Evolution

Chapitre 1 : Evolution

Catégorie: M

Dernière mise à jour 10/11/2016 05:46

Prologue

 

Elle ne faisait plus que ça : elle se levait le matin, préparait le repas du midi pour nous trois, parfois retournait se coucher jusqu’au soir ou s’asseyait sans bouger pendant des heures… puis elle revenait dans la cuisine pour préparer le repas du soir. C’était devenu une routine qu’il était impossible de lui faire casser…un faible équilibre dans sa vie qui lui permettait de ne pas sombrer. 

Son ventre grossissait chaque semaine, elle était plus belle chaque jour mais les cernes sous ses yeux noircissaient à la même vitesse qu’elle s’arrondissait. Ça me faisait si mal de la voir comme ça, nous étions tous impuissants face à sa souffrance.

 

Elle avait accepté de rester chez nous, peut-être parce que c’était la dernière volonté de Jacob ? Rachel essayait de la distraire mais sans succès. Les seules fois où elle restait près de nous c’était pour se balancer doucement sur la chaise à bascule du perron, fixant la forêt avec des yeux vides. Je préférais encore qu’elle reste dans sa chambre tellement son visage ravagé par les larmes me brisait.

 

Charlie passait tous les jours mais elle ne lui parlait pas plus qu’aux autres. La seule personne avec qui elle communiquait, c’était moi. Elle hochait la tête à mes questions, me montrait parfois du regard ce qu’elle voulait. Elle ne s’était pas mise en colère lorsque j’avais réussi à la ramener à la maison, elle était dans cet état atonique depuis et pourtant, je le voyais dans ses yeux, elle m’en voulait d’avoir écouté Jacob, de l’avoir arrachée de lui sans même qu’elle puisse lui dire au revoir.

Nous n’avions plus de nouvelles depuis maintenant quatre mois, plus beaucoup d’espoir non plus…nous n’avions jamais retrouvé son corps, juste un tas de cendre pour lequel nous n’avions aucune explication. Je mutais tous les jours, pour écouter mais plus aucune pensée ne nous était parvenu, plus rien…

 

Tous les soirs, elle se balançait sur sa chaise, par n’importe quel temps, à fixer le vide, à l’attendre, et tous les soirs, je la couchais dans le même état : inerte, silencieuse, dépressive. Parfois, elle me tenait la main et je comprenais qu’elle souhaitait que je reste pour la nuit. Rachel ne disait rien, sachant parfaitement que c’était inutile de toute façon, et je passais des heures à la bercer, tentant de la réchauffer comme je pouvais car elle restait glaciale malgré le feu qui brûlait en permanence dans sa chambre et la chaleur que mon corps dégageait. Elle me caressait le bras, parfois elle était secouée de spasmes. Je ne savais pas si je lui apportais le réconfort qu’elle cherchait mais elle finissait toujours par s’endormir.

 

Rachel et moi devions beaucoup insister pour qu’elle mange, la forçant pour le bébé…elle le faisait, au bout de deux ou trois remarques mais je le sentais, elle se forçait juste pour qu’on se taise. Je la soupçonnais de se moquer éperdument de cet enfant, je me demandais même si elle le sentait ? Pourtant, si je comptais bien, elle était presque à terme maintenant et je redoutais déjà l’arrivée de ce petit être qui lui rappellerait Jacob. Elle avait refusé de voir un médecin, laissant la nature faire et j’imaginais déjà que nous devrions nous en occuper à sa naissance car sa mère semblait à mille lieux d’envisager sa présence qui devenait de plus en plus inéluctable.

 

La neige ne fondait pas, l’hiver avait été  particulièrement rude cette année mais je redoutais le printemps, date à laquelle ils auraient dû se marier. Je l’observais en coin, elle semblait si absente, ses deux mains sur les accoudoirs, je remarquais qu’elle ne les mettait même pas sur son ventre.  Cette attitude me révoltait et je décidais de la secouer un peu. Je m’approchais d’elle doucement puis m’accroupis à ses côtés. Elle ne bougea pas. Alors j’osais poser mes mains sur son ventre et aussitôt, un coup me répondit. Surpris et heureux de cette réponse immédiate, je souris en levant les yeux vers elle mais elle restait inerte, le regard vide. Ce qui me confirma qu’elle se fichait complètement de ce bébé.

Une sourde colère m’envahit et je frottais son ventre afin qu’elle ressente au moins ma chaleur, qu’elle réagisse ! Et aussi, que ce bébé se sente un peu aimé. Elle baissa lentement les yeux vers moi, j’y lu un léger reproche. Au moins, elle était sortie de son état amorphe. 

  • Bella, tu le sens ? murmurais-je.

Je pris sa main et la posais sur son ventre. Elle ne résista pas mais son visage n’exprima aucune émotion quand une petite boule se forma.

  • Bella…il bouge…il est là…tu devrais le caresser tu sais…il aimerait ça.

Je n’avais aucune idée si c’était une fille ou un garçon mais comme elle s’en fichait de toute façon …

Je ressentais une certaine émotion à toucher ce petit être qu’on sentait parfaitement sous sa peau. Rachel n’était toujours pas enceinte et je commençais à me demander si elle le serait un jour… il est vrai que depuis que Bella était à la maison, notre relation avait stagné car nous n’étions plus jamais seuls et il fallait que je sois honnête, je passais plus de temps avec Bella qu’avec Rachel, qui pleurait aussi son frère. Je n’avais plus aucune arrière pensée, ce temps-là était passé, je voulais juste m’occuper d’elle, parce que Jacob me l’avait confiée, parce qu’il pouvait revenir un jour et qu’il fallait que sa femme soit en pleine forme, parce que je l’aimais comme une sœur, qu’il avait eu confiance en moi et qu’elle avait confiance en moi.

Elle me brisait le cœur et je ne savais plus comment la consoler, lui faire remonter la pente. 

  • Bella, tu veux quelque chose à manger ? lui proposais-je.

Elle secoua doucement la tête, replongeant son regard dans le néant. Je passais ma main sur son visage et je vis ses sourcils se crisper…je sus que je venais de lui rappeler Jacob. Ça arrivait parfois et à chaque fois, les larmes coulaient, inépuisables, et je me sentais impuissant. Alors je la laissais se calmer, seule.

Je me levais et cette fois, elle m’attrapa la main. Surpris, je m’accroupis à nouveau près d’elle et je portais sa main à mes lèvres, l’embrassant avec toute la chaleur dont j’étais capable de lui offrir pour redonner un peu de vie à son corps.

  • Tu veux que je reste ?

Elle hocha la tête. Elle fixait sa main que je tenais fermement et je compris qu’elle fixait son anneau. Je lui caressais les doigts puis lui frottais le dessus de la main. Elle planta alors ses yeux mouillés dans les miens et je lui souris.

Une voiture se gara devant la maison : son père. Je soupirais, sachant que cette visite se passerait comme toutes les autres, qu’il repartirait en larmes, anéanti par l’état de sa fille qui refusait de lui parler. Je la lâchais pour venir à sa rencontre. Il avait beaucoup maigri, et ses cernes faisaient aussi peur que celles de Bella.

  • Bonjour Paul…pas de changement ? demanda-t-il d’une voix lasse.
  • Non mais le bébé bouge bien, répondis-je, histoire de lui redonner un peu de baume au cœur. Après tout, il allait être grand-père.
  • Elle l’a senti ?

Charlie était aussi conscient que moi de l’indifférence de Bella vis-à-vis de cet enfant et je ne préférais pas lui répondre. Il comprit mon silence et baissa la tête.

  • Elle ne réagit vraiment à rien ?
  • Non…
  • Je l’ai déjà vu comme ça une fois…je ne pensais pas la revoir dans cet état, tout allait si bien …

C’était à mon tour de baisser la tête, je ne savais plus quoi lui dire…Bella n’évoluait pas, sauf physiquement parce que la nature ne se laissait pas vaincre aussi facilement, mais ça faisait maintenant quatre mois qu’elle n’avait pas prononcé un mot, ni même un cri…elle ne faisait que attendre et pleurer toutes les larmes de son corps.

Charlie hocha la tête en serrant les lèvres puis remonta dans sa voiture. Je fus surpris qu’il n’aille même pas la voir mais je pouvais comprendre la douleur qu’il devait ressentir à la trouver comme ça. Je remontais les marches du perron pour me rassoir à ses côtés. Je lui pris sa main et tout comme le sien, mon regard se perdit vers la forêt.

 

 

Huit mois plus tôt ….

1 – Faim de loup

 

Les bras enroulés autour de son cou, balancée par ses mouvements, je me laissais porter à travers la forêt dans un état de total abandon. Derrière nous, je pouvais entendre les pas des femmes qui marchaient aux côtés de leurs loups silencieux. Puis, l’atmosphère changea et j’entendis le bruit du plancher qui craquait…nous devions être arrivés à la petite maison rouge.

D’une main, Jake ouvrit la porte en douceur, Billy devait sûrement dormir et il traversa la cuisine sans un bruit. Je sentis qu’il poussait la porte de sa chambre et il me posa sur le matelas molletonné. Le parfum de cette pièce me fit reprendre mes esprits. C’était un endroit où je n’étais pas venue souvent mais je savais déjà que je m’y sentirais bien.

  • Qu’est-ce qu’il s’est passé ? chuchota Sam que je n’avais pas entendu nous suivre.
  • Je ne sais pas, répondit Jake sur le même ton. Nous…on l’a fait, enfin tu vois…et c’est arrivé …comme ça…elle s’est réveillée et elle était comme ça…
  • C’est incroyable, murmura Sam.

Mon cœur battait très fort. Entendre Jake parler de nous ainsi me chamboulait et me ramenait dans ses bras où je m’étais enivrée quelques heures plus tôt. J’avais hâte qu’il ferme cette porte et qu’il revienne à mes côtés.

  • Tu crois que c’est parce qu’il est parti ? Chuchota Jacob.

Sam mit du temps à répondre puis je l’entendis dire :

  • je ne sais pas … peut-être…après tout, il est parti quand ? Il y a trois ou quatre jours ?
  • C’est peut être dû au fait qu’elle a reçu mon sang ? insinua Jake. 
  • Elle a reçu le mien aussi, moins que toi mais… je doute que ça ait un rapport… Peut-être que ça vient d’elle, tout simplement, déclara Sam. J’ai connu ça avec Emily. Je la rejetais et lorsque je l’ai acceptée, la magie a vraiment opéré. Mais moi j’étais conscient de la rejeter. Le cas de Bella est…étrange…
  • Oui…, souffla Jake.

Je commençais à m’impatienter. Les bras de Jacob me manquaient déjà et l’intimité de cette chambre me rendait brûlante. Je n’avais pas de mot pour décrire ce que je ressentais pour Jake depuis cette nuit mais une chose était sûre, dès qu’il s’éloignait de moi, j’avais du mal à respirer.

  • En tous cas, on peut dire que tu as assuré ! plaisanta Sam en étouffant un rire.

Jacob ne semblait pas apprécier car il ne répondit pas. Mon état l’inquiétait-il tant que ça ? Puis, j’entendis enfin le bruit de la poignée et celui de vêtement qu’on retire. La seconde d’après, ses bras chauds m’enveloppaient et je poussais un soupir de plaisir en sentant son corps contre le mien.

