Petite Etincelle

Chapitre 40

12813 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 25/09/2025 12:34

Et voici un nouveau chapitre !

CHAPITRE 40

{==Souterrains, Iacon==}

POV Normal

«Tu es sûre que c’est le bon chemin ? J’ai l’impression qu’on tourne en rond, là.» Déclara Smokescreen avec un ton détaché, laissant glisser ses doigts le long de la paroi humide pendant qu’il marchait.

«Il n’y a qu’un seul chemin d’après la carte. Nous y sommes presque.» Répondit aussitôt Moonlight devant lui après avoir sauté au-dessus d’un obstacle sur sa route.

Les deux Autobots d’esprit aventureux avaient décidé de se rendre dans la partie des souterrains qui n’avait pas été ensevelie durant les nombreuses attaques menées par les Decepticons sur la capitale au fil des vorns. Pas à pas, avec prudence, ils s’engouffraient dans un passage étroit, sous plusieurs dizaines de tonnes de métal qui ne tenait plus à grand-chose. Une poutre tordue leur permettait de se faufiler entre des plaques déformées jusqu’à une ouverture assez vaste pour leur permettre de se tenir debout. Smokescreen, qui mesurait presque le double de la taille de Moonlight, réussit tout juste à la suivre dans la crevasse. Ses porte-ailes heurtaient la poutre et le plafond trop bas, si bien qu’il les baissa pour mieux suivre la petite fembot agile qui n’avait qu’un seul objectif en tête : atteindre la partie encore intacte des souterrains. Là où elle espérait trouver des réponses à ses questions. Qui se résumaient à comprendre comment les Decepticons avaient réussi à l’enlever avec une telle précision ce cycle-là, durant la course, aux abords de Iacon.

«Encore un petit effort, nous y sommes presque !» Encouragea Moonlight d’un coup d’optique par-dessus son épaule au mecha qui peinait à la suivre. Le pauvre devait presque se mettre à quatre pattes pour éviter d’érafler son armure !

«Je te suis, mais si ça s’écroule, au moins raconte à Optimus que je suis tombé en héros ! En tout cas, j’espère que tes réponses valent le prix de mon armure neuve… Tu es sûre que ce n’est pas plutôt un plan secret pour me transformer en cube de ferraille ? Je commence sérieusement à avoir un doute, là, tu vois !» Rétorqua Smokescreen avec humour avant de grimacer quand le haut de son casque se heurta contre un morceau de métal vrillé.

«Il suffit d’avancer pour le découvrir ! C’est pas ta devise ?» Amusée par les paroles du mecha toujours prêt à l’aventure, la fembot épousseta d’un geste la poussière invisible de sa carrosserie avant de se redresser dans une cavité suffisamment grande pour contenir deux robots. Devant elle, deux chemins s’ouvraient désormais. Celui de gauche menait à une autre galerie dont les parois semblaient plus stables, mais qui plongeait dans une obscurité totale. Celui de droite, encore plus étroit, laissait filtrer un faible éclat bleuté, comme si une source d’énergie encore active s’y cachait.

«Génial ! Deux options, deux fois plus de chances de finir en tas de ferraille. Alors, cheffe d’expédition, on prend laquelle ?» Soupira Smokescreen dans son dos après avoir lui aussi dépoussiéré son armure sans jamais perdre son petit sourire narquois.

«On est venus chercher des réponses, pas une mort stupide.» Rappela Moonlight d’un faible haussement d’épaules.

«Alors c’est parti pour aller à droite ! Droit vers la lumière !» Le large sourire de Smokescreen illumina ses traits, de plus en plus excité par la tournure que prenait leur expédition dans les bas-fonds de Cybertron. Il adorait ça ! Surtout lorsqu’il y avait du danger, de l’imprévu et un objectif aussi palpitant.

Les deux Autobots poursuivirent donc leur exploration des lieux en prenant garde de ne jamais fragiliser la structure bancale au-dessus de leur casque. Un seul faux pas, et ils pourraient se retrouver ensevelis ! Voire pire. Au fur et à mesure qu’ils avançaient dans ce labyrinthe de couloirs escarpés, Moonlight commençait à se poser des questions sur la légitimité de cette mission… Si vraiment un informateur avait été présent ce cycle-là, comment aurait-il pu s’infiltrer dans ce chaos sans être repéré ni coincé ? Les passages étaient si étroits qu’un Autobot de taille normale aurait déjà eu du mal à se faufiler dans ces couloirs sinueux et oppressants. Elle en avait la preuve avec Smokescreen qui, malgré les difficultés du parcours, continuait à la suivre sans faiblir dans sa quête de réponses… D’ailleurs, elle se demandait ce qui le poussait autant à la suivre dans une mission aussi incertaine. Était-ce uniquement son goût pour l’aventure, ou bien y avait-il quelque chose de plus profond derrière son obstination ?

Son regard pétillant trahissait une excitation sincère, mais Moonlight n’était pas certaine que le mecha mesurait vraiment les risques qu’ils encouraient dans ces souterrains à la structure fragilisée par le temps et l’abandon. Tout comme elle, finalement. Car plus elle avançait, plus le doute l’habitait. Cependant, ils étaient déjà bien trop avancés pour faire machine arrière. Ils touchaient au but, elle en était profondément convaincue ! Ses ailettes frétillaient d’impatience. L’enthousiasme mêlé à l’audace de Smokescreen lui donnait l’impression que rien n’était vraiment impossible. Il dégageait une aura puissante qui l’apaisait et la mettait en confiance, c’était quelque chose qu’elle avait remarqué dès leur toute première rencontre à l’infirmerie. Il dégageait presque une aura de Prime, si on lui avait demandé son avis… Reprenant rapidement sa concentration, la fembot se laissa glisser le long d’une plaque de métal puis enchaîna une roulade avant d’attendre le robot blanc et bleu qui peinait à se frayer un chemin derrière elle. Smokescreen surgit de la pénombre quelques astrosecondes plus tard, un large sourire accroché au visage malgré la poussière qui recouvrait son armure.

«T’as vu un peu le pro ? Pas même une petite rayure ! Nickel chrome !» Lança-t-il fièrement avant de secouer ses porte-ailes pour chasser les débris qui s’y étaient coincés. Moonlight esquissa malgré elle un léger sourire, consciente que son compagnon de route trouvait toujours le moyen d’alléger l’atmosphère même dans les tréfonds les plus inquiétants de Cybertron.

«Au top de ta forme ! Très impressionnant.» Loua-t-elle avant de laisser échapper un petit rire lorsque le mecha afficha une expression radieuse en entendant le compliment.

L’endroit où ils se trouvaient à présent était nettement plus spacieux après tous les obstacles qu’ils avaient rencontrés jusque-là. Fini les passages serrés, place à un vaste espace où les échos de leurs pas rebondissaient sur les parois intactes mais couvertes de rouille. Un mélange d’huile pure et d’energon liquide creusait des sillons sous leurs pedes. De ce mélange émanait une jolie couleur bleutée qui se reflétait sur leurs armures respectives, éclairant assez l’espace pour pouvoir se diriger autrement qu’à la seule lumière de leurs optiques. Cette source improbable descendait en une petite cascade au centre de la caverne, s’échappant d’un énorme tuyau coupé en deux. Les deux amis, bouche bée par leur découverte, s’avancèrent tranquillement pour se rendre compte qu’au contact de leurs pedes dans cette nappe miroitante, celle-ci devenait iridescente. C’était hypnotisant et magnifique à la fois. S’échangeant un bref regard, Moonlight et Smokescreen continuèrent leur exploration tout en restant prudents là où ils posaient les pedes.

«D’après la carte, nous nous trouvons pile en dessous de la piste où Niltrex et moi nous sommes faits attaquer.» Expliqua la fembot après avoir visionné la carte photographiée dans son CPU. Elle retira son doigt de son audio gauche puis cligna des optiques lorsque le mecha marcha en direction d’un spot de lumière à moitié enseveli sous des décombres qui, malgré les vorns, fonctionnait encore. Ce dernier éclairait une façade latérale.

«C’est dingue cet endroit…» S’hébéta Smokescreen, la bouche grande ouverte de saisissement.

Qui aurait cru qu’un pareil réseau de souterrains à l’abandon existait sous leur glorieuse capitale ? Il n’aurait jamais imaginé découvrir un tel spectacle caché sous les fondations de Iacon. Les parois anciennes, marquées par le temps, semblaient avoir conservé intact le souvenir d’une époque révolue, bien avant les guerres. Chaque reflet d’energon sur le métal leur donnait l’impression de marcher dans un sanctuaire oublié, à la frontière entre beauté, chaos et danger. C’était si grand que sa voix se perdait en écho dans le lointain… À croire que cet espace ne connaissait aucune limite. Jouant dans le liquide iridescent avec son pede, Smokescreen posa ses mains sur ses hanches tandis que la fembot dans son dos commençait à chercher quelque chose dans les décombres. La fameuse balise marquant un lieu stratégique qui prouverait l’implication de Sentinel dans son enlèvement. Sur le point de lui donner un coup de main une fois son émerveillement dissipé, Smokescreen se rapprocha d’elle en secouant encore quelques gouttelettes d’energon de son pede. Jusqu’à ce qu’une autre idée beaucoup plus amusante ne lui vienne en tête.

