Petite Etincelle
CHAPITRE 33
POV Normal
Moonlight sursauta violemment puis se redressa, raide comme un piquet, les optiques grandes ouvertes. Où était-elle ? Que s’était-il passé ? Pourquoi se sentait-elle aussi groggy ? Laissant échapper un gémissement de son vocaliser anormalement rêche, la fembot frotta sa tête avec confusion tandis qu’elle essayait de comprendre où elle se trouvait actuellement. Elle se sentait complètement déboussolée... Le Spark martelant à l’intérieur de son châssis. La vive lumière traversant la fenêtre face à elle lui brûlait les optiques, ce qui lui arracha un second gémissement plaintif. Par précaution, elle réalisa une rapide analyse de ses systèmes vitaux pour se rendre compte que son réservoir était pratiquement vide, mais qu’il y avait aussi quelques résidus d’energon de haute qualité dans ses circuits. Grâce à cela, elle put facilement en déduire qu’elle avait abusé de la haute qualité, et que c’était donc pour cette raison qu’elle était aussi embrouillée à sa sortie précipitée de stase.
«Ma tête…» Gémit Moonlight dans une grimace de douleur. Elle étudia la pièce dans laquelle elle se trouvait, un fond de crainte lui étreignant le Spark.
Elle ne reconnaissait absolument pas les lieux. Rien de cet endroit ne lui était familier… Cette pièce inconnue était particulièrement lumineuse, pas vraiment spacieuse cependant tout l’espace disponible était utilisé par des tableaux ainsi qu’un bureau servant de support à du matériel artistique. Des stylos tactiles, des datapads de toutes les tailles, des chiffons utilisés, des substances colorées, des poudres diverses et variées… Un large panel d’objets dont elle ne comprenait pas toujours l’utilité, mais qui semblaient essentiels à une forme d’art qu’elle ne maîtrisait pas. Cette découverte la rendit d’autant plus perplexe. Face à elle sur le mur, un large miroir ovale orné de motifs se trouvait à côté d’une fenêtre offrant une vue fabuleuse sur les tours brillantes de Iacon. Et d’après la hauteur des deux soleils dans le ciel clairsemé de nuages, le cycle avait déjà bien été entamé. Sa confusion s’accentua alors que Moonlight effleurait du bout des doigts la surface métallique sous elle, pour comprendre rapidement qu’il s’agissait en réalité d’une couchette. Mais la couchette de qui ?!
«C’est quoi ce-» Elle n’eut toutefois pas le temps de finir sa phrase car quelqu’un se racla le vocaliser en même temps. Effrayée par cette présence qu’elle n’avait même pas remarquée, elle dégringola de la couchette pour se retrouver à plat ventre sur un sol impeccable et curieusement coloré en jaune. L’impact plutôt abrupt avec le métal lui donna l’envie de purger le reste de carburant qu’elle avait dans le réservoir.
«Je te déconseille de faire ça.» Lança sèchement une voix masculine venant de sa gauche. Malgré son désarroi face à une situation pour le moins ambiguë, le ton employé était amplement suffisant pour qu’elle mette un nom sur cette voix acariâtre bien connue de tous : un bot au tempérament arrogant, prompt à critiquer les autres et la société, sans même qu’elle ait besoin de le regarder pour le reconnaître.
«Qu’est-ce que je fous, là… Pourquoi je suis dans ta chambre ?» Grogna Moonlight en se redressant sur ses coudes, massant ses optiques douloureuses avec la paume de ses mains. Devant le silence de son interlocuteur vaniteux, elle laissa tomber ses mains sur le sol et fusilla du regard le mecha assis sur son tabouret, dos à elle, face à un tableau holographique inachevé représentant un coucher de soleil.
«Réponds-moi, Sunny. Pourquoi, par Primus tout-puissant, suis-je dans ta chambre ? Et pourquoi je n’ai aucun souvenir d’être arrivée là ?» Se plaignit la fembot qui commençait peu à peu à paniquer à cette mémoire qui lui faisait cruellement défaut dans les pires moments. Il lui était simplement impossible de se souvenir de la veille ! Lentement, le robot jaune vif fit pivoter son tabouret pour l’épier d’un regard antipathique, les bras croisés sur son châssis luisant et un pinceau numérique entre les doigts.
«Tu as quand même un sacré culot. Tu ne te souviens de rien parce que tu t’es enfilé je ne sais combien de cubes de haute qualité sans réfléchir un seul klik aux conséquences de cette stupidité ! Si on ne tient pas la haute qualité, faut pas en prendre, c’est pourtant logique ! Mais non, on s’en fiche, du moment que Sunstreaker est là pour prêter sa couchette aux déchets ambulants que vous êtes ! Pour ça, il a bon dos.» Ses optiques bleues glaciales fixaient avec agacement la fembot à même le sol qui montrait des signes d’incompréhension, avant que son expression confuse ne change en horreur. Voir ce regard épouvanté sur son visage lui donna un semblant de réconfort.
«Dis-moi que je n’ai pas rechargé ici… Par pitié, dis-moi que j’étais ailleurs qu’ici cette nuit !» S’affola Moonlight tout en se redressant sur ses genoux, ses optiques balayant follement le bot désinvolte qui admirait son pinceau. À son cri, Sunstreaker fronça les crêtes optiques, décroisa les jambes puis leva le menton avec dégoût.
«Quoi ? Tu as peur que ma couchette soit sale ? Elle n’était pas assez confortable pour toi, peut-être ? Tu es vraiment gonflée. Regarde-toi dans un miroir avant de faire des allusions déplacées sur la propreté de ma chambre. J’hallucine… Je n’ai pas demandé à ce qu’une pouilleuse de ton genre vienne recharger sur MA couchette qui se trouve dans MA chambre ! La prochaine fois, trouve-toi un autre boulet qui t’héberge après une cuite.» Déclara crûment le mecha alors que la fembot poussait un soupir d’abattement, suivi d’un grognement qu’elle tenta de rendre discret en enterrant sa tête entre ses bras. D’un rictus, il la suivit du coin de l’optique lorsqu’elle se décida enfin à se lever du sol pour essayer de rejoindre son miroir sans trébucher à ses pedes, trouvant la scène particulièrement pathétique à regarder. L’Autobot jaune soupira.
«Quelle sale tête que tu as… La vue de toutes ces couleurs me donne envie de purger.» Commenta Sunstreaker quand Moonlight arriva enfin devant la glace pour constater l’effroyable mélange de couleurs sur sa carrosserie. Du vert, du jaune, du rose… Il avait l’impression qu’elle avait été mâchée puis recrachée sans vergogne. Ne pouvant se retenir de grimacer à ce spectacle ridicule, le mecha artiste dévisagea longuement la fembot, apparemment choquée de ce qu’elle voyait dans son reflet ; «Ce mélange est abominable, tu en es bien consciente, je l’espère ? Tu n’as aucun goût, c’est insipide. Il n’y a aucune harmonie dans ce choix de couleurs ! Ça n’a aucun sens ! Burp. Répugnant.»
«Sérieusement ? Tu penses que j’ai fait ça volontairement ?!» S’exaspéra aussitôt Moonlight en se tournant vers lui, se désignant de la tête aux pedes avec un regard médusé. Pourquoi y avait-il toutes sortes de tâches de peinture sur son armure ?! Fichue mémoire ! Sunstreaker avait néanmoins raison sur une chose, ce mélange hideux crevait les optiques.