  • Tu es réveillée ? Chuchota-t-il à mon oreille.

Son souffle chaud sur ma nuque me fit frissonner et je tournais ma tête vers lui, en lui tendant mes lèvres qu’il captura aussitôt. Ce baiser déclencha en moi une violente vague de désir et je me tournais complètement pour me serrer contre lui. Il se laissa aller et je le poussais doucement sur le matelas pour avoir plus d’emprise sur lui. Je remarquais alors qu’il était seulement torse nu. Je tirais alors sur son short.

  • Enlève-moi ça, demandais-je d’une voix rauque que je ne reconnue même pas.
  • Bella … Mon père dort à coté…

Cette idée me révolta, j’avais le corps en feu, j’avais trop besoin de lui.

  • On fera doucement…, proposais-je en l’embrassant dans le cou, sur l’arrête de sa mâchoire, dans le creux de son oreille…
  • Non, Bella…pas maintenant…à l’aube, Sam doit venir le chercher...mais tu n’es pas fatiguée ? demanda-t-il en riant à demi.

Non, je ne l’étais pas…je me sentais encore pleine de cette vitalité excessive et je mourrais d’envie de me perdre à nouveau dans ses bras. C’était comme une soif immense et incontrôlable, qui ne se tarirait jamais. Jake m’opposait une légère résistance et mon baiser se fit plus insistant. Il se dégagea doucement.

  • Bella…tout à l’heure…il fera bientôt jour….
  • Non !

Il éclata d’un rire étouffé et prit ma tête entre ses bras pour la coller contre sa poitrine où j’entendais la douce musique de son cœur. Je me sentais très frustrée. Je me libérais et plantais mes yeux suppliants dans les siens.

  • Jake…s’il te plait…j’ai envie de toi là, maintenant !

Il fit des yeux ronds et je me sentis vaguement gênée par mon attitude mais c’était plus fort que moi. Il fallait que je le fasse craquer. Ma gorge me serrait, mon cœur palpitait, ma peau le réclamait à grands cris, il fallait qu’il comprenne !

Jake se releva et se mit assis, contre la tête de lit.

  • Jacob…je te promets que Billy n’entendra rien, chuchotais-je, à fleur de peau.

Quelque chose du le faire changer d’avis car il marmonna :

  • Bon…mais s’il nous entend, tu te …
  • Chut …, le coupais-je, trop heureuse qu’il capitule.

Il me sourit de ce sourire que j’aimais tant et me faisait fondre. Je grimpais sur lui, retirais mes vêtements pour la troisième ou quatrième fois depuis hier ainsi que les siens. Jake se laissait faire, amusé par ma précipitation. Il m’attira contre lui et je respirais à nouveau…ma tête me tournait, je me sentais vraiment dans un état second mais la sensation était si agréable que je ne voulais pas en sortir. J’étais si …différente, je me sentais belle (sentiment très nouveau pour moi), aimée et complètement accro à l’homme que je tenais fermement contre moi…je me demandais même comment j’avais pu le rejeter, comment j’avais pu vivre sans lui jusque maintenant, comment j’allais pouvoir me séparer de lui physiquement…A cet instant, je voulais rester dans cette chambre avec lui pour l’éternité. Je respirais sa peau, ses cheveux, je caressais son dos, ses bras, il était si beau, si parfait…le contour de ses lèvres était si merveilleusement dessiné, le galbe de ses muscles était pour moi un paysage magnifique où je laissais glisser mes doigts, tout m'appartenait…nos corps s’emboîtaient à la perfection, comme si nous avions été crée dans le même moule…c’était une sensation tellement bouleversante et si magique. Assise sur lui, je fus surprise pendant un instant de constater que je menais la danse. Je croisais le regard de Jake et il semblait aussi surpris que moi mais enchanté par ma métamorphose. Je n’aurai pu imaginer qu’une relation physique puisse apporter autant de bonheur. Je me concentrais sur la respiration de Jake qui était pour moi la plus douce des musiques. La violence du plaisir fut si forte que je plantais mes dents dans le muscle de sa nuque pour ne pas crier. L’effet sur Jacob fut immédiat. Je sentis son corps parcouru par un frisson et il émit un gémissement sourd qu’il étouffa dans mes cheveux.

 

Le clapotis de l’eau sur le carreau me réveilla en douceur. Je regardais les gouttes couler en abondance le long de la vitre et soupirais de plaisir en me resserrant plus contre la chaleur de Jacob. Je ne savais pas quelle heure il était mais j’aurai pu rester ainsi pendant des heures…Jake bougea le bras qui me tenait et se dégagea en grognant doucement. Puis, je le sentis relever brusquement le buste et il s’écria :

  • Mais qu’est-ce que tu fous là ?!

J’entendis rire et me retournais aussi subitement pour découvrir Billy dans son fauteuil près de notre lit.

  • J’admire le spectacle fiston, se moqua-t-il. Je commençais à m’inquiéter, tu as vu l’heure ?

Je pris alors conscience de ma nudité et tirait le drap (que j’avais viré au bout du lit) sur moi. Mais, je ne réussis qu’à me couvrir les jambes. Billy éclata de rire.

  • Dégage de là ! Ordonna Jake, furieux, en lui jetant un oreiller.
  • Oui, oui, répondit Billy en continuant de rire.  Le repas est prêt si vous avez faim, ajouta-t-il en faisant pivoter son fauteuil vers la cuisine.

Une odeur de pain de viande me chatouilla les narines.

  • Bon sang ! Quel vieux voyeur celui-là ! Bougonnais Jake. M’étonne pas qu’il a fait des gosses partout !

J’éclatais de rire de le voir ainsi, fâché et tentant de remettre de l’ordre dans son tee-shirt qu’il voulait enfiler. Je vins alors l’enlacer par le cou et déposais un baiser sur son épaule.

  • Allons vite manger et revenons ici, chuchotais-je.
  • Quoi ? Non, je dois aller chercher la voiture du vieux Willy…, continua-t-il en grommelant toujours, je lui avais promis de la réparer pour ce matin …

L’idée qu’il me quitte me paniqua :

  • Tu vas partir combien de temps ? murmurais-je, soudain au bord des larmes.

Le ton de ma voix l’alerta car il se retourna brusquement et je vis une certaine stupeur sur son beau visage. Lorsque ma tête lui confirma mon état (que je ne parvenais pas à contrôler), il me prit la main et chuchota :

  • Reste là si tu veux…je ne serai pas long. Je vais chercher la voiture et je la mets dans notre garage.
  • C’est vrai ? couinais-je, honteuse de ressembler clairement à une gamine trop gâtée.
  • Oui, je te le promets.

J’inspirais et constatais que j’avais arrêté de respirer correctement depuis quelques minutes. Soudain, cette imprégnation me parut moins magique, comme si ce cadeau merveilleux comprenait également des désavantages qu’il fallait supporter pour mériter le bonheur intense quand tout allait bien. Je compris alors par quoi était passé Jacob durant tout ce temps.

  • Jake ?
  • Oui ma chérie ? répondit-il en se levant pour récupérer ses chaussures.
  • Qu’est-ce que tu as ressenti quand je suis partie ?

Par cette question, je voulais savoir à quoi je devais m’attendre quand nous serions séparés. Il vint se rassoir près de moi et soupira bruyamment. Je pus alors percevoir toute sa douleur.

  • Et bien … je me réveillais la nuit en pleurant…et parfois, je pleurais même la journée sans pouvoir contrôler quoique ce soit…tout ça c’était le pire…, déclara-t-il, en me faisant un faible sourire.

J’hochais la tête, l’invitant à continuer.

  • Sinon, je te voyais tout le temps, le pire était quand je fermais les yeux… j’entendais ta voix dans ma tête… j’entendais des conversations que nous avions eues, qui défilaient comme une musique… et puis …

Il baissa la tête, ses épaules s’affaissèrent. Comme il hésitait, je pris sa main.

  • Oui ? Continue …
  • Je t’imaginais, murmura-t-il après un temps en relevant la tête, je t’imaginais comme maintenant…je nous imaginais…tout le temps…ces images que j’inventais me permettaient de tenir le coup car mon esprit finissait par y croire…comme si tu étais tout le temps près de moi, que je pouvais te retrouver quand je le voulais, dès que j’étais seul ou que ça n’allait pas. Parfois, la nuit, j’avais même l’impression de dormir dans tes bras…

Son regard se posa sur nos deux mains enlacées et il soupira à nouveau.

  • J’ai du mal à croire que tu es là devant moi…comme je l’ai rêvé tant et tant de fois … même si Billy m’a mis en rogne tout à l’heure, le fait qu’il te regarde me force à croire que je ne rêve pas.
  • Oh Jake…, murmurais-je en le prenant contre moi. Je suis là, je suis bien près de toi et je ne te quitterai jamais ! Ajoutais-je avec force.

 

2 – Décisions

 

Je poussais un petit cri de stupeur lorsque je vis l’heure sur l’horloge de la cuisine.

  • Nom d’un chien ! Cinq heures ! Charlie va me tuer ! m’écriais-je, en me rappelant que j’avais un père.
  • Ne t’en fais pas Bella, répondit Billy en riant, je l’ai déjà prévenu.
  • Oh…

Jake et moi nous lançâmes un regard et nous comprîmes alors que mon père était déjà au courant de tout. J’imaginais déjà la tête de Charlie : satisfait et inquiet à la fois. J’allais d’ailleurs sûrement avoir droit à une nouvelle morale. Je m’installais à table et Billy m’apporta une assiette.

  • Merci Billy.
  • De rien ma fille, répondit-il en retournant près des fourneaux.

Je le regardais faire, surprise et heureuse du surnom qu’il venait de me donner. Jake m’observait, le regard brillant et je lui souris avant de mordre avec délice dans le morceau de viande.

Le repas terminé, Jacob se leva et mon angoisse me revint avec une force surprenante.

  • Tu pars déjà ? marmonnais-je.
  • J’en ai pour une heure maximum.

Une voiture fit craquer les cailloux de la cour. Billy s’approcha de la fenêtre et sourit. Je compris que c’était mon père et me levais pour l’accueillir. Lorsqu’il entra en boitant à cause de son attelle, je vis dans ses yeux qu’il n’était même pas fâché que j’aie découché.

  • Bonjour les enfants ! Salut Billy…, déclara-t-il en lui tendant la main.
  • Salut papa, répondis-je d’une petite voix.

Jake semblait un peu tendu mais lui sourit, le regard franc.

  • Une tasse de café Charlie ? Proposa Billy.
  • Avec plaisir ! répondit mon père en s’essayant près de moi, l’air de rien.
  • Pas trop dur, la reprise, avec tes côtes et ton espèce de botte ? Demanda Billy en tendant la cruche de café à mon père.
  • Ça va … ça ira mieux dans quelques jours. Un peu de mal pour conduire mais bon…je ne compte pas rester à la maison alors …

Je me posais à nouveau sur ma chaise et avalais une grande gorgée d’eau. Jacob s’approcha de moi et m’embrassa sur le front.

