Petite Etincelle

Chapitre 39

8523 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 13/08/2025 20:46

CHAPITRE 39

POV Moonlight

Je ne me souvenais pas de la dernière fois où j’avais couru aussi vite.

Mes talons martelaient le sol métallique à un rythme effréné alors que je fonçais vers le centre de soins où se trouvait l’infirmerie de Ratchet. Après son court message me demandant de venir immédiatement, je n’avais pas perdu une seule astroseconde à réfléchir ou à poser des questions. J’avais besoin de le voir de mes propres optiques. Mon Spark pulsait à tout rompre, résonnant dans tout mon châssis comme un tambour d’alerte. Encore secouée par la présence de ce dérangé de hacker, je décidais de mettre ses menaces de côté pour le moment. Pour moi, il y avait plus urgent à traiter qu’un danger dont je ne connaissais pas encore l’ampleur. Les néons de la ville se reflétaient sur mes plaques, projetant des éclats intermittents à chaque foulée. Les structures et passerelles qui défilaient autour de moi n’étaient plus que des ombres d’acier, balayées par l’urgence qui électrisait mes circuits, prête à me consumer de l’intérieur. Si seulement j’avais retrouvé mon T-Cog… En mode alternatif, j’y serais déjà depuis longtemps. Mon véhicule à deux roues me manquait énormément, surtout dans ce genre de situation où chaque instant comptait.

Zigzaguant entre les robots avec une agilité surprenante, je me précipitai vers les escaliers menant au centre dont le plan était gravé dans mon processeur tant j’y avais mes habitudes. Soit pour mon check-up quotidien, soit pour rendre visite à mon meilleur ami. Montant les marches deux par deux, j’ouvris les grandes portes avec fracas avant de m’engouffrer dans le couloir de gauche. Celui qui menait directement aux locaux de Ratchet. Je puisais dans mes réserves d’energon, mes engrenages criant et grinçant à chaque propulsion de mes jambes. J’entendis à peine la réceptionniste m’interpeller, me sommant de m’arrêter pour expliquer ma venue précipitée, mais ses mots se perdirent dans le tumulte de mes pensées. Un seul objectif me guidait, et rien ni personne n’avait le droit de m’arrêter. Je slalomai entre les infirmières et infirmiers qui circulaient dans le couloir, évitant de justesse leurs plateaux et leurs outils, avant de me précipiter vers l’une des salles sur ma droite heureusement ouverte.

Il ne me fallut que quelques nano-kliks pour analyser la scène. Ratchet et Optimus se tenaient à gauche de la couchette occupée par Bumblebee depuis de nombreux orns maintenant. Tellement longtemps que j’aurais été incapable de donner un chiffre précis. Épuisée par ma course, j’activai mes ventilations pour évacuer la chaleur accumulée dans mon protoforme, penchée en avant avec les mains sur les genoux en attendant que mes articulations refroidissent enfin. Nous n’étions vraiment pas conçus pour courir de longues distances en mode robotique… Et je venais une fois de plus d’en avoir la preuve. Levant un index pour demander un court instant, je finis par me redresser afin d’affronter le regard des deux grands mechas. Ils m’observaient avec une expression où l’étonnement se mêlait à l’inquiétude. Ben quoi ? Ils n’avaient jamais vu quelqu’un en surchauffe ? Pensai-je avec ironie, un mince sourire aux lèvres.

«C’est bon, je suis là ! Pfiou…» Lâchai-je en laissant mes engrenages de dos émettre un craquement, mes mains venant se poser sur mon bassin dans un geste de soulagement immédiat. Mes ailettes se redressèrent dans mon dos au moment où je posais mon regard soucieux sur la silhouette de Bumblebee.

Est-ce que je rêve encore ? Résonna ma pensée, mes optiques se dilatant alors que tout mouvement autour de moi semblait freiné par une gravité invisible.

Le scout jaune et noir était conscient, assis tranquillement les jambes étendues sur sa couchette. Ses mains croisées au-dessus de son réservoir, son regard oscillait entre curiosité et incertitude, deux émotions que je n’avais plus vues depuis longtemps sur son visage adorable. Ses porte-ailes réparées étaient écartées de part et d’autre dans son dos pour lui permettre de s’adosser confortablement contre la couchette redressée. Il n’était plus relié à une multitude de câbles ni à des machines maintenant son Spark en vie. Non, il n’y avait plus rien et cette simple constatation suffit à m’arracher un poids énorme de mes circuits. Il avait été libéré de toutes ces contraintes, comme s’il n’en avait jamais eu besoin. Sa carrosserie cabossée laissait apparaître de larges zones où la peinture manquait, mais malgré tout, je reconnaissais l’Autobot qui m’avait tant manqué. À peu de choses près, il ressemblait encore à celui de mes souvenirs. La seule différence frappante résidait au niveau de sa bouche… Elle était désormais dissimulée derrière un masque, conséquence de la perte de sa voix. Son cou avait été réparé, mais une large section manquait encore à l’endroit où se trouvait autrefois sa boîte vocale.

Submergée par l’émotion, je levai ma main droite pour couvrir ma bouche et ma surprise avec l’impression d’être coincée entre deux réalités. C’était une sensation étrange… Comme si je flottais, perdue dans un rêve éveillé. J’avais peur qu’à chaque clignement de mes optiques, Bumblebee sombre à nouveau dans ce coma profond, branché de toutes parts à des machines bruyantes. Immobile sur cette couchette froide, sans éclat, privé de toute vie. Je me revoyais encore assise sur la chaise à sa gauche, lui parlant pendant qu’il était inconscient. Lui racontant toutes sortes d’histoires dans le maigre espoir qu’il revienne à lui. L’émotion qui me tenaillait en le revoyant vivant était indescriptible. J’étais heureuse, chamboulée, infiniment reconnaissante pour le formidable travail de Ratchet et pour la grâce de Primus. La main toujours plaquée sur ma bouche, je m’avançai prudemment vers la couchette, mes jambes flageolant à chacun de mes pas me rapprochant de Bumblebee. La peur au réservoir que tout cela ne soit qu’une illusion de mon CPU malade.