Pour ne pas changer.

Grimpant sur une pile de métal cabossé, le jeune mecha de nature espiègle et intrépide se jeta à pedes joints dans le liquide iridescent, éclaboussant Moonlight tout en éclatant d’un rire mécanique joyeux. Il était incapable de résister à l’envie de transformer leur exploration en un véritable terrain de jeu. Surprise, la fembot bascula la tête la première dans sa pile de décombres d’un petit «ouf !» qui amplifia le rire communicatif de Smokescreen. Il avait passé un bras autour de son réservoir, un doigt tendu vers Moonlight dont la tête était coincée dans les débris. Une fois qu’elle parvint à se dégager, elle lança rapidement un regard noir mais ne put contenir son amusement plus longtemps tant le rire du mecha était irrésistible. Pour se venger, elle attrapa un petit morceau de métal et le jeta dans sa direction, se sentant victorieuse lorsque celui-ci ricocha sur son casque, faisant résonner un bruit sourd tout autour d’eux. Le silence s’étira entre eux alors que le bruit creux continuait de rebondir sur les murs. Il y eut un long moment de silence avant que les deux ne sombrent dans une nouvelle vague d’hilarité incontrôlable.

Moonlight riait si fort que des larmes apparurent aux coins de ses optiques. À chaque fois qu’elle se retrouvait avec Smokescreen, elle oubliait tous ses problèmes ! Il était un véritable remède contre l’ennui. Heureuse de partager une telle complicité avec lui, elle finit par reprendre ses fouilles pendant que Smokescreen escaladait une autre pile de décombres, cette fois-ci éclairé par le spot lumineux. Une fois de plus distrait par les ombres projetées sur le mur à côté de lui, il se mit à gesticuler dans la lumière pour créer des formes amusantes.

«Ouga ouga !» Le mecha prit une voix grave tout en se balançant d’un côté à l’autre de la pile de l’amas de métal, ses bras levés de manière exagérée et ses mouvements sautillants rappelant ceux d’une créature agile et farceuse. Son ombre immense sur la paroi donnait l’impression qu’une énorme bestiole cybertronienne s’était invitée dans la caverne.

«Arrête tes pitreries et viens plutôt m’aider avec ça !» Gloussa Moonlight dans son dos, secouant brièvement la tête face aux idioties de son coéquipier qui n’arrivait pas à rester sérieux. Elle tentait de soulever une énorme plaque de métal, mais elle manquait de puissance.

«Allez, admet quand même que c’est drôle !» Répliqua Smokescreen depuis sa pile.

«Je ne sais même pas ce que tu es censé représenter…» Admit Moonlight d’un soupir audible, levant les optiques vers le plafond très loin au-dessus de sa tête.

«Mais si regarde, un Gorillecon !» S’exclama-t-il, serrant les poings à ses côtés et cambrant légèrement le dos, amusé par son ombre grossière sur la paroi accompagné de grognements ridicules.

«Ça n’existe pas.» Rationalisa la fembot, bras croisés sur son châssis et crête optique arquée.

«Bien sûr que si ! Regarde !» Insista Smokescreen en changeant de position pour faire une autre forme d’ombre sur le mur au grand dam de Moonlight, mi-exaspérée, mi-amusée par les acrobaties lumineuses de son ami farceur. Décidément, il ne manquait jamais une occasion pour se faire remarquer !

Le mecha, après avoir fait son petit numéro pour amuser sa coéquipière, finit par descendre de sa pile pour rejoindre Moonlight en difficulté avec cette lourde plaque de métal. À deux, ils parvinrent à la soulever pour constater qu’il n’y avait rien en dessous. Tout du moins, rien qui puisse correspondre à une balise ou un émetteur. À chaque nouvelle fouille qui ne menait à rien, l’espoir de Moonlight ternissait. Elle avait besoin de prouver qu’elle ne délirait pas, et surtout de soutenir son Opiluk pour le procès imminent visant à juger Sentinel Prime. Pour juger tous ses crimes allant à l’encontre de la morale Autobots. C’était d’une importance capitale et sa seule chance de faire entendre la vérité afin d’empêcher Sentinel de s’en tirer une nouvelle fois. Sans cela, c’était simplement sa parole contre la sienne. Quelque peu anxieuse mais néanmoins déterminée à faire éclater la vérité, Moonlight s’arma de patience, puis continua de fouiller les environs à la recherche d’un indice ou de n’importe quoi d’autre qui pourrait l’aider.

«Qu’est-ce qu’on fait si on ne trouve rien ?» Demanda subitement Smokescreen après avoir lancé son pede dans un bout de ferraille pour l’envoyer au loin.

«Il y a forcément quelque chose… N’importe quoi qui pourrait nous être utile. C’est forcément là…» Marmonna la fembot occupée dans sa quête de réponses. Soupirant bruyamment par ses évents, elle se redressa avec les mains sur les hanches, affichant une expression frôlant l’exaspération.

«Oui mais, s’il n’y a vraiment rien ? C’est quoi ton plan B ?» Poursuivit le mecha blanc et bleu dans son dos en feignant la désinvolture, mais ses porte-ailes révélaient une certaine nervosité. Devant le silence de la fembot immobile en pleine introspection, il ricana ; «Alors ? Tu comptes faire quoi si la piste s’arrête là ? Tu veux qu’on continue à fouiller ensemble, ou tu comptes m’abandonner ici à jouer les lampadaires ?»

«Je réfléchis.» Moonlight tapota son doigt contre ses lèvres, plongée dans la réflexion.

«Ne réfléchis pas trop, ou tu vas finir par oublier que je suis encore là ! Puis tu sais, parfois, la meilleure piste est juste devant nos optiques. Il suffit de prendre du recul.» Renchérit Smokescreen d’un haussement d’épaules, ses optiques sondant les environs. Il lui arrivait de chercher quelque chose, de fouiller partout sans résultat pour finalement réaliser que l’objet en question se trouvait juste sous son parechoc.

«Tu as sans doute raison. Je ne prends pas assez de recul.» Acquiesça Moonlight en décidant de gravir une pile de décombres pour avoir un meilleur visuel de la large zone abandonnée. Le léger bruit du liquide tombant en une petite cascade apaisait ses circuits, et le spot lumineux à sa gauche diffusait une lumière assez puissante pour révéler chaque relief de la caverne. Ce fut à cet instant-là que Moonlight remarqua qu’il y avait un autre passage un peu moins étroit de l’autre côté dans la pénombre, et que c’était sans doute par-là que l’espion s’était infiltré plus facilement. Pendant plusieurs breems, les deux poursuivirent leurs recherches dans un silence entrecoupé par le vacarme de la tôle et de la ferraille retournés par les deux robots, jusqu’à ce que Smokescreen ne brise à nouveau le silence pour faire la conversation.

«Tu sais, j’aime bien t’accompagner dans ta quête de vérité. Ça me fait du bien… Ça change de mon train-train habituel. Avec toi, j’ai l’impression de faire quelque chose qui compte vraiment, d’être enfin utile à quelque chose. Parce qu’au fond… Tu es ma seule véritable amie.» Se confessa-t-il en passant le dos de sa main sur sa bouche, gardant ses optiques fixées sur les débris qu’il était en train de déplacer.

«Je t’apprécie aussi beaucoup.» Répondit Moonlight sans hésitation, un sourire chaleureux aux lèvres au mecha qui avait un peu de mal à soutenir son regard. Certainement parce qu’il n’avait pas l’habitude d’exprimer ce qu’il ressentait vraiment. Elle était profondément touchée par la sincérité de ses mots, et se sentait honorée. Toutefois, elle ne put s’empêcher de rebondir sur quelque chose.

«Tu es quelqu’un de bien et de très courageux, ne l’oublie jamais. La plupart n’auraient pas supporté un quart de ce que tu as traversé ! Et je suis sûre que beaucoup d’autres t’apprécient à ta juste valeur. Tu penses que tu n’as pas d’importance, mais en réalité tu en as bien plus que tu ne l’imagines. Moi, je le vois. Tu es entouré de plus d’alliés et d’amis que tu ne le crois. Et je serais toujours ton amie. Alors fais-moi plaisir, ne te dénigre pas !» Assura-t-elle en secouant son index vers Smokescreen perché sur la pile au-dessus d’elle, le défiant d’oser la contredire. Elle n’aimait pas quand il se sous-estimait de la sorte… Elle avait l’impression de se revoir le cycle de leur rencontre dans l’infirmerie, sa confiance profondément ébranlée.

«On croirait entendre un mélange entre Optimus Prime et Ratchet…» Smokescreen ricana légèrement, mais il était très ému par les sages paroles de la fembot au grand Spark.

«C’est normal, ce sont mes Opiluks.» Taquine, Moonlight haussa les épaules et se pencha pour ramasser un morceau de panneau rouillé qui portait le chiffre six. Le reste était effacé par le temps.

«Pour de vrai ?!» S’exclama Smokescreen, stupéfait.