  • A tout à l’heure ?
  • Oui…, répondis-je la gorge serrée.
  • Où vas-tu ? demanda Charlie, surpris par le départ de Jacob.
  • Euh…j’avais un truc à faire ce matin et …je ne me suis pas réveillé alors je vais le faire maintenant, marmonna Jake.
  • Ah oui… oui, évidemment, lança mon père en souriant à Billy.

Ces deux là étaient des vraies commères ! Pensais-je. Je n’imaginais même pas ce qu’ils se racontaient derrière notre dos, pour ensuite nous faire la morale sur ce qu’on devait faire ou ne pas faire.

Lorsque Jacob referma la porte derrière lui, je sentis un immense vide en moi mais curieusement, ce vide fut vite remplacé par une douce chaleur, comme une onde positive, qui me traversa et qui me réconforta. Je sus alors ce qu’Emily avait voulu m’expliquer : « Quand il n’est pas là, c’est un déchirement mais il ne te quitte pas vraiment. Tu peux ressentir sa présence et son amour à distance. » Et c’était vrai. Je le sentais au plus profond de moi. Je poussais un léger soupir de soulagement devant mes angoisses du matin. Jacob avait souffert de mon absence mais je n’étais pas imprégnée. Cette fois, c’était différent ! Et je me dis qu’il ne souffrirait plus.

  • Tu penseras à appeler ta mère en rentrant Bella. Elle a téléphoné plusieurs fois depuis hier mais apparemment, tu avais éteint ton portable…, avança mon père dans un demi-sourire.
  • Je ne rentre pas Charlie, répliquais-je, sans même réfléchir.

L’idée même m’était soudain intolérable ! Mon père manqua de s’étrangler avec son café.

  • Quoi ? s’exclama-t-il.
  • Tu as très bien entendu, répétais-je.

Il fallait que les choses soient claires. Je ne savais pas d’où me venait cet aplomb et cette détermination mais j’étais sûre d’une chose, je ne bougerai pas d’ici !

  • Bella, non mais ça ne va pas ? s’écria mon père. Tu sors avec Jake depuis quoi ? Deux jours ? Une semaine ? Tu n’es pas mariée à ce que je sache ! Et ce n’est pas parce que vous …enfin, tu … enfin bref ! Ressaisis-toi ma fille !
  • Tu peux crier Charlie, je ne partirai pas d’ici, répondis-je calmement, sans sourciller.

Il était hors de question que je cède ! Je n’avais même pas réfléchis à la question, il n’y avait même pas à réfléchir, je ne bougerai pas ! Je dormirai ici, toutes les nuits, dans les bras de Jake et tant pis si Charlie mettait du temps à le comprendre. Lui, il avait Sue ! Il pouvait se passer de moi maintenant. Moi, je ne pouvais plus me passer de Jacob. Je vis Charlie blanchir et sa colère ne me fit pas peur.

  • Charlie, je crois que nous devons parler toi et moi, intervint Billy.
  • Ne te mêle pas de ça ! C’est peut être ton fils mais ma fille a encore des études à faire !
  • Je n’irai pas à Seattle ! Déclarais-je, consciente que j’allais le mettre dans une rage folle.

Mais ça aussi, il n’y avait même pas à y réfléchir, je ne bougerai plus de la Push !

  • Qu..quoi ? ! Mais Bella, tu deviens folle ! Cria Charlie en se levant, renversant sa tasse au passage.

Je me levais à mon tour et le défiais du regard.

  • Je viendrai chercher mes affaires avec Jake quand il sera de retour, annonçais-je, poussée par une volonté de fer.  
  • Hors de question !

Mais, je ne voulais plus continuer cette conversation. Tout était dit. Je filais dans la petite chambre de Jacob, NOTRE chambre, et claquais la porte. J’entendis mon père bégayer, anéanti :

  • Mais…mais qu’est-ce qu’elle a … ?
  • Charlie…je t’ai dit qu’il fallait qu’on parle, répéta doucement Billy.

 

La nuit tombait lorsque la porte de la chambre s’ouvrit. Je fixais la cour, attendant patiemment le retour de Jake, m’imaginant ce que serait ma nouvelle vie, ici, dans cette petite maison que j’aimais tant.

  • Bella, tu peux rester ici le temps que tu voudras, déclara Billy Black depuis l’encadrement de la porte.
  • Merci…

Je n’avais même pas entendu Charlie quitter la maison mais peu importe…j’irai le voir ce soir, je lui réexpliquerai et je prendrai mes affaires…le strict minimum.

  • Bella ?

Je me retournais pour faire face au père de Jacob.

  • Je sais que pour l’instant, tu penses que tu ne pourras plus le quitter mais ça va passer…tu pourras reprendre une vie normale après l’euphorie du phénomène.
  • Ma vie normale est avec Jake. Vous, au moins, vous pouvez comprendre ça !
  • Non Bella…je ne peux pas, répondit-il tristement. Je n’ai pas muté moi...

Je m’excusais du regard, me rappelant vaguement une explication que j’avais eue à ce sujet…

  • Oui, j’ai vécu pendant la période tranquille et crois-moi, cette histoire d’imprégnation est la seule chose que je regrette en partie ! Peut-être que j’aurai fait moins de mal à ma femme…

Je repensais à ce que m’avait raconté Jake avec Sue Clearwater…la femme que mon père comptait garder dans sa vie, la mère de Seth, demi-frère de Jake…oui, soupirais-je, nous étions tous de la même famille.

  • Seth ne serait pas là sans ça ! déclarais-je dans un sourire chaleureux.

J’aimais beaucoup ce garçon et finalement, j’étais très heureuse que Billy est eu un écart de jeunesse pour qu’il fasse parti de notre vie.  

  • Oui…ça c’est l’autre partie qui fait que je ne regrette pas tout, répondit Billy, le regard brillant.
  • Vous pouvez être fier de vos enfants Billy…ils sont magnifiques, le rassurais-je sincèrement.

 

 

Finalement, Jacob revint assez tard dans la soirée et mon impatience avait atteint sa limite. Je me précipitais jusqu’au garage et lui sautais au cou, l’enveloppant de mes jambes.

  • Oh ! Bella …doucement, tu vas te faire te mal, rigola-t-il.

J’enfouis mon visage dans le creux de sa gorge, respirant à plein poumon son odeur.

  • Jacob, Jacob…tu es là, enfin…, soupirais-je.
  • Oui, oui…

Je ne voulais pas le lâcher et il ferma la porte de la voiture qu’il venait de pousser dans le local, avec moi toujours accrochée après. Comme il semblait n’avoir aucune difficulté à bouger ainsi, je décidais de rester comme ça. Il finit par en rire.

  • Tu ne comptes plus descendre de là ?
  • Non…je suis bien là, répondis-je en lui plantant un baiser sur l’épaule.
  • Heureusement, tu pèses autant qu’un écureuil…, plaisanta-t-il, en sortant des outils de son coffre.

Je me sentais bien ainsi, ballotée par ses mouvements. Mon attitude devait paraître bien puérile mais je m’en fichais. Jake, lui, m’avait toujours acceptée telle que j’étais. Faisant comme si je n’étais pas là, il referma tout l’atelier, rangea quelques affaires et éteignit la lampe de fortune qu’il avait fabriquée pour le garage. Nous nous retrouvâmes dehors, faiblement éclairés par la lune, et Jake se dirigea vers la maison d’un pas assuré. Une fois sur le perron, il me força à descendre.

  • Tu n’as rien à prendre ici avant que je te ramène ?
  • Quoi ? couinais-je. Je ne dors pas avec toi ?
  • Bella, soupira doucement Jake, Charlie va finir par gueuler si tu restes ici.
  • Je m’en fiche ! Je l’ai prévenu …je reste ici ! déclarais-je brusquement.
  • Quoi ?! Mais tu es folle ! Tu ne peux pas rester …ce n’est pas bien pour toi…
  • Pourquoi ? !
  • Mais ! Il n’y a pas tout le confort dont tu as besoin ! Et puis…et puis, tu vas bientôt reprendre les cours…
  • Non !
  • Quoi ? ! s’écria-t-il, le visage soudain décomposé.
  • J’ai dit non ! Je reste ici, avec toi !
  • Mais Bella …
  • Il n’y a pas à discuter ! Je reste ici…, affirmais-je, consciente que ma décision me rapprochait clairement de la rustaude que je refusais pourtant d’être avant.

Les mains sur les hanches, je le vis digérer la nouvelle difficilement.

  • Bella … je t’ai toujours soutenue mais là, c’est non ! Tu vas aller à l’école et continuer tes études ! insista-t-il durement.

Je n’en revenais pas, il avait haussé le ton ! La colère monta en moi et je me rapprochais de lui en fulminant.

  • Tu vas m’emmener chez Charlie et m’attendre pendant que je prends des affaires…ensuite, tu me ramènes ici ! ordonnais-je.

J’avais la sensation qu’une autre Bella venait de parler à ma place mais j’étais totalement d’accord avec elle. Jake semblait halluciner pendant quelques secondes puis il secoua la tête en s’écriant :

  • Non mais tu me fais quoi là ? Tu perds les pédales ! Hors de question que je me mette Charlie à dos ! déclara-t-il en se dirigeant vers sa voiture.
  • Jake ! … Jake ! Hurlais-je à nouveau. Je reste là ! Tu ne m’y emmèneras pas de force !

J’entendis vaguement le fauteuil de Billy rouler sur le perron pendant que je courrais vers Jacob qui ouvrait déjà la voiture.

  • Ton père m’a dit que je pouvais rester ici ! criais-je, balançant ma dernière carte.

Jacob claqua la porte et revint vers moi dans une attitude si menaçante que pendant une seconde, je ne le reconnus pas.

  • Je…refuse…que tu arrêtes l’école…tu m’entends ? me dit-il, les dents serrées, à quelques centimètres de moi.

Il tremblait tellement que je sentais qu’il pouvait exploser d’une seconde à l’autre. Notre image me frappa, comme si je nous voyais de loin et mon cœur se déchira. Nous ne pouvions pas continuer à nous disputer comme ça ! Je m’approchais de lui, les larmes aux yeux et tendis les bras. Il s’y glissa, le visage si triste que je m’en voulu énormément d’avoir provoqué sa colère.

  • Bella chérie, murmura-t-il après un petit moment, on va aller te chercher des affaires, tu vas quand même prendre une douche parce qu’ici, c’est trop rustre pour toi et ensuite, on verra….
  • C’est tout vu, répondit-je, en le berçant doucement, heureuse de l’avoir fait à nouveau capituler.

 

3 – Mon endurance a ses limites

 

Ma mâchoire allait se décrocher…je baillais toutes les cinq minutes et impossible de me concentrer tellement ma tête était remplie de brouillard. Et cette vis qui tombait pour la quatrième fois ! Est-ce que j’allais réussir à la mettre dans son trou ? Je commençais à désespérer de finir de remonter ce moteur…un nouveau bâillement me tirait la mâchoire, brûlant mes yeux. Les larmes de fatigue me brouillaient la vue et je me frottais du revers du bras pour tenter d’éclaircir mes idées. Le pire, c’était cette sensation des yeux qui entrent dans leur orbite, semblant me tirer la peau du visage jusqu’en bas…quand je fermais les paupières, la brûlure s’atténuait…et si je restais comme ça, l’apaisement était si profond que je sentais ma respiration devenir plus régulière…comme si une sorte de gravité m’attirait vers le bas pour que je dorme…c’était si reposant...mon corps était en train de me remercier pour cette brève mais délicieuse pause…

  • Salut Jacob !