«J’en sais rien et je m’en contrefiche. Par contre, il y a intérêt à ce que tu n’aies pas sali ma couchette avec cette peinture dégoûtante… Et que tu aies purgé dehors !» S’épouvanta Sunny, écœuré, en voyant des traces d’energon sur le châssis de Moonlight. La mâchoire presque tombante, il posa sa main sur sa bouche pour retenir l’energon dans son conduit d’assimilation, les optiques comiquement écarquillées. C’en était trop à supporter ! Il accourut vers la porte automatique pour rejoindre rapidement la salle des eaux usées située de l’autre côté du salon, trébuchant presque sur les meubles dans sa précipitation. Il fallait qu’il libère son malaise, d’une façon ou d’une autre.
Après le passage de Sunstreaker, Moonlight entendit des rires provenir de la pièce voisine tandis qu’elle contemplait le désastre sur son cadre, découvrant par la même occasion la présence du frère jumeau de Sunstreaker et de son ami Hot Rod. Bon, au moins elle n’était pas venue ici toute seule, complètement perdue et à la ramasse… Une chose qui la réconfortait un peu dans cette situation plutôt terrifiante. Se lançant un regard critique à travers son propre reflet, déplorant son manque évident de contrôle, elle s’éloigna du miroir pour rejoindre le salon, prête à confronter les deux mechas riant à vocalise déployée du comportement de Sunny vis-à-vis d’elle. Ou de quelque chose d’autre, mais cela n’avait aucune importance. Tout ce qui comptait au groon actuel, c’était de comprendre pourquoi elle avait atterri dans ce lieu de vie qui lui était totalement étranger, mais aussi de découvrir la vérité sur ce qui s’était passé la veille.
Au fond d’elle, la colère montait crescendo à chaque pas.
«Réflexe !»
Un petit cube d’energon solide traversa la pièce et alla se glisser directement dans la bouche grande ouverte d’Hot Rod, actuellement allongé sur une large banquette. Dans un coin du salon, juste à côté de la porte de sortie, le mecha orange et jaune se prélassait en compagnie de son meilleur ami, Sideswipe. Le bot rouge flash, assis de l’autre côté de la table basse recouverte d’une multitude de datapads, avait une jambe croisée et tenait plusieurs petits cubes d’energon dans ses mains. Cubes qu’il prenait un malin plaisir à faire jongler avant de les envoyer vers son acolyte. Un grand sourire benêt se dessina sur son visage au moment où l’un des cubes solides disparut à l’intérieur de la bouche d’Hot Rod. Victoire ! Il tourna alors son regard amusé vers la fembot qui venait d’apparaître dans l’embrasure de la porte menant à la chambre de son frère jumeau. Moonlight les observait, incrédule, la bouche légèrement béante. Ses optiques déroutées balayaient tour à tour les deux mechas, puis le désordre ambiant qui régnait dans cet appartement situé à plusieurs dizaines d’étages au-dessus du sol de Cybertron.
«C’est quoi ce dépotoir ?» Lâcha-t-elle en scrutant l’endroit d’un regard critique. Des cadavres de cubes d’energon jonchaient presque toute la surface disponible, transformant la pièce en un chaos coloré et désordonné.
«Tu t’es levée du mauvais pede ou quoi ? Bonjour, pour commencer.» Ricana Sideswipe installé sur son siège tout en jonglant avec deux cubes.
«Salut Hot Rod, salut le tapis.» Répondit platement la fembot restée prudemment à l’embrasure de la porte automatique, ses optiques explorant chaque recoin de la pièce sens dessus dessous. Il y avait même des pièces détachées qui traînaient dans un coin, mêlées à de l’huile de vidange et à d’autres fluides douteux.
«Hein ? C’est quoi cette histoire de tapis ?» S’étonna Sideswipe en jetant un coup d’optique intrigué à son meilleur ami.
«Laisse tomber.» Hot Rod secoua la tête. Il n’avait aucune envie de raconter cette histoire, car pour l’instant, c’était Moonlight le centre de l’attention. Affalé sur la grande banquette, les jambes étendues devant lui, le bot examina l’apparence de son amie plutôt nerveuse ; «Qu’est-ce qu’il y a, Moon ? Un problème ? Si tu as envie de purger, il te suffit juste de suivre les bruits dégueux de Sunny et tu trouveras cette merveilleuse invention qu’est la salle de vidange.»
«J’ai plus envie de purger, justement ! Je veux savoir ce que je fiche ici et pourquoi je ne suis pas dans l’infirmerie à ce stade-là du cycle ! Hot Rod, qu’est-ce qui s’est passé ?» S’impatienta Moonlight d’une touche de désespoir dans sa voix tremblante, les mains levées.
«Quoi ? Mais pourquoi tu aurais envie de retourner à l’infirmerie ? On est quand même mieux ici.» Plaisanta Hot Rod en haussant grotesquement les crêtes optiques pendant que Sideswipe hochait vivement la tête.
«Tu sais que je ne tiens pas du tout l’energon de haute qualité ! Et que je ne voulais pas recommencer cette expérience. Par Primus, Hot Rod, pourquoi tu ne m’en as pas empêchée ? C’est limite si je me souviens de quelque chose de la veille ! Il n’y a vraiment rien de pire que ça, que d’avoir des trous de mémoire !» S’écria Moonlight en balançant les bras, suivie d’un soupir découragé.
«Wow, Moon, du calme. Tout va bien.» Tenta de la rassurer Hot Rod en tendant la main dans un réflexe de réconfort, mais la panique de la fembot ne faiblit pas.
«Non, je n’ai aucune envie de me calmer ! Je suis dans le cambouis, Ratchet va vouloir me démonter et me recycler en quelque chose de bien plus utile !» De plus en plus anxieuse, Moonlight commença à faire les cent pedes dans la pièce avec un horrible sentiment de culpabilité flottant dans son Spark, son châssis lui semblant devenu trop étroit tout à coup.
Son monde commençait à tourner…
«Qu’est-ce que tu peux être tendue, toi ! Ils ne t’ont pas appris à gérer l’energon de haute qualité chez les Decepticons ?» Se moqua allègrement le robot rouge arrogant après avoir lancé un autre petit cube en direction de son meilleur ami détendu.
Moonlight se rapprocha dangereusement de Sideswipe, jusqu’à recouvrir entièrement le mecha de son ombre. Un mecha qu’elle avait beaucoup de mal à supporter. Pour différentes raisons. Elle ne lui avait toujours pas pardonné ses moqueries envers son ami Niltrex, ni sa mauvaise influence sur Hot Rod. Bloquant la luminosité du cristal suspendu avec son cadre, la fembot plissa méchamment les optiques vers le bot qui, subitement plus petit dans son fauteuil, se sentit vite mal à l’aise sous sa présence envahissante. Malgré sa frêle taille, elle réussissait à l’intimider rien que par son regard tranchant. Il n’avait pas l’habitude de voir cette expression austère, encore moins ce visage sinistre sur celle qu’il connaissait comme la fille gentille et exemplaire du commandant des Autobots. Qu’est-ce qui n’allait pas chez elle ? Se demandait Sideswipe, défiant silencieusement Moonlight au-dessus de lui. D’ordinaire, il ne se serait jamais senti déstabilisé par une fembot, surtout pas par celle-ci qui ne représentait aucun danger pour quiconque.
Mais étrangement, il ressentait une puissante aura émanant de son corps, une sensation qu’il n’avait encore jamais éprouvée auparavant chez elle. Quelque chose d’inhabituel. Et cela le terrifiait, sans qu’il puisse en comprendre la raison.
«Évite ce genre de réflexions à l’avenir.» Finit par dire Moonlight d’un regard noir à faire pâlir un Decepticon. Derrière elle, Hot Rod se manifesta.