«Ils m’ont tous les deux élevée. Optimus est mon Opiluk de lien, Ratchet mon Opiluk de Spark.» Répondit Moonlight tout naturellement après avoir jeté la pancarte sur le côté, la lumière de ses optiques éclairant ses mains.

«Tu as vraiment beaucoup de chance !» Rêvassa le mecha d’un sourire pensif aux lèvres, levant son regard au plafond tandis que ses porte-ailes s’abaissaient dans une profonde réflexion.

«À quoi tu penses ?» Questionna Moonlight ensuite, interpellée par le silence et l’absence soudaine de Smokescreen.

«Je pensais à la proposition d’Alpha Trion. Il aimerait que je vienne travailler avec lui aux archives…» Smokescreen mit un certain temps à lui répondre, comme s’il réfléchissait encore à cette proposition.

«Mais c’est génial ! C’est une excellente nouvelle !» S’enchanta aussitôt la fembot en frappant dans ses mains. En revanche, elle fut surprise de constater que le mecha ne semblait pas aussi heureux qu’elle ne l’était à cette annonce. Ses optiques vacillaient légèrement, la bouche s’ouvrant puis se refermant, comme s’il pesait chaque mot avant de les prononcer. Inquiète, elle pencha la tête sur le côté d’un froncement de crêtes optiques ; «Qu’est-ce qu’il y a ?»

«C’est juste que… Je n’ai pas de vrai chez moi. Je vis sur un toit ! Je ne sais même pas si je serai à la hauteur ! Moi ? Un archiviste ? J’ai besoin de sensations fortes ! D’adrénaline ! De montrer de quoi je suis capable ! Pas passer mes cycles à classer des données poussiéreuses ! Je ne veux pas faire semblant d’être quelqu’un que je ne suis pas…» Expliqua tristement Smokescreen, ses porte-ailes tombant en signe de défaite.

«Quand il verra qui tu es et de quoi tu es capable, il te trouvera une autre fonction. J’en suis persuadée, n’importe qui verrait ton haut potentiel ! Et pour ce qui est du problème de logement… Tu pourrais venir vivre avec nous ? On a une pièce de recharge de libre dans nos quartiers. Je suis sûre qu’Optimus n’y verrait pas d’inconvénients.» Proposa gentiment Moonlight avec une touche de légèreté, d’une façon qui faisait penser que c’était LA solution au problème.

«Attends… Moi venir vivre dans les quartiers personnels d’Optimus Prime ?! Le célèbre Optimus Prime ? Mais tu te rends compte ?! Mes circuits vont griller ! Je vais marcher dans le même couloir que lui tous les matins ! Tu réalises que je pourrais le voir se détendre ?! Optimus Prime en mode détente ! C’est historique ! Non mais sérieusement, comment je vais pouvoir me reposer normalement en sachant que le plus grand héros de notre époque recharge juste à côté ? C’est complètement fou…» Ahuri, le mecha blanc et bleu s’effondra mollement sur sa pile de débris, les optiques écarquillées face aux innombrables scénarios qui se formaient dans son CPU en imaginant Optimus Prime à ses côtés. Il pourrait carrément avoir des conversations avec son idole ! Ici-bas, Moonlight se mit à rire.

«C’est un robot comme toi et moi. Tu finiras par t’y habituer.» Gloussa-t-elle en secouant la tête face aux exagérations complètement démesurées de son ami, preuve que son enthousiasme n’avait vraiment aucune limite. Une fois de nouveau calme, Smokescreen reprit sur un ton plus doux.

«Tu ferais vraiment ça ?» Lui demanda-t-il sérieusement, les optiques brillantes de reconnaissance.

«Bien sûr que oui ! Avec le temps, tu comprendras que je tiens toujours mes promesses. Tu es le bienvenu dans la tour des Cieux.» Moonlight lui esquissa un autre de ses sourires authentiques, jusqu’à ce que ses mains attrapent quelque chose qui ne ressemblait pas du tout à un débris…

«Et je crois que nous venons de trouver ce que nous étions venus chercher.» Révéla-t-elle alors qu’elle levait sa main droite où pendait par un câble un étrange dispositif cylindrique avec une lumière rouge clignotante.

Une balise.

{==Centre de recherches, 2 groons plus tard==}

Le commandant des Autobots prenait un peu de son temps pour ranger son bureau. Voilà un moment déjà qu’il devait rétablir de l’ordre afin de retrouver l’espace nécessaire pour travailler sereinement. Il appréciait tout particulièrement cette tâche reposante, qui lui rappelait ses cycles stellaires passés en tant qu’archiviste. Une époque qui lui inspirait parfois une douce nostalgie. Seul avec ses pensées, il triait soigneusement les datapads par ordre chronologique dans les grandes armoires à droite de son bureau central. Un par un, méthodiquement, il les plaçait à la verticale tout en réfléchissant aux nombreuses affaires qu’il devait traiter en ce cycle. Des affaires principalement administratives, dont la monotonie finissait par peser. Cette redondance, Optimus avait appris à s’y habituer, contraint d’exercer son rôle de Prime en parallèle à celui de guerrier. Pourtant, parfois, les interventions sur le terrain lui manquaient… Être au plus proche de la population, de ses Autobots, de leurs combats quotidiens, loin des formalités.

Soupirant faiblement par ses évents, Optimus laissa son regard se perdre sur la couverture d’un des datapads qu’il tenait entre ses mains. Depuis quelque temps, il ressentait une pression supplémentaire. Une grosse charge mentale. Entre les problèmes de réapprovisionnement, la population divisée, le futur jugement de son mentor, et sa fille Moonlight… C’était surtout ce dernier point qui pesait sur lui. Elle ne quittait jamais vraiment ses pensées. À chaque groon qui s’écoulait, il se demandait ce qu’elle faisait, où elle se trouvait dans Iacon. Si elle était bien entourée, en bonne forme, à l’abri des pensées parasites, si elle était heureuse… Bien sûr il y avait leur lien, capable d’apaiser certaines de ses interrogations de créateur, mais ce lien ne remplacerait jamais la chaleur d’un échange direct verbal ou physique. Chaque fin de cycle, il attendait avec impatience le moment de se retrouver dans leurs quartiers pour partager leurs expériences respectives.

Depuis le retour de Bumblebee cependant, Moonlight passait le plus clair de son temps à son chevet à l’infirmerie, mettant entre parenthèses son travail de fouille dans les Ruines du Passé. Optimus ne l’en blâmait pas. Après tout, c’était lui-même qui avait eu l’idée qu’elle accompagne le scout sur le chemin de son rétablissement complet.

Ce véritable miraculé…

Il n’arrivait toujours pas à croire à la vitesse à laquelle Bumblebee récupérait de sa longue stase forcée. Pendant des orns, ce jeune mecha s’était battu de toute son âme pour survivre à ses blessures les plus graves. Optimus ne pouvait qu’admirer sa force et ce courage inépuisable qui imposaient le respect, même aux plus anciens. Il voyait en lui un haut potentiel qu’il prendrait en considération dès que Bumblebee sortirait de l’infirmerie. Sa détermination sans faille qui brillait dans son Spark et sa capacité à toujours se relever, prêt à protéger les siens, avaient convaincu Optimus de lui proposer de rejoindre son équipe de guerriers personnels. Sunray devait être si fière de ce qu’il était devenu… En tout cas lui, il l’était. Voir cette amitié avec Moonlight se renforcer de cycle en cycle le remplissait d’une joie sincère. Ce lien était inébranlable, pur, d’une authenticité touchante qui faisait naître chez lui un profond sentiment d’espérance. Optimus savait que si jamais il lui arrivait malheur, il pourrait compter sur Bumblebee pour veiller sur elle et la protéger, comme il se sentait voué à le faire lui-même.

Nostalgique, Optimus attrapa un cadre posé sur son bureau et l’alluma d’une pression sur le côté droit, révélant une photo de Moonlight encore petite. C’était l’époque où ses couleurs commençaient à changer, lorsque le bleu prenait peu à peu le dessus sur le gris. Elle n’atteignait guère plus que la hauteur de son tibia sur ce cliché ! Cela remontait à si longtemps… On la voyait lui adresser un salut débordant de joie, comme si l’univers entier s’était arrêté pour eux, pour figer cet instant précieux empli d’émotion. Optimus adorait tout particulièrement cette photo, raison pour laquelle il la gardait toujours sur son bureau. Chaque fois que le doute ou la crainte l’assaillait, il suffisait qu’il pose ses optiques dessus pour retrouver courage et espoir. Tendrement, son pouce caressa l’image, et le sourire rayonnant de Moonlight finit par provoquer le sien tant il était sincère et contagieux. Puis, laissant défiler d’autres photos du bout du doigt, il s’appuya contre le rebord du bureau. Perdu dans des souvenirs heureux d’une autre époque.