Je sursautais violemment, constatant que j’avais dû m’assoupir quelques secondes. La vis tomba à nouveau à terre et je grognais.

  • Oh mon dieu Jake, tu as l’air…crevé, déclara Leah du bout des lèvres.
  • C’est une façon polie de me dire que j’ai une sale gueule ?
  • Ok tu as une sale gueule ! Riposta-t-elle en riant.
  • Je suis mort…, soupirais-je.

Je tentais de reprendre cette foutue vis mais elle ne voulait pas.

  • Tu veux en parler ?
  • Non, répondis-je, plus sèchement que je ne le voulais.

Leah soupira. Voilà, je l’avais ! Maintenant, restait plus qu’à essayer de la remettre à sa place.

  • Sam nous demande, tu n’as pas entendu son appel ?
  • Si…
  • Et ?

Enfin, j’y étais arrivé ! Il en restait trois maintenant….

  • Et allez-y sans moi, répondis-je enfin.
  • Quoi ? Mais Jake, tu es notre Alpha ! S’écria Leah. Tu ne peux pas nous laisser aller à ce conseil, seuls ?
  • Pourquoi ? Vous entendez toujours Sam non ?

C’était un truc complètement dingue mais très pratique. Il y avait deux Alpha, deux clans, mais Sam et moi pouvions toujours communiquer ensemble et curieusement, les membres de ma meute pouvaient toujours entendre les pensées de Sam si ce dernier le souhaitait. Pareil pour moi…c’était agréable de pouvoir restreindre son auditoire ou au contraire, de l’amplifier.

  • Mais Jacob…, me coupa Leah.
  • J’ai du boulot, dis à Sam que je viendrais le voir ce soir pour qu’il me briffe.
  • Ok…

Enfin, elle me laissa, non sans me jeter un regard chargé de reproche et d’inquiétude.

Je me fichais de ce qu’elle pouvait penser…il était hors de question que je me transforme ! Etaler mes pensées à la vue de tout le monde, qu’ils soient témoins de tout ce que je vivais avec Bella, supporter leurs railleries…non, c’était au-dessus de mes forces. J’étais au bout du rouleau, je me sentais complètement à plat et je n’étais pas d’humeur.

Justement, je la sentais approcher. Elle était chez moi depuis une semaine, elle était censée reprendre l’école dans cinq jours et nous n’en avions toujours pas reparlé ! Charlie m’appelait tous les jours, comptant sur moi pour la faire changer d’avis et ce n’était pas gagné ! Bella avait pris tout ce dont elle avait besoin chez lui, je n’avais rien pu faire, sauf me confondre en excuse devant son père qui n’avait pas tout compris à ce que Billy lui avait expliqué…il m’avait juste dit avant de partir : « Je sais que tu n’y peux rien, et elle a toujours été têtue alors maintenant… mais essaie de la résonner…je t’en prie »

Et je n’avais toujours pas eu le courage d’aborder le sujet avec elle…elle était si…différente. Sa détermination avait pris des proportions inquiétantes depuis cette fameuse nuit où elle s’était imprégnée. Elle, qui se moquait des filles mariées et déjà avec un gosse en sortant de l’école, ne quittait presque plus ma chambre, où elle dormait pour récupérer de la nuit…mis à part ça, elle m’attendait tout le temps ou venait s’asseoir près de moi dans le garage, ne me quittant pas d’une semelle et parfois, m’interrompait dans mon travail pour que je calme ses pulsions, exigeant plus de moi à chaque fois, comme si elle mourrait de faim…j’essayais pourtant de lui faire comprendre que j’étais débordé de boulot avec la voiture du vieux Will, mais la vrai raison est que j’étais complètement déboussolé…redoutant même parfois l’heure du coucher car j’avais l’impression de dormir avec une autre femme. Pendant un moment, je m’étais dit qu’il faudrait peut-être que je reste près d’elle la journée pour l’épuiser et que je puisse récupérer la nuit mais je craignais que ça ne lui suffise quand même pas et si ça durait vingt quatre heures non stop, là c’était sûr, je mourrais au bout de trois jours !

Ma fatigue n’était pas vraiment physique mais Bella m’empêchait de dormir toutes les nuits, pensant sûrement que j’étais increvable et je sentais que je m’épuisais moralement car j’étais passé de « tout seul » à Bella tous les jours, toutes les heures, toutes les secondes…une overdose qui allait jusqu’à l’étouffement.

Une petite voix au fond de moi (que j’essayais de taire de toutes mes forces) me murmurait que je regrettais le temps d’avant…j’avais tellement espéré qu’elle soit à moi … Pourtant, je savourais vraiment chaque instant avec elle, je l’avais tant désirée et je l’aimais tant que mon cœur cessait de battre à chaque fois qu’elle me prenait dans ses bras. Je découvrais aussi des tas de choses dont je n’avais même pas idée sur les femmes. Faut dire que côté expérience, j’étais loin d’être au top. Bella semblait vachement plus avancée que moi dans ce domaine !

En plus de cette voix, j’avais une autre musique dans ma tête qui me rendait cinglé : c’était ses soupirs, ses gémissements, ses murmures…même quand je n’étais pas avec elle, j’avais l’impression que je ne quittais pas le lit. Alors, la petite voix venait à nouveau me marteler la tête, comme un petit diable qui me reprocherait d’avoir forcé le destin…je m’en voulais d’avoir ce genre de pensées, c’était horrible…pourtant, la fatigue me clouait, Bella était insatiable et moi…j’étais vidé.

  • Jacob ?
  • Oui ma chérie, je suis là.
  • Je …j’ai envie de faire une balade, de prendre l’air.

Je relevais la tête surpris. Elle n’avait pas eu ce genre de désir depuis une éternité !

  • Parfait ! Tu veux y aller seule ou tu veux que je t’accompagne ?
  • Ta voiture est plus importante ? demanda-t-elle sur un léger ton de reproche.
  • Non … Je viens avec toi, marmonnais-je.

Elle me sourit faiblement, ses yeux avaient toujours cette lueur un peu folle lorsqu’elle me regardait. Je fermais les miens, me disant que finalement, il aurait peut être fallu qu’elle parte avec lui…je regrettais aussitôt cette pensée mais elle m’en amena une autre, plus troublante. Bella ne parlait plus jamais d’Edward … comme si il n’avait jamais existé ! J’aurai du être content et pourtant, ça me rendait dingue ! Ça me rappelait trop que la Bella qui vivait chez moi n’avait plus rien à voir avec celle que j’avais tant désiré.

J’avais envie de la secouer et de lui crier de reprendre ses esprits.

Elle me prit la main et je sus que je ne pouvais pas lui résister. Ça aussi c’était frustrant ! J’avais l’impression qu’elle était mon Alpha ! Ses gestes, ses désirs, j’obéissais à tout ce qu’elle voulait de moi sans pouvoir combattre. Ce truc commençait à sérieusement me chauffer, même si j’étais très heureux d’être dépendant d’elle comme ça. C’était contradictoire et je pensais souvent à Sam dans ces moments là…lui aussi avait essayé de lutter.

Elle m’entraina dehors et l’éclat du soleil me brula les yeux. Ma tête me cognait…il fallait que je dorme !

  • Tu as vu, murmura-t-elle. Nous avons eu des belles journées cette année.

Même sa voix était différente ! Non, il fallait que ma Bella revienne…là, maintenant, j’avais une furieuse envie de retourner dans le passé, de la laisser tranquille, qu’elle ne sache jamais rien des sentiments que j’avais pour elle…

Elle serait peut être déjà en train de préparer sa valise pour Seattle ? Elle aurait une vie normale, entourée d’humains normaux…et elle serait peut-être toujours avec Edward…

Cette idée me laissa un goût amer…voilà à quoi ça nous menait de jouer à forcer les choses … Bella avait complètement perdu son identité. Si elle ne s’était pas imprégnée au départ, c’est qu’elle ne devait pas !

  • Jake ? s’inquiéta-t-elle.
  • Oui…oui, belle journée !

Nous marchions, main dans la main, elle avec le visage rayonnant, moi…moi, je me sentais tellement las… je me demandais si elle s’en rendait compte ou pas ?…pourtant, je le sentais aussi, j’avais changé…je n’avais plus envie de rire, j’étais limite dépressif là…et je devais avoir une tête à faire peur mais elle, elle continuait de sourire en levant son visage vers le ciel. En l’observant en coin, je me dis que non…elle ne s’en rendait pas compte. C’était grave ! Finalement, j’enviais mon père et Seth, et Embry ! Ah, bon sang ! Fallait que j’arrête d’avoir des idées pareilles …c’était quand même toujours Bella…je l’aimais, elle était à moi, corps et âme….enfin, surtout corps pour l’instant… et finalement, j’avais eu ce que je voulais. Une voix paternaliste bien familière résonna dans ma tête :

« Elle est heureuse…c’est tout ce qui compte… »

Ouais sangsue, à condition que ce bonheur soit bien réel !

Elle me faisait parfois l’effet d’une droguée et je me disais que le jour où les effets s’estomperaient, la chute serait peut être terrible.

Elle se dirigeait vers les bois, je me laissais faire, me donnant l’impression d’être tracté par un fil invisible…tout ça en trainant des pieds. Je baillais à nouveau et fermais les yeux…une nuit complète, mettre ma tête sur l’oreiller et dormir tout de suite ! Me réveiller et m’étirer sans craindre un violent assaut…voilà ce dont je rêvais. Je me rendis compte que je marchais les yeux fermés lorsque je sentis ma main être tirée vers le bas. Bella venait de s’asseoir et m’invitait à en faire autant. Je me plaçais derrière elle, contre l’arbre qu’elle avait choisi et elle s’installa entre mes jambes, contre mon torse, en soupirant de plaisir.

Lorsque la nuit tomba, je m’étonnais qu’elle n’ait pas encore enlevé sa robe. Et dire qu’avant je rêvais de la voir nue ! Cette pensée me rendit à nouveau morose. Elle me caressait le bras, je n’osais plus bouger, de peur de provoquer chez elle cette faim de moi complètement irrationnelle. Et si je cassais l’ambiance ? C’était peut être le moment…elle semblait détendue.

  • Lundi, tu veux que je t’amène à Seattle en voiture ou tu prends le bus ?

Aïe…elle se retourna brusquement, le visage apeuré puis ses yeux se chargèrent de colère.

  • Jake, on en a déjà parlé. C’est non ! Je n’irai ni à Seattle, ni ailleurs. Je reste avec toi !

Je soupirais…mon cerveau bouillait, cherchant une issue à ce conflit. Elle se leva d’un bond et soudain, la panique m’envahit. Qu’est-ce que j’avais encore fait ? !

Mais non…elle ne se jetait pas sur moi…ma respiration reprit son cours normal. Elle fixait l’horizon, calmée et pensive. Je n’osais pas l’interrompre, redoutant un assaut.