«Mais qu’est-ce qui t’arrive ? Pourquoi tu es autant sur la défensive tout d’un coup ? On s’amusait bien hier pourtant ! Je ne vois vraiment pas où est le problème…» Le mecha jeta ses bras devant lui avant de se laisser retomber sur sa banquette, son sourire goguenard s’étant effacé depuis qu’il ressentait de l’irritation face à la tournure des événements. Il pencha légèrement la tête lorsque Moonlight abandonna son intimidation sur Sideswipe pour le regarder lui d’un air exaspéré.
«Le problème, c’est que je ne peux plus faire n’importe quoi. J’ai des responsabilités maintenant, et je ne tiens pas à décevoir dès le premier cycle de ma remise en liberté. Je veux m’améliorer, je veux devenir quelqu’un de bien, en qui on peut avoir confiance, sur qui on peut compter… C’est très important pour moi, et tu le savais.» Expliqua-t-elle en insistant sur la fin de sa phrase, son regard perçant et accusateur s’attardant sur le robot orange et jaune qui prenait tout à la légère.
«T’as pas arrêté de répéter que tu voulais voir Ratchet… Franchement, Moon, ça ressemblait surtout à un cri de désespoir ! Je pensais que tu délirais ! À aucun moment je ne me serais douté que tu étais sérieuse et que tu voulais vraiment y retourner pour le cycle de nuit… Faut être complètement dingue pour vouloir revenir dans cet endroit de sa propre initiative.» Dubitatif, Hot Rod haussa les épaules, puis jeta un cube en l’air pour ensuite le rattraper dans sa bouche sous le regard consterné de la fembot colorée.
«Pourquoi tu ne m’as pas écoutée ? Il avait confiance en moi !» Entre les deux mechas, elle désespérait.
«Parce que tu avais l’air de bien t’amuser, voilà pourquoi ! Tu avais besoin de te détendre, je pensais que ça t’aiderait. Sérieusement, je ne vois pas ce qu’il y a de si grave à désobéir à un petit ordre de rien du tout !» Avoua Hot Rod, de plus en plus confus par son insistance.
«Tu peux vraiment être méprisable quand tu t’y mets...» Baragouina la fembot en se massant les optiques alors que la colère continuait de croître dans son Spark. Elle avait envie de lui bondir dessus et de l’étriper !
«Depuis quand tu es devenue aussi sérieuse ?» Sideswipe revint à la charge.
«Mêle-toi de tes affaires, Sides, c’est un conseil.» Siffla froidement Moonlight en posant ses mains sur ses hanches, ses optiques bientôt blanches fixées sur Hot Rod qui ne semblait toujours pas voir où était le problème. Elle revint à la charge, mais sa voix sonnait moins agressive cette fois ; «Sois gentil et dis-moi ce qui s’est passé hier soir.»
«T’affole pas, il ne s’est rien passé de grave. Après la visite touristique de la ville, on est passé au bar. Tu sais, celui qui se trouve au bout de la rue de l’ancienne carrière… Bref, on est allés là-bas puis on a commencé à boire jusqu’à ce que tu te mettes à déprimer à cause de cauchemars, ou je ne sais plus trop quoi. Je voulais juste que tu passes un bon moment, que tu oublies toutes ces histoires qui te hantent sans arrêt. Après ça, on est allé te chercher une nouvelle peinture pour ton armure. C’est tout ! Tout était parfaitement normal.» Expliqua brièvement Hot Rod dans une vaine tentative de calmer la fembot en furie.
«C’est tout ?! Et tu trouves que j’ai l’air normale dans cet état ?» Fulmina Moonlight tout en se désignant grossièrement de la tête aux pedes, ses optiques éclaircies sur le bot têtu alors qu’elle s’évertuait à lui faire comprendre que ce n’était pas bien. Cela fit rire Sideswipe, spectateur de leur embrouille, pendant qu’Hot Rod reprit avec légèreté.
«Roh, ça va, c’était juste pour rire ! T’étais complètement saoule en plus. Normal que tu ne te souviennes plus de rien. Tu n’aurais jamais pu rentrer chez toi ni même espérer atteindre l’infirmerie en un seul morceau. Et moi non plus, d’ailleurs… Alors je t’ai emmenée ici, c’était le plus proche.» Poursuivit le bot orange et jaune d’un soupir contrarié, la tête appuyée dans sa main.
«Hot Rod, c’est de l’inconscience.» Rappela Moonlight, ébranlée.
«Un minimum de reconnaissance, ce serait trop te demander ? On aurait pu te laisser dehors au lieu de te refiler la couchette à Sunny. Ça nous aurait évité la crise du vorn. Tiens, je trouve que vous iriez bien ensemble, tous les deux…» Sideswipe recroisa sa jambe puis lança un regard effronté à la fembot, dont les nerfs étaient à fleur de métal sans raison apparente. Tout ce qu’il voulait, c’était assister à l’implosion ! Faire péter des câbles aux autres, c’était sa spécialité.
«Tu ne m’aides pas, là…» Hot Rod se massa le front, las.
«C’est drôle !» Répliqua son meilleur ami insolent d’un sourire ravi aux lèvres en avalant un énième cube d’energon.
«Non, c’est tout sauf drôle.» Jetant un coup d’optique réprobateur au mecha affalé dans son fauteuil, Moonlight se tourna rapidement vers Hot Rod, le principal concerné. Et ce dernier osait même feindre l’étonnement ! Puis, elle remarqua soudainement quelque chose qui serra douloureusement son Spark.
«Et Niltrex et Isis ? Pourquoi ils ne sont pas là avec nous ?» Questionna-t-elle en croisant les bras, le menton légèrement levé et les lèvres pincées. Prisonnière d’une tornade émotionnelle mêlant colère, confusion et tristesse, elle ne savait plus quoi penser ni faire. Ignorant délibérément les remarques déplacées de Sideswipe, par peur de faire quelque chose de regrettable à cet imbécile au QI inférieur à celui d’un Sharkticon, elle n’en avait pas moins envie de le frapper. Mais quand Hot Rod évita tout à coup son regard accusateur, elle comprit que la réponse ne lui plairait pas du tout.
«Ils sont partis quand Sideswipe et Sunstreaker nous ont rejoints au bar.» Dévoila-t-il enfin, embarrassé.
Le visage de Moonlight se contracta violemment, puis des larmes d’energon commencèrent à se former dans ses optiques presque entièrement blanchies par ses émotions fortes. C’était la goutte de trop. Son masque de fembot coriace finit par céder, et la colère cessa soudain d’alimenter ses circuits, la laissant complètement vulnérable face à ces deux mechas. Le menton tremblant sous la pression devenue insupportable, elle essuya ses larmes du bout des doigts avant de se détourner d’Hot Rod pour ne plus affronter ce visage qui lui inspirait du dégoût. C’était plus fort qu’elle. Il avait abandonné… Non, ils avaient abandonné leurs véritables amis pour aller faire les zouaves dans un bar réputé, accompagnés des frères jumeaux avec qui elle ne s’entendait même pas. Ce n’était pas elle. Tout cela ne lui correspondait pas. Pourtant, elle avait honte, terriblement honte de son comportement. Honte d’avoir été si faible et influençable, encore une fois… À peine sortie de l’infirmerie, il fallait déjà qu’elle fasse n’importe quoi.
C’était un cercle vicieux, un éternel recommencement.
«Hey Moon, ça va, ne t’inquiète pas. Ce n’est pas grave…» Hot Rod adoucit sa voix en se levant de la banquette pour prendre Moonlight par le bras, le Spark se serrant lorsqu’il vit son visage dévasté. L’envie de rire qui l’avait animé quelques instants plus tôt s’était subitement envolée. Il n’avait pas voulu lui faire du mal ! Au contraire, il voulait l’aider à se sentir mieux.
