La fille aux yeux rouges

Chapitre 24 : PACTE

Catégorie: G

Dernière mise à jour 12/09/2009 08:26

Je n’allais plus sur le campus. J’appelais Josh tous les soirs pour prendre de ses nouvelles. Je l’avais prévenu qu’il devait se tenir prêt à déguerpir au plus vite à la moindre alerte de ma part. Mais j’avais évité de rentrer trop dans les détails.

Trois jours avaient passés depuis que Bella et Jasper avaient décidé de partir en Italie. Trois jours durant lesquels ils n’avaient cessé de répéter ce qu’ils allaient raconter aux Volturis.

Trois jours que j’angoissais. J’étais rongée par l’inquiétude. Bella et Jasper allait-il revenir sain et sauf ? Les Volturis allaient-ils accepter de nous aider ? Les autres en semblaient persuadés. Pour ma part, cet Aro ne m’inspirait aucune confiance.

En plus de cet état d’angoisse permanent, j’étais totalement déprimée. Desmond me manquait terriblement. J’étais toujours hantée par une paire d’yeux. Mais leur couleur avait changé. De rouge sang, ils étaient passés au bleu océan.

Plus les jours passaient, plus j’avais du mal à refreiner mon envie de le retrouver. J’étais obsédée par les brefs instants que nous avions passés ensemble. Comment pouvais-je être autant enticher de lui alors qu’on avait passé si peu de temps ensemble ?

Edward avait fini par accepter la décision de Bella même si il était fou d’angoisse à l’idée de la laisser partir seule. Il avait l’air terriblement  malheureux. Ca me faisait beaucoup de peine.

J’avais même tentée de faire changer d’avis Bella. Mais elle n’avait rien voulu savoir. Elle disait qu’il ne fallait pas qu’Aro sache comment m’atteindre. Josh et Desmond étaient mes faiblesses et Aro n’hésiterait pas à les utiliser pour m’avoir à sa merci.

Tous semblaient d’accord avec elle. Même Edward en convenait.

Alice ne cessait de dire que ça allait marcher et qu’ils seraient de retour la semaine suivante. Malgré ça, tout le monde était inquiet. Et pour cause, les prédictions d’Alice étaient fluctuantes.

La veille du départ de Bella et de Jasper, une partie de chasse fut organisée. Nous avions besoin de nous détendre, selon Carlisle.

Je ressentais la faim. Mais je n’avais pas du tout envie de manger. Je les suivais néanmoins.

Ne me voyant pas chercher à attraper des proies, Esmée s’alarma. Je la rassurais en acceptant la biche qu’elle avait capturée.

Je buvais le sang de la bête sans aucun plaisir. Tout était devenu fade. Même la vitesse ne m’amusait plus. Je soupirais.

_ « Qu’y a-t-il ma chérie ? » me demanda-t-elle.

_ « C’est fade. » dis-je.

_ « Du sang de prédateur te conviendrait mieux. » acquiesça-t-elle.

_ « Et je suis inquiète. » lui avouais-je.

_ « Oui, moi aussi. » me confia-t-elle.

Ce fut tout. Mais ce bref échange me remonta le moral. Esmée était une mère idéale, aimante, douce, compréhensive. Tout le contraire de ma vraie mère. Je lui souris.

Je n’étais pas la seule à ne pas être très enthousiasmée par la chasse. Edward et Bella avaient disparu de leur côté et Jasper et Alice avaient fait de même.

C’était l’heure des adieux. Je n’en fus que plus déprimé.

Le soir, j’appelais mon frère espérant qu’il me remonterait un peu le moral. Ce fut pire.

_ « Allô ? »

_ « C’est moi. »

_ « Ah ! » fit-il embarrassé.

_ « Quoi ? Je te dérange ? » demandais-je.

_ « Euh… en fait je suis en train de réviser avec Katie. »

Le coup de grâce.

_ « Bon, je vais te laisser  réviser  alors » fis-je sur un ton cynique.

_ « Attends, j’ai un message de Desmond pour toi. »

_ « Quoi ? » m’étranglais-je.

_ « Ouais, il avait l’air un peu allumé. Il m’a dit de te dire qu’il t’attendrait tous les soirs à la maison. »

Sous le choc, je ne répondais rien.

_ « Allô ? Lucy ? »

_ « Oui, je suis toujours là. Quand est-ce que tu l’as vu ? » demandais-je d’une voix tremblante.

_ « Cet après midi. Pourquoi est-ce que tu vois encore ce type ? » me demanda-t-il sur un ton de reproche.

_ « Pour la même raison que tu révises avec Katie. » rétorquais-je vertement.