Ce retour en arrière l’aidait à chasser un instant la tension accumulée, à apaiser son stress et ses inquiétudes pour ce qui l’attendait. Avec Iacon, mais surtout avec Moonlight. Et il n’était pas prêt. Optimus ressentait une émotion qu’il n’avait plus connue depuis le sauvetage de sa fille des griffes de son ennemi juré : la peur. Une crainte brutale qui rongeait ses circuits, remontait le long de ses câbles et étreignait douloureusement son Spark. Le moment fatidique approchait. Dans le silence, le Prime comptait presque les astrosecondes jusqu’à l’instant où tout basculerait, pour lui comme pour Moonlight. Comment affronter une épreuve capable de mettre en péril à la fois son rôle de Prime et celui de créateur ? Comment porter le poids d’une destinée quand son Spark n’aspirait qu’à protéger Moonlight depuis leur liaison ? Cette vérité implacable fonçait vers lui avec la rapidité d’un cycle. Non, psychologiquement il n’était pas prêt. C’était la première fois, depuis qu’il avait reçu la Matrice de commandement, qu’Optimus se sentait aussi terrifié par l’inconnu. Terrifié par les révélations à venir, qui risquaient d’anéantir cette complicité avec sa fille, de briser la plus précieuse des connexions qu’il ait jamais connues.

Grimaçant à la douleur contenue dans son Spark anormalement rapide, Optimus fixa la photographie qu’il avait prise avec ses optiques lorsque Moonlight étincelant se reposait dans sa petite couchette, installée juste à côté de la sienne. L’œuvre de toute une vie résumée en un seul cliché… C’était l’époque où elle n’arrivait pas encore à recharger seule, quand Ratchet avait commencé le traitement pour apaiser ses cauchemars récidivistes. Elle était si minuscule… À peine plus grande que sa main. Une petite chose fragile, incapable de communiquer autrement que par de courts sifflements et des pépiements propres au langage des étincelants. À ce moment-là, son protoforme maigre et majoritairement argenté s’était recroquevillé au fond de la couchette, les optiques fermées. Au-dessus, Ratchet avait installé une bulle de protection, simple précaution pour éviter qu’Optimus, d’un mouvement maladroit, ne l’écrase de son bras quatre fois plus massif que la petite Moonlight. Grâce à cela, l’Autobot rouge et bleu pouvait placer sa main au-dessus de la bulle et se rassurer que son étincelant était bien là, toujours sous sa protection.

Absorbé par cette photo qui réchauffait son Spark, Optimus esquissa un sourire attendri tandis qu’il inondait le lien créateur de tendres sentiments. Comme toujours, la réponse fut immédiate. Moonlight ne manquait jamais une occasion de lui faire ressentir à quel point elle l’aimait… Et cela ne faisait que renforcer la culpabilité et la peur qui l’assaillaient depuis des cycles. Instinctivement, ses optiques se levèrent vers l’horloge holographique projetée sur le mur face à lui. Chaque astroseconde l’entraînait inexorablement vers le moment fatidique. C’était comme si le temps lui-même se jouait de lui, moqueur et cruel, le condamnant à se torturer l’esprit dans un compte à rebours qu’il était incapable d’arrêter. Ses doigts se crispèrent autour du cadre alors qu’il baissait de nouveau les optiques sur l’image qu’il chérissait. Il s’imprégna de la lumière et de la positivité qui s’en dégageaient. Plus que jamais, il en avait besoin.

Immobile, les optiques fixées sur les précieux clichés qu’il effleurait de son index, le Prime fut doucement ramené vers un souvenir lointain.

FLASHBACK

Optimus regardait Moonlight, les optiques assombries par la préoccupation.

Debout au-dessus de la petite couchette de la minuscule fembot, le Prime l’étudiait pendant qu’elle rechargeait. Elle s’agitait, son petit visage se froissait à chaque mouvement de ses bras ou de ses jambes. Par moments, de faibles gémissements s’échappaient de son vocaliser, comme si elle se débattait contre l’un de ses fameux cauchemars. Devait-il la sortir de recharge ? Ratchet le lui avait formellement interdit, lui ayant expliqué qu’interrompre un rêve particulièrement agité pouvait provoquer un choc brutal dans ses circuits déjà épuisés. Pourtant, la tentation était si forte… L’envie de la tirer de là brûlait dans chacun de ses câbles, hurlait dans son esprit de nouveau créateur, qui ne souhaitait qu’une chose : soulager sa création en détresse émotionnelle. C’était un véritable crève-Spark de voir son petit étincelant souffrir dans le silence de la recharge, inaccessible à ses bras pourtant si proches, prisonnière d’un cauchemar qu’il ne pouvait combattre à sa place. En dépit de tout, il mourait d’envie d’intervenir malgré les mises en garde du médecin.

Cette petite chose si fragile…

Il avait toujours au fond de lui cette peur de lui faire du mal sans le vouloir. Un geste trop brusque, un manque de vigilance, une faiblesse de sa part… Ce lien créateur encore si récent venait sans cesse ébranler ses certitudes les plus ancrées. Pourtant, une chose demeurait immuable. Il serait prêt à donner sa vie pour elle. Avec une infinie douceur, Optimus posa la paume de sa main contre la surface lisse de la bulle de protection qui le séparait de son étincelant. Son étincelant… Un mot qui, il n’y a pas si longtemps encore lui paraissait étranger, et qui désormais résonnait au plus profond de son Spark comme une évidence. Cette petite présence avait changé le cours de son existence, bouleversé son rôle, redéfini ses priorités. Elle n’était pas seulement devenue sa création mais une part de lui, fragile et précieuse, qu’il se jurait de protéger au péril de tout le reste. Et en cet instant, il comprit que rien dans l’univers, ni les batailles ni les serments anciens, n’avait autant de valeur que ce minuscule être en recharge devant lui. Était-ce donc cela, l’amour inconditionnel ?

«Je te protégerai, quoi qu’il m’en coûte.» Chuchota doucement Optimus tout en caressant tendrement la vitre qui le séparait de Moonlight.

La pauvre avait attrapé une maladie qui touchait principalement les jeunes étincelants, encore incapables d’assimiler d’autres types de liquide que l’energon raffiné. Une maladie qui se déclarait chez pratiquement tous les jeunes, au moins une fois au cours de leur croissance. On l’appelait la fièvre de l’étincelant, car elle était transmise par l’energon non raffiné ou de mauvaise qualité. La petite avait réussi, il ne savait comment, à atteindre le cube qu’il avait posé sur la table basse pour en boire quelques gorgées… Une curiosité qui l’avait conduite droit à l’infirmerie pour un lavage de réservoir. Mais c’était trop tard, le mal avait été fait. Une partie de son système avait déjà absorbé l’energon. Ratchet dut alors intervenir en injectant un produit intra-câble, destiné à stabiliser ses circuits en attendant que son protoforme élimine les impuretés. Un processus inconfortable, surtout pour un si petit être qui ne comprenait pas forcément ce qui lui arrivait, ni pourquoi elle avait contracté une maladie simplement en essayant de faire comme les grands… Leur soif de découverte ne connaissait décidément aucune limite. Cette souffrance, Optimus l’avait ressentie à travers le lien créateur, et ce qui devait arriver arriva.

Pour la deuxième fois de sa vie, le commandant des Autobots avait complètement perdu le contrôle face à l’angoisse de son étincelant. C’était purement instinctif, incontrôlable et d’une intensité rare. Il avait failli en venir aux mains avec Ratchet après avoir entendu le cri strident des étincelants, un son destiné uniquement à alerter leur créateur en cas de danger. Ce signal déclenchait un mode combat où la survie de sa progéniture devenait la seule priorité, peu importaient les conséquences. La première fois qu’un tel débordement s’était produit, c’était lorsqu’il avait trouvé Sunray dans ses quartiers, tenant une Moonlight pleurnichante dans ses bras. Cette incroyable force, cette colère soudaine… Il avait soufflé les portes automatiques de ses quartiers, sans qu’aucune pensée rationnelle ne traverse son esprit. Comme cette fois-là, il était animé par une force archaïque, plus puissante que toute discipline militaire ou sagesse de Prime. Une tempête que seule la détresse de son étincelant pouvait déclencher. Ratchet avait néanmoins su canaliser cet élan protecteur grâce à son professionnalisme et sa grande expérience des situations extrêmes.

Optimus grimaça amèrement. Que se serait-il passé sans l’intervention de leur médecin compétent ? Il n’osait l’imaginer, mais sûrement rien de bon.

Il fut toutefois tiré de ses pensées lorsqu’il remarqua que Moonlight était sortie de recharge et le regardait de ses petites optiques fatiguées. Toujours recroquevillée au fond de sa couchette, la jeune fembot observait son créateur immense dans un silence chargé d’attention, faisant passer son regard de la main posée sur la bulle de protection à son visage préoccupé. Elle avait ressenti des émotions négatives dans le lien, ce qui l’avait fait sortir de recharge plus tôt que prévu, ses batteries n’étant qu’à soixante-cinq pourcents de leur capacité. Sa fièvre redescendait lentement, ternissant l’éclat habituel de ses optiques et les rendant presque vitreuses. Elle ne fit aucun bruit, se contentant simplement d’analyser la situation sans faire le moindre mouvement. Après quelques kliks à scruter son créateur rouge et bleu stoïque, la petite Moonlight se redressa difficilement au moment où Optimus ouvrit la capsule sécurisée pour la prendre dans ses bras. Avec soin et beaucoup de délicatesse, le grand Prime positionna la fembot contre son châssis, juste au-dessus de son étincelle de vie vrombissante.