  • Il faudrait que nous ayons notre maison à nous, déclara-t-elle brusquement.
  • Quoi ?!

Alors celle-là, je ne l’avais pas vue venir !

Mais, en y pensant, elle n’avait pas tout à fait tord…avec tout ça, Billy avait fini par accepter la proposition de Sue et était parti s’installer « provisoirement » chez elle avec Leah et Seth. Sue vivait avec Charlie. Tout ce bazar parce que Bella était très …active. Et que mon père avait eu la très grosse impression de gêner. Avoir une maison à moi (enfin à nous) serait quand même plus correct. Paul avait bien construit une maison pour ma sœur ! Je devais pouvoir en être capable…sauf que …

  • Mais Bella…avec quel argent ? M’interrogeais-je, réfléchissant brièvement aux solutions que j’avais.
  • J’ai des économies, répondit-elle, toujours en fixant l’horizon de son air trop sérieux.

Ah oui, c’était vrai…elle s’en était même servi pour réparer les bécanes… ah bon sang ! Elle ne comptait vraiment pas continuer ses études…Charlie allait me tuer !

  • On pourrait la construire près de la maison de ton père ? proposa-t-elle dans un grand sourire.
  • Euh…ouais…

Où était ma Bella ? J’allais devenir fou si elle continuait comme ça….

  • Faudrait peut-être que je travaille ? Annonçais-je soudain, voyant en ça une échappatoire à mon quotidien infernal.
  • Oui…

Cette idée l’ennuyait, je le voyais déjà au pli que sa bouche venait de former.

  • Ton idée d’éleveur me plait bien, déclara-t-elle dans un léger sourire.

Tu m’étonnes !!!Pensais-je. Comme ça, je resterai à la maison, hors de question !

  • Euh, je pensais…ouvrir mon garage, annonçais-je sans même réfléchir.

Au fond, c’était ce que je savais faire le mieux, réparer des bagnoles. Et pour bien faire, il faudrait qu’il soit à Forks…loin de la réserve !

  • Un garage ? Oui…tu es doué, c’est vrai, murmura-t-elle. Et on a déjà le local, ajouta-t-elle, optimiste.

Oh non…ma tête s’affaissa…elle ne me lâcherait pas. En même temps, je réalisais qu’elle pensait enfin à « autre chose ». Ça faisait même presque une demi-heure qu’elle semblait s’accrocher à ce « projet »…il ne fallait pas que je casse cette infime chance qu’elle retrouve le chemin de la normalité. J’entendis à nouveau le cri de Sam. Qu’est-ce qu’il voulait bon sang ! J’avais dit ce soir…Pour une fois que Bella restait près de moi sans trop bouger…je devais pourtant y aller et comme je ne voulais pas muter, il allait me falloir du temps avant d’atteindre la clairière. Je me levais et Bella me regarda avec son air habituel de fille paniquée.

  • Désolée ma chérie mais je dois vraiment te laisser…, m’excusais-je.
  • C’est Sam qu’on vient d’entendre ?
  • Oui…je ne savais pas que tu l’avais entendu…
  • Je me sens plus connectée à la meute maintenant, affirma-t-elle.

L’appel de Sam passait d’habitude inaperçu aux oreilles des humains…j’étais franchement étonné. Il faudrait que je parle de ça avec Emily ou ma sœur.

Je l’embrassais puis la quittais, encore surpris que, pour une fois, Bella soit restée calme.

 

4 – J’oublie souvent que je ne suis pas seul

A mon arrivée, je vis le loup noir qui m’attendait patiemment. Lorsqu’il comprit que je ne muterais pas, Sam reprit forme humaine.

  • Jacob…tu comptes jouer les imbéciles comme ça encore longtemps ?
  • Qu’est-ce qu’il y a d’aussi urgent ? demandais-je, ignorant sa remarque.

Je n’avais aucune envie de discuter de ça avec lui.

  • ça fait deux fois, bientôt trois, que tu loupes un conseil…je me demandais pourquoi ?
  • C’est tout ? claquais-je, énervé qu’il m’ait fait venir jusqu’ici pour ça.

Qu’est-ce qu’il avait à toujours ameuter tout le monde ? Les vampires étaient partis de Forks, il n’y avait plus aucune raison de faire des réunions toutes les cinq minutes !

  • Jake …
  • Ecoute Sam, j’ai du boulot et Bella m’attend…

Je fis demi-tour, prêt à filer.

  • Jacob, nous pouvons t’aider…

Surpris par le ton qu’il venait de prendre, je stoppais le mouvement. Il continua :

  • Il suffirait que tu me fasses confiance. Que tu fasses confiance à tes frères…

Je compris par là « laisse-moi lire tes pensées, laisse-nous voir tout ce qui te fait tant honte, pourquoi tu ne veux plus muter »…j’eu soudain le sentiment qu’il connaissait ma situation plus que je ne le croyais. Je me retournais vers lui. Oui…mes frères pouvaient peut-être m’aider…

Je me déshabillais et me transformais, prenant cependant soin de fixer mes pensées sur Sam, dès fois que les autres ne soient pas loin. Me retrouver dans la peau de mon loup me fit un bien fou. Ainsi, je pourrais peut-être dormir et récupérer plus vite ? Sam se transforma également.

C’était quoi la prochaine étape ? demanda-t-il après un moment. Interdire à ta meute de muter ?

J’y ai pensé oui…

Il grogna car il comprit que je ne plaisantais pas…oui, s’il avait fallu, je n’aurai pas hésité à leur donner l’ordre de ne plus se transformer, déshonorant ainsi toute la lignée des Black.

Cette voiture est finie depuis longtemps, n’est-ce pas ?

C’était juste la batterie…, avouais-je.

Et tu l’as démontée entièrement puis remontée ? Rigola-t-il.

Ouais …

Tu voulais vraiment être occupé, hein ?

Ouais…

Il éclata de rire et je me joins à lui, un peu soulagé de partager mon honteux mensonge. Oui, c’était dur à avouer, mais je ne savais plus quoi faire pour échapper à Bella. Pourtant, je l’aimais tant. Cette pensée me provoqua un pincement au cœur. Oui, il était temps que je parle à quelqu’un…ou j’allais devenir fou.

Soudain, Jared, Paul, Embry et Quil s’approchèrent de nous à pas lent, redoutant ma colère de les voir ainsi nous encercler, mais leur expression était si amicale que je ne me sentis même pas fâché de l’embuscade qu’ils venaient de me tendre. Je hochais la tête, me sentant prêt à étaler devant mes frères toute ma gêne et mes angoisses. Sam nous invita à nous asseoir et quand il était comme ça, il était toujours mon Alpha. Surtout que je n’étais plus trop apte à endosser ce rôle depuis un petit temps…Je me concentrais et autorisais mentalement mes frères à écouter mes pensées. La connexion se fit, immédiate. Au bout d’une longue minute où je savais (rougissant si j’avais pu) que tout défilait dans leurs têtes, Jared s’esclaffa :

Ah oui je connais bien ça ! Tout le temps, partout, n’importe quand !

Tous éclatèrent de rire, d’un air entendu. 

Non mais…c’est une violente ! Elle te mord ?! s’écria Embry.

Non, non…c’est arrivé une fois…peut-être deux…, marmonnais-je.

Pourquoi ça ne m’étonne pas d’elle … répondit Paul.

Mais…

Ah ben, j’en connais un qui devait être content pour son lit tiens !Rigola Quil.

Hum, oui…je dois le retaper mais …

M’étonnes pas que le vieux ait foutu le camp ! Pouffa Jared.

Non mais il n’est pas parti à cause du lit …

M’étonnes pas non plus qu’elle te plaque comme ça, c’est une cinglée…, insista Paul.

Eh …

Ça c’est bien vrai ! Regarde la première fois où Jake l’a embrassée ! Rappela Quil.

Et sans parler de l’autre jour avec la blonde ! Continua Paul. Une vraie sauvage !  

Eh, mais…c’est de ma femme que tu parles là !

Oui, je te le dis, cette fille est violente…, répéta Embry. Rappelez-moi de ne JAMAIS m’imprégner !

Bon, ça suffit maintenant !Grondais-je.

Le rire d’Embry se coinça dans sa gorge et je m’en voulu aussitôt. J’avais utilisé ma voix d’Alpha sans m’en rendre compte ! Oui, si je le voulais, je pouvais tous les contrôler.

Dé…désolé Sam…c’est bon les gars…Sam, je suis désolé, m’excusais-je à nouveau.

C’est rien Jake…

J’ai vraiment besoin de repos…, murmurais-je.

Je laissais passer un peu de temps, histoire de calmer le jeu.

Et pourquoi aucun de vous n’en a jamais parlé ? Leur reprochais-je. Je n’ai rien vu de tout ça dans vos pensées !

Mais des images (que je pensais inédites) commençaient à affluer dans ma tête et je reconnus beaucoup de situations similaires aux miennes.

Tu étais sûrement trop occupé par tes propres fantasmes pour saisir les trois quarts des images que tu recevais de nous !rétorqua Paul.

Je lui jetais un regard mauvais.

Non, mais vieux ! Est-ce que tu te rends compte du calvaire que tu nous as fait subir avec ta Bella ??? Pour te donner une idée, maintenant que tu sais ce que c’est, lorsque nous mutions, les images de nos femmes à cette période là étaient éclipsées par les tiennes ! Continua-t-il.

Bah pour moi, c’était un peu un soulagement je dois dire, rigola Jared. Moi aussi j’étais crevé…et il m’a fallu deux jours de sommeil forcé pour récupérer !

Je ne me souvenais absolument pas de ça ! L’idée que mes frères aient pu vivre le même cauchemar que moi sans que je ne m’en rende compte me perturbait. Je devais vraiment être atteint à ce moment là …ou égoïste ?

Tu étais COMPLETEMENT atteint ! me répondit Paul, en écho à mes pensées.

Je réfléchis, essayant de me rappeler à quelle période Jared s’était imprégné et je me souvins que c’était à l’époque où je tentais d’arracher Bella à Edward par tous les moyens. Ensuite, je réfléchis pour Paul, et lui, c’était au moment où Bella était partie à l’autre bout du monde. Je venais d’apprendre que j’étais imprégné et je vivais des moments de souffrance atroces. Je m’étais forcé à occulter tout ça de ma tête pour justement, ne pas torturer mes frères. Je levais les yeux vers Sam, gêné par mon attitude égocentrique.  

Nos débuts ont été plutôt difficiles. Emily n'a pas connu cette période,m’expliqua Sam.

Kim était très demandeuse aussi, rassure toi, ajouta Jared. Mais c’est passé au bout de quinze jours.

Cette information me redonna espoir.

Et après ?M’enquis-je.

Parce qu’après tout, j’étais crevé mais je ne voulais quand même pas une nonne à la maison !

Elle était toujours enthousiaste mais elle avait récupéré l’usage de la parole puis toute sa tête,rigola-t-il.

En le regardant, j’espérai que je serai comme lui dans quelques temps, à rire de cette passe de folie. Je tournais mes yeux vers Paul.

Tu es sur que tu veux qu’on parle de ta sœur, demanda-t-il sérieusement.

