'ai été chargé de la garder pour vous. Et maintenant, je suis votre humble serviteur.

-Heu...je ne suis pas sûre de comprendre...qui t'as chargé de me donner cette épée? Et pourquoi à moi?

-Vous êtes la dovahkiin. Et celle qui doit sauver les univers. Dame Meridia m'a placé ici pour vous accueillir.

-Une minute...cette épée, c'est un artéfact daedra? Et tu es une créature de l'Oblivion ?

-Si c'est comme ça que vous le voyez, me dit-il.

   Une lumière bleutée apparaît. Je sursaute quand une femme vêtue d'une longue robe apparaît. Elle est très belle, mais d'un âge indéfinissable. Le guerrier de pierre s'agenouille en la voyant.

- Dame Meridia, dit-il.

La femme fait un geste de la main. Le guerrier se redresse et devient immobile. Puis la femme se tourne vers moi.

-Tu l'as enfin trouvée, me dit-elle.

-C'est vous qui m'avez parlé en rêve! m'exclamai-je en reconnaissant sa voix.

Elle hoche la tête.

-En effet.

Elle regarde la licorne et sourit.

-Azura a déjà pris les choses en main, à ce que je vois, dit-elle en caressant l'encolure de la licorne. Je ne doute pas que cette petite créature t'aidera beaucoup. Ne t'en sépare jamais. Quoi qu'en disent les thalmors.

-Alors vous savez...

-Ma soeur et moi veillons sur toi en permanence, dit une autre voix.

Je me retourne. Une autre femme, d'apparence plus ordinaire, mais tout aussi luminescente, est apparue. Elle porte une robe assez étrange. Sur sa couronne, un étoile et la lune apparaissent. Elle appelle la licorne, qui va la voir sans aucune crainte.

-Azura...sourit l'autre.

- Cela faisait longtemps, lui répond la nouvelle venue.

- En effet.

Puis elles se tournent vers moi.

-Nous ne pouvons plus te surveiller quand tu franchis le portail, me dit Azura. C'est pour cela que quelqu'un doit t'accompagner pour veiller sur toi. Tu as déjà failli mourir deux fois. Sans nous...

-Tu ne dois pas mourir, poursuit Meridia. Sans toi, les jours des Peuples Libres sont comptés. Nous savons que nos frères et soeurs daedras se sont alliés, même ceux qui ne se supportent pas. Nous ignorons ce qu'ils font. Nos fidèles dans l'Oblivion ne nous sont d'aucune aide de ce côté là. Tu dois découvrir ce qu'il se passe. Et également pourquoi les dragons se sont réveillés. Alduin est de retour en Bordeciel. Seule Nocturne ne s'est pas alliée aux autres, à part nous. Elle t'aidera aussi. Et méfie-toi des autres. J'ai peur que certains thalmors ne soient pas bien fiables...

À ces mots, j'ai peur. Et si...

   Azura me sourit.

-Rassure-toi, me dit-elle. Ce sorcier qui semble tant tenir a toi est prêt à tout pour toi. Il t'apprécie vraiment. De toute façon, ce cher petit les reconnaîtra, n'est-ce pas?

Le bébé licorne la regarde, comme s'il disait oui. Je comprends maintenant pourquoi il me semblait si intelligent!

-Ah, une dernière chose, me dit Azura. Prends le parchemin avec toi dans l'autre monde. L'une de mes prophétesses a vu que l'aube révélerait quelque chose qui pourra vous aider à avancer, dans le monde ou vous voulez aller.

- Et surtout, continue Meridia, méfiez-vous de cet oeil rouge, dans l'autre monde.

-Rassurez-vous, dis-je, je sais qui est cet oeil et je connais son pouvoir. Il ne me fait pas peur.

-Qui est-ce? demande Azura.

-Un serviteur du mal du nom de Sauron.

- Mais méfie-toi de lui quand même. D'après Clavicus Vile, il est très rusé et ses serviteurs d'une puissance semblable à celle de nos créatures.

-Ce n'est pas lui qui me fait le plus peur, dis-je. C'est cet abîme sombre, le Tartare, qui me fait vraiment peur.

-Cette abysse étrange? demande Meridia. Nous en sentons le mal encore plus nettement que cet oeil... Ne t'en approche pas. Les monstres qui y vivent risquent de t'ôter la vie en un rien de temps, peu importe ta force et tes amis.