«Tout va bien. Bumblebee va bien.» Rassura Optimus à ma gauche pendant que je contournais lentement la couchette sans jamais détourner mon regard ému du scout immobile.

Est-ce qu’il me reconnait ? Je fus envahi d’un horrible doute.

«Ses constantes sont stables, il n’y a plus rien à craindre.» Certifia le médecin rouge et blanc, percevant aisément mes craintes et mes hésitations.

«Bumblebee ?» Murmurai-je d’un faible soupir, mes optiques ancrées sur sa silhouette. Mon Opiluk posa délicatement sa grande main sur ma petite épaule lorsque je passai devant lui pour rejoindre le scout toujours aussi calme… Presque absent.

J’étais terrifiée à l’idée qu’il ne me reconnaisse plus… Terrifiée qu’il ne soit plus le même qu’avant. L’angoisse me nouait le réservoir et mes optiques commencèrent à s’humidifier face à cette crainte qui m’étreignait douloureusement. Ce manque de réaction effaçait toute ma joie de mes circuits, provoquant un hoquet involontaire sous la pression qui s’amplifiait derrière mes optiques. Il se contentait de me fixer avec ses grandes optiques rondes, l’anneau se rétrécissant puis s’élargissant au rythme de son observation intense. Calmement, il pencha la tête sur le côté, ses crêtes optiques se fronçant trahissant une confusion profonde. Ce geste fragile montrait à quel point il était perdu… Luttant contre des souvenirs qui lui échappaient, un combat silencieux se jouant dans son esprit embrouillé. Je pouvais presque ressentir sa détresse, aussi tangible que la mienne, ce vide entre nous s’élargissant à chaque astroseconde qui s’écoulait dans l’infirmerie. J’étais là, immobile, impuissante, regardant celui que j’aimais se débattre dans un labyrinthe d’ombres tandis que mon Spark se fissurait un peu plus sous le poids écrasant de l’incertitude.

«Il peut y avoir des signes de confusion, c’est normal au début-» Commença Ratchet, toutefois il n’eut pas le temps de terminer sa phrase car je l’interrompis, la voix tremblante.

«Bumblebee… C’est moi, Moonlight ! Tu te souviens ?» Pressai-je en posant ma main sur celle d’Optimus à mon épaule, cherchant désespérément un appui dans cette nouvelle épreuve psychologique. Bientôt, des larmes de désespoir coulèrent de mes optiques malheureuses, avec la sensation que mon monde entier s’effondrait en mille éclats à mes pedes. À côté de moi, Ratchet reprit la parole après un bref raclement de vocaliser.

«Comme je le disais, il est fréquent que les patients présentent des troubles temporaires de la mémoire après un traumatisme important. Leur esprit a besoin de temps pour réorganiser les souvenirs et retrouver ses repères. Avec de la patience, du soutien, et un suivi adapté, il pourra progressivement redevenir lui-même. Je reste confiant dans mon diagnostique.» Expliqua-t-il en prenant son datapad récapitulatif sur la table mobile pour faire le point sur toutes ses annotations depuis le retour au présent de Bumblebee.

«Laisse-lui le temps de se retrouver. Nous serons là pour le protéger, quoi qu’il arrive. L’important, c’est qu’il sente notre présence.» Réconforta Optimus dans mon dos, ses doigts se resserrant doucement autour de mon épaule.

«Bee… C’est moi…» J’insistai, la voix défaillante.

Bouleversée, j’essuyai rapidement les larmes qui coulaient sur mes joues grises d’un revers de main avant de baisser tristement mes optiques vers le sol. Je refusais d’accepter cette douloureuse réalité. Il m’avait oubliée… Bee ne savait plus qui j’étais. Je savais qu’il lui fallait du temps et surtout du repos, mais je ne pouvais me résoudre à croire qu’un vide s’installerait entre nous. Un gouffre si profond qu’il semblait, pour l’instant, impossible d’y entrevoir la moindre lueur d’espoir. Affronter ce regard plein de confusion, ressentir cette froideur qui n’avait jamais existé auparavant entre nous, me déchirait le Spark en deux. J’étais confrontée à ces optiques perplexes, habituellement si chaleureuses et joyeuses. Comme si je faisais face à un étranger. Le mecha jaune et noir me fixait toujours aussi intensément tandis que Ratchet reprenait sa conversation avec Optimus, évoquant le protocole de rééducation cognitive à suivre pour Bumblebee. Un long processus, dont seules des bribes de mots atteignaient mes audios. Le silence pesant entre nous semblait s’étirer, chaque nano-klik creusant un peu plus le fossé invisible qui nous séparait.

Pourtant, malgré cette distance nouvelle, je ne pouvais m’empêcher de chercher dans son regard cette étincelle familière. Ce fragment de lui-même que je connaissais si bien. Celle propre à mon meilleur ami. Il était forcément là, quelque part… Mais il n’y avait rien. Rien d’autre que ce vide confus et cette froideur inhabituelle. Baissant à nouveau la tête de défaite, je me détournais de Bee pour prendre le chemin de la sortie. Anéantie, blessée au plus profond de mon âme. Je fus cependant arrêtée net par une main qui m’agrippa fermement le bras avant que je ne puisse faire le moindre pas. Figée sur place, je levai mes optiques écarquillées et entrouvris légèrement la bouche, prisonnière de la surprise. Mes ailettes se raidirent dans mon dos sous le silence qui s’abattit autour de moi. La prise sur mon bras gauche se resserra doucement alors que mon Spark manquait une pulsation derrière mes plaques de châssis. Les astrosecondes s’étiraient, lentes et écrasantes, semblables à des groons entiers suspendus dans le temps. Posément, je baissai mon regard sur les quatre doigts noirs familiers qui tenaient mon bras pour m’empêcher d’avancer.

Mes audios sifflèrent, ma vision se troubla à nouveau. Suspendue un instant, je finis par me retourner complètement vers Bumblebee pour le regarder. Il s’était redressé sur sa couchette, c’était lui qui m’avait retenue. Son expression avait changé. Elle n’était plus froide ni analytique mais vibrante et pleine de vie, animée d’un tout nouveau sentiment.