Oui…

Et bien, elle a un caractère très doux et timide, trop peut-être…donc elle avait tellement honte de ce qu’elle ressentait pour moi qu’elle n’osait pas me demander mais heureusement, parfois je le voyais,déclara-t-il en riant doucement, contrairement à vous, moi j’ai bien vécu cette période ! Mais, pareil, sa folie s’est modérée…trop vite à mon goût.

Et Claire ne ressent pas tout ça ! ajouta Quil comme pour nous rassurer, ce qui nous fit tous éclater de rire.

Je constatais que je ne m’étais pas senti aussi détendu depuis longtemps. Rire me faisait beaucoup de bien. Je me sentais aussi comme libéré d’un poids.

Ça va passer Jake…tu devrais en profiter plutôt que de lui résister, me rassura Sam.

Je suis mort…Bella a un caractère volontaire et …elle a toujours été un peu barge alors avec ça…

Au moins, tu le reconnais ! Riposta Paul.

Jacob, je t’assure que ça va lui passer. Tu verras que tu regretteras ces moments !répondit Jared.

Non, je ne crois pas…je ne la reconnais plus, avouais-je, tristement.

Oui, ça c’est le souci de l’imprégnation à retardement, se moqua gentiment Quil.

Ils devaient tous avoir vraiment pitié de moi pour être aussi sympas….

Nous n’avons pas eu ce souci car nous ne les connaissions pas « avant », ajouta Sam plus sérieusement. Mais Bella va redevenir « normale », rassure-toi.

Ouais…je ne ferai rien comme tout le monde si je comprends bien, soupirais-je.

Ouais, vous êtes vraiment un drôle de couple !ajouta Jared.

Je voulais te parler de quelque chose mais je crois que le plus important, pour l’instant, est de te récupérer, déclara Sam. Je te propose une chose : reste-là, le temps que tu voudras et dors ! Tu avais raison, ton loup t’aidera à récupérer plus vite…

Ah bon sang…l’idée était si tentante…

Mais Bella ?M’inquiétais-je.

Je n’étais pas sûr de pouvoir supporter une plus ou moins longue séparation, même si j’en avais besoin.

Je croyais que tu avais appris à te séparer d’elle ? Intervint Embry.

Ouais, tu es même le seul que ça ne dérange pas,bougonna Quil.

Oui…mais depuis une semaine, je ne l’ai plus quittée…je ne sais pas…

Trop tentant…je ne pouvais pas laisser passer cette occasion ! Tant pis…Dormir, ne plus rien entendre…dormir des heures…après ça irait mieux, j’étais même sûr que je la supporterais mieux ! Mais l’image de Bella s’imposa à moi, en colère, en larmes…je l’imaginais déjà comme le jour où j’avais muté pour la première fois et que je l’avais fuie…elle allait perdre les pédales !

Je vais m’occuper de Bella et l’amener chez nous, proposa Sam.Emily pourra discuter avec elle.

Je pesais le pour et le contre : j'avais promis à Bella que je ne la ferai jamais souffrir. Or, je m'apprêtais à le faire car, (j’étais bien placé pour le savoir) Bella allait souffrir « physiquement » de mon absence. Mais d'un autre côté, si je ne récupérais pas, j'allais devenir irritable, mauvais et ensuite ? Allais-je finir par me mettre un jour en colère ? Allais-je finir par lui faire du mal, comme Sam avec Emily ?

C’est justement ce que je voudrais éviter, répondit Sam.

Et si elle résiste ? M’inquiétais-je à nouveau.

Je viendrai te chercher, fais-moi confiance, m’assura Sam.

Cette fois, je ne combattais plus. Je me couchais, en boule, déjà prêt à savourer ce moment de détente. Mes frères le comprirent car je me retrouvais seul en un rien de temps. Avant de sombrer, je leur envoyais un message « Merci les gars…merci ».

Je captais juste la réponse de Paul :

T’inquiète, si elle résiste, je l’assomme !

Je grognais et ce fut le néant.

 

5 – Retenue

 

Plus qu’un bon coup de balai et je pourrai dire que cette maison venait de subir une véritable cure de jouvence. Je venais de passer ces dernières vingt quatre heures à laver les meubles, les fenêtres, les rideaux, à ranger la vaisselle qui trainait, les fringues et les outils que j’avais trouvé dans des endroits complètement insolites, bref…j’avais bien dépensé mon énergie et j’étais très fière de moi ! Cette boulimie d’activité m’aidait progressivement à sortir de mon petit nuage merveilleux dans lequel je me sentais si bien. En fait, mes idées étaient plus claires depuis hier. Je regrettais d’être sortie de mon monde mais je savais que c’était justement ça qui avait fait fuir Jacob.

Ma première nuit sans lui, passée chez Paul et Rachel, avait été une véritable épreuve.

Je les revoyais encore entrer dans la cuisine, ces cinq gaillards torse nus. Sam s’était approcher calmement en m’expliquant que Jake avait du s’absenter et qu’il fallait que je vienne chez lui. J’avais bien sûr refusé, préférant l’attendre ici plutôt que dans un endroit où il ne me trouverait pas tout de suite s’il revenait…étant encore dans mon état de dépendance intense, je n’avais pas tout compris…Sam avait insisté et je m’étais mise à leur crier dessus de déguerpir, que je m’en sortirais bien toute seule ! Paul avait grogné et ça m’avait mise en colère. Comme lorsque j’avais perdu les pédales sur le parking du magasin, mon sang n’avait qu’un tour, d’une manière complètement incontrôlable ! Ma colère était si forte que je me sentais prête à tous les frapper et c’est ce que j’avais tenté de faire … mais je sentais encore les doigts de Paul lorsqu'il m'avait chopé le poignet en plein élan, évitant ainsi que ma main ne s'abatte sur Sam, le premier à ma portée.

  • Lâche-moi Paul…, lui avais-je ordonné, sifflante.
  • Regardez-moi ça cette furie ! Avait-il riposté lorsque j’avais réussi à me dégager et à filer derrière la table.
  • Paul, fais doucement…c’est la femme de ton frère, avait rappelé Sam.
  • Je le sais bien et je vais la calmer ! Toi, tu viens avec moi…, avait-il ajouté en me pointant du doigt.

En comprenant ses intentions, j’avais tenté de faire le tour de la table en faisant basculer une chaise pour lui échapper mais c’était sans compter sur son agilité. Il m’avait rattrapé en moins de deux et m’avait fait basculer sur son épaule, comme un paquet.

Je m’étais alors débattue de toutes mes forces et j’avais entendu Embry dire d’une voix alarmée :

  • Oh lala, moi je ne veux pas assister à ça…Jake va nous tuer !
  • Paul, elle vient chez nous, avait répété Sam.
  • Ne t’inquiète pas Sam…je ne vais pas lui faire de mal…c’est ma sœur maintenant, non ?

Une fois dans la forêt, j'avais tellement bougé qu'il m'avait jeté à terre, sans ménagement et dans un regard mauvais. Ensuite, je ne me souvenais plus de rien. Je m'étais retrouvé dans un lit, dans ses bras, à pleurer à chaudes larmes et ceci, pendant une bonne partie de la nuit. J’avais senti aussi Rachel me caresser les cheveux, me murmurant que Jacob allait revenir. Puis, elle nous avait laissé et Paul était resté près de moi…j’avais alors découvert en lui une autre facette de sa personnalité. Plus tranquille, plus fraternelle, presque douce…il avait ainsi apaisé ma colère qu’il avait provoqué. Il avait eu raison d’insister : il m’avait calmée.

 

A l’aube,  j’en étais ressortie vidée tellement j’avais pleuré et la journée avait été moins difficile et puis surtout, Rachel m’avait bien occupée ! Me forçant à faire de la poterie ou à apprendre à coudre…tout des trucs que je n’avais jamais fait de ma vie et qui devaient m’aider à me concentrer sur autre chose. Après ça, était venue la bonne explication de Sam, puis de Paul pendant la nuit suivante…ils m’avaient donnée la véritable raison de la « retraite » de Jake, et je savais que je n’avais pas le choix ! La deuxième nuit, j’avais pleuré moins souvent mais la souffrance physique était toujours présente. Je dormais les bras autour de ma taille, bien serrés, afin d’avoir l’impression qu’il était là. Et c’était vrai…je sentais sa présence, au plus profond de moi…son amour m’enveloppait à chaque instant…j’avais même l’impression d’être près de lui dans cette forêt, une impression tellement nette que je me voyais marcher à ses côtés.

Paul était venu à plusieurs reprises, vérifier que tout allait bien. Les premières fois, il me posait la question puis les fois suivantes, je l’entendais juste entrer dans la chambre, me remettre ma couverture ou simplement écouter ma respiration, ou mon cœur ? Bref, il me surveillait de près, guettant la crise mais j’avais tenu bon…

Le matin du deuxième jour, j’avais alors demandé à Paul de me ramener chez Jacob, sûre que je supporterais mieux son absence là bas puisque tout dans cette maison me rappelait quelque chose de lui. Une fois seule dans la cuisine, j’avais commencé le ménage et je l’avais fait, toute la nuit et toute la matinée, sans fatigue. La journée touchait maintenant à sa fin et j’avais terminé. Il fallait que je me trouve une autre occupation !   

 

Soudain, mon regard fut attiré par une silhouette qui sortait du bois et qui avançait à grands pas vers la maison. Mon cœur battait si fort dans ma poitrine, tout mon corps l’avait tant réclamé mais je restais là, sur le perron, à le regarder marcher vers moi alors que je n’avais qu’une envie, c’était de courir vers lui. Mes mains tremblaient et pour ne pas qu’il voit mon état de manque, je les cachais derrière mon dos, tout en comptant chaque pas qu’il faisait et qui le rapprochait de moi. Lorsqu’il monta doucement les marches, sans me quitter des yeux, je retins mon souffle. Son visage m’avait tellement manqué. Il semblait si heureux de me voir. Je constatais alors que sans vraiment y penser, j’avais craint qu’il me jette. Je m’empourprais, heureuse et à la fois gênée de ce que j’allais pouvoir lui dire pour ne pas lui faire peur. Il me tendit la main et j’hésitais à lui prendre. Il vit mon hésitation et sauta une marche pour me prendre plus vite dans ses bras. A son contact, je respirais à nouveau de bonheur, inhalant son parfum et savourant la chaleur de sa peau. Je n’osais pourtant pas le serrer contre moi, le laissant m’envelopper avec patience. Je fermais les yeux et soupirais.

  • Oh ma Bella…, chuchota-t-il. Tu m’as manqué…

Je frissonnais malgré la chaleur qu’il m’apportait et il resserra plus fort son étreinte. Je sentis ses mains descendre le long de mon dos et chercher les miennes. Il les prit et plaça mes bras autour de sa taille. Alors, je le serrais fort contre mon corps, tellement heureuse de retrouver mon Jacob. Mais au bout de quelques minutes, je me dégageais en douceur et tentais de me donner une contenance en lissant mon tee-shirt qui était plein de poussière. J’avais réussi la première épreuve dictée par Kim ! Apprendre à ne plus le coller. Et cette pensée me fit sourire. Par contre, Jake me regardait en fronçant les sourcils.