_ « Quoi ? » balbutia-t-il.

_ « Je te laisse. Je te rappelle demain. »

Je n’attendis pas sa réponse et je raccrochais. Quel idiot ! Il devait faire – 15° C dehors. Il allait geler.

J’analysais froidement la situation. Edward et Alice étaient toujours absents du manoir. Si je sortais maintenant, personne ne s’en apercevrait. Et si c’était le cas, on pourrait penser que j’avais besoin de solitude ou que j’avais rejoint mon frère. Seul Edward saurait. Mais seulement demain matin. C’était le moment où jamais.

Je fonçais. La maison ne pouvait être que ma maison qu’il avait détruite lors de sa première et dernière transformation. Je galopais à toute vitesse à travers les bois. Avant de parvenir dans mon ancienne demeure, je m’arrêtais un instant.

Même si j’en avais terriblement envie, je ne devais pas laisser la situation de la dernière fois se reproduire. Dans un premier temps, je ne devais pas le laisser me toucher. Ensuite, je ne devais pas laisser déraper la conversation.

Soudain, je perçus un léger battement. Un cœur. Je m’élançais vers lui.

Desmond avait monté une tente près de la maison. Il attendait assis sur les marches du perron. Les seules choses encore en état dans la maison.

_ « Tu campes ? » le surpris-je.

Il se leva brusquement. Il était emmitouflé dans des vêtements pour le grand froid. Il avait prévu de passer la nuit là, me rendis-je compte.

_ « Je n’étais pas sûr que tu viendrais. »

_ « Si ça n’avait pas été moi, ça aurait été quelqu’un d’autre. Te rends-tu compte des risques que tu prends ? » le grondais-je.

Il me sourit bêtement et haussa les épaules.

_ « Sinon tu ne serais pas venu. » remarqua-t-il.

_ « Tu dois être congelé. »

_ « Pas tant que ça. Je me sens mieux. Mes forces me reviennent. »

_ « Tant mieux. »

_ « Alors qu’est ce que tu as fait ces derniers jours ? »

_ « Pas grand-chose. Et toi ? »

_ « Je t’ai cherché. »

Je lâchais un petit rire.

_ « Tu m’as trouvé, on dirait. »

_ « Non, je cherchais où tu vivais. C’est en désespoir de cause que j’ai demandé à Josh de te transmettre un message. »

_ « Tu ne dois pas venir là où je vis. » l’avertis-je.

_ « Pourquoi ? Les autres vampires me tueraient ? »

Je songeais à Emmett et à sa froide confession. Je songeais aux Volturis.

_ « Oui, sans aucun doute. »

Il avala difficilement  sa salive. Il ne s’attendait pas à une réponse aussi catégorique.

_ « Je vois. »

_ « Tu ne vois rien du tout. Dans quelques jours, le coin sera infesté de vampires qui ne mangent pas que végétarien, si tu vois ce que je veux dire. Tu dois te planquer.» m’énervais-je.

_ « On dirait que tu es inquiète pour moi. »

_ « Et comment ! Tu agis comme un idiot.»

_ « Si tu viens me voir dans ma planque, alors je resterais caché. »

Je le regardais, pantoise.

_ « C’est du chantage ? Ta vie t’importe-t-elle si peu ? »

_ « Non, non ! C’est juste que tu me manquais.» me dit-il doucement.

Je soupirais. Sa franchise m’avait coupé le sifflet. Que pouvait-on répondre à ça ?

_ « Tu es gelé. Remballes ton matériel et rentres chez toi. »

_ « Je remballe, si tu rentres avec moi. »

_ « T’es plutôt têtu. » notais-je.

_ « Absolument. Tu m’aides ? »

Je lâchais un soupir amusé. Nous nous mîmes au travail. La tente fut repliée rapidement. Nous la  rangeâmes dans le coffre de sa voiture.

Desmond fit le tour de la voiture et m’ouvrit la portière du côté passager avec un sourire entendu.

Je m’installais sans broncher sur le siège. Je ne pouvais pas m’empêcher d’être flattée. Aucun garçon ne m’avait couru après avec autant d’insistance.

Il fit démarrer la voiture à grand coup d’accélérateur et s’engagea sur la route recouverte de neige. La voiture avançait lentement.

_ « Cette fichue route n’a pas été déneigée ! Pourquoi es-tu venue t’installer dans un coin aussi reculé ? » me demanda-t-il.

_ « Je préférais vivre loin des humains. »

_ « Parce que ne pas tuer des humains est un combat perpétuel contre ton instinct? » demanda-t-il en reprenant mes paroles de l’autre soir.

_ « C’est ça » confirmais-je dans un sourire.