«Non, ça ne va pas du tout. À quel moment tu t’es dit que c’était une bonne idée ?» Reprocha-t-elle d’une brève secousse de la tête avant de s’éloigner du robot soucieux. Dans son dos, elle entendit Sideswipe baragouiner quelque chose de complètement stupide, mais au lieu de lui répondre avec la réplique cinglante qu’il méritait, elle préféra abandonner ce combat perdu d’avance.
«Je suis désolé, je pensais que tu étais bien avec nous… Avec moi.» Se confessa timidement Hot Rod devenu soudain très sérieux, tendant les mains vers la fembot qui continuait de reculer pour prendre de la distance. D’une nouvelle secousse désespérée de la tête, elle détourna ses optiques humides, son Spark subissant une douleur intense.
«Bee ne m’aurait jamais laissé boire.» Chuchota-t-elle, comme si elle venait de comprendre quelque chose d’important. D’un revers de sa main gauche, elle essuya l’excédent de larmes puis s’éloigna rapidement vers la porte de sortie en faisant de grandes enjambées pressées.
«Attends ! Où est-ce que tu vas ?» Appela Hot Rod dans son sillage.
«Essayer de réparer mon erreur.» Répondit vaguement Moonlight qui disparut derrière les portes coulissantes sans jeter un regard en arrière, ses ailettes crispées étant la dernière chose que vit Hot Rod avant qu’elle ne disparaisse.
«Quelle dramaturge…» Sideswipe leva les optiques au plafond, mais il ne s’attendait pas à recevoir un datapad en pleine figure lancé par son meilleur ami désormais furieux. Hébété par ce retour flamboyant et inattendu, il faillit tomber de son fauteuil, la bouche grande ouverte.
«La ferme !» Hurla le mecha orange et jaune planté au milieu du salon désordonné, l’horrible impression d’avoir tout gâché.
oOoOoOoOoOoOoOoOoOo
POV Moonlight
Je m’enfuyais.
J’avais besoin de prendre un maximum de distance.
Dans ces rues régulièrement bondées où le peuple de Iacon se mélangeait chaque cycle solaire, je me sentais en sécurité, j’avais l’impression de passer inaperçue. Personne ne me connaissait ou du moins, pratiquement personne ne me reconnaissait. Pour la plupart des habitants, je n’étais qu’une fembot avec une désignation banale ainsi que cette réputation d’être la fille du grand commandant des Autobots. Mais au fond, qui savait réellement qui j’étais ? Mon créateur ? Mes amis, mon meilleur ami ? Non, personne ne me connaissait vraiment. Alors que je courais vers le bâtiment médical qui se trouvait à peine à quelques mètres devant moi, un terrible doute finit par m’envahir. Et si je ne savais pas qui j’étais moi-même ? Si je n’étais pas celle que je prétendais être ? Si j’avais changé ? J’avais peur d’apprendre la vérité. C’était une étrange sensation… Là, lourde, comme un morceau de métal dans le réservoir. Je n’avais pas envie de me retrouver enfermée dans une boucle infernale de questions sans réponses, encore moins de me perdre dans des réflexions existentielles qui ne m’apporteraient aucune satisfaction.
Alors comme toujours, j’esquivai ce genre de réflexion.
Poussant les grandes portes du centre médical avec précipitation, je me dépêchai d’atteindre le couloir de gauche sans même prêter attention aux cris indignés de la réceptionniste. Je m’engouffrai dans ce long et vaste couloir que j’avais quitté la veille avec le Spark rempli d’excitation, mais que je réempruntais avec de l’appréhension. L’angoisse de voir la déception dans le regard de Ratchet montait… Atteignait son paroxysme. Je ne voulais pas l’affronter, je n’avais pas les épaules assez solides pour cela. Pas en ce cycle. C’était trop douloureux. Les claquements effrénés de mes talons sur le sol métallique, c’était à peine si je prenais garde de ne renverser personne sur mon chemin vers les locaux du médecin rouge et blanc. Je priai de tout mon Spark pour qu’il soit là… Car s’il ne l’était pas, je craignais de perdre tout le courage que j’avais amassé jusqu’ici pour venir présenter mes excuses.
Enfonçant mes pedes dans le sol pour maîtriser un long dérapage, j’agrippai le boîtier de déverrouillage des portes automatiques avant de pianoter dessus avec frénésie pour les ouvrir. Elles se rétractèrent d’un sifflement dans les murs, dévoilant une infirmerie calme, cependant pas vide de vie. En effet, le médecin que je cherchais activement se trouvait dans son bureau vitré, en face de l’entrée principale des locaux spécialisés dans les grosses réparations et les urgences prioritaires. Dans cet immense centre médical, aussi vieux que la ville elle-même, plusieurs secteurs de soins existaient suivant les différents cas à traiter et comportant pas moins de trois étages. Ratchet, étant le médecin le plus réputé mais aussi le plus respecté de sa catégorie, possédait toute la partie du rez-de-chaussée et répartissait son travail entre trois autres assistants sous ses ordres. Je ne comptais même plus le nombre de salles de soins mises à notre disposition dans cet endroit titanesque…
«Ratchet ! Je suis là !» M’écriai-je ridiculement alors que je pénétrais dans la pièce, épuisée après avoir autant exploité mes batteries qui n’étaient pas complètement rechargées à cause de ma mauvaise recharge.
Le mecha rouge et blanc était en train de déguster un cube d’energon au distributeur automatique, mais à la suite de mon exclamation, il se retourna dans ma direction pour me regarder avec indifférence à travers la vitre séparatrice. Ses optiques bleues qui me fixaient sans l’ombre d’une émotion, je me dépêchai de franchir la porte ouverte pour me tenir devant lui, les mains posées sur les genoux tandis que je faisais tourner mes systèmes de ventilation à plein régime. C’était incroyable de voir à quel point j’étais en manque d’endurance ! Encore une preuve que je n’étais pas totalement guérie, et que mon protoforme ne s’était toujours pas remis de son traumatisme. Ou peut-être que c’était à cause des résidus de la haute qualité, plus probablement… Légèrement pliée en attendant de refroidir mes systèmes, je levai mon index pour faire signe à Ratchet que j’avais besoin de quelques nano-kliks pour retrouver mes esprits. C’était embarrassant… Je n’osais imaginer à quoi il pensait en me voyant ainsi, affaiblie. Mais c’était surtout son silence qui me terrassait, alors je parlai avant de me dérober.
«Je suis vraiment désolée ! Je t’assure que je voulais venir ici cette nuit, je te le promets ! C’est juste un énorme malentendu !» M’excusai-je, affolée, après m’être redressée dans une grimace pour observer l’expression platonique du médecin resté près du distributeur. Toujours silencieux, je pris ce manque de réaction pour de la colère.
«Je t’en prie, il faut que tu me croies… Je n’étais pas dans mon état normal hier, et Hot Rod pensait que ce serait judicieux de m’emmener boire de l’energon de haute qualité pour me changer les idées. Bon, c’est vrai que ce n’était pas la plus brillante des idées, je te l’accorde, mais il ne pensait pas à mal. Il voulait juste m’aider.» Lui expliquai-je à la hâte alors qu’il m’examinait de la tête aux pedes avec une touche de répugnance ou de mépris, je n’en étais pas certaine mais dans les deux cas, cela me faisait énormément de mal.
«Je sais que j’ai fait n’importe quoi et que tu comptais sur mon sérieux pour réaliser les tests et revenir ici à chaque fin de cycle… Que tu attendais de moi de la discipline. Mais je peux t’assurer que cette erreur ne se reproduira plus à l’avenir. Je vais te prouver que tu peux avoir confiance en moi, Ratchet. Je ne suis pas une cause perdue.» Plaidai-je jusqu’à ce que je sente mes optiques devenir humides, encore une fois. Mais qu’est-ce qui n’allait pas avec moi ?! Pourquoi étais-je tout le temps excessivement sensible ? Pourquoi la fierté de mes proches était-elle aussi importante ?