-Je ferai attention, dis-je.

-Bien, répond Meridia. Et maintenant, va retrouver tes amis. Puisse-tu rester en vie.

Azura s'approche de moi et pose un doigt sur mon front.

- Puisse la lumière de l'aube te guider, dit-elle. Maintenant, pars, dovahkiin.

    Une lumière bleue nous enveloppe, puis elles disparaissent, me laissant avec le guerrier de pierre et le bébé licorne. Ce dernier se rapproche de moi quand le guerrier me dit:

- Alors elles vous a parlé.

Je hoche la tête.

-Si vous avez besoin de moi, reprend-il, il vous suffira de m'appeler. Mon nom est Daelis. Quand vous n'avez plus besoin de moi, vous pouvez me renvoyer en Oblivion. Chaque fois que vous m'appellerez, je reviendrai vous voir.

-Heu...dis-je, donc si je dis: Daelis, je n'ai plus besoin de toi pour le moment, vous allez disparaître et ne revenir que quand je vous le demanderai?

Il hoche la tête lentement.

-Alors, heu...Daelis, je n'ai pas besoin de ton aide pour le moment, begayai-je.

Il commence alors à disparaître en disant:

-Vos désirs sont des ordres, fille des daedras.

Et, dans un tourbillon de poussière, il disparaît. Je pose la main sur l'encolure de la licorne, qui lève ses yeux noirs vers moi.

-On y va, lui dis-je.

   Elle lève les yeux vers la statue en forme de dragon. Sa corne s'illumine quand elle touche le bout d'une aile de la statue. À ce moment là un grondement sourd retentit et la statue commence à bouger. Le dragon pose ses pattes avant au sol et baisse la tête, qui m'arrive à la taille. J'aperçois alors quelque chose dans sa gueule ainsi qu'un étrange trou dans une de ses écailles. Il semble pouvoir contenir une épée. J'essaye de faire entrer la lame que j'ai encore dans les mains. Elle coïncide parfaitement avec la fente. Quand j'ai enfoncé la lame jusqu'à la garde, la statue ouvre la gueule, révélant une armure magnifique, entièrement noire, avec des éclats rougeoyants. Le métal est léger et résistant, je le vois à la texture de l'armure. Une paire de gants, de bottes et un casque se trouvent à côté. Au fond, un petit tas de couvertures pourpres semble recouvrir quelque chose. Je le soulève. Une pierre rouge écarlate, de la forme d'un oeuf un peu allongé mais en beaucoup plus gros se cache en dessous. Elle est magnifique. Je la prends doucement. Elle est lourde. Le bébé licorne me tire alors doucement par la manche, puis me montre l'épée. Je la reprends une fois que j'ai mis l'armure et par dessus ma tunique de thalmor. J'attache un fourreau richement orné à ma taille et prends la pierre. Elle est encombrante mais très brillante, et j'ai le sentiment que ce n'est pas n'importe quelle pierre. Je sors l'épée de son réceptacle et la range dans le fourreau avant de reprendre l'étrange caillou.

  Au moment où je me baisse pour la reprendre, je la vois bouger. Je me stoppe net en entendant des légers craquements en provenir. Je m'en écarte en voyant une lézarde apparaître sur sa surface polie. Puis une autre lézarde apparaît au fur et à mesure que résonnent les coups et les craquements. Mon coeur s'accélère. Ce n'est pas une pierre, mais un oeuf!

    Un morceau de la coquille se soulève, révélant quelques écailles rouges vif. Quelques secondes plus tard, un autre morceau se détache complètement et laisse à apparaître un museau rouge. Quelques coups plus tard, je vois la coquille se briser et une petite créature rouge écarlate roule au sol en grognant. Elle est repliée sur elle même. Je ne distingue que quelques écailles rouges et trempées, ainsi qu'un étrange morceau de peau qui semble recouvrir toute la créature.