_ « Et maintenant que ta maison a été détruite par mes soins, tu es allée vivre avec d’autres vampires. »

_ « Oui. »

_ « C’est avec eux que tu vas combattre la meute de loup garou ? »

Jusque là je n’avais pas réalisé que j’allais devoir me battre. Une nouvelle source d’angoisse à l’horizon.

_ « Euh oui. »

_ « Je ne veux pas que tu participes à ça. » lâcha-t-il nerveusement.

_ « Je te demande pardon ? »

Celui qui m’imposerait sa volonté n’était pas encore né.

_ « Ecoutes, c’est dangereux. Tu pourrais être blessée voir pire. »

_ « Je sais me défendre. » mentis-je.

_ « Frapper des humains sans défense est une chose, combattre un loup garou en est une autre. »

Je songeais à mon pouvoir. Je ne savais pas du tout le maîtriser. Et je n’avais aucune notion de combat. Qu’allais-je faire si je me retrouvais face à un loup garou et que mon pouvoir m’abandonnait ?

_ « Que veux-tu que je fasse ? Ils vont nous attaquer ! Je ne vais pas m’enfuir en courant et abandonner mon clan ! »

_ « Mais tu les connais à peine ! ! »

_ « Peu importe, ils m’ont aidé quand j’étais dans le … dans le besoin. » me repris - je. « J’ai une dette envers eux. »

_ « Moi aussi, je suis inquiet pour toi. » reprit-il sur un ton plus doux. « Je sais ce que tu vas affronter et, crois-moi, tu ne feras pas le poids. »

Son insistance à rabaisser mes capacités au combat commençait à m’irriter.

_ « Figures-toi que, nous autres vampires, avons des talents cachés. Quand tes petits copains verront de quel bois je me chauffe, il sera déjà trop tard pour eux. » fis-je amusé de ma propre blague.

_ « Quels talents cachés ? »

Je n’eus pas le temps de répondre. Les roues arrières chassèrent dans un virage et la voiture, emportée dans son élan, glissa dans le fossé de la route. Le choc ne fut pas violent car nous allions à une allure modérée mais la voiture s’était couchée sur le côté conducteur bloquant la porte de Desmond.

_ « Merde ! » lâcha ce dernier.

Je ne pus m’empêcher de lâcher un petit rire.

_ « On peut savoir ce qu’il y a de drôle ? »

_ « C’est juste que le coup de la panne, c’est un peu usé non ? » fis-je.

_ « Je peux t’assurer que je n’avais pas prévu ce coup là ! » se défendit-il.

Je souris et ouvris ma portière.

_ « Ne t’en fais pas, de toute façon, en matière de voitures je suis victime d’une sorte de malédiction. » expliquais-je en m’extirpant de la voiture.

_ « Comment ça ? » demanda-t-il en essayant de me suivre.

_ « Non. Reste là. Je m’en occupe. » lui lançais-je en l’arrêtant d’un geste de la main.

Je continuais mon récit en faisant le tour de la voiture.

_ « A l’époque du lycée, j’ai détruit deux ou trois voitures. »

J’attrapais le rebord du toit de la voiture et poussais pour faire basculer la voiture vers la route. « Des petits accidents sans gravité. Mais, avec le recul, j’aurais dû me douter que les voitures signeraient mon arrêt de mort. »

La voiture étant de nouveau droite, je l’attrapais par le dessous et la soulevais pour la déposer sur la route, deux mètres plus loin.

_ « Remets le contact. » lui demandais-je.

La voiture redémarra sans problème. Je retournais m’asseoir côté passager.

Desmond me lança un regard sidéré.

_ « Quoi ? »

_ « Rien… merci. »

_ « Oh pas de quoi. Mais ne viens plus me dire que je ne fais pas le poids face à tes petits copains. »

_ « Ce ne sont pas mes petits copains » grinça-t-il.

Nous reprîmes la route en silence. Desmond semblait concentré sur sa conduite. Soudain il reprit.

_ « Les voitures ont signé ton arrêt de mort ? »

_ « C’est suite à un accident de la route que je suis devenue comme ça. Un vampire m’a trouvé pendant que j’agonisais, il m’a mordu et puis voila ! »

J’évitais de lui dire que la dernière fois que j’avais frôlé la mort je me trouvais sur un parking. Décidément, les voitures étaient le dénominateur commun de tous mes problèmes.

_ « Je crois que je vais arrêter les voitures finalement. »

Cela fit rire Desmond.

Nous atteignîmes enfin une route dégagée. A partir de là, nous ne mîmes que quelques minutes à rejoindre le campus. Desmond se gara juste en face de la confrérie Alpha Delta.