Je connaissais déjà la réponse.
«Je sais que je vous ai déjà souvent déçus… Avec mes frasques, mes décisions impulsives, cette fichue soif d’aventure que je traîne depuis l’âge étincelant. Je vous ai fait peur plus d’une fois. Mais à ce cycle, je veux que tu comprennes que j’ai changé. Que ma vision du monde, des responsabilités, a évolué. Je veux devenir meilleure. Je veux que vous puissiez être fiers de moi, toi et Optimus. À mes optiques, il n’existe rien de plus précieux.» Je laissai tomber mes dernières barrières, exposant mes émotions à nu pour que Ratchet saisisse toute la sincérité de ma démarche. Mon Spark se contracta douloureusement dans mon châssis lorsqu’il détourna le regard, impassible, pour aller se resservir un cube à la machine. Je sentis ma voix vaciller, mais je la retins de justesse. Il ne fallait pas que je flanche maintenant. Pas après avoir fait tout ce chemin.
«Pardonne-moi… Pour toutes mes erreurs. Je suis une idiote ! Une fembot pourrie-gâtée qui ne pensait qu’à s’amuser, qui voyait les ordres comme des punitions ! J’ai toujours mérité les sermons. Je sais qu’ils étaient pour mon bien… Mais j’étais trop orgueilleuse pour l’admettre. J’ai toujours fait les choses à ma façon, juste pour exister, pour prouver que j’étais là. Je voulais qu’on m’écoute, qu’on me voie… Que mon Opiluk me voie. Et regarde où ça m’a menée. J’ai tellement de regrets qui me rongent, Ratchet. Mais jamais, jamais je n’ai voulu blesser qui que ce soit délibérément…» Toutefois, mes mots se figèrent dans mon vocaliser lorsque Ratchet se retourna lentement vers moi avec un cube d’energon rosé entre les doigts. Sans un mot, il me le tendit. Prise au dépourvu, je clignai des optiques puis levai les mains avec hésitation pour récupérer timidement le cube.
«Bois ça. Ça t’aidera à soulager ton réservoir.» Indiqua calmement le médecin.
«Tu… N’es pas fâché ?» Lui demandai-je, hésitante, passant mes optiques incertaines du cube rose au visage si impassible du grand bot.
«Pourquoi je serais fâché ? Optimus est venu me prévenir hier soir que tu ne viendrais pas remplir ta mission exceptionnellement, que tu avais grandement besoin de décompresser avec tes amis. Et je vois que tu n’y es pas allée de main morte.» Remarqua Ratchet avec un petit sourire en coin tout en fixant avec insistance ma carrosserie ayant fait office d’esquisse.
«Optimus a fait ça…» Répétai-je doucement, le menton s’abaissant. Bien sûr qu’il aurait fait quelque chose comme ça pour moi… C’était typiquement l’œuvre de mon créateur.
«Nous nous sommes dit qu’il valait mieux te laisser un peu d’espace, sans personne sur ton dos. Mais que ce soit bien clair entre nous, c’était à titre exceptionnel !» Avertit le médecin en levant son index devant mon visage, m’obligeant à le regarder, ses crêtes optiques haussées en signe d’avertissement.
«Oui oui, complètement exceptionnel !» Hochai-je bêtement la tête, encore sous le choc.
Je ne m’y attendais pas du tout… C’était une marque de confiance qui me touchait profondément.
«Bien. Si nous sommes sur la même longueur d’onde, j’estime qu’il est inutile de préciser que je t’attends ici ce soir, sans faute, avec le rapport quotidien rempli. Mhm ?» Ratchet posa ses mains sur ses hanches en attendant une réponse positive de ma part, ses optiques se rétrécissant pour mieux m’influencer.
«Évidemment ! Tu peux compter sur moi, Ratchet. Je n’ai aucune intention de te décevoir.» Me raclant le vocaliser pour me libérer de cette pression contraignante, je lui souris avec reconnaissance tandis qu’il m’incitait à boire le cube.
«Prends-le. Comme tu n’es pas habituée à recevoir de grandes quantités d’energon de haute qualité dans tes circuits, j’ai peur que ton réservoir te fasse des siennes jusqu’à la fin du cycle. Il est important de bien évacuer, quitte à le laisser frôler la barre des vingt pourcents jusqu’à ce que tu reviennes ici plus tard dans la soirée. Je m’occuperai du reste lors de ta recharge quotidienne.» Précisa-t-il, suivant du regard le cube que j’avalais goulument.
J’avais terriblement envie de le prendre dans mes bras, de lui dire à quel point j’étais soulagée qu’il ne me détestait pas… Mais je n’osais pas faire le premier pas. La peur du rejet me paralysait, tout comme la crainte d’empiéter sur son espace privé, si étroit et si précieux. Je crois que je ne lui avais jamais fait de câlin auparavant, ou du moins, je ne m’en souvenais pas. Peut-être que cela était arrivé lorsque j’étais encore un jeune étincelant innocent, en manque d’affection… Je l’ignorais. Cependant, mon amour et mon admiration pour lui ne faiblissaient pas avec le temps. Au contraire, ils ne faisaient que grandir, gagner en intensité et en valeur. Comme mon Opiluk, il occupait une place unique et sacrée dans mon Spark. Je l’aimais, comme on aime un créateur qui veille tendrement sur soi. Une fois le cube vidé, il le reprit doucement de mes mains. Puis, dans un geste tendre et rare, il tapota le haut de mon casque, m’offrant ce sourire rare qu’il ne réservait qu’à moi. Ce simple contact ponctua cette merveilleuse émotion qui gonflait en moi, illuminant mon Spark d’une chaleur nouvelle.
«Merci.» Je le remerciai en imitant soigneusement son sourire.
«Il n’y a pas de quoi. Je porte également un message de la part d’Optimus. Il aimerait te voir au centre de recherches pour discuter de certaines formalités avec toi.» Le médecin croisa les bras sur son châssis après avoir jeté le cube dans le recyclage.
«J’aimerais intégrer sa brigade de recherches aux Ruines du Passé. Ses récits passionnants sur l’Ancien Monde m’ont donné envie de fouiller pour trouver des reliques.» Expliquai-je suivi d’un petit rire, même si ce n’était pas la vraie raison. D’après son expression suspicieuse, il s’en doutait également.
«Mais oui, bien sûr, c’est parfaitement cohérent. Ce n’est absolument pas pour passer plus de temps avec lui, c’est juste parce que tu as découvert une nouvelle passion. Je ne savais pas que tu avais un penchant pour les vieilles reliques… Passer de longs groons sous le métal, c’est vraiment ce qu’il y a de plus excitant pour une jeune Autobot en quête d’identité, hein ?» Lança Ratchet qui lisait clairement mes véritables intentions. Vilain !
«Tout le monde change, c’est bien connu.» J’haussai les épaules avec nonchalance, même si sa dernière remarque me laissait un profond sentiment d’appréhension. Retourner dans le noir… Sous le métal ? Je n’y avais pas vraiment pensé…
C’était quelque chose qui me rendait particulièrement anxieuse.
«Bon, j’ai du travail. Les patients ne vont pas se réparer tout seuls !» Grommela le mecha rouge et blanc face à moi, ce qui me sortait rapidement de mon angoisse passagère. J’avais envie de lui demander comment allait Bumblebee, mais je préférais m’en assurer moi-même lorsque je reviendrai ce soir pour la recharge. Néanmoins, au regard obtus que le médecin me lança, je ne pouvais m’empêcher de lui demander ce qui le perturbait autant. La réponse ne fut évidemment pas décevante !