   Puis la peau bouge, révélant le corps miniature en dessous. Une petite tête triangulaire se redresse doucement, puis deux petites pattes griffues apparaissent. Une queue au bout triangulaire se déroule lentement et deux pattes toutes aussi griffues apparaissent à l'arrière. L'étrange peau se révèle être une paire d'ailes relativement grandes par rapport au corps de la créature. Elles sont tendues, complètement trempées et inutiles pour le moment. La créature ne fait pas plus de la taille d'un chat,sans compter les ailes et la queue pointue. Elle secoue le museau en gémissant doucement. Elle a du mal à se mettre debout, malgré la relative petite taille de ses pattes. Elle finit par y arriver, mais ses ailes immenses semblent la gêner. Quand elle lève la tête pour me regarder, je retiens mon souffle. Ses yeux rouges me fixent avec curiosité. Sa pupille est aussi droite que celle d'un chat, et noire comme la nuit. De petites pointes surmontent son museau et ses yeux, d'autres courent le long de sa colonne vertébrale.

   Je n'en reviens pas. Je viens de voir un bébé dragon naître! Il s'approche de moi en chancelant. Ses ailes le déséquilibrent, mais il ne sait pas encore les replier. Je le regarde avancer vers moi. Quand il est à quelques centimètres de moi, je tends doucement la main vers lui. Il commence par regarder ma main comme si c'était un monstre, puis finit par venir poser son museau contre ma paume.

   Je sens alors un courant brûlant passer de lui à moi, ainsi qu'une présence dans ma tête. je sens aussi une douleur fulgurante à l'épaule droite. La peur m'envahit. Je sens la présence se mettre à paniquer au moment où le dragonneau s'éloigne de moi en tremblant et en gémissant. Je comprends alors que c'est lui qui est présent dans ma tête. J'essaye de me calmer. Le dragon ressent mes émotions. Je ne dois donc pas avoir peur, sinon il risque d'avoir peur aussi. Ses yeux me fixent avec effroi, mais il se calme quand je rapproche ma main pour le toucher. J'entends son grognement de douleur. Je me promets de regarder ce que j'ai plus tard. Pour le moment, j'essaye de calmer le dragonneau. La licorne me regarde faire. L petite créature finit par se calmer. Je sens sa présence dans ma tête, mais je n'essaye pas de la repousser. Il me laisser lui gargouiller le menton. Je peux même caresser son dos le long de sa crête. Il a encore du mal à tenir debout, mais se débrouille déjà mieux. Ses pupilles sont devenues rondes. Il me regarde maintenant avec curiosité, comme si j'étais une créature étrange. La présence dans ma tête devient plus calme et je la sens poser des questions, mais sans mots. Il me montre plutôt des images accompagnées de curiosité. Je souris quand il me montre mon visage.

-Je m'appelle Lena, lui dis-je.

"Lé...Léa" entendis-je dans mon esprit.

Je sursaute en regardant le dragon. Il s'assoit devant moi en me fixant de ses pupilles rondes. Je vois dans mon esprit mon visage étonné et j'entends en même temps, comme une affirmation :

"Léa".

Je ris en comprenant que c'est le dragonneau.

- Non! lui dis-je doucement. C'est Lena! ajoutai-je en accentuant le n.

" Lena."

La voix est légère, contente d'elle. Je souris en félicitant le dragon. Je sens la présence laisser éclater sa joie. Puis il m'envoie une image de Clara et des thalmors. Je m'affole alors. Ils doivent s'inquiéter! La licorne m'attrape la manche et me tire vers la sortie. Je prends le dragonneau inquiet dans mes bras avant de me mettre à courir à la suite de la licorne jusqu'à la sortie.

   Une fois dehors, je fonce à travers les bois jusqu'au camp. La licorne me précède au petit galop, me distançant lentement. Le dragonneau me regarde d'un air inquiet et perdu. J'essaye de le rassurer tout en tentant de calmer un point de côté. Quand je commence à apercevoir des soldats entre les tentes, j'ai encore plus peur. Ils doivent avoir remarqué mon absence! Je cours le plus vite possible et le plus discrètement possible jusqu'à ma tente. Arnael y est, l'air déboussolé et honteux. Il a la tête basse et est assis sur une chaise, l'air penaud. Thalerior est devant lui. Il hurle en elfique. Ses yeux lancent des éclairs et il marche de long en large devant Arnael. Je remarque alors des traces brillantes sur ses joues.