«Bee ?» Dis-je d’une voix voilée par l’émotion, croisant mon regard débordant d’espoir avec le sien indéchiffrable. Dans un coin de la pièce, Ratchet et Optimus patientaient. Le silence à rallonge emplissait la pièce où chacun attendait la réaction du jeune mecha, visiblement surpris par ce revirement inattendu.

Après un instant suspendu, les optiques du scout s’écarquillèrent puis il me saisit dans une étreinte ferme mais débordante d’enthousiasme.

«Bumblebee ! C’est bien toi ! Je savais que tu reviendrais !» M’écriai-je de bonheur en entourant aussitôt son cou avec mes bras. Je pressai ma tête contre son casque, entre son épaule et son armure rayée alors que mes larmes de soulagement éclaboussaient son châssis. Je le serrai si fort, par peur qu’il ne disparaisse subitement.

 «C’est à peine croyable…» S’hébéta Ratchet dans mon dos.

«Nous assistons là à un véritable miracle.» J’entendis mon Opiluk répondre.

«Tu es là… Enfin, je n’arrive pas à y croire. Tu es vraiment de retour… Ça faisait si longtemps. Oh, Bee… Tu m’as tellement, tellement manqué. Je te tiens maintenant, et je ne te laisserai plus jamais partir. Jamais.» Murmurais-je à son audio, sentant ses grands bras m’envelopper pour me garder précieusement contre lui. Il ne voulait plus me lâcher. Je ne voulais plus le lâcher.

Nous étions tous les deux heureux de nous réunir après tant de temps séparés, partageant un moment unique rempli de tendresse que je n’échangerais pour rien au monde ! Cette complicité retrouvée… Je peinais toujours à y croire. Il me tenait avec une telle force que j’aurais pu me briser en deux. Il m’avait reconnue, c’était certain. Riant doucement lorsqu’il me chatouilla juste en dessous de mes ailettes, je lui rendis la pareille en attaquant sa nuque, consciente que cet endroit était particulièrement sensible chez lui. L’effet fut immédiat ! Il se débattit sous mes doigts qui s’infiltraient entre ses plaques d’armure pour atteindre le protoforme vulnérable. Il ne pouvait plus rire, mais je percevais son sourire dans la chaleur de son étreinte, une chaleur qui m’avait atrocement manquée. Affalée contre le scout qui refusait de me lâcher, je me redressai doucement sur son imposant châssis pour plonger mon regard dans ses optiques expressives. Ces mêmes optiques que j’aimais tant, où se lisait une innocence fragile mêlée à une détermination farouche. C’était bien là mon meilleur ami… Plus aucun doute, c’était lui que je retrouvais.

«Eh bien, bon retour parmi nous, Bumblebee. Nous sommes ravis de te revoir et de constater que tes souvenirs sont, du moins en partie, intacts.» Salua Ratchet en hochant la tête avec satisfaction tout en consignant ses observations sur son datapad.

«C’est un grand soulagement, en effet.» Optimus esquissa un faible sourire en nous regardant, Bumblebee et moi, toujours enlacés sur la couchette.

Je ne voulais plus m’éloigner de lui. Posant mes mains sur son châssis cabossé au niveau des aérations, je ne pouvais décrocher mon regard chargé d’émotion de son visage illuminé par la joie de nos retrouvailles. J’étais captivée par ses optiques… Incapable de détourner mon regard du sien débordant de bonheur. Autour de nous, tout semblait s’effacer, ne laissant plus que lui et moi dans cette parenthèse hors du temps. Je fus soudainement plongée dans un souvenir où nous nous entraînions ensemble sur ce fameux ring avant la grande course qui avait à jamais bouleversé nos destins. Il y avait cette même étincelle, cette lueur insaisissable dans ses optiques que je n’avais jamais réussi à déchiffrer, mais qui en ce cycle me semblait emplie d’une affection profonde. Une émotion retenue cependant pleine de sens. C’était comme retrouver une part de lui que je croyais perdue, un éclat d’espoir naissant mais sincère. Tendrement, je caressai sa joue avec mon pouce d’un sourire pensif alors que je profitais de cet instant gracieusement accordé.

Il ne fallut pas longtemps pour que les portes de la salle s’ouvrent et que trois figures apparaissent à l’embrasure, mettant ainsi fin à ce moment magique.

Isis, Hot Rod et Niltrex s’avancèrent timidement dans la pièce, contenant leur impatience tandis qu’ils attendaient le feu vert du médecin pour accueillir le retour de Bumblebee. Je remarquai que le regard d’Hot Rod fuyait le mien, mais après avoir reçu l’autorisation de Ratchet, le mecha s’avança calmement vers nous pour s’arrêter au bout de la couchette. Il hésitait, ses mains se tordaient nerveusement devant lui. Je voyais bien qu’il luttait avec ses propres émotions, alors quand nos regards se croisèrent enfin, je lui fis mon plus beau sourire. Il était temps de mettre nos rancœurs de côté pour savourer cet instant privilégié, tous ensemble. À nouveau réunis. Niltrex et Isis s’empressèrent de nous rejoindre sur la couchette pour faire un câlin à Bee, pendant qu’Hot Rod s’approcha sobrement pour se contenter de serrer la main du scout muet. Un sourire authentique illuminait nos visages, témoignant du soulagement partagé. Hot Rod laissa échapper un petit cri de surprise quand Bumblebee l’attira lui aussi sur la couchette pour rejoindre le câlin général.

Cela faisait longtemps que je n’avais pas ressenti une aussi grande paix.

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POV Normal

Durant les cycles qui suivirent, Moonlight se rendit à l’infirmerie aussi souvent que possible pour accompagner Bumblebee dans sa réadaptation et l’aider à s’habituer peu à peu à un nouveau quotidien. Après ses groons de travail dans les ruines, parfois jusque tard le soir, elle veillait à son chevet comme elle l’avait toujours fait lorsqu’il était inconscient. À la différence que cette fois, elle ne parlait plus à une audio sourde mais à quelqu’un capable de l’entendre. Ratchet lui avait clairement expliqué qu’il faudrait faire preuve de patience jusqu’à ce que le scout puisse à nouveau sortir, comme lorsqu’elle avait elle-même traversé cette longue étape. Elle ne pouvait que compatir. Elle savait à quel point être enfermé pouvait nuire au moral, c’était en partie pour cette raison qu’elle se dévouait autant à passer un maximum de temps aux côtés de Bee. Elle voulait qu’il se sente aimé et soutenu, surtout pendant cette étape compliquée pour le jeune mecha désireux de redevenir indépendant.