Un geste qui calma instantanément l’étincelant malade alors qu’il s’accrochait au pare-brise avec le peu de force qu’il lui restait. Chaque mouvement lui demandait un effort considérable… Se collant du mieux qu’elle pouvait contre la chaleur naturelle du Spark d’Optimus, Moonlight pépia de bonheur lorsque sa grande main la recouvrit pour la protéger du monde extérieur. Elle se sentait en sécurité, bercée par la force tranquille de son créateur, oubliant la fièvre et la douleur. Enveloppée dans une bulle de chaleur et d’affection que seul son Opiluk pouvait lui offrir, elle ronronna de plaisir puis enfouit son petit visage entre les grandes plaques de métal constituant son châssis, communiquant avec lui par le lien pour exprimer son contentement. Elle se sentait apaisée… Loin de ses cauchemars et de la pesante solitude. Elle finit par redresser la tête lorsqu’Optimus se déplaça pour rejoindre sa large couchette et s’y asseoir au rebord, prenant garde de ne pas brusquer Moonlight qu’il gardait précieusement entre ses mains.

L’installant au creux de son bras rouge, il leva son autre main pour actionner, d’une traction du poignet, le petit tube conique qu’il utilisait pour l’alimenter en energon raffiné. Il lui présenta l’embout, mais Moonlight refusa de l’accepter en détournant la tête d’un petit gémissement mécanique. Son réservoir était pratiquement vide, mais elle ne ressentait pas l’envie de le remplir. Il était trop inconfortable et lui donnait envie de gémir à chaque mouvement. Cependant, voyant le visage tombant de son Opiluk après son refus de coopérer, Moonlight voulut lui faire plaisir pour ne plus devoir affronter ce regard triste. Elle n’aimait pas le voir ainsi ! Elle n’avait pas l’habitude de le voir abattu. Elle voulait qu’il soit content, revoir ses sourires qui lui plaisaient tant… Entendre ses rires graves résonner dans tout son châssis comme une berceuse. Alors, elle finit par attraper l’embout noir pour le mettre dans sa bouche et commencer à assimiler l’energon, au plus grand bonheur de son créateur attentif. Elle sentait son soulagement l’envahir, ce qui la motiva à persister, car voir son Opiluk heureux valait toutes les douleurs ! En revanche, elle ne s’attendait pas à ce que son protoforme en décide autrement.

Écarquillant subitement les optiques dès l’instant où son réservoir se rebella, Moonlight toussa puis vomit tout l’energon assimilé sur son châssis argenté. Optimus rétracta rapidement son câble d’alimentation, saisit un chiffon de métal fin et essuya la bouche de sa petite création prise d’une quinte de toux. Une vague de culpabilité le submergea. Il n’aurait jamais dû lui proposer un repas alors qu’elle n’était pas bien… Il aurait dû anticiper. Comment avait-il pu se montrer si négligent alors qu’elle comptait sur lui pour la protéger ? Se réprimandant mentalement pour son manque de discernement, il resserra doucement sa prise autour d’elle, comme pour lui demander pardon en silence tout en essuyant les résidus roses d’energon raffiné. Il en avait un peu sur son bras, mais Optimus décida de ne pas s’en soucier. Ses optiques ne regardaient que son étincelant malade, se remémorant les conseils avisés de Ratchet pour traverser cette nouvelle épreuve. À savoir lui laisser le temps de récupérer et surtout ne pas se sentir coupable pour des événements totalement hors de son contrôle.

Car oui, Optimus Prime ne pouvait pas tout contrôler.

«Pardonne-moi… Pardonne mes erreurs. Je ne sais pas toujours comment m’y prendre, mais retiens ceci : je t’aime plus que mon propre Spark. Si tu chancelles, je serai ton appui. Si tu tombes, je serai tes ailes. À chaque cycle, à chaque instant de mon existence, je resterai à tes côtés. Rien ni personne ne pourra jamais m’empêcher d’être le créateur dont tu as besoin… Et dont tu seras toujours digne.» Il chuchota à l’audio de Moonlight désormais nichée contre son cou, tapotant doucement ses doigts sous ses ailettes pour lui apporter du réconfort quand il l’entendit hoqueter.

«Souviens-toi de cela.»

FIN FLASHBACK

Toc toc toc toc

Le martèlement frénétique contre la porte de son bureau tira Optimus de sa rêverie passagère. Celui ou celle qui se trouvait derrière le métal devait certainement avoir une urgence impossible à ignorer. Clignant rapidement des optiques, le grand Prime replaça le cadre photo sur son bureau puis s’écarta de la surface métallique pour marcher vers la porte. Son inquiétude grandissait à mesure qu’il s’en approchait, son Spark vibrant dans son châssis comme un écho de l’impatience résonnant à travers la paroi. Il n’attendait pourtant aucune visite et n’avait aucun rendez-vous prévu… Qui pouvait bien se présenter à ce moment du cycle ? Jetant un bref coup d’optique à l’horloge holographique indiquant le début du deuxième quart, Optimus posa sa main sur le panneau de contrôle à sa droite pour déverrouiller la porte. Quelle ne fut pas sa surprise en découvrant sa fille Moonlight, visiblement très nerveuse en tenant un objet inconnu dans sa main. Sans même lui adresser un regard, la fembot franchit le seuil d’un pas précipité.

«Désolée de débarquer comme ça à l’improviste, mais il fallait absolument que je te voie.» Déclara-t-elle pendant qu’Optimus refermait la porte derrière elle. Elle leva enfin les optiques pour croiser le regard dubitatif du commandant, levant instinctivement une main en signe de paix lorsqu’il fixa l’objet cylindrique qu’elle tenait avec méfiance.

«Je sais ce que tu vas dire, et non, il ne m’est rien arrivé. Je n’y suis pas allée seule, j’étais accompagnée.» Poursuivit rapidement la fembot, interrompant son Opiluk qui s’apprêtait à répondre. Sans attendre, elle leva le bras pour présenter l’étrange objet qu’elle avait apporté avec elle.

«Ceci pourrait être la preuve qu’il nous manquait pour inculper Sentinel ! Je l’ai trouvée dans les souterrains, juste sous la zone d’attaque des Seekers. Une balise de localisation cachée parmi les décombres… Ça ne peut pas être une simple coïncidence !» Expliqua Moonlight à la hâte tout en faisant les cent pas devant le bureau central sous les optiques perplexes du Prime silencieux.

«Il aurait très bien pu échapper à notre vigilance ! Il sait où sont placées les caméras, il connaît la ville et chacun de ses recoins. Il y a forcément un lien avec tout ça !» Dit-elle avec force, tapotant nerveusement l’objet dans l’autre main. Les crêtes optiques froncées, elle arpentait la pièce de long en large, ne laissant jamais à Optimus l’occasion de répliquer.

«On nous cache des choses, Opi. C’est certain. Et je refuse de rester les bras croisés ! S’il a réussi à placer ça là, alors il peut frapper n’importe où, n’importe quand…» Moonlight sentit l’inquiétude grandir dans son réservoir, tandis que ses théories du complot tourbillonnaient dans son CPU. Puis elle s’arrêta brusquement, les optiques écarquillées.

«Tout converge dans cette direction ! Et si c’était ce qu’il voulait depuis le début ? Que je le voie faire affaire avec les Decepticons ? Pour qu’on l’accuse devant le peuple de Iacon ! Mais oui, ça tient la route ! Il savait que la plupart des habitants prendraient son parti, qu’ils resteraient fidèles à leur ancien Prime et rejetteraient toute accusation comme une manœuvre politique. C’est exactement ce qu’il veut : nous faire passer pour les coupables. Ma parole contre la sienne ! Tu perdrais toute crédibilité… Et lui, il récupérerait son pouvoir ! Tout s’assemble parfaitement !» Elle ponctua sa réflexion d’un geste de la main, comme si la logique s’imposait d’elle-même maintenant qu’elle la disait à voix haute. Ensuite, elle se tourna vers Optimus qui n’avait pas bougé d’un écrou depuis le début de son monologue.

«Et ce n’est pas tout ! Il y a autre chose que je dois te dire…» Elle était sur le point de mentionner le hacker, mais Moonlight fut surprise de voir son Opiluk pensif. Il paraissait absent, détaché… Elle n’était même pas sûre qu’il l’ait écoutée durant tout ce temps. Maintenant qu’elle le regardait, elle pouvait voir qu’il semblait soucieux et nerveux, loin de l’assurance qu’il affichait habituellement. Il n’avait pas décroché un seul mot depuis son entrée dans le bureau, et son manque de réaction à toutes ses révélations remplaçait vite sa détermination par de l’inquiétude.

«Opi ?» Appela doucement Moonlight, intriguée, la tête penchée sur le côté.