  • Tu te sens bien ?
  • Oui ! Et toi ? répondis-je, tentant d’adopter une voix légère.
  • Oui…je …Sam t’a expliqué pourquoi j’ai du m’absenter ? s’inquiéta-t-il, les yeux plissés, redoutant peut-être une explosion de ma part.
  • Oui, oui…et tout va bien ! Ne t’inquiète pas…, le rassurais-je.

J’avais si peur de lui faire peur ! Je ne voulais plus qu’il me quitte à cause de mon attitude trop possessive. Je me mordis les lèvres (qui étaient si brûlantes). Jacob se pencha alors et me tendit les siennes, hésitant. Je me retenais, préférant le laisser faire afin de ne pas faire l’erreur d’être trop fougueuse (ça c’était encore un conseil de Kim !). Il me déposa un baiser, mon corps trembla si fort que je reculais.

  • Bella …, murmura Jacob, surpris.
  • Oui, pardon…je…tout va bien ! C’est seulement que …j’essaie de ne plus ressembler à une dingue et parfois, mon corps me trahit, plaisantais-je, en roulant les yeux vers le ciel.

Ma tentative de le faire rire eut l’effet inverse. Jake grimaça en baissant la tête, penaud.

  • Bella, non…je ne te prenais pas pour une dingue…j’ai compris que tu n’étais pas responsable…c’est seulement que j’avais besoin…
  • De repos, oui, je sais ! Et je m’excuse de t’avoir …épuisé, marmonnais-je, rouge de honte.

Il caressa mon visage, un trait soucieux barrait son front. Je lui souris, espérant que j’allais le rassurer sur mon état.

  • Laisse-moi le temps de me changer et je vais nous préparer à manger ! m’exclamais-je, sur un ton d’une normalité déconcertante.

Je m’étonnais moi-même de réussir à autant me maitriser. Il faut dire que j’avais eu le temps de réfléchir depuis ces trois jours de sevrage. Et j’avais été bien entourée ! Paul m’avait bien secouée : « fais en sorte qu’il ne sente pas agressé ! » m’avait-il répété.  Sam et Rachel m’avaient rassurée et Kim m’avait bien conseillée. Je le laissais donc là et me dirigeais vers la cuisine, d’un pas mal assuré mais avec détermination ! Jacob me rattrapa en moins de deux et m’enlaça par la taille.

  • Pardon Bella…pardon de t’avoir laissée au moment où tu avais le plus besoin de moi, chuchota-t-il à mon oreille. Je sais que tu as dû souffrir…

Je déglutis et ma gorge me brûla atrocement. Il ne fallait pas que je craque ! Sinon tout ce que j’avais réussi à faire jusque là allait être anéanti en un claquement de doigt. Je fixais le mur devant moi, me concentrant sur des clefs de voiture attachées à un clou pour refouler mes larmes. Ça fonctionna car je réussis à expirer correctement.

  • Tout va bien Jake, déclarais-je d’une voix assurée. Je suis contente que tu sois rentré.

Il me fit pivoter et ses yeux noirs plongèrent dans les miens, cherchant au plus profond de moi la vérité. Il sourit faiblement et je compris qu’il n’était pas dupe des salades que je lui servais depuis son retour. Alors, il se pencha et m’embrassa avec une telle ardeur que je dus m’accrocher à ses épaules pour ne pas tomber. Mon désir s’enflamma à nouveau et paniquée, j’essayais de me dégager pour me calmer mais il me serra plus fort et me souleva pour m’emporter vers son lit.

 

 

La tête sur son épaule, j’observais son visage si paisible sans oser bouger, de peur de le réveiller. Ses traits étaient plus reposés que depuis la dernière fois que je l’avais vu et je constatais, avec une certaine honte, que sa fatigue ne m’avait pas alertée. Etait-ce de l’égoïsme ? Pourtant, je ne l’étais pas, et encore moins quand il s’agissait de Jacob. Non, ce petit nuage dans lequel j’étais si bien, m’avait vraiment coupé de la réalité et je m’en voulais d’avoir terni mon soleil. Je ne me rappelais même plus la dernière fois que je l’avais vu rire ! Il soupira dans son sommeil et je me retins de lui caresser le visage. Cette nuit, il m’avait montré à quel point il m’aimait et je me sentais rassurée sur la façon dont nous allions aborder notre nouvelle vie.

Brusquement, il tourna son regard vers moi. Il me sourit alors avec une telle douceur que je me sentis fondre.

  • Tu ne dors pas ? Chuchota-t-il.

Je n’osais pas lui avouer que j’avais passé des heures à le contempler dormir, alors je répondis :

  • Je viens juste de me réveiller !

Une lueur traversa ses yeux…avait-il capté mon mensonge ?

  • Bella…je n’étais pas uniquement fatigué physiquement, déclara-t-il soudain d’une voix rauque. Je l’étais aussi moralement.

Surprise par cette soudaine révélation, je me redressais, m’appuyant sur un coude.

  • J’avais tellement l’habitude de vivre mon imprégnation seul que ça a été dur de t’avoir avec moi, tout le temps, murmura-t-il en rougissant légèrement. J’ai honte de moi et je te promets que tout va bien se passer maintenant…
  • Non, tu as eu raison de te sauver…j’étais insupportable ! Répondis-je, sincèrement.
  • Non, tu voulais juste rattraper le temps perdu…
  • Si, si je t’assure…, affirmais-je. Il fallait que je sois sevrer sinon j’aurai fini par avoir ta peau !  grondais-je.

Mon imitation de Billy quand il se fâchait le fit éclater de rire et je savourais ce bref instant avec bonheur.

Mais, cette nuit, je m’étais fait une promesse : plus jamais je ne le forcerai, je me contenterai d’attendre qu’il ait besoin de moi.  

Dans un effort surhumain, je me levais du lit, abandonnant mon bien-être.

  • Qu’est-ce que tu fais ? S’étonna Jake.
  • Nous allons manger chez Sam et Emily !
  • Ah …nous avons une vie sociale maintenant ? Se moqua-t-il doucement.
  • C'est mon anniversaire ! Rétorquais-je.
  • Je sais…, répondit-il sérieusement. Je croyais que tu n'aimais pas le fêter et encore moins faire des fêtes...je n’osais pas te le souhaiter…
  • Pourquoi ? Tu l’as toujours fait…
  • Oui mais celui-ci, enfin, je sais que tu ne voulais pas les avoir…tes dix neuf ans, précisa-t-il l’air grave.

C’était vrai…mais cette période de ma vie me semblait si lointaine …comme si elle faisait partie d’un autre monde ou d’une autre époque, comme si j’étais morte et ressuscitée dans une autre vie, dans un autre décor et que je n’étais plus la même. Car je le sentais, j’avais vraiment changé. Mes priorités avaient changé, ma façon de voir les choses aussi, mes objectifs et mes projets, je me sentais toujours aussi déterminée mais je ne savais pas trop à quoi…c’était un sentiment très étrange. J’étais sûre de ce que je voulais avec Jake, je l’aimais tellement, mais je sentais en moi quelque chose de plus grand sur lequel je n’arrivais pas à mettre un doigt.

Une envie de vivre !Entendis-je « crier » dans ma tête. En y pensant, je sentais une boule palpiter violemment dans mon corps, comme si ce dernier me remerciait de l’avoir épargné. Mais il y avait aussi autre chose … et puis, j’avais beau essayé de me rappeler pourquoi j’avais été autant déterminé à ne pas les fêter ces dix neuf ans, mes souvenirs étaient flous, comme englués dans du coton…et cette constatation m’ennuya un peu. Seule la voix de Carlisle résonnait souvent dans ma tête, comme le refrain d’une musique qui passe en boucle parce qu’on ne connaît pas les autres paroles :

 « Ton avenir est ailleurs Bella et il est bien plus grand que celui auquel tu aspirais. »

Si seulement j’avais eu la présence d’esprit d’approfondir cette conversation…je soupirais.

  • Je pense que toi et moi, nous avons besoin de voir du monde ! Déclarais-je. Et puis, j’ai envie de revoir Charlie, avouais-je.

Il m’attira contre lui et son baiser brulant m’arracha un soupir de plaisir.

  • Alors, puisque ça ne te dérange pas : bon anniversaire ma chérie !
  • Merci Jacob, répondis-je sincèrement. Vieillir ne me fait plus peur tu sais… maintenant que je suis avec toi.

Ça aussi maintenant j’en étais sûre ! Je ne m’étais pas fait une raison ou quoi, non…j’avais même presque « envie » de vieillir, « envie » d’évoluer et de voir quelle femme j’allais devenir. Le visage de Jacob s’éclaira d’un grand sourire.

 

6 – Troubles

 

Jake posa un sac sur la table de la cuisine et je l’entrouvris curieusement pour y découvrir un tee-shirt, un jeans, des chaussures et son portefeuille.

  • Où vas-tu ? m’enquis-je, un peu moins angoissée par la séparation que les autres fois constatais-je.
  • J’ai une course à faire à Forks, me répondit-il dans un petit sourire en coin.

Je n’insistais pas, comprenant qu’il souhaitait me faire une surprise maintenant que j’étais d’accord de fêter mon anniversaire. Il me prit dans ses bras et me déposa un baiser en murmurant :

  • Je suis content de te retrouver…tu m’as manqué tu sais.
  • Toi aussi, soufflais-je.
  • Moi je parle depuis plus longtemps que ces trois jours … j’ai l’impression d’avoir retrouvé ma Bella…Jared avait raison : tu as retrouvé la parole puis ton cerveau. C’est génial !

J’éclatais de rire devant la description que Jared avait faite de Kim. Pourtant, malgré ce que Jake disait, je ne me sentais pas encore complètement connectée à la réalité. Depuis ce matin, j’avais déjà eu deux petites crises de manque et j’avais réussi à me maitriser. Mais le baiser qu’était en train de me donner Jacob allait finir par me replonger dans cet état atonique et ça durerait jusqu’à ce qu’il me prenne à nouveau dans ses bras. Je me dégageais donc et il marmonna :

  • Oui, tu as raison…je vais y aller si je ne veux pas me mettre en retard.

Comme si j’avais besoin de voir ça maintenant, il se déshabilla et heureusement, muta aussitôt. J’en oubliais mon trouble et restais émerveillée devant son loup, que je ne me lasserais jamais de contempler. Il me fit un clin d’œil et je ris. Mais lorsqu’il descendit les marches du perron, je remarquais le sac encore sur la table.

  • Eh attends !

Il se retourna et leva ses gros yeux noirs au ciel en voyant le sac dans ma main. Je m’accroupis et l’accrochais à sa patte comme je pus. En faisant le nœud sur ses poils, je m’imaginais la tête qu’auraient mes amis du lycée s’ils me voyaient à côté de ce loup géant, en train d’attacher une poche de fringues pour qu’il puisse aller faire des courses. Cette idée me fit pouffer de rire et je vis à l’expression de Jacob qu’il riait aussi.

  • Allez file ! lâchais-je en lui mettant une tape sur l’arrière train.

Il déguerpit aussitôt et je restais une minute ainsi, à regarder l’endroit où il avait disparu dans les bois.