Perdre sa boîte vocale avait été la pire chose qui lui soit arrivée. Pas le reste de ses blessures, qui étaient superficielles et se répareraient vite avec un chalumeau et une nouvelle couche de peinture fraîche… Non. Cette blessure-là était indélébile, un handicap. Une blessure que Bumblebee peinait à supporter, à assumer, comme s’il avait perdu une part de lui-même dans ce combat. Un combat qui, d’ailleurs, le hantait chaque fois qu’il fermait les optiques, déplorait Moonlight parfois témoin de ses angoisses nocturnes. Ratchet lui avait expliqué que c’était le traumatisme qui ressurgissait, un peu comme elle avec les Decepticons. C’était incontrôlable et effrayant. Son processeur mettrait du temps à s’en remettre, à réapprendre à fonctionner sans cette obscurité devenue partie intégrante de son identité. Les premiers cycles étaient les plus difficiles pour Bumblebee, mais peu à peu, il apprendrait à composer avec cette absence. À puiser dans sa force intérieure et à avancer, malgré tout. Moonlight était convaincue qu’il finirait par retrouver un équilibre, même si la route serait longue et semée d’embûches.

Pour compenser son absence de voix, le médecin lui avait fourni une tablette spécialement conçue pour qu’il puisse communiquer avec son entourage. Grâce à cet outil, il pouvait enfin répondre à Moonlight sans avoir à recourir au langage des signes. Exprimer quand il se sentait bien ou, au contraire, signaler un problème. La communication privée n’étant plus une option, puisque le dispositif était également relié au vocaliser. Au début, il peinait à maîtriser le pavé tactile avec ses grands doigts. Mais avec le temps et un peu d’entraînement, il réussit à s’en servir avec une certaine aisance. Ratchet et Moonlight étaient ravis de ses progrès et ne manquaient jamais de l’encourager à persévérer. La fembot, qui passait le plus clair de son temps à ses côtés, lui racontait toutes sortes d’histoires pour lui faire passer le temps durant ses examens souvent longs et ennuyeux. Lui qui aimait tant l’aventure et la liberté ! Être enfermé entre les quatre murs de l’infirmerie était un véritable supplice, un supplice que Moonlight partageait en silence, ayant vécu la même expérience il y a quelques temps.

«Je suis désolée, Bee, mais il faut que tu tiennes le coup. Ratchet met tout en œuvre pour que tu puisses sortir d’ici le plus vite possible. Il faut que tu aies confiance en lui.» Tenta de le rassurer la jeune fembot, adressant un regard compatissant au scout renfrogné sur sa couchette. Les bras croisés et les crêtes optiques froncées tel un étincelant faisant un caprice, il finit par prendre la tablette pour écrire sa réponse.

- Confiance en Ratchet, hein ? Je vais essayer, mais si ça traîne trop, je signe pour une évasion !

«Hors de question !» Rigola Moonlight d’une secousse amusée de sa tête, ce qui sembla apaisé les tensions de Bee.

- Je suis très sérieux ! Je ne plaisante pas. Et j’aurais besoin de ton aide pour m’aider à m’évader d’ici ! Je compte sur toi !

«Je pourrais peut-être essayer de te faire passer par le conduit d’aération. Tu en penses quoi ?» Moonlight le suivit en se prêtant à son scénario rocambolesque, levant significativement les optiques vers la grille d’aération située juste au-dessus du scout. Elle savait que c’était juste pour plaisanter un peu, et combien ça l’aidait à garder le moral.

- Mouais… Pas sûr que mon pot d’échappement passe là-dedans… Écrivit Bumblebee sur la tablette avant de la tendre à Moonlight pour qu’elle puisse lire. Ses porte-ailes retombèrent mollement dans son dos, signe de résignation. La fembot devina un sourire triste derrière son masque puis posa doucement sa main sur le genou du mecha abattu.

«T’inquiète pas, on trouvera un autre moyen de s’échapper ! Souviens-toi, on est champions toutes catégories pour inventer des combines. Ratchet n’aura même pas le temps de nous voir venir… Les pros de l’improvisation !» Rappela soudainement Moonlight d’un doigt levé, faisant bien évidemment référence à leurs jeux lorsqu’ils étaient plus jeunes. Une petite pensée pour ce pauvre Bulkhead qui en avait vu de toutes les couleurs avec eux…

- Nous sommes les meilleurs.

Bumblebee hocha la tête avec conviction, ses optiques pétillant d’amusement en regardant Moonlight assise à sa gauche, une lueur d’espièglerie venant se glisser dans son regard. Depuis qu’il avait retrouvé l’ensemble de ses souvenirs, ceux de sa période d’étincelant revenaient le plus souvent, et plus encore ceux partagés avec elle. Leurs nombreux jeux, leurs dessins, leurs rires et chamailleries… Il les chérissait tous sans exception. Pris d’un élan de nostalgie, il posa délicatement sa main sur celle de Moonlight toujours posée sur son genou, l’invitant ainsi à lever ses optiques vers les siennes. À chaque occasion, il saisissait la plus petite opportunité pour établir un contact physique. Il ne supportait pas de voir la peine ou la moindre trace de douleur traverser son visage. Il la préférait souriante, lumineuse, heureuse… Et surtout joyeuse ! C’était devenu sa mission à chacune de ses visites : lui arracher un éclat de rire ou un sourire pour qu’elle oublie, ne serait-ce qu’un instant, tout ce qui pouvait l’attrister. En dépit de sa propre condition.

«Bee, il y a quelque chose que j’aimerais savoir…» Commença Moonlight après un bref silence entre eux. Ses optiques restèrent un instant fixées sur leurs mains jointes, puis elle releva le regard quand il inclina la tête sur le côté, attentif.