«Fais-moi plaisir. Avant d’aller voir Optimus, transforme-moi cette catastrophe visuelle en quelque chose d’un peu moins voyant. Je veux bien que ce soit un nouveau style à la mode, ou peu importe comment vous appelez ça, mais je n’ai aucune envie qu’une vague de robots, aveuglés par cette horreur, débarquent dans mon infirmerie ce cycle.» Se plaignit dramatiquement Ratchet tout en grimaçant devant mon armure qui lui inspirait manifestement beaucoup de dégoût. Tirant la langue un instant, il secoua finalement la main devant son visage plissé.
«Pour l’amour de Primus ! Je ne suis pas expert en peinture de carrosserie, et encore moins en harmonisation de couleurs mais si j’étais toi, je demanderais réparation à celui qui t’a fait ça. J’ai l’impression de voir un ramassis de couleurs qui aurait pris vie suite à une expérience qui aurait mal tourné…» Insista-t-il en cachant sa bouche derrière son poing, exagérant volontairement ses propos pour détendre l’atmosphère. Ou simplement pour me faire passer un message, au choix !
«Rassure-toi, je ne compte pas laisser ça en l’état. Je tiens quand même à garder un minimum de dignité.» Répondis-je en riant après quoi, je laissai Ratchet vaquer à ses occupations tandis que je me dirigeais d’un pas nettement plus léger vers la sortie du centre.
C’était dingue, le pouvoir qu’avait Ratchet pour me faire décompresser… Entre ses remarques désobligeantes, ses réflexions, ses indignations et ses crises de colère, il parvenait encore à me surprendre avec des moments comme celui-ci. Des moments presque tendres. Il ne manquait jamais de nous étonner ! Secouant la tête en repensant à notre conversation, je m’enfonçai tranquillement dans le couloir principal en direction du centre de recherches situé à environ un breem de là. Des idées pleins le processeur, je me voyais déjà effectuer ces fameuses recherches aux côtés de Chromia et Ironhide, ce duo iconique que je trouvais à la fois très attachant et terriblement drôle. J’avais hâte de découvrir de nouvelles choses, de m’intégrer enfin à cette société qu’était la nôtre. De m’éloigner de tous mes cauchemars, de toutes ces images qui me pourchassaient sans répit…
Retourne-toi !
Machinalement, mon corps pivota pour regarder derrière moi, les optiques écarquillées de stupeur à cette injonction soudaine. Mon Spark s’arrêta l’espace d’un instant. Immobile d’incrédulité après cette forte voix qui avait résonné dans mon dos, je sondai le couloir étrangement vide… Il n’y avait personne d’autre à part moi, et aucun bruit ne rivalisait avec celui de mes évents vrombissant furieusement sous l’effet de la peur. Osant à peine faire le moindre mouvement, je regardai lentement de gauche à droite à la recherche de l’auteur de ce cri. Or, j’étais bel et bien seule avec mes pensées. J’étais pourtant certaine d’avoir entendu quelque chose… Ou plutôt quelqu’un, dans mon audio droit. Quelque part, au fond de ce long couloir lumineux. Toujours méfiante, je plissai les optiques tout en me redressant petit à petit, attendant quelques instants de plus immobile au milieu du couloir pour être sûre que personne ne me jouait de mauvais tour. J’étais figée sur place, à la fois terrifiée et fascinée par cette présence invisible qui semblait m’observer. Mais mis à part mon Spark qui bourdonnait dans mes audios, il n’y avait absolument rien d’alarmant.
Jusqu’à ce qu’une silhouette n’apparaisse au croisement.
«Tout va bien ?» Demanda une voix féminine appartenant à l’une des assistantes, du moins, ce fut ce que je déduisis en apercevant la croix rouge figurant fièrement sur son épaule droite.
«O-oui oui ! Tout va bien !» Répondis-je un peu à la va vite, embarrassée par la situation. Massant confusément l’arrière de ma tête d’un sourire ridicule, j’attendis que cette dernière n’entre dans son bureau pour enfin me détendre.
Tu t’imagines des choses, Moonlight. Il faut que tu arrêtes de vivre dans le passé, me réprimandai-je intérieurement avec une pointe d’agacement à cette paranoïa qui ne voulait plus me quitter.
Tu veux arrêter de vivre dans le passé, mais tu es sur le point d’y replonger la tête la première… Rappelai-je aussitôt, ce qui eut pour effet d’amplifier cette irritation. D’un grognement exaspéré face à mon manque de raisonnement logique, je levai les optiques au plafond puis repris ma route, non sans une petite dose d’adrénaline dans mes circuits.
{==Centre de recherches, ouest de Iacon==}
POV Normal
La lumière verte de l’hologramme, projetée au centre d’une grande table ovale, éclairait le visage tourmenté du leader des Autobots, Optimus Prime. En pleine réunion avec les membres de son équipe de chercheurs-fouilleurs, le très respecté commandant effectuait un tour de table mensuel afin de connaître les différents points de vue sur l’avancement de leur projet collectif. Après de longs groons de fouilles dans les Ruines du Passé à la recherche de la fameuse forge de Solus Prime, ils avaient enfin la possibilité de mener des investigations plus poussées sur le sanctuaire des Treize. Ce qui, bien sûr, ouvrit un long débat sur la manière de procéder pour que l’exploration se déroule dans les meilleures conditions possibles.
Tout le monde avait son idée sur la question. Chacun à leur tour, les Autobots de l’équipe exposaient leur perspective sur le prochain grand problème qu’ils allaient devoir affronter : l’extraction du précieux artefact désormais à portée de main. Ils n’avaient pas le droit à l’erreur. L’opération devait se dérouler sans encombre pour éviter d’abîmer la relique, qui pourrait complètement changer le visage de leur monde et offrir une toute nouvelle lueur d’espoir à leur race sujette à de nombreux conflits. Surtout ces derniers temps… La création d’étincelants était en grande perdition, le nombre d’individus ne cessait de diminuer à chaque nouvel affrontement, dans les deux camps. Le Allspark n’était plus aussi productif depuis que les deux maternusines principales avaient été détruites, et les infrastructures secondaires attendaient actuellement de recevoir de nouvelles ressources pour pouvoir produire de nouveaux protoformes. Quant aux Bénédictions de Primus, assez rares, elles n’étaient pas non plus une option durable.
Ces précieuses ressources commençaient sérieusement à leur poser problème… Optimus en avait parfaitement conscience. Chaque cycle, de nouvelles plaintes concernant le réapprovisionnement des stocks s’empilaient sur son bureau, car les habitants de Iacon commençaient à ressentir les effets de la guerre sur leur confort de vie. Et généralement, lorsqu’un certain seuil était atteint, une révolte n’était jamais très loin. La population ne pouvait pas être indéfiniment sous contrôle. Les Decepticons pillaient les mines d’extraction, volaient les marchandises et s’emparaient des territoires appartenant aux Autobots. Petit à petit, ils gagnaient du terrain. À cela s’ajoutait le manque de nouvelles pièces pour réparer les robots, un autre grand fléau auquel ils étaient tous confrontés. Sans pièces de rechange, comment allaient-ils survivre ?