   Je sens mon coeur se pincer. Je n'aurai pas dû m'en aller comme ça, sans un mot... Arnael risque les ennuis à cause de moi... Je sors du buisson dans lequel je m'étais cachée après avoir fait comprendre au dragonneau de rester caché. La licorne apparaît comme par enchantement devant moi et je m'en vais vers les deux thalmors, la tête haute malgré la sensation de peur qui me ronge de l'intérieur.

   Arnael relève la tête brusquement en me voyant et se lève, légèrement inquiet et en même temps énervé. Thalerior lui demande quelque chose en elfique et Arnael lui répond dans la même langue. Thalerior se tourne vers moi et semble surpris. Mais il passe aussitôt à la colère et avant que j'aie pu atteindre la tente, il vient vers moi et m'attrape par le col de ma robe, manquant de m'étouffer au passage.

- Qu'est-ce qui t'as pris de partir comme ça? hurle-t-il. Nous étions morts d'inquiétude ! Ça ne t'as pas suffi d'être à moitié broyée par un chaurus? Faut-il qu'un spriggan te règle ton compte définitivement pour que tu comprennes?

-La...lâchez-moi! soufflai-je en sentant ma respiration devenir difficile.

- Pas avant que tu ne m'aies donné une raison valable! crie-t-il encore plus fort. Tu étais censée rester ici sans bouger! Pourquoi as-tu fait ça, hein? Pourquoi?

   J'entends un cri derrière moi et Thalerior me lâche aussitôt en saisissant son épée. Je m'effondre au sol en haletant. Arnael vient vers moi et me redresse doucement en me demandant comment je vais. Je regarde ce qui a si subitement attiré l'attention de Thalerior. La licorne et le dragonneau sont sortis du buisson et courent vers moi, la première rapidement, le second avec difficulté. Thalerior est d'ailleurs fixé sur lui et tend la main. Je cours vers le dragon en hurlant:

-Non!

Thalerior tourne à peine la tête vers moi et je vois un éclair se former entre ses doigts. Je me jette sur le dragon en le serrant contre moi. Je sens sa peur au fond de moi et tente de le rassurer, malgré ma propre peur.

-Recule, m'ordonne le chef des thalmors.

-Pas question, répliquai-je. Ce dragonneau est un ami. Vous n'avez pas le droit de le tuer!

- Cette créature est un démon. Éloigne-toi de lui.

-Non.

   Je lui lance un regard de défi. Il me foudroie du regard et dit:

-Très bien. Tu l'aura cherché.

Il lève la main et je vois des éclairs danser entre ses doigts. Je me prépare à sentir la morsure d'une décharge électrique... Je ferme les yeux en pensant très fort au dragon. Il est terrorisé. Et moi aussi.

   Mais rien ne vient. J'entrouvre les yeux et vois Arnael discuter avec animation avec Thalerior. Je me demande de quoi ils parlent. Sûrement de moi. Le dragonneau semble être aussi perdu que moi. Enfin, Thalerior vient vers nous et me demande, les yeux toujours aussi pleins d'éclairs:

-Où l'as tu trouvé?

-Dans une grotte, pas loin d'ici, répondis-je.

-Et que faisais tu là-bas ?

   À ce moment-là, la licorne me mordille le bras. Je la regarde. Son regard appuyé semble vouloir dire quelque chose... une phrase de Meridia me revient à l'esprit: "méfie-toi des autres. J'ai peur que certains thalmors ne soient pas fiables...". Thalerior ferait donc partie de ceux-là...

- La licorne voulait me montrer quelque chose, dis-je.

-Hmm...fait-il, dubitatif. Et quelle était cette chose?

-Un lac souterrain. C'était magnifique! Les parois semblaient faites de cristal! m'exclamai-je avec un enthousiasme que je ne pensais pas possible.

Thalerior me fixe bizarrement pendant quelques secondes, puis dit:

-Et il y avait un dragonneau abandonné près de ce lac?

-Non, dis-je. C'était un oeuf. Je pensais même que c'était juste une grosse pierre rouge avant qu'il ne sorte...

-Une grosse pierre rouge? fait Arnael, surpris.

-Je n'avais encore jamais vu d'œuf de dragon, répliquai-je.

Thalerior me fixe d'un air soupçonneux, mais finit par dire:

-Très bien. Je te crois. Mais ne va pas croire que je vais t'applaudir pour ta bêtise. Il aurait très bien pu y avoir un dragon adulte avec cet oeuf. Et on ne t'aurait plus revue dans ce cas-là. D'ailleurs, ça m'étonne qu'il ait été laissé à l'abandon comme ça...