«Je sais que c’est peut-être stupide, mais… Te souviens-tu d’un rêve où nous étions tous les deux dans un couloir ? Tu m’avais aidée à me cacher de quelque chose, et on aurait dit que tu étais effrayé… J’avais vraiment l’impression que tu étais là, avec moi. Ça te parle ?» Demanda-t-elle d’une touche d’espoir dans la voix, repensant à ce rêve qu’elle avait fait une fois avec Bee et à quel point il lui avait semblé réel. Elle espérait, d’une certaine façon, y trouver des réponses à ses questions. Mais quand le mecha secoua la tête après un moment de réflexion, elle sentit une pointe de déception l’envahir.

«Ce n’est rien, ne t’en fais pas. J’ai juste cru un instant qu’on avait réussi à établir une connexion psychique, ou un truc du genre. Qu’on avait partagé un même rêve. Mais c’est sans importance.» Rit nerveusement Moonlight en agitant la main devant son visage, un peu gênée par cette confidence.

- Ce n’est pas stupide. Mais malheureusement, je n’ai aucun souvenir de la période où j’étais en stase… C’est le trou noir total. Écrivit Bumblebee en haussant les épaules, remarquant que la fembot semblait touchée par ce rêve étrange qu’elle avait fait avec lui. Soucieux, il se pencha vers elle pour capter son attention.

- Et si, pour moi ça a de l’importance. Bee fit glisser sa main pour la poser sur le bras de Moonlight, l’invitant ainsi à relever ses optiques vers lui après avoir lu ses mots.

«Je ne voulais pas t’embêter avec ça… Ce n’est pas comme si c’était vraiment grave. Puis, au fond, ce n’était qu’un rêve, hein ?» Murmura la fembot un peu embarrassée en esquissant un sourire hésitant à l’Autobot jaune et noir, cherchant à se rassurer. Celui-ci inclina doucement la tête, partagé entre curiosité et attention.

- Les rêves ont parfois des significations. À toi de percer leur mystère !

«Peut-être que tu as raison… Peut-être qu’ils portent tous un sens et que je ne sais juste pas comment les interpréter.» Finit par céder Moonlight d’un haussement de ses épaules, un coin de ses lèvres se relevant en un sourire discret mais sincère.

- J’ai toujours raison ! Rappela Bee, ses porte-ailes s’agitant dans son dos.

«N’abuse pas !» Se mit à rire la fembot en poussant l’épaule du scout d’une humeur taquine en ce cycle.

Il ne pouvait peut-être plus exprimer ses émotions verbalement, mais ses optiques parlaient pour lui. Amusé par la réaction de son amie, Bumblebee attrapa rapidement sa main puis la tira vers lui, cherchant à atteindre son dos pour se venger à sa façon. Surprise, Moonlight laissa échapper un petit glapissement tandis que ses doigts agiles glissaient sous ses ailettes, en quête du point parfait pour la faire plier à ses quatre volontés. À la merci du scout, la fembot n’eut d’autre choix que de céder, éclatant de rire sous les chatouilles incessantes jusqu’à ce qu’elle implore grâce. Le court instant où elle s’était sentie gênée par ses rêves s’évanouit alors comme par magie, balayé par la personnalité rayonnante de Bumblebee. Il avait ce pouvoir incroyable sur elle. Cette joie de vivre contagieuse, même dans les groons les plus difficiles. Un mecha tendre, optimiste, jovial, loyal et protecteur… Un vrai rayon de soleil dans son existence.

«Bee ! C’est bon, c’est bon ! Je capitule ! Tu as gagné.» Les systèmes de ventilation tournant à plein régime, Moonlight s’affaissa dans sa chaise après être passée entre les mains farceuses de Bumblebee. Elle avait tellement ri qu’elle en avait mal au vocaliser ! Ça faisait du bien. Elle sursauta lorsque le rideau opaque faisant office de séparation avec l’autre chambre s’ouvrit brusquement, et qu’un Ratchet mécontent apparut.

«Silence !» Gronda-t-il, l’index posé sur ses lèvres tout en lançant un regard d’avertissement aux deux jeunes trop bruyants. Comment pouvait-il y avoir autant de bruit avec un muet ?!

Moonlight et Bumblebee se regardèrent longuement après la disparition du médecin rouge et blanc derrière son rideau, se le point d’exploser un fou rire. Enfin, surtout Moonlight. Et la tête que faisait Bumblebee ne l’aidait pas du tout à se retenir, bien au contraire ! Ses optiques rondes, son imitation silencieuse mais grotesque de Ratchet… Tout cela faillit lui faire perdre le contrôle de son vocaliser une nouvelle fois. Sa gestuelle ridicule, mimant grossièrement les mouvements du médecin, renforçait l’effet comique. Il ne manquait jamais une occasion de la faire rire ! Ce fut à cet instant précis qu’elle se rendit compte à quel point les bêtises de son meilleur ami lui avaient manqué… À quel point lui, lui avait manqué. Après quelques kliks passés à retrouver leur calme dans le silence strict que Ratchet avait exigé, Bumblebee saisit à nouveau sa tablette pour y écrire quelque chose. Curieuse, Moonlight se pencha vers lui en s’attendant à une blague ou une remarque taquine. Or, cette fois, le scout avait retrouvé son sérieux.

- Je ne me souviens pas vraiment d’avoir rêvé, mais ta voix… Je l’ai entendue. Elle perçait l’obscurité, et d’un coup, je me suis senti moins seul. Tu as fait disparaître cette peur qui m’écrasait. Je me raccrochais à chaque mot et quelque part, je savais que quand j’ouvrirais les optiques, tu serais là… À m’attendre.

Moonlight était sans voix.

Elle était stupéfaite de constater que, même inconscient et dépendant à la machine qui préservait son Spark, Bumblebee avait entendu sa voix. Quelque part, dans les méandres de son esprit, elle avait réussi à l’atteindre. Pendant tout ce temps passé à son chevet, à lui parler de tout et de rien, elle avait sans le savoir apaisé les craintes de son ami. Optimus avait raison. C’était un véritable miracle ! Comment cela pouvait-il être même possible ? Elle se le demandait, et elle n’hésiterait pas à confier ces révélations à Ratchet dès qu’elle sortirait d’ici. Touchée par ces mots, elle se pencha vers Bumblebee comme pour lui murmurer un secret, éveillant aussitôt sa curiosité naturelle. Les crêtes optiques levées, il se pencha vers elle mais son expression se durcit soudainement. Loin de l’ambiance légère qui s’était installée un instant plus tôt. La fembot prit un moment avant de finalement parler dans un ton des plus sérieux.