Optimus hésita quelques instants avant de répondre, n’ayant pas vraiment écouté ce que sa fille lui avait dit. Très honnêtement, c’était le cadet de ses soucis. Il percevait ses émotions contradictoires à travers leur lien, mais décida de le refermer au minimum pour ne pas l’affecter avec son état psychologique actuel. Son esprit était ailleurs, concentré sur ce qu’il allait devoir accomplir. Il avait peur. Il était inquiet. Tellement inquiet qu’il se sentait incapable d’argumenter avec elle sur la possible implication de son ancien mentor dans cette nouvelle affaire. Pour lui, il y avait actuellement plus urgent et important qu’un futur incident diplomatique. Une situation à laquelle il s’était préparé depuis le retour de Moonlight au bercail, après l’avoir secourue chez les Decepticons. Bien des choses avaient été découvertes… Et c’étaient précisément ces éléments qui le rendaient soudainement aussi anxieux, au point qu’il ne pouvait plus cacher ses émotions. Même à sa fille. Après avoir longuement réfléchi en silence, Optimus s’approcha de Moonlight qui le regardait confusément. Il leva sa main droite, saisit le potentiel objet du crime puis le déposa sur l’étagère, décidant de reprendre cette conversation plus tard.

«J’aimerais que tu m’accompagnes quelque part. Veux-tu ?» Finit-il par dire après un long moment tendu et silencieux.

«Oui, bien sûr ?» Répondit une Moonlight plus calme, ne comprenant pas l’ampleur de la préoccupation qui assombrissait soudain son Opiluk. C’était la première fois qu’elle le voyait si vulnérable, presque déstabilisé, comme si le poids de l’univers s’abattait sur lui.

«Suis-moi.» D’un mouvement de la main, Optimus lui fit signe de le suivre dans le couloir.

oOoOoOoOoOoOoOoOoOo

Moonlight et Optimus avançaient dans un couloir interminable, alourdi d’un silence presque tangible. Après avoir traversé une partie de la ville, ils s’étaient engouffrés dans un ancien tunnel de maintenance, faiblement éclairé par des néons. Les parois portaient les traces visibles de l’usure. Le passage paraissait si long qu’il donnait l’impression de ne jamais finir, comme s’ils s’étaient perdus dans un labyrinthe sans issue. Passage secret ou section oubliée, l’austérité métallique de l’endroit accentuait encore le poids du silence entre eux. À chacun de ses pas, Moonlight avait la sensation de s’enfoncer un peu plus profondément dans les entrailles de la ville. Elle n’avait jamais mis les pedes ici… Ni même entendu parler d’un pareil lieu aux allures de sanctuaire perdu, dissimulé au regard de tous. Pour y accéder, il avait fallu pousser un mur dans une ruelle très peu fréquentée. Jamais elle n’aurait imaginé qu’un couloir aussi long s’étendait juste derrière !

«Où allons-nous ?» Demanda la petite fembot qui marchait aux côtés du chef des Autobots. Elle joignait nerveusement ses mains, se tenant aussi près que possible de la jambe de son Opiluk tandis qu’ils s’enfonçaient toujours plus loin dans ce passage où une vive lumière se dessinait enfin au bout. Chaque pas lourd résonnait jusque dans son châssis, attisant l’anticipation et l’excitation qui nouaient ses câbles.

Le suspense la rongeait de l’intérieur !

«J’aimerais te montrer quelque chose…» Répondit Optimus, choisissant de conserver une part de mystère. Par prudence ou par crainte, il n’en était plus si certain. Pourtant, il ne pouvait rester indifférent à la curiosité de sa fille, ni à l’anxiété qui grandissait de plus en plus dans leur lien. Alors, il poursuivit après s’être arrêté pour regarder Moonlight dans les optiques.

«C’est très important. Mais avant toute chose, j’aimerais te dire que je suis fier de l’Autobot que tu es devenue. Tu as grandi au-delà de toutes mes espérances. Tu as toujours fait preuve de courage, de loyauté et d’une compassion qui t’honore. Même dans l’adversité, tu n’as jamais détourné ton Spark de ce qui te semblait juste. Tu es une lumière dans l’ombre de cette guerre, Moonlight, et sache que rien ni personne ne pourra jamais éteindre la flamme qui brûle en toi. Rien, ni personne.» Répéta doucement Optimus en se mettant à genou pour poser sa main sur l’épaule de la fembot surprise par la tournure de la situation. Lui offrant un rare mais sincère sourire, il resserra tendrement sa prise sur son épaule et laissa passer des ondes apaisantes à travers leur lien ; «Peu importe les épreuves que nous traverserons, je crois en toi… Plus que je ne crois en moi-même. Je te soutiendrai toujours. Et quoi qu’il advienne en ce cycle, sache que je resterai ton créateur.»

«Et je ne pourrais jamais rêver mieux.» Émue, Moonlight lui rendit son sourire avant de poser sa propre main sur la sienne immense. Mais son élan fut freiné lorsqu’elle le vit détourner brusquement les optiques, comme si les mots suivants restaient prisonniers de son Spark. Elle se sentit déconcertée, incapable de comprendre ce qui l’empêchait de parler.

«Opi ? Tu me fais peur. Qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce que tu ne me dis pas ?» Demanda-t-elle avec inquiétude, se penchant légèrement en avant et levant les crêtes optiques quand le Prime continua de fixer le sol.

Quelque chose ne tournait définitivement pas rond. Elle avait l’impression qu’il se préparait à affronter une épreuve particulièrement difficile, comme s’il s’était résigné à partager un secret qu’il aurait préféré taire pour toujours. De quoi pouvait-il bien s’agir ? Qu’est-ce qui pouvait le mettre dans un tel état ? Lui, le grand Optimus Prime, porteur de l’espoir des Autobots qui ne montrait jamais la moindre faille. Elle était perdue… Et désemparée. Troublée par ce masque habituellement impénétrable, fissuré par une vulnérabilité qu’elle n’avait jamais vue auparavant. Enfin si… Elle l’avait déjà aperçue, mais uniquement dans les instants les plus sombres de son histoire. Par exemple lorsqu’elle n’était encore qu’un étincelant à multiplier les imprudences avec Bumblebee, ou encore quand son Spark fragile avait vacillé dans l’infirmerie de Ratchet. Jamais autrement. Elle ne lui connaissait pareille inquiétude mêlée de peur que lorsque survenait un événement d’une extrême gravité. Il était sur le point de lui avouer quelque chose, et il cherchait juste ses mots. Il cherchait la force de franchir cette limite qu’il avait repoussée depuis si longtemps. La façon dont il allait aborder le sujet qui le tourmentait depuis des vorns… Depuis qu’elle était assez grande pour en saisir la réalité.

De comprendre qu’elle avait été adoptée.

«À propos du lien créateur…» Commença Optimus avec hésitation, levant enfin les optiques vers Moonlight pour croiser les siennes chargées d’émotions. Brillantes d’espoir, elles s’embuèrent légèrement tandis qu’elle resserrait sa main autour de son doigt pour l’encourager. Il se libéra le vocaliser.

«Quand tu n’étais encore qu’un jeune étincelant, je… Je voulais te protéger. Je voulais que tu vives et puisses grandir en sécurité… Alors j’ai pris une décision que je pensais être la plus juste, dans une situation où je ne voyais pas d’autre issue. Je t’ai privée d’une vérité que tu dois désormais connaître.» Néanmoins son vocaliser s’étreignit, et Moonlight pouvait voir à quel point son créateur était tiraillé entre son devoir et ses sentiments. À quel point c’était difficile pour lui.

«Ce n’est pas facile à aborder-» Toutefois Optimus ne put terminer sa phrase, car la fembot le devança rapidement.

«Opi, je sais. Je suis au courant.» Finit par dire Moonlight d’un autre de ses sourires rassurants.

«Tu sais ?» Confus, le Prime cligna des optiques.

«Oui, je suis au courant pour mon adoption. Je l’ai appris il y a quelque temps, c’est Ratchet qui me l’a dit. Je m’étais posée des questions, et il a jugé bon de me révéler la vérité sur mes origines.» Expliqua Moonlight, son sourire s’élargissant en se remémorant la scène qui s’était déroulée plusieurs vorns plus tôt. C’était leur petit secret à tous les deux.

«Ratchet a toujours été la voix de la sagesse.» Acquiesça lentement Optimus, encore sous le choc de cette révélation. Évidemment que Ratchet s’en était chargé… Pourquoi n’y avait-il pas pensé plus tôt ? Son professionnalisme et sa bienveillance n’avaient d’égal que son attachement pour elle. Jamais il n’aurait pu lui mentir sur quelque chose d’aussi important.

«Mais Opi, je veux que tu saches que pour moi, ça ne change strictement rien. Que tu sois mon créateur biologique ou non, tu resteras mon Opiluk. C’est toi qui m’as élevée, qui m’as aidée à grandir et à m’épanouir… À devenir qui je suis. C’est toi qui as toujours été à mes côtés, dans les bons comme dans les mauvais moments. Tu m’as soutenue quand j’en avais le plus besoin, et protégée. Malgré ton devoir de Prime, malgré les responsabilités qui pèsent sur tes épaules, tu as toujours trouvé le temps d’être là pour moi. Et crois-moi, aucune vérité sur mes origines, aucun titre, aucune règle ne pourra jamais remplacer cela, ni la place que tu occupes dans mon Spark. Rien, ni personne.» Répéta tendrement Moonlight en reprenant les mêmes paroles que son Opiluk un instant plus tôt.

