Le souvenir commence avec une cicatrice

Chapitre 4

2228 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 19/01/2019 19:34

[ Edit : J’ai fait le flash‑back au passé simple parce que je trouvais que ça sonnait mieux qu’à l’imparfait ou au passé ­ comme il m’est déjà arrivé de le faire ^^" maintenant j’espère que ça vous plaira aussi :) . ]

[ Nouvelle edit : J’ai oublié ! Y a un astérisque (vous me croyez si je vous dit que j’ai écris « astérix » ?) dans le chapitre précédent concernant le clip d’un groupe pas loin de l’ambiance du Fangtasia : c’est « DEVIL SIDE » du groupe VAMPS ;) ]

 

***

 

Dix‑neuf ans plus tôt, quelque part dans le Sud‑Est de la France.

 

Eric et Pam avaient décidé de parcourir l’Europe pour finalement jeter leur dévolu sur la France, en partant du Nord, et faisant des haltes dans quelques grandes villes dans le but de s’y nourrir. Un cadavre par‑ci, deux autres par‑là... De quoi affoler les gens mais les coins visés étaient à distance plus que raisonnable les uns des autres. Ça occuperait la police de chaque département. Les deux vampires s’arrêtèrent dans un village de Provence qui comptait environ quinze‑mille habitants. Autant dire « le repas est servi » mais au lieu de ça, ils avaient arpenté les rues, cherchant à attirer l’attention le moins possible sur eux. Si dans les grandes villes c’était souvent chacun pour soi, dans les villages, le bruit courait beaucoup plus vite. Il devait être aux alentours de vingt‑deux heures, et il n’y avait pas grand monde dehors. Pam et son Créateur avaient seulement croisé quelques personnes qui jouaient aux boules dans le centre, non loin de l’Eglise. Au bout de plusieurs minutes à marcher, ils tombèrent sur un lotissement relativement calme. La rue dans laquelle ils étaient donnait pile sur une villa avec un portail en bois peint en blanc qui avait été mal fermé. Une aubaine !

— Eric, si on arrêtait enfin nos recherches pour aller directement là ?

Pam pointa du doigt la maison en question, l’autre main sur la hanche.

— J’en ai assez de marcher, et‑j’ai‑faim.

— Je sais. Et tu n’es pas la seule.

Sur ces mots, le vampire avança, suivi de près par sa progéniture, à une vitesse bien plus rapide que la moyenne « normale ». Ils arrivèrent sous le porche et tendirent l’oreille. Pas un bruit à l’intérieur.

— Et on entre comment ? demanda une Pam sarcastique. Tu sais qu’il faut nous inviter.

— C’est toi qui as voulu venir ici, Pam.

Eric quitta le devant de la maison pour faire le tour par le jardin. Chez les voisins, tout était noir. A l’arrière se trouvait un couple d’une quarantaine d’années. L’homme bêchait tandis que la femme arrosait un figuier. Ils avaient l’air si serein. Les vampires se tenaient le plus loin possible, tous crocs dehors, observant celui et celle qui allaient leur servir de repas. Trop occupés à s’occuper du jardin, ils n’avaient pas remarqué les intrus. De plus, il commençait à faire sérieusement sombre en cette nuit d’août.

— Je me demande ce qu’ils doivent faire dans leur misérable existence de mortels... ? Tu veux qui, Eric ? L’homme ou la femme ?

— Ça m’est égal.

— Maman ?

Eric se figea à l’entente de cette petite voix qui venait de l’intérieur de la maison. Pam, elle, sembla fort intéressée. Les parents, quant à eux, n’avaient pas entendu leur fille les appeler.

— On dirait qu’on va aussi avoir le dessert.

Le vampire trancha, avant de se précipiter sur le père :

— Occupons‑nous d’abord des parents.