«J’aimerais te faire une promesse, Bee. Celle de te trouver une nouvelle boîte vocale, même si je dois y consacrer toute ma vie. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour t’aider à retrouver ta voix, ton identité. Tu as ma parole.» Assura Moonlight d’un hochement de tête ferme, ses optiques déterminées plongées dans celles abasourdies de Bumblebee.

Et ce n’était pas une promesse en l’air. Après avoir tenu compagnie au scout pendant plusieurs groons d’affilée, la fembot se rendit au bureau vitré de Ratchet pour lui demander la liste de tous les centres de recyclage de Iacon. Animée d’une volonté de fer, elle était bien décidée à les visiter un par un dans l’espoir de retrouver une boîte vocale pour Bumblebee, profondément affecté par son handicap. Elle n’était pas dupe. Derrière ses pitreries et ses tentatives de la rassurer, Moonlight avait perçu son mal-être de ne plus pouvoir communiquer autrement qu’avec cette tablette. D’autant plus qu’il ne s’agissait que d’une solution temporaire. Bientôt, l’Autobot jaune et noir se lasserait de cette méthode lente et contraignante. Comment ferait-il pour s’exprimer une fois dehors, loin des murs du centre de soins ? C’était l’une des raisons qui poussait Moonlight à tout faire pour l’aider, avec l’objectif de retrouver cette pièce avant sa sortie. Dans le meilleur des cas… Car Ratchet, après lui avoir confié la liste, l’avait mise en garde que cette quête s’annonçait ardue.

Trouver des pièces de rechange en bon état était devenu une franche galère.

Optimus travaillait sur ce problème de pénurie depuis plusieurs deca cycles maintenant, mais les pillages répétés dans les mines à energon n’ayant jamais cessé, il craignait que l’approvisionnement en en ressources ne se stabilise jamais. Surtout depuis l’attaque menée sur Kaon. Le manque de matière première continuait d’appauvrir la population. Cependant, grâce à un immense mouvement de solidarité, les centres de recyclage continuaient d’être alimentés. C’était pour cette raison précise que Moonlight prit la décision de tous les visiter, sans exception. Le datapad contenant la liste des centres recensés en main, elle s’empressa de rejoindre le plus proche, là où Niltrex travaillait comme bénévole. Situé en face de la tour des Cieux, il s’agissait d’un des plus grands entrepôts de Iacon donc le plus propice à avoir la pièce qu’elle recherchait. Elle ne voulait pas se laisser décourager par Ratchet qui lui disait qu’ils avaient déjà tenté de trouver une autre boîte vocale pour Bee, sans succès jusqu’à présent. Tant qu’elle n’aurait pas elle-même fait le tour de chacun des centres listés, elle refusait d’abandonner ou même de perdre espoir.

S’il fallait qu’elle ramène elle-même la matière première, elle le ferait.

«Niltrex, j’aurais besoin de ton aide...» Débuta Moonlight dès qu’elle se retrouva face au robot svelte au revêtement noir, qui s’occupait actuellement de l’accueil des donateurs dans ce premier centre qu’elle visitait. La file d’attente n’était pas aussi longue que la dernière fois, déplora-t-elle. Posant son datapad sur le comptoir adapté aux petites tailles, elle croisa les bras et attendit patiemment que le mecha, encore occupé, se tourne vers elle. Puis elle reprit ; «J’aimerais savoir si vous avez une boîte vocale en stock.»

«C’est une pièce vraiment particulière que tu me demandes. La pénurie actuelle rend sa disponibilité extrêmement rare, et même les centres de recyclage ont du mal à en retrouver en bon état. C’est pour Bumblebee, j’imagine ?» Niltrex posa un lourd conteneur à ses pedes d’un petit grincement de dentas à l’effort.

«Oui. Je suis à la recherche d’une nouvelle boîte pour lui. C’est essentiel à son rétablissement, tu comprends ?» Répondit Moonlight d’un ton résolu, faisant les optiques de Cyberwolf au mecha pour essayer de l’attendrir.

«J’aimerais sincèrement vous aider, je t’assure, mais c’est une pièce très complexe et spéciale que tu recherches. Ça ne court pas les rues ! Surtout que la demande de pièces explose, on ne sait même plus où donner de la tête !» Au même moment où il parlait, un gros robot jaune et vert posté au comptoir de sa collègue rouspéta car eux non plus n’avaient pas ce qu’il était venu chercher. À ce dernier lui manquait une jambe et se déplaçait à l’aide de béquilles.

«Oui, je sais, mais tu es bien placé pour comprendre à quel point c’est important pour lui ! S’il le faut, je reviendrai chaque cycle pour te le demander. Tu me connais, je ne cesserai pas de chercher jusqu’à ce qu’il retrouve sa voix. Alors promets-moi que si cette pièce arrive, tu la garderas précieusement pour Bee. Je t’en supplie, Nil ! Pour notre ami !» Supplia Moonlight en joignant les mains devant elle pour appuyer son plaidoyer.

«Bien sûr, tu peux compter sur moi. Je ne veux pas laisser Bumblebee dans cet état. Il mérite de retrouver son intégrité.» Accepta Niltrex en hochant la tête à la fembot, quelque peu embarrassé par sa petite mise en scène pour l’attendrir. Toutes les optiques étaient braquées sur lui ! À croire qu’elle faisait exprès de lui mettre la honte à chaque rencontre.

«Merci ! Tu es décidément le meilleur.» Moonlight soupira de soulagement en s’agrippant aux bords du comptoir gris pour s’y étaler.

«Oui oui, d’accord. J’ai compris.» Grommela Niltrex, déjà excédé d’être ainsi sous les feux des projecteurs en à peine deux kliks de conversation. Nerveusement, il jeta quelques coups d’optique à la file derrière elle et constata que certains robots commençaient à perdre patience. Il se pencha alors vers Moonlight pour lui parler plus discrètement.