«Moonlight…» La voix d’Optimus vibra légèrement, trahissant un mélange d’émotion et de gravité.

«Je te fais la promesse que rien ne changera jamais entre nous.» Moonlight enroula ses bras autour du cou de l’Autobot rouge et bleu, enfouissant son visage radieux dans ses câbles et le serrant aussi fort qu’elle le pouvait. Des larmes de joie perlèrent aux coins de ses optiques, tandis qu’elle se sentait enveloppée d’une chaleur rassurante avec une certitude tranquille que quoi qu’il advienne, leur relation ne pourrait jamais être brisée.

«Parfois, je me demande vraiment de qui tu tiens cette clairvoyance…» Murmura Optimus en resserrant doucement son étreinte, son sourire réservé s’étirant un peu plus au contact affectueux de sa fille.

«De toi, évidemment.» Rétorqua aussitôt Moonlight d’un petit rire.

«Oui, évidemment. Tu resteras toujours mon étincelant.» Il la serra doucement contre lui, laissant son Spark communiquer toute l’intensité de son amour paternel et de son engagement silencieux, un lien indéfectible qui dépassait toutes les circonstances.

Sa précieuse fille… Qui avait toujours un tour d’avance sur lui ! Un soulagement immense l’envahit, mais ses craintes n’avaient pour autant pas totalement disparu. Elles restaient logées au plus profond de son réservoir. Après plusieurs petites tapes dans le dos de la fembot blottie contre son châssis, le commandant se redressa de toute sa hauteur et invita Moonlight à le suivre pour le reste du chemin. Il pouvait encore sentir la chaleur de son étreinte et la douceur innée de son Spark résonner contre le sien. En silence, il lui lança un regard empli de fierté et d’affection, comme pour graver cet instant dans sa mémoire. Elle était cette clarté fragile mais indomptable, capable d’illuminer ses ténèbres les plus profondes. Et dans ce silence partagé, il sut que tant qu’elle brillerait près de lui, aucune obscurité ne pourrait jamais l’engloutir. Il devrait penser à remercier Ratchet plus tard, non seulement pour lui avoir épargné le fardeau de révéler ses origines, mais surtout pour avoir permis à Moonlight d’accueillir cette vérité avec sérénité. Elle était d’une grande résilience… Et d’une maturité impressionnante, un point de plus dont Optimus pouvait être fier.

«Alors, que sommes-nous sur le point de découvrir ?» Moonlight brisa le silence, le Spark nettement plus léger après ce moment de tendresse. À côté d’elle, Optimus retrouva son impassibilité et son ton solennel.

«Il y a quelque temps, lorsque tu avais été faite prisonnière, l’équipe d’Arcee avait détecté une signature énergétique dans les ruines de l’ancienne capitale. Très faible, indétectable sans un équipement spécialisé. Une anomalie dans ces lieux abandonnés. J’ai envoyé des éclaireurs sur place pour tenter de comprendre l’origine de ce phénomène, et nous avons fait la découverte de quelque chose d’extraordinaire…» Répondit Optimus de sa voix autoritaire mais calme, décidant enfin de lui révéler la vérité sur ce sur quoi ils travaillaient tous en secret.

«Que veux-tu dire par là ?» Intriguée, Moonlight leva les optiques vers son Opiluk tandis qu’ils s’approchaient toujours plus de la lumière au bout du couloir.

«Il ne s’agissait pas d’une seule signature énergétique, mais de plusieurs, regroupées en un même point. Dans une salle anti-bombardement de la base souterraine numéro douze, plus précisément.» Révéla le Prime, ses optiques se posant sur la fembot à l’écoute avec une intensité qui soulignait toute l’importance de cette vérité.

«Attends… Tu es en train de me dire que vous avez retrouvé des survivants ?!» S’exclama Moonlight, la surprise éclatant dans sa voix.

«En effet.» Optimus hocha la tête.

«Mais, comment est-ce possible ? Après tout ce temps ?! Je veux dire, ça fait des vorns que Trypican a été rayée de la carte et que toutes les bases ont été anéanties… C’est impossible !» S’exclama la fembot, ses optiques s’écarquillant à mesure qu’elle prenait conscience de la situation. Grâce à l’éducation transmise par Optimus, et à sa volonté de lui enseigner l’histoire de leur planète, elle savait combien la chute de Trypican avait marqué la mémoire de son peuple.

«Et pourtant, nous avons retrouvé une dizaine de rescapés, maintenus en stase forcée depuis la chute de Trypican. Soit un peu plus de dix-neuf vorns.» Poursuivit Optimus d’un ton toujours calme et posé, chaque mot résonnant du poids du temps écoulé.

«C’est à peine croyable… Je n’ose même pas imaginer l’état dans lequel ils doivent se trouver, ni la détresse qu’ils ont dû endurer. Les pauvres… Après tout ce temps arrachés à la réalité, la réadaptation sera si difficile.» Moonlight croisa les bras contre son châssis lorsqu’un frisson courra le long de son dos puis que ses ailettes vibrèrent.

«Et c’est là que tu entres en jeu. J’aimerais que tu nous aides à les réintégrer dans notre société. Avec ta bienveillance et ton profond sens de l’empathie, tu pourras rallumer en eux la force d’un nouveau départ, leur rendre la place qui leur revient dans ce monde en constante évolution. Ils ont besoin de nous. Et moi, j’ai besoin de toi.» Confia Optimus à sa droite, son imposante silhouette contrastant avec la douceur de ses paroles. Il espérait que sa fille accepterait cette requête même s’il y avait une autre raison, plus intime encore, derrière cette demande particulière…

«Le centre médical Ouest… Vous les avez placés là-bas, pas vrai ? Cette base interdite au public, c’était pour eux.» La voix de Moonlight ne laissait que peu de place au doute. Ce n’était pas une question, mais une certitude.

«Exactement. Il nous fallait isoler les survivants, afin d’effectuer des tests et de les réparer sans leur infliger de stress inutile. Nous devions d’abord nous assurer de leur stabilité avant de songer à les réintroduire. Chaque protocole, chaque mesure a été appliqué avec rigueur pour garantir leur sécurité et leur bien-être. C’était la seule façon de les protéger correctement.» Admit le Prime.

«Je comprends… Et je veux les aider. Après avoir été coupés du monde si longtemps, se retrouver dans une réalité qui n’est plus la leur doit être une épreuve insoutenable. Mais je serai là pour eux. Je donnerai tout ce que j’ai pour les accompagner et leur offrir une chance de retrouver leur place. Tu peux compter sur ma contribution.» Déclara fermement la fembot, son regard étincelant d’une résolution profonde et d’une tendresse vibrante.

«Je n’en ai jamais douté.» Acquiesça Optimus dans un demi-sourire, sensible à la détermination de sa fille toujours prête à tendre la main à son prochain.

Elle ferait une très bonne Prime.

Les deux retombèrent dans un silence seulement troublé par l’écho régulier de leurs pas dans le tunnel. Moonlight méditait sur sa nouvelle mission, réfléchissant déjà à la manière dont elle pourrait accompagner les survivants dans leur réintégration. Optimus, lui, songeait à l’épreuve la plus difficile de toutes. Car survivants signifiait aussi potentiels créateurs biologiques de sa fille… Même si jamais personne ne s’était plaint de la perte d’un étincelant. Peut-être que l’un d’eux se trouvait là, simplement trop confus ou trop effrayé pour se révéler, prisonnier de ses souvenirs et de la longue stase qui l’avait figé. Que se passerait-il si l’un de ces rescapés réclamait Moonlight ? Que deviendrait leur lien ? Leur famille ? Il savait que c’était peut-être égoïste de sa part, mais l’idée de perdre sa fille lui était insupportable. Son attachement à elle dépassait tout ce qu’il aurait pu imaginer. Pourtant, il devait en avoir le Spark net. Il devait savoir si l’un de ses créateurs pouvait encore être en vie. C’était, en vérité, la principale raison pour laquelle il l’emmenait à leur rencontre en ce cycle après en avoir longuement débattu avec Ratchet. Pour le médecin, c’était une évidence quand pour lui, c’était une épreuve qui touchait son essence.

Moonlight percevait la détresse de son créateur et malgré les ondes positives qu’elle lui envoyait sans relâche, il restait marqué par une inquiétude tenace. Une inquiétude qu’elle ne comprenait pas. De quoi pouvait-il avoir si peur ? Qu’allait-elle réellement découvrir au bout de ce tunnel, ce passage secret menant directement au centre médical Ouest ? Smokescreen en perdrait la raison s’il apprenait la vérité. Lui qui ne cessait de formuler hypothèses sur hypothèses pour percer ce mystère, il était en réalité bien loin du compte. Moonlight brûlait d’impatience de ressortir pour tout lui raconter ! Il n’en reviendrait pas, c’était certain. Qui aurait pu imaginer que, derrière ces grilles, se trouvaient les derniers survivants de Trypican ? Des Autobots qui n’avaient pas revu la lumière du jour depuis des vorns… Et qui n’auraient jamais été retrouvés sans l’intervention d’Arcee et de son équipe. Cette vérité défiait toute logique.