Ces derniers ne comprirent pas ce qui se passait. Ils n’avaient même pas eu le temps de crier. Les seuls bruits furent ceux de la chute de la bêche et du tuyau d’arrosage. L’homme et la femme se trouvèrent dos à leurs bourreaux qui les maintenaient fermement avec un bras autour des épaules, et les mains fortement calées sur les bouches. Eric et Pam avaient mordu de bon cœur ­ comme un humain l’aurait fait avec un banal morceau de steak ­, avant d’aspirer le sang chaud. Quiconque aurait vu la scène l’aurait sans doute comparée à deux animaux avec leurs proies. Dans un sens, c’était le cas. En plus de l’effet de surprise, le pauvre couple était vidé tellement rapidement qu’il n’avait même pas la force de se débattre, et encore moins de se défendre. Les vampires finirent par allonger leurs victimes qui ne tenaient bien évidement plus sur leurs jambes. Leur fille n’avait cessé d’appeler, alternant son père et sa mère. Finalement, la porte d’entrée de fit entendre.

— Je vais la faire taire, décida Pam en s’y précipitant, le menton dégoulinant de sang jusqu’au cou.

— Ne la touche pas ! ordonna Eric, avant d’en finir avec la femme dont l’autre vampire s’était en grande partie nourrie.

Ce fut donc lui qui, officiellement, tua les parents de la fillette. Il n’éprouvait aucun remord les concernant. Il avait même oublié ce que c’était que les remords. Quand il eut fini, sans un regard en arrière, il alla rejoindre Pam qui l’appelait depuis le porche, devant la porte principale.

— Qu’est‑ce que tu veux ? demanda‑t‑il en s’essuyant le menton et la bouche du revers de la manche de sa veste.

Pam s’était accroupie à hauteur d’une gamine apeurée qui tenait son nounours dans ses bras comme s’il s’était s’agit d’un bouclier.

— Elle est insensible à l’hypnose.

— Je t’ai dit de ne pas la toucher !

Eric avait presque crié cette phrase tout en arrivant à la hauteur de la vampire qui avait créée, l’agrippant au cou pour la relever. Pam suffoquait.

— Je croyais avoir été clair ?

— E... Eric...

— Va m’attendre devant le portail, dans la rue, à l’Eglise... Où tu veux, mais éloigne‑toi !

Le vampire Viking la lâcha puis elle sortit à vitesse grand V dans la rue, s’asseyant sur le trottoir de la maison d’en face, près d’un panneau « STOP ». Pam n’en dit rien à Eric ­ bien qu’il dût s’en douter ­ mais elle était frustrée. Ce dernier, toujours dans sous le porche, s’accroupit à son tour devant la fillette châtain clair et tenta de la charmer, son visage aussi proche que possible de la petite qu’il devait revoir des années plus tard. Rien à faire : elle y était effectivement insensible. Comment allait‑il se sortir de là ? Il était un prédateur, il savait qu’il devait la tuer, mais quelque chose l’en empêchait, comme si une petite parcelle d’humanité était encore encrée en lui après tout ce temps.

— Où est mon papa ? Et ma maman ?

Eric avait compris ce qu’il s’était dit. Il avait eu largement le temps d’apprendre, même sur le tas, des langues étrangères, dont le français. Et bien qu’étant en Provence, la fillette n’avait aucun accent, ce qui aida.

— Ils...

Eric n’arrivait pas à trouver une excuse valable. Que dire à une petite fille qui était devant un parfait inconnu, lequel venait de vider ses parents de leur sang ?

— Comment t’appelles‑tu ?

— Gwenn.

— Ecoute, Gwenn, tes parents... eh bien... ils sont partis au Ciel.

— Pourquoi ?

Les enfants et leurs questions... auxquelles il fallait à tout prix avoir une réponse.

— Je n’en sais rien, mentit Eric.

— Je vais les revoir ?

— Non. Mais ils veilleront sur toi, ajouta‑t‑il aussitôt, voyant que la petite allait se mettre à pleurer. Ils te verront. D’accord ?

Gwenn hocha la tête, ravalant au mieux ses larmes qui ne demandaient qu’à sortir. Eric savait ce que signifiait perdre ses parents pour l’avoir vécu de son époque mortelle. Il avait même perdu sa petite sœur qui n’avait été qu’un bébé. C’était peut‑être pour ça qu’il ne parvenait pas à faire du mal à cette petite fille. Pourtant, il en avait déjà tué, des enfants... ? Pas si jeunes, certes, mais il l’avait fait... Vraiment, il n’était plus sûr de rien depuis qu’il avait oublié ce que signifiait avoir un quelconque sentiment. Par contre une chose sans rapport aucun était certaine : Pam s’impatientait.

— Tiens.