«Je ferai ce que je peux de mon côté. Mais garde en tête que la demande est élevée, et que ça ne va pas être tâche facile d’en trouver une complète avec un communicateur intégré.» Lui dit-il en prenant le datapad qu’il alluma avant d’entourer une zone sur la carte de la ville où plusieurs points figuraient ; «Tu aurais peut-être plus de chance dans ce secteur-là. De ce que je sais, ils ont récupéré pas mal de pièces récemment.»

«C’est tout proche du fameux centre médical Ouest…» Constata Moonlight avec surprise.

«Je n’ai aucune idée de ce qui s’y trame, mais tout ce que je sais, c’est qu’ils ont un besoin urgent de pièces. Et en grande quantité. D’après ce que j’ai compris, c’est classé secret défense. Peut-être qu’ils mènent des tests… Ou qu’ils ont mis la main sur une découverte majeure. En tout cas, ça bouge beaucoup dans ce secteur.» Déclara Niltrex toujours à voix basse en désignant le centre situé dans la zone concernée. Une zone plutôt discrète où beaucoup de bâtiments étaient abandonnés, ce qui alimentait la curiosité de Moonlight.

Une information qu’elle pourrait aussi partager à Smokescreen, le petit fouineur.

Après l’avoir remercié pour son aide, la fembot prit la direction du centre de recyclage que Niltrex lui avait conseillé en espérant y trouver son bonheur. Malheureusement, le discours fut le même… Ils n’avaient pas non plus de boîte vocale en parfait état et n’étaient guère rassurants quant à ses chances d’en dénicher une. À croire qu’il n’en restait plus aucune de valide sur Cybertron ! Ratchet lui avait pourtant dit qu’il avait déjà cherché dans tous les centres, mais qu’aucune de ses recherches n’avait été concluante. Malgré tout, elle refusait d’admettre la défaite. À chaque refus, elle revoyait les optiques innocentes mais abattues de Bumblebee. Elle revoyait sa douleur dans cette arène… Après avoir combattu le Predacon en furie. Elle revoyait les quantités d’energon qui s’échappaient de sa blessure à la gorge, là où se trouvait autrefois sa boîte vocale avant qu’elle ne soit violemment arrachée. Ces visions lui rappelaient sans cesse pour quoi elle se battait, et à quel point elle était déterminée.

{==Tour des Cieux==}

«Moonlight ? C’est moi. Tu sais, ton vieux pote, Hot Rod. Ça te tente qu’on fasse la paix, toi et moi ? On pourrait… Je sais pas… Aller faire un tour ? Qu’est-ce que t’en dis ?… Nan, laisse tomber, c’est nul…» Bougonna le jeune mecha orange et jaune en envoyant un coup de pede dans le vide avec l’entêtement d’un petit étincelant qui boude. Frustré par son absence d’inspiration, il jeta brusquement ses bras en avant.

Seul, il errait dans le couloir du tout dernier étage de la tour des Cieux, mû par l’ambition ou l’espoir un peu maladroit de se faire pardonner par la fille du Prime. Leur petite querelle avait assez duré. Cela faisait pratiquement trois cycles entiers qu’il était à la recherche d’une fleur de cristal à offrir, comme Arcee le lui avait conseillé. C’était bien le genre de cadeau que les fembots en colère finissaient par accepter, non ? Une façon sûre de regagner leur faveur ? Il se posait la question pour la centième fois, le pas nerveux tandis qu’il avançait dans ce couloir faiblement éclairé bordé de portes closes. La fameuse fleur en main, il la fit tourner délicatement entre ses doigts en admirant ses reflets singuliers tout en se dirigeant lentement, mais sûrement, vers les quartiers personnels de Moonlight et d’Optimus Prime. Il lui avait fallu une sacrée dose de courage pour franchir les imposantes portes de cette tour, symbole de l’autorité suprême de Iacon… Et encore plus pour survivre à l’interminable ascension dans l’ascenseur menant jusqu’à son sommet.

«Est-ce que ça te dirait d’aller boire un cube ? Non, non, c’est nul ! N’importe quoi.» Grogna-t-il, de plus en plus inquiet en approchant de la porte tant redoutée. Celle qui mènerait à Moonlight, à ce moment crucial où chaque mot pouvait le condamner… Il tremblait à l’idée qu’elle refuse ses excuses. Était-il dramatique ? Très certainement.

Même après un bon breem d’entraînement, il ne pouvait s’empêcher de trouver ses tentatives de réconciliation ridicules. Dans sa tête, il repassait sans cesse à leur dispute, persuadé que la cause venait de ses fréquentations plutôt que de son refus de la raccompagner chez Ratchet. Et franchement… Qui voudrait retourner chez le médecin grincheux de son plein gré ? Songea-t-il avec ironie, un sourire amusé effleurant ses lèvres alors qu’il faisait tournoyer la fleur entre ses doigts. Elle était splendide. Ses pétales de métal, fins et pointus, se déployaient en courbes élégantes. En son centre, un petit cristal d’energon pulsait comme le rythme d’un Spark, projetant des éclats lumineux sur son châssis poli. Une rareté sur Cybertron qui lui avait coûté une belle somme… Mais qui toutefois en valait largement la peine, autant pour sa beauté que pour ce qu’elle représentait. C’était la première fois qu’il en tenait une, et cette seule pensée renforçait sa détermination à présenter ses excuses pour la lui offrir. Un sourire rêveur passa sur son visage, quelques souvenirs heureux avec la fembot défilant dans son CPU. Finalement, Hot Rod s’avança vers la porte et appuya sur la console pour sonner.

Quelques nano-kliks s’écoulèrent, puis la porte se rétracta.

«Tiens ! C’est pour toi !» S’exclama-t-il presque par réflexe, la nervosité guidant son geste.