Arrivés au pied de l’escalier du tunnel qui semblait sans fin, Moonlight leva un bras devant ses optiques pour se protéger des rayons aveuglants des soleils haut dans le ciel. Elle grimaça sous la lumière alors que son CPU peinant à adapter sa vision, et ce fut le vacarme environnant qui frappa en premier ses sens. Des pas précipités, des voix criant des ordres de toutes parts… Puis le monde s’imposa à elle. Des robots s’affairaient dans tous les coins, et elle reconnut au loin Ratchet qui donnait des instructions à Jolt et à plusieurs infirmières, dirigeant son équipe sur le tarmac. Des conteneurs s’entassaient un peu partout tandis qu’un haut grillage ceinturait la zone sécurisée. Des gardes patrouillaient régulièrement autour du périmètre désormais très actif, empêchant toute intrusion indésirable. Si Optimus ne lui avait rien dit, elle aurait cru à une base militaire plutôt qu’à un centre médical secret. Trois énormes avions porte-charges étaient alignés sur sa droite, attendant patiemment leur prochaine mission. Et, en face d’elle, un immense entrepôt venait tout juste d’ouvrir ses portes, dévoilant dans la lumière une dizaine de silhouettes.

Les robots inconnus hésitaient à faire le premier pas, tous éblouis par la vive luminosité des soleils. Une réaction plutôt normale après avoir passé des orns enfermés, privés de contacts extérieurs et de stimuli sensoriels depuis si longtemps. Leurs optiques clignotaient nerveusement alors qu’ils tâtonnaient lentement vers la sortie, hésitants mais curieux de ce monde dont ils avaient été privés pendant tant de vorns. Ils avançaient avec prudence, le jour révélant peu à peu la couleur de leur carrosserie. Du vert, jaune, rouge, bleu, noir… Petits et grands, deux fembots et huit mechas, les derniers rescapés de Trypican se dévoilaient progressivement aux optiques fascinées de Moonlight. Sur le tarmac, scientifiques et médecins affluaient, prêts à les guider vers cette liberté nouvellement retrouvée. La fembot bleu ciel fit quelques pas en avant tandis qu’Optimus restait en retrait, observant avec la plus grande attention les réactions de sa fille face à tous ces visages inconnus. Et si l’un d’eux s’avérait être son créateur ou sa créatrice ? La question revenait sans cesse dans son esprit tourmenté. Moonlight, elle, avançait d’un pas assuré, son Spark vibrant de compassion sans soupçonner à quel point cette rencontre pourrait bouleverser son existence.

Et celle d’Optimus.

Les Autobots miraculés se mêlaient peu à peu aux nombreux médecins et aux soldats présents sur le tarmac. Leurs voix s’élevaient dans un brouhaha général, un mélange de souffrance passée et d’espoir renaissant. Optimus suivait Moonlight au milieu de cette foule dense, à proximité des portes‑charges. Elle pouvait voir à quel point ces robots étaient perdus… À quel point cet environnement nouveau les déstabilisait. Cherchant désespérément des repères, leurs optiques balayaient l’espace comme pour s’assurer que ce monde n’était pas une illusion. Certains tremblaient encore, pendant que d’autres levaient timidement leurs visages vers les soleils, redécouvrant la lumière avec une émotion palpable. Ce spectacle toucha profondément Moonlight qui ne put s’empêcher d’esquisser un petit sourire émotif. Ils se familiarisaient. Jetant un petit coup d’optique derrière son épaule vers son Opiluk silencieux, elle se retourna à nouveau vers la foule et commença à s’y mêler, déterminée à les aborder et à les aider.

«Starwind ?»

Inconsciemment, presque par réflexe, Moonlight se retourna vers le son de la voix qui appartenait à un mecha noir et blanc.

Sa voix tremblait légèrement, hésitante, comme si le simple fait de prononcer ce nom lui demandait un effort immense. Un mélange d’incertitude et d’espoir filtrait dans son timbre, fragile et vulnérable, résonnant autour d’eux comme un appel timide mais sincère. Le mecha la regardait d’un mélange de stupeur et d’espérance, ses optiques bleues la fixant comme s’il faisait face à une illusion de données. Le temps sembla se figer un court instant. Les autres voix devinrent plus lointaines, le monde plus flou alors que Moonlight plongeait son regard incrédule dans cette paire d’optiques qui lui était inconnue. L’intensité de cette connexion accélérait son Spark à l’arrière des plaques de métal de son châssis, donnant l’impression qu’il pouvait carrément lire à travers elle. Qu’il la reconnaissait… Ou plutôt qu’il la confondait avec quelqu’un d’autre qui lui était très cher. Elle se retrouva prisonnière de ces optiques à la fois froides et perçantes, mais étrangement vibrantes d’émotion. Le mecha noir et blanc, au port droit et à la silhouette d’un stratège aguerri, portait sur son châssis la marque d’une discipline implacable : une étoile. Sa carrure sobre et affûtée rappelait celle d’un tacticien plus habitué à observer qu’à agir dans l’ombre.

Et pourtant, derrière ce masque de contrôle, Moonlight percevait un trouble sincère, une faille inattendue qui le rendait presque vulnérable.

«Non… Vous n’êtes pas elle, vous n’êtes pas Starwind…» Chuchota-t-il dans l’effroi, secouant brusquement la tête lorsque la réalité finit par le rattraper. Titubant en arrière de quelques pas, il leva les mains devant cette fembot dont l’apparence rappelait celle d’une Autobot qu’il avait connue juste avant sa stase forcée.

«Vous lui ressemblez, mais vous n’êtes pas Starwind !» Cria-t-il soudainement, son ton frôlant l’accusation. Désorienté et en état de choc, le mecha commença à s’agiter, ce qui attira immédiatement l’attention des médecins et d’Optimus.

«Non, non… C’est impossible… Elle était avec moi… J’ai vu… Vous n’êtes pas réelle… Pas réelle… Vous avez ses optiques… Mais ce n’est pas elle ! Vous n’êtes pas Starwind !» Murmura-t-il, la voix basse et tendue, presque étranglée par le conflit intérieur. Ses optiques vacillaient, oscillant entre l’espoir et l’incrédulité. Chaque pas qu’il faisait en arrière semblait hésitant, calculé, comme s’il craignait de franchir une ligne qu’il ne pourrait pas rattraper. Ses mains se levèrent devant lui, non pas pour attaquer, mais pour marquer une distance prudente. Ses systèmes semblaient surchauffer sous l’afflux d’émotions contradictoires avec cet espoir insensé de retrouver cette Starwind et la certitude douloureuse de l’avoir perdue. Prisonnier de ce conflit intérieur, l’inconnu perdait le contrôle. Partagé entre l’envie de s’approcher et le besoin de fuir, son esprit rationnel était incapable de reprendre le dessus face à la tempête de souvenirs qui l’assaillait. Puis tout à coup, ses optiques chargées de reproches se posèrent sur Optimus, et il grogna.

«Tout ça, c’est de votre faute… C’est à cause de vous ! Vous êtes le coupable ! Vous l’avez tuée !» Hurla-t-il en avançant brusquement vers le Prime. Ses mains se crispèrent, ses gestes devinrent saccadés… Presque menaçants, comme si chaque câble de son être hésitait entre éclater en sanglots ou se jeter sur lui. Les médecins autour se figèrent, craignant qu’un seul faux mouvement ne déclenche une explosion de violence. Avant qu’un incident ne se produise, des gardes se précipitèrent pour le retenir et l’empêcher de porter un geste désespéré contre leur chef.

«Vous l’avez tuée !» Répétait sans cesse l’inconnu, tandis que les soldats le retenaient avec force, maintenant ses bras pour l’empêcher de se débattre davantage.

L’écho de sa voix glaçait l’energon dans les câbles de Moonlight.

Elle était complètement perdue. La scène qui se déroulait devant elle semblait surréaliste. Elle ne comprenait ni cette réaction démesurée, ni pourquoi ce robot accusait son Opiluk d’un crime avec une telle véhémence. Qui était-il ? Et qui était cette fameuse Starwind à laquelle il la comparait ? Figée sur place après ce spectacle déroutant, elle sentit son Spark pulser à tout rompre, partagé entre peur et curiosité. Chaque mot de l’inconnu résonnait en elle comme une énigme insoluble, soulevant plus de questions qu’il n’apportait de réponses. Des chuchotements se firent entendre tout autour, la plaçant au centre de l’attention et la rendant rapidement mal à l’aise sous tous ces regards accusateurs et inquiets. Elle aurait voulu fuir, se cacher, mais surtout comprendre ce qui venait de se passer. Les optiques grandes ouvertes, Moonlight se concentra sur les pulsations irrégulières de son Spark, puis se tourna vers Optimus pour tenter de déchiffrer son expression. Et y trouver une forme de réconfort par la même occasion. Mais le Prime, pondéré, échangeait des regards avec Ratchet de l’autre côté du tarmac alors que les cris indignés du mecha noir et blanc continuaient de percer le silence tendu.

Que venait-il de se passer ?

À suivre…

À bientôt, VP

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