Eric s’ôta du cou une chaine qui avait pour pendentif « Le Marteau de Thor ». C’était un des bijoux de sa famille qu’il avait conservé au fil des siècles.

— Je veux que tu gardes ça.

— C’est quoi ?

— Ça t’aidera à avancer dans la vie, répondit Eric en mettant le bijou au cou de la petite fille. Fais‑moi confiance.

— Mais je ne vous connais pas, fit remarquer Gwenn, tout à fait logique malgré son jeune âge. Et je ne sais pas comment vous vous appelez.

Eric sourit malgré lui.

— Tu es une maline, toi. Je m’appelle Eric.

Quelques secondes passèrent en silence. On entendait les grillons chanter, signe que l’été était bien installé. Celui de Gwenn n’allait guère être joyeux. Et les suivants non plus...

— Je dois partir, dit enfin Eric en se levant. Retourne te coucher.

Gwenn s’exécuta, docile ­ elle qui d’habitude était d’une extrême méfiance envers les étrangers. Si ça avait été Pam, elle n’aurait rien doute rien fait. Cette femme lui avait fait peur ! Eric, lui, s’était montré plus patient et avait eu l’air moins « sadique ». Il observa Gwenn pour s’assurer qu’elle retournait bien dans ce qui devait être sa chambre mais à peine partie que la petite fit demi‑tour, les yeux endormis :

— Monsieur ?

— Oui ?

— Je vous verrai encore, vous ?

Ce qu’aurait voulu répondre le vampire était « Je n’espère pas. » mais, plus sagement, il ne dit rien et s’en alla, prenant soin de fermer la porte d’entrée derrière lui. Le tuyau d’arrosage coulait toujours à l’arrière du jardin. Les voisins le remarqueraient sans doute. Sans parler des corps...

Quand ils furent assez loin du lotissement ­ dans un vignoble assez bien fourni qui appartenait aux moines qui vivaient dans ce que les villageois appelaient « Le Château », qui se situait plus loin, après une Nationale ­ les vampires décidèrent où aller. Retourner en Amérique était une bonne solution. Ils seraient aussi définitivement à l’abri de quelconque soupçon ayant un lien avec la série de meurtres qu’il y avait eu.

— Il faut que tu m’expliques quelque chose, Eric...

— Quoi ?

— Pourquoi tu ne l’as pas tuée ? s’emporta presque Pam en se planta devant lui.

Eric avait repris son regard froid, et son visage fermé s’était rapproché de celui de sa progéniture, si bien qu’ils n’étaient qu’à quelques millimètres l’un de l’autre.

— Cesse de me parler d’elle, Pam. Je ne veux plus jamais en entendre parler. Est‑ce que c’est clair ?

Pam baissa les yeux et remarqua encore un détail.

— Ton collier... ? Tu ne lui as quand même pas... ?

— J’ai dit : plus jamais ! répéta le vampire Viking en haussant le ton, les sourcils froncés, les mâchoires serrées.

— D’accord, Eric.

Les deux vampires s’en allèrent, s’arrangeant pour monter, avant la levée du soleil, à bord d’un bateau en partance pour les Etats‑Unis.

Quelques heures plus tard, une voisine sonna à la porte d’une maison trop tranquille et, inquiète de voir la petite Gwenn sortir encore en pyjama et pieds‑nus, elle décida d’entrer pour chercher les parents qui n’étaient plus. Il ne restait que leur enveloppe corporelle baignant dans de la boue. La police et l’ambulance arrivèrent ­ trop tard ­ et après autopsies, au cours desquelles les médecins ne trouvèrent aucunes explications au fait que le couple ait été saigné à blanc, le dossier fut classé sans suite. Aucun rapprochement ne se fit avec les meurtres commis à Lille, Lyon, Bordeaux, Metz... Et même si, personne n’aurait trouvé les coupables. Gwenn avait été interrogée, mais n’avait rien dit, seulement qu’elle avait dormi jusqu’au matin ; ce qui se tenait.

La petite avait enlevé la chaine de son cou avant que quelqu’un lui demande d’où elle la tenait. Elle l’avait gardée dans une petite boite où elle mettait des babioles ­ inutiles pour les grandes personnes mais très importantes pour les enfants ­ pour finalement oublier son existence ainsi que celles de Pam et d’Eric... temporairement.

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