Le silence qui suivit le frappa de plein fouet. Ses optiques s’écarquillèrent de façon comique lorsqu’il réalisa que ce n’était pas la bonne personne qui avait ouvert la porte. Ses joues chauffèrent instantanément, virant à un bleu électrique digne d’un feu de signalisation. Devant lui, Optimus Prime dans toute sa stature imposante, le fixait avec une expression stupéfaite. Chaque astroseconde semblait s’étirer en une éternité ridicule. La fleur toujours tendue à bout de bras, Hot Rod sentit son visage se décomposer tandis qu’il levait les optiques pour croiser celles du commandant figé sur le seuil. Ils restèrent ainsi, plantés l’un devant l’autre dans un silence lourd et maladroit, sans savoir lequel devait briser la glace en premier. L’embarras flottait entre eux comme un nuage dense et oppressant. Comment se sortir d’un tel pétrin ? Maudissant son geste irréfléchi, Hot Rod fouilla frénétiquement dans son CPU en quête d’un plan de sauvetage. Par chance, si l’on pouvait qualifier la chose ainsi, ce fut Optimus qui désamorça la situation.

«J’ignore ce que j’ai fait pour mériter ça, mais je suppose qu’il s’agit d’une erreur.» Déclara-t-il en faisant de son mieux pour rester stoïque, un minuscule sourire éclairant ses traits habituellement sévères. La situation était plutôt cocasse.

«Euh… Oui, oui, c’est ça, une erreur ! Je… Je pensais tomber sur Moonlight, en fait. Pas que vous ne méritiez pas cette fleur, hein ! Vous êtes notre grand chef et tout, mais… Enfin… C’est un peu bizarre là, non ?» Hot Rod se racla le vocaliser puis leva sa main libre pour frotter l’arrière de son casque d’un sourire crispé, littéralement en train de se consumer de honte.

Tout simplement génial. Il fallait toujours qu’il foire tout !

Pris au dépourvu par la scène, Optimus cligna des optiques avant de se décaler sur la gauche pour laisser passer Moonlight près de sa jambe, manifestement attirée par une voix qu’elle reconnaissait comme amicale. Ils étaient tous les deux sur le canapé en train de discuter des Ruines du Passé et des secrets qu’elles renfermaient lorsque la sonnette retentit, les surprenant tous les deux car personne n’attendait de visite à ce moment du cycle de nuit. Ni Optimus, ni Moonlight n’auraient imaginé voir Hot Rod sur le palier. La fembot, décontenancée, s’appuya contre le cadre de la porte automatique pour regarder alternativement Hot Rod et la fleur qu’il serrait précieusement entre ses mains. Dire qu’elle était surprise serait un euphémisme... À côté d’elle, le commandant repartait dans l’autre direction afin de leur laisser plus d’intimité, veillant à refermer la porte de son bureau dans son sillage. Le silence qui s’était installé s’étirait entre eux. Enfin seuls, Hot Rod se dit qu’il était temps de passer à l’action, alors que ses optiques descendaient vers la fleur qu’il tenait.

«Bon, OK. Ahem, euh… Voilà. Je suis venu te dire que… Que je suis désolé. Pour… Enfin… Pour avoir été complètement nul. Et franchement un vrai crétin. J’aurais dû faire gaffe, je le sais ! J’ai pas assuré, mais alors pas du tout. Je… J’ai pas été un super pote, et j’aurais dû voir que t’étais pas bien. Et… J’aurais dû te défendre contre cet abruti de Sideswipe. Et… Et je me rends compte du mal que j’ai fait. Que je t’ai fait. Et, ouais, aussi pour Isis… Et pour pas t’avoir emmenée direct à l’infirmerie. Bref… J’ai foiré sur toute la ligne.» Balbutia le mecha d’un petit haussement d’épaules embarrassé, n’osant pas croiser les optiques de Moonlight de peur d’y voir de la désapprobation ou du rejet. Incertain, il finit par tendre timidement la fleur vers elle.

«Je voulais t’offrir ça… Est-ce que tu me pardonnes ?» Lui demanda-t-il avec espoir, redressant enfin son regard fuyant pour observer l’expression indéchiffrable de Moonlight. Elle le fixait sans rien dire, les bras croisés sur son châssis avec les lèvres pincées. L’attente semblait interminable. À quoi pensait-elle ? Cependant, après quelques kliks dans cette même position, elle finit par se détacher du cadre de la porte et prit le bot tendu dans ses bras, un petit sourire naissant aux coins de ses lèvres.

Sidéré, Hot Rod resta bouche bée, les optiques grandes ouvertes. Figé avec les bras toujours dressés devant lui, il sentit son Spark faire une violente embardée au contact de la petite fembot contre son châssis. Le temps semblait s’arrêter pour lui. Le contact physique avec son amie lui avait beaucoup manqué… Au point qu’il se demanda quand avait été la dernière fois qu’il avait partagé un moment pareil avec elle. Silencieuse, Moonlight resserra ses bras autour de lui en pressant son visage contre son châssis. Il pouvait presque sentir les pulsations erratiques de son Spark en rythme avec le sien. Sortant finalement de son état de sidération, il entoura doucement ses propres bras autour de la petite fembot, enterrant son visage dans le creux de son cou en fermant les optiques pour profiter de cette proximité. Tenant la fleur dans sa main droite, il veilla à ne pas heurter ses ailettes délicates en la rapprochant avec précaution. Il voulait que ce moment dure, qu’il ne prenne jamais fin. Malheureusement, la chaleureuse étreinte se termina trop vite à son goût alors que Moonlight s’écartait de lui, leurs châssis se touchant presque.

«Tu me pardonnes alors ?» Questionna timidement Hot Rod d’une pointe d’appréhension, noyé dans le bleu magnifique de ses optiques. Au lieu de répondre, la fembot lui offrit un sourire éclatant avant de se retourner pour rejoindre ses quartiers, le laissant suspendu dans le doute. Hébété, il attendit ainsi sur le palier avec sa fleur toujours tendue, jusqu’à ce que Moonlight ne s’exprime enfin sans jamais perdre son splendide sourire.

«Tu viens ?» Lui dit-elle d’un coup de tête vers l’intérieur, l’invitant à entrer.

Et Hot Rod ne se fit pas prier, heureux de retrouver cette belle amitié.

À suivre…

Je vous dis à bientôt,

VP

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