Il me lança un regard chargé de désir. Ma gorge se serra.

_ « Si je t’invite chez moi, tu viendras ? »

Je baissais la tête.

_ « Tu sais que non. »

Il soupira, déçu.

_ « Tu sais, si je t’ai cherché comme ça ces derniers jours, c’est parce que je voulais te dire quelque chose. »

Je retins ma respiration.

_ « Je voulais te proposer de t’enfuir avec moi. » lâcha-t-il tout de go.

Je le regardais, ébahie.

_ « Nous ne pouvons pas faire ça ! Mes amis prennent des risques pour nous protéger, toi, Josh et moi. Je ne peux pas les abandonner. »

_ « Je sais cela. C’est pour ça que je ne t’ai rien demandé. »

_ « Desmond...» soupirais - je. 

_ « Ne dis rien. J’ai compris de toute façon. » fit-il d’un air désabusé.

Il fit un geste pour sortir de la voiture. Je le retins en posant ma main sur son bras.

_ « Attends. »

Je ne voulais pas le quitter comme ça. Je ne voulais pas qu’il pense que je le rejetais.

_ « Tu sais, ces derniers jours, je n’ai pas cessé de penser à ce que tu m’as dit dans ta chambre » avouais-je.

Son regard s’éclaira d’un intérêt soudain.

_ « Je réfléchissais à … à ce qu’il se serait passé si il n’y avait  pas eu toute cette histoire de guerre millénaire entre nous. »

_ « Ah bon ? Moi j’ai pensé à ce qu’il se serait passé si cet imbécile de Luke n’avait pas frappé à ma porte. »

Je lui jetais un regard de travers.

_ « Désolé. Je me tais. » fit-il dans une grimace.

_ « Donc, je disais que je réfléchissais à notre situation. Et puis je me suis dit qu’après tout, nous n’étions pas pressés. Si nous nous débrouillons pour nous tirer sans dégât de cette histoire, nous aurions alors tout le temps d’être ensemble plus tard…»

_ « Qu’est-ce que tu entends par « plus tard » ? Parce que le temps est une notion un peu vague quand on a toute l’éternité.»

_ « Je ne sais pas ! Je ne suis pas médium. Quand toute cette histoire sera terminée, que mes amis et mon frère seront en sécurité. »

_ « Humph » fit-il, pas complètement convaincu.

_ « Qu’en dis-tu ? »

Il me regarda très sérieusement, puis sa bouche s’élargit progressivement pour laisser place à un grand sourire.

_ « C’est d’accord, mais à une condition. » décréta-t-il.

_ « Quelle condition ? » demandais-je méfiante.

_ « A la condition que nous scellions notre pacte par un baiser. »

_ « Oh ! Desmond ! » fis-je mécontente.

Je me précipitais hors de la voiture. Je lui avouais presque mes sentiments et voilà qu’il se fichait de moi.

J’entendis la portière de Desmond claquée derrière moi puis ses pas dans la neige alors qu’il tentait de me rattraper. Je songeais à bondir hors de sa portée quand il m’attrapa le bras avec vigueur. Il me força à me retourner vers lui. Pas de doute, ses forces lui étaient  revenues.

Il me fixa de ses yeux bleus glacial.

_ « Ce n’est pas drôle ! » fis-je dans un couinement apeuré.

Il me tenait fermement contre lui. Je ne songeais même pas à me débattre. Je sentais son souffle chaud me réchauffer le visage.

_ « Ca ne m’amuse pas non plus. » dit-il la mâchoire serrée. «  Tu me demande d’attendre. D’attendre que tu es mené ta guerre et mit tout le monde à l’abri. Je veux simplement quelques garanties. »

_ « Des… des garanties ? » répétais-je bêtement.

_ « Si jamais cette histoire tourne mal pour nous, je veux au moins avoir goûté une fois à tes lèvres. »

Je le regardais incapable de faire le moindre mouvement ou de lui répondre. D’ailleurs, que pouvais-je répondre à ça ? J’étais sa prisonnière. Ses yeux me tenaient en joue. Ses bras autour de moi étaient comme des cordes entravant mes mouvements. Et sa chaleur était ma cage. Impossible de lui résister.

Il se pencha vers moi et m’embrassa avec violence. Contre toute attente, je lui rendais son baiser. C’était comme une évidence, j’étais faite pour l’embrasser. Ses bras étaient faits pour m’étreindre.

J’avais l’impression d’être née seulement pour vivre cet instant. Je percevais son cœur qui battait la chamade, je n’avais jamais entendu de mélodie aussi merveilleuse.

Plus rien ne serait comme avant.

 

 

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