Ils étaient une minorité autour de cette table à débattre des prochaines directives à suivre concernant ce projet de grande ampleur, un projet sur lequel ils travaillaient d’arrache-pede depuis plus d’un cycle stellaire maintenant. Étant un sujet controversé et donc sensible, Optimus ne tolérait qu’une poignée de chercheurs dans la salle de réunion en qui il avait une totale confiance. Autour de cet immense hologramme représentant les tréfonds des ruines, Chromia, Ironhide, Beachcomber, Wheeljack, Inferno et Blurr échangeaient sur une éventuelle extirpation de l’artefact. À cette table, il ne manquait qu’une seule figure emblématique. Celle de son mentor Sentinel Prime, qui n’avait toujours donné aucun signe de vie aux Aerialbots partis à sa recherche, pas plus qu’à lui depuis leur retour de l’offensive lancée sur Kaon. Optimus se questionnait sur les véritables intentions de son mentor et ami, trouvant cette disparition très suspecte en plus d’être incohérente avec les récits des soldats.
De l’autre côté du grand canyon, derrière les murailles, Megatron ne donnait pas non plus de signe de vie. Curieusement, au lieu d’apporter du soulagement, ce silence de la part de son ennemi juré était plutôt inquiétant. Car d’habitude, le chef des Decepticons se manifestait toujours d’une façon ou d’une autre, que ce soit en tentant d’infiltrer la capitale ou en essayant de faire des prisonniers à chaque patrouille hors de la ville. Mais là, rien du tout. Plus rien depuis leur retour de l’assaut sur l’arène de Kaon, ce qui était tout à fait inhabituel et énigmatique pour un tyran tel que lui, qui prônait la violence avant tout. Le silence radio total, ce qui ne manqua pas d’intriguer les Autobots au point qu’ils se demandèrent si les Decepticons ne mettaient pas secrètement un nouveau plan en pratique derrière les remparts de leur capitale bien gardée. Allaient-ils agir dans l’ombre ? Dans tous les cas, Optimus était aux aguets et ne permettrait plus jamais à Megatron de mettre la main sur sa fille, il s’en était fait le serment.
Il finirait par se venger. Il finirait par l’anéantir. Mais en attendant d’établir l’ultime plan d’attaque, il devait rester en position défensive jusqu’à ce qu’il puisse enfin résoudre ce problème de réapprovisionnement qui appauvrissait la ville.
Problème sur problème… L’Autobot rouge et bleu ne savait plus où donner de la tête par moment. Mais tant qu’il endossait le rôle de chef, il assumerait toutes ses responsabilités, et il ferait tout en son pouvoir pour les remplir dignement avec toute la dévotion possible. Malgré les obstacles. Tant qu’il avait le soutien de ses Autobots ainsi que la confiance des citoyens, Optimus était confiant quant à l’avenir de leur peuple. Il trouverait une solution à chacun des problèmes qu’ils rencontreraient, peu importe le temps ou l’énergie qu’il faudrait, il assurerait ses fonctions jusqu’au bout même si cela signifiait faire des choix compliqués. Il pensait notamment à Sentinel et à ses suspicions à son sujet. À chaque fois qu’il y songeait, le Prime ressentait une douleur sourde dans son Spark puis une pression inconfortable au niveau du réservoir qui se terminait par un goût amer en bouche. Cette affaire le travaillait bien plus qu’il ne voulait laisser paraître.
Fermant un instant les optiques pour tenter de soulager toute cette pression accumulée dans ses câbles, Optimus se concentra davantage sur le lien créateur étrangement silencieux en ce milieu de cycle. Naturellement inquiet pour sa fille, il se mit à titiller le lien dans l’espoir de recevoir une réponse, même infime, de l’autre côté. Cependant il restait toujours silencieux, à son plus grand malheur. Ratchet lui avait dit de laisser plus de liberté à Moonlight, mais c’était bien plus facile à dire qu’à faire… Remarqua-t-il d’une pointe d’agacement. Pourquoi ressentait-il toujours ce besoin irrépressible d’avoir un contact permanent avec elle ? C’était une question sans fondement, car il s’agissait de sa fille et il était tout à fait normal pour un créateur de s’inquiéter. Il voulait juste s’assurer qu’elle allait bien, rien de plus…
Être certain qu’elle s’amusait bien, qu’elle était bien entourée, loin du danger que représentaient les espaces sauvages en dehors des remparts de la ville. Qu’elle n’avait mal nulle part… Il ne supportait pas de ressentir des émotions négatives, se remémorant sans arrêt les électrocutions qu’elle avait subies et qui s’étaient répercutées sur lui. Cela le hantait. Mais c’était plus fort que lui, incontrôlable même. Depuis toute petite, il voulait la protéger de tout et apporter une présence bienveillante dans sa vie, tout comme être un bon créateur pour que son développement se réalise correctement. Une figure exemplaire sur qui elle pouvait compter à chaque instant. Mais que Primus le garde, c’était éprouvant d’être à la hauteur dans tous les domaines… De faire en sorte de répondre présent sur tous les fronts sans jamais montrer de signe de faiblesse. Un Prime, un Autobot, un créateur… Toutes ces fonctions demandaient autant d’énergie que de perspicacité. Peut-être devrait-il songer à faire une pause ? À essayer de se ressourcer un peu, pourquoi pas auprès du Allspark, pour tenter de renouer avec les anciens qui pourraient le guider.
Cette idée n’était pas déplaisante.
«Monsieur ?» Intervint soudainement la voix de Beachcomber.
«Oui ?» Optimus cligna des optiques quand il remarqua que le mecha géologue bleu et blanc lui faisait signe de la main. Il était tellement accaparé par ses pensées qu’il n’avait plus du tout suivi la conversation.
«Est-ce que tout va bien ? Vous semblez préoccupé.» Demanda l’Autobot plus petit en regardant avec insistance le datapad dans la main gauche de son leader à priori absent. Ce dernier était complètement tordu, ayant subi une grande pression de la part du robot en pleine réflexion.
«Pardonnez ma distraction passagère. Je pensais au problème de réapprovisionnement des ressources et à toutes ces pièces qui nous manquent. Je ne voulais pas perturber la discussion. S’il vous plaît, reprenez là où vous vous étiez arrêtés.» Indiqua le Prime d’un faible geste vers l’hologramme vert qui montrait un zoom approfondi des fondations du temple souterrain. Il libéra enfin sa prise sur le datapad qu’il reposa soigneusement devant lui, tandis que Blurr s’exprimait.
«Vous ne devriez pas vous rendre au chevet de votre fille ? D’habitude, vous vous y rendez à la fin du cycle matinal, et il est presque le début de l’autre moitié ! Vous êtes gravement en retard, si je peux me permettre ! Cette réunion peut être reportée, elle n’est pas urgente. Enfin, un peu, mais la famille passe avant tout !» Débita-t-il, assis de l’autre côté de la table ovale, la seule lumière produite par l’hologramme central se reflétant sur sa carrosserie aérodynamique bleu pâle.
Optimus voulut rebondir sur ce que venait de dire son messager, toutefois Ironhide fut bien plus rapide que lui pour une fois. Ce qui était assez surprenant venant du guerrier aguerri, presque aussi vieux que le Allspark lui-même, lui qui préférait les actes aux bavardages… En outre, ses prochaines paroles étaient plutôt imprévisibles.
«Moonlight a quitté l’infirmerie le cycle dernier. Je pense que notre bon vieux Prime est juste soucieux, c’est pour ça qu’il semble aussi distrait. Il s’inquiète pour sa fille, comme tout bon créateur le ferait. Et si tu veux mon avis, tu devrais aller la retrouver pour passer un moment avec elle. Car on ne peut jamais rattraper le temps perdu.» Affirma-t-il de sa grosse voix bourrue tout en regardant les autres Autobots pour appuyer ses propos. Des paroles pleines de sagesse… Ironhide était vraiment étonnant quand il s’y mettait, mais son Spark de guerrier endurci n’était qu’une de ses nombreuses facettes. Au fond, il était un grand tendre. À ses côtés, la fembot bleue prit la parole.