Je ne réponds rien à son regard qui en disait long: "menteuse", me disaient ses yeux. Pourtant je soutiens son regard. Il finit par détourner les yeux en disant :

-Maintenant, je veux que quelqu'un te surveille en permanence. Arnael, appelle-t-il ensuite.

-Oui? répond l'intéressé.

-Reste avec elle pour le moment. Et ne la quitte pas des yeux.

-Bien. 

   Thalerior regarde le dragonneau.

-Il doit disparaître. Je ne veux pas voir cette chose dans le camp.

-Non. Il est trop petit pour se débrouiller tout seul! dis-je.

-Alors tue-le.

-Hors de question.

C'est Arnael qui a parlé. Je le regarde, presque aussi stupéfaite que Thalerior. Ce dernier dit:

-Cette créature sauvage n'a rien à faire ici. C'est un démon de l'Oblivion. Qu'elle soit trop faible pour le voir mourir, c'est une chose, mais si elle refuse de l'abandonner, c'est ce que je vais faire!

Arnael s'interpose entre lui et le dragonneau (et moi par conséquent), et croise les bras d'un air buté.

-Vous ne toucherez pas à ce dragonneau tant qu'elle sera contre. Si elle le protège, c'est qu'elle a une bonne raison de le faire.

Thalerior semble sur le point de répliquer quelque chose, mais dit finalement:

-Très bien. Mais je ne veux pas en entendre parler s'il cause des ennuis à qui que ce soit.

   Sur ce, il tourne les talons avant de dire:

-Je veux vous voir demain matin devant le portail, prêts à partir. De préférence sans la licorne et le dragon.

Arnael attend qu'il s'éloigne avant de plisser le front.

-Ce n'est pas normal, dit-il.

-Quoi? demandai-je.

- Jamais il n'a accepté que quelqu'un discute ses ordres. Et encore moins moi. Et il avait l'air de ne pas te croire...

Il se tourne vers moi.

-Tu nous caches quelque chose, toi.

Je soupire avant de le regarder dans les yeux. Il semble soucieux.

- Y a-t-il un lieu où on pourrait parler sans se faire entendre? demandai-je. Ou plutôt non, suis-moi.

   Je l'attrape par la manche. Il résiste quelques instants avant de céder. La licorne nous emboîte le pas et nous dirige dans la forêt. Arnael me demande:

-Mais où m'emmènes-tu?

Nous arrivons vite à la grotte. Arnael la regarde et dit:

- Je n'entre pas là-dedans.

Sans un mot, je m'enfonce dans l'ombre de la grotte, sur les traces de la licorne. Le dragonneau s'est blotti autour de mon cou et commence à fermer les yeux. Arnael m'appelle et finit par me suivre.

-Bon sang, tu vas me dire où tu m'emmène?

Je ne lui réponds que quand nous arrivons à la seconde salle, celle où se dresse la statue du dragon. Arnael laisse échapper une exclamation de surprise et d'émerveillement. Il me dit:

- Comment as-tu trouvé cette grotte?

-C'est la licorne qui m'a emmenée ici, dis-je enfin. Elle m'a conduit dans cette salle et les daedras de mon rêve m'ont parlé. Elles m'ont expliqué plusieurs choses.

-Elles? me demande Arnael.

-Elles disent qu'elles sont Azura et Meridia.

-Et...que t'ont-elles dit?

   Je lui raconte tout. Quand j'en arrive aux doutes d'Azura quand à la fiabilité de certains thalmors, Arnael devient songeur.

-C'est pour ça que tu n'as rien dit à Thalerior... devine-t-il. La licorne t'as averti de quelque chose...

-Oui. Et son comportement étrange me fait penser qu'elle a raison.

-Et pour l'expédition ? Tu vas accepter de le suivre de l'autre côté?

Je réfléchis à toute vitesse. Je n'ai pas confiance en Thalerior. Arnael non plus, à ce que je vois. Et la licorne encore moins. Mais je ne sais pas comment lui fausser compagnie... À moins que...

-On ne va pas le suivre, annonçai-je. On va le devancer.

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