«Elle est sortie ? Voilà une nouvelle rassurante. Je peux seulement imaginer les difficultés que vous avez dû affronter ensemble. Je suis heureuse d’apprendre qu’elle se rétablit bien. Permettez-moi aussi de vous dire que vous semblez en meilleure forme.» Chromia rejoignit Ironhide après avoir offert un sourire resplendissant à Optimus, nouant doucement son bras autour de celui du grand mecha au caractère hargneux.
«Ça fait plaisir à entendre et à voir.» Acquiesça Beachcomber.
«Merci à tous pour votre soutien. Il me va droit au Spark.» Remercia le commandant d’un hochement de tête solennel, empreint d’affection. Il décala ses optiques sur Ironhide quand celui-ci reprit la parole.
«C’est normal, Prime ! Tout le monde a le droit d’être heureux. Surtout toi, d’ailleurs ! Tu as assez trimé pour deux vies. Faut savoir lâcher un peu l’accélérateur et savourer ce que Primus nous offre. Alors, détends tes boulons et prends le reste du cycle. On finira cette réunion plus tard, il y a plus important que ça. Et si ça déplaît à quelqu’un, je lui collerai mon gros canon dans la tronche et je l’enverrai se faire voir chez les Decepticons !» S’exclama le robot entièrement noir en posant son épais bras sur les épaules de la fembot à ses côtés, échangeant un petit sourire complice avec elle.
Ne pas terminer une réunion ? Optimus n’avait jamais fait cela auparavant, c’était totalement inédit pour lui. Et prendre du temps libre ? Jusqu’à présent, c’était impensable. Incertain, le leader des Autobots observa les autres robots, visiblement indifférents à cette décision d’interrompre leur réunion mensuelle. Blurr riait avec Beachcomber tandis qu’Ironhide et Chromia se chuchotaient à l’audio, commentant l’expression ahurie que le Prime affichait, assis en bout de table. Bientôt, le commandant se retrouva seul dans la salle à fixer l’hologramme qui représentait une grande partie de son travail de chercheur. Prendre un cycle de congé… Comment les citoyens ordinaires faisaient-ils ?
Le mecha rouge et bleu finit par abandonner son datapad fissuré sur la table lorsqu’il se rendit compte que les ordinateurs dans la pièce d’à côté étaient également déserts. Toute l’équipe faisait grève pour le contraindre à prendre du repos, un mouvement collectif inédit qui laissait le Prime plutôt perplexe. Quittant les locaux désertés avec une certaine confusion quant à la marche à suivre, il se dirigea calmement vers la sortie du centre tout en appelant Moonlight via le lien. Il voulait savoir où elle se trouvait pour lui proposer une activité. Mais quelle activité ? Que pouvait faire un créateur avec sa création ? Qu’aimait-elle faire en fin de cycle ? Lorsqu’elle était encore un étincelant, ils jouaient à toutes sortes de jeux d’éveil mais une fois adulte, il n’avait plus vraiment entretenu ces rituels avec elle. Pour la simple et bonne raison qu’ils n’étaient plus adaptés à son âge, et que son devoir de Prime et ses recherches accaparaient la majeure partie de son temps.
Alors, qu’était-il censé faire à présent ?
Lorsqu’il ouvrit les portes du centre, laissant apparaître les escaliers qui descendaient vers la rue principale, il fut surpris par l’agitation intense qui y régnait. Et il ne s’attendait pas à croiser Moonlight à cet instant précis. C’était une grande surprise ! Elle était justement sur le point de gravir les marches pour rejoindre l’entrée, mais au contact visuel avec son Opiluk elle s’arrêta brusquement, stupéfaite. Forcément, elle était confuse de le voir ici à ce moment du cycle. N’était-il pas censé travailler ? Un silence lourd de sens s’installa entre eux, ponctué seulement par le léger cliquetis des pas des passants sur le métal. Les deux s’observèrent sans un mot pendant plusieurs nano-kliks. Optimus, fidèle à lui-même, restait calme, son regard bleu pénétrant scrutant chaque détail de sa fille. Elle brillait de mille feux sous les rayons des soleils ! Elle resplendissait. Il était évident qu’elle avait appliqué une nouvelle couche de peinture sur son armure, désormais flambant neuve et bien loin des nuances grisâtres et ternes qu’elle avait affichées à son retour de captivité. Sentant rapidement son regard inquisiteur, la fembot se mit à rire nerveusement puis d’un sourire penaud, elle positionna ses mains derrière son casque.
«Hé hé, j’étais justement en train de te chercher. C’est fou comme le hasard fait bien les choses ! J’espère que je ne suis pas en retard… Je me suis dépêchée de finir ma nouvelle peinture avant de venir. Je voulais être présentable pour ce grand moment !» Elle pivota alors sur elle-même avec un sourire rayonnant, dévoilant l’éclat neuf de sa carrosserie fraîchement repeinte. Elle était tellement excitée à l’idée de travailler avec son Opi ! Ravie, elle poursuivit dans ce même ton enjoué.
«Regarde ma nouvelle couleur ! Elle te plaît ? Bon, c’est presque la même qu’avant, mais j’ai ajouté des touches de rouge, comme toi !» Annonça fièrement Moonlight tout en indiquant les fameuses pièces peintes en rouge. Une dans son dos entre ses ailettes, les deux autres au niveau de ses tibias.
Quand je serai grande, je voudrais être comme toi !
Résonna la petite voix fluette de Moonlight plus jeune dans l’esprit d’Optimus. Il la regarda pensivement, observant sa fille tourner sur elle-même avec enthousiasme, fière de sa toute nouvelle carrosserie. Le début éclatant de sa renaissance. Son Spark se remplit d’un amour immense pour elle et il ne put s’empêcher de lui offrir un sourire tendre en repensant à son propre double étincelant qui autrefois, à une autre époque, répétait les mêmes gestes insouciants. Au fond, elle n’avait pas changé. Elle était restée la même petite fembot intrépide et attachante, celle qu’il avait appris à aimer et à chérir de tout son être. Sans elle, il n’était rien. Rien d’autre qu’une machine froide appliquant les règles sans jamais se poser de questions, sans jamais avoir connu ce qu’est le véritable amour. Car l’amour revêt plusieurs formes et sa rencontre avec ce petit étincelant abandonné lui avait appris à le reconnaître cycle après cycle.
«Qu’est-ce qu’il y a ? Ça ne te plaît pas ?» S’inquiéta Moonlight en contrebas des marches, les crêtes optiques froncées d’inquiétude face au manque de réaction de son créateur. Alors lorsqu’Optimus s’avança pour la rejoindre sur les marches puis posa sa grande main sur son épaule, elle fut soudainement submergée par des émotions qui ne lui appartenaient pas, la baignant d’une onde positive.
«Tu es parfaite comme tu es. Ne change rien.» Dit-il simplement avant de la prendre dans une douce accolade contre sa cuisse droite. Il ne se souciait pas d’extérioriser ses sentiments en public. Tout ce qu’il voulait, c’était de montrer à Moonlight à quel point il tenait à elle. À quel point il l’aimait. Tant pis s’il y avait une faille dans son masque de Prime irréprochable juste l’espace d’un instant.
Car cet instant, c’était le leur.
Et personne ne pouvait leur prendre ce moment de complicité.
À suivre…
Les personnages sont en constante évolution, plus particulièrement Moonlight qui cherche toujours à se retrouver. Y parviendra-t-elle ? Trouvera-t-elle un équilibre ? Ou sa paranoïa aura-t-elle raison d’elle ? Pour le moment, il y a plus de questions que de réponses, mais vous finirez par découvrir toute la vérité. Enfin, si vérité il y a à découvrir ! Laissez-moi développer mon histoire, et vous comprendrez l’importance de chacun de ces moments.
VP