 

A mon grand soulagement, il revint vite et je me composais une bonne tête pour ne pas qu’il remarque à quel point il m’avait déjà manqué. Mais lorsqu’il ouvrit la porte, son air fâché m’alarma :

  • Qu’est-ce que tu as ? 
  • Rien, répondit-il tendu. Tu es prête ?
  • Oui…
  • Alors, allons-y !

Je le suivis, perturbée. Il s’installa au volant et je regardais son profil contrarié pendant qu’il manœuvrait la Golf pour la sortir du garage. Je remarquais alors l’Aston Martin qui n’avait pas bougé depuis …

  • Tu ne comptes pas t’en servir ?

Ma remarque l’étonna.

  • Euh…si…, marmonna-t-il. Tu veux qu’on la prenne aujourd’hui ?
  • Pourquoi pas ?

Pendant qu’il descendait de la voiture, je voyais que son air tendu avait complètement disparu…il semblait vraiment surpris et heureux par ma proposition ! Il m’ouvrit la porte de l’Aston, prit les clefs dans une boite accrochée au mur et alla s’installer au volant dans un grand sourire.

  • Jacob ?
  • Oui ? Répondit-il toujours souriant, tout en caressant le volant.
  • C’est la première fois que tu la sors depuis…qu’il te la offerte ?

Curieusement, j’avais à nouveau du mal à prononcer son nom mais ce n’était pas parce que c’était douloureux, c’était parce que je n’en avais pas envie…une drôle de sensation mais qui ne me perturbait pas plus que ça.

Jacob démarra la voiture en fermant les yeux et le bruit du moteur ronronna doucement, comme un jaguar pensais-je. Je ris de le voir prendre autant de plaisir à écouter le son que ce bolide produisait.

  • Oui…, chuchota-t-il. C’est la première fois …
  • Mais pourquoi ? demandais-je, stupéfaite.

Il ouvrit les yeux et les tourna vers moi.

  • Je ne savais pas si tu supporterais de voir quelque chose qu’il lui appartenait, avoua-t-il.

Je réfléchis, cherchant au plus profond de moi si cette idée m’ennuyait et en conclus que je m’en fichais complètement.

  • Je ne l’avais jamais vue sauf le jour du barbecue et elle était déjà devant chez toi ! Alors…
  • Ok…

Il appuya sur l’accélérateur et le moteur vrombit, puissant et assourdissant.

  • Ne t’inquiète pas…je sais…, murmura Jake.
  • Tu sais quoi ? M’étonnais-je.
  • Rien ! Répondit-il, rougissant, en tournant les yeux vers moi. Je me parlais…à moi-même…
  • D’accord…Alors ? M’impatientais-je, en riant.
  • Alors allons-y ! déclara-t-il dans un sourire éclatant, tout en passant la première vitesse.

La pauvre voiture fut un peu secouée lorsque Jake la fit traverser le champ qui menait jusqu’au chemin mais dès que les roues touchèrent l’asphalte, ce fut comme si elle se plaquait à la route et elle devint silencieuse. Jacob appuya sur l’accélérateur et mon corps fut collé contre le siège. J’éclatais de rire et Jake passa une vitesse avec un plaisir non contenu. Le bolide filait à toute vitesse à travers la forêt de Forks, je ne distinguais plus les arbres clairement mais j’avais confiance dans sa conduite et cette voiture semblait très solide. Tout comme lui, je savourais ce moment de puissance avec délice.

 

Mais, sa bonne humeur fut de courte durée. Au bout de quelques minutes, je remarquais qu’un trait soucieux barrait à nouveau son front. Je me retins de lui en demander la raison car nous venions d’entrer sur le chemin de terre qui nous menait chez Sam.

Jake gara l’Aston à côté du gros 4 x 4 de Paul et sortit de la voiture en claquant brutalement la portière. Je me dis qu’il pourrait quand même prendre plus soin d’une voiture de ce prix, aussi gratuite qu’elle pouvait l’être ! Encore plus énervé que tout à l’heure, il me prit par la main et nous nous dirigeâmes dans un silence pesant vers le jardin, derrière la maison, où j’entendais déjà les voix joyeuses des autres. Je vis alors Billy en pleine discussion avec Embry puis, Sam et Emily dans les bras l’un de l’autre, Sam posait sa main sur le petit ventre de sa belle et je souris devant leur bonheur. Paul avançait vers nous, une bière à la main lorsque Jacob me lâcha et fonça droit sur lui pour lui assener un coup de poing d’une force phénoménale. Paul fut projeté à terre dans un craquement sourd et j’entendis Rachel hurler. J’avais moi aussi poussé un cri et courrais vers Jake, le prenant par les épaules.

  • Jacob ! mais qu’est-ce que tu as fait ? Criais-je, déboussolée par son attitude. Pourquoi l’as-tu frappé ?!
  • T’inquiète pas, lui, il sait pourquoi ! Rétorqua Jacob, d’une voix sourde.

Je vis Paul passer sa main sur son visage ensanglanté mais curieusement, son regard ne trahissait aucune colère. Il semblait même…coupable ? Je jetais un regard sur le reste de la meute que Jacob rejoignait et eux aussi semblaient gênés. Personne n’intervenait, Rachel pleurait et couru vers la maison, sûrement pour chercher de quoi nettoyer le sang. Je me penchais alors sur celui qui venait de se faire défoncer le nez.

  • Paul…
  • C’est bon Bella…va le rejoindre, murmura-t-il.

Son attitude me déroutait. Lui qui était d’habitude si impulsif …

  • Non, attends, je vais t’aider….
  • Bella ! Me cria Jacob. Laisse-le !
  • Non Jake ! Paul m’a beaucoup aidé !

Jacob se rapprocha, l’air toujours mauvais.

  • Je sais …et c’est pour ça que je ne le tue pas !
  • Comment peux-tu dire ça ? C’est ton frère ! S’écria Rachel qui revenait, bouleversée.

Je vis Jacob hésiter puis il répondit :

  • Je lui avais dit de ne pas toucher à Bella et il l’a assommée !

Ainsi s’expliquait mon trou de mémoire de l’autre jour… Je compris alors que Jake avait dû voir la façon dont s’étaient déroulées les choses lorsque les gars étaient venus me chercher. Mais ça n’avait aucune importance. Paul avait eu le courage de faire ce que les autres n’auraient jamais osé. En m’assommant, il savait qu’il s’exposait à la colère de Jacob. J’entendais encore Embry dire : « Oh lala, moi je ne veux pas assister à ça…Jake va nous tuer… » Mais, le résultat était là : j’étais redevenue presque moi-même.

Paul se prit le nez entre les mains et le craquement qui suivit m’écœura. Rachel se leva et fila droit sur son frère qui nous avait laissé. Les laissant régler leurs comptes, je m’accroupis :

  • Paul, je suis désolée…
  • Ne t’en fais pas pour ça, je guéris vite.
  • Mais, qu’est-ce qu’il se passe ?  
  • Jake a bien fait de me remettre les idées en place, c’est tout…, murmura-t-il.
  • Je ne comprends pas …ce n’était qu’un coup…

Il se racla la gorge et je compris qu’il pesait ses mots. Complètement inhabituel de sa part ! Mon inquiétude augmenta.

  • Je t’ai provoqué l’autre jour …lorsque nous sommes venus te chercher. On aurait pu faire ça en douceur mais je t’ai provoqué. Jake l’a vu…
  • Quelle importance ?
  • Toi et moi, on se ressemble beaucoup Bella, déclara-t-il en s’essuyant le visage.

Je ne voyais pas trop à quoi il faisait allusion mais il était vrai que depuis un certain temps, je me mettais facilement en colère et puis, je ressentais toujours cette étrange sensation de trop plein de vitamines. Alors, si on me prenait dans l’état actuel, oui Paul et moi avions un tempérament de feu. Nous nous étions rencontré dans la violence, notre relation était ainsi…

  • Avec l’imprégnation tu sais, renifla-t-il, on ne choisit pas….

J’étais assez d’accord sur ce point puisque je m’étais moi-même posé la question plusieurs fois à ce sujet avant, mais à présent, j’étais heureuse d’être touchée par cette magie, même si elle comprenait quelques aspects désagréables…

Mais quel rapport avec tout ça ? Je croisais le regard vert de Paul (je n’avais jamais remarqué jusque là la couleur particulière de ses yeux, vert pistache) et j’y lu quelque chose qui me bouleversa. Paul ne parlait pas en général, ni de moi, ni de Jacob…il parlait de lui ! On ne choisit pas …Paul était lié à Rachel et il semblait le regretter. Il dut voir dans mes yeux le malaise qui venait de m’envahir car il continua :

  • J’ai vu dans sa tête comment tu étais…ton tempérament …, expliqua-t-il, la voix tendue. J’ai voulu voir un peu ce que ça faisait de te provoquer…de te toucher quand tu étais survoltée comme ça... Les images que j’ai reçues de Jacob m’ont un peu chamboulées je dois dire…
  • Paul…, murmurais-je, troublée, comprenant à quoi il faisait allusion.
  • Si cette imprégnation n’existait pas, tu me correspondrais plus je pense et Jake aurait du souci à se faire, déclara-t-il en hochant la tête, le regard perdu dans le vide.
  • Ne dis pas ça, soufflais-je, pendant qu’une bouffée de chaleur envahissait mon visage.

Je le sentais, j’étais incapable de me lever. Jamais, au grand jamais, je n’aurai cru que Paul puisse être attiré par moi et encore moins depuis qu’il s’était imprégné de Rachel ! Je constatais alors que cette magie n’était pas aussi puissante qu’elle le laissait paraître…Sam avait réussi à résister à Emily, Jake avait réussi à vivre loin de moi, Paul avait réussi à fantasmer sur une autre femme …

  • Bah, ne t’inquiète pas, Rachel me tient bien ! continua-il en souriant. Je regrette juste qu’elle ne se laisse pas plus aller parfois.  

Je tournais mon regard vers celle qui ne se doutait pas une seule seconde de ce qui était en train de se passer…remerciant secrètement Jacob d’avoir prétexté une histoire de coup pour justifier son geste. Voilà qui expliquait la gêne des autres membres de la meute. Tous avaient dû voir le trouble de Paul.

  • Je ne sais pas pourquoi, poursuivit-il, alors que je gardais toujours le silence, mais je rêve de toi toutes les nuits depuis un p’tit temps.
  • A cause de ce que tu as vu dans la tête de Jake ? réussis-je à demander d’une voix tremblante.
  • Non, rien à voir je pense…, répondit-il clairement.

J’hochais la tête, que je gardais baissée sur le sol, ne préférant pas imaginer la teneur de ses rêves. Mais Paul m’éclaira :

  • Tu marches toujours à côté de moi, on se balade, tu me parles, tu me dis de faire attention…c’est très bizarre.

Je levais les yeux vers lui, surprise.

  • Je ne sais pas comment tu fais mais ça me perturbe…
  • Je suis désolée, murmurais-je. Sincèrement …
  • Moi aussi je suis désolé.
  • Pourquoi ? M’étonnais-je.
  • De t’avoir assommée ! Déclara-t-il en riant. Je t’ai mis une claque derrière la tête…tu es tombée comme une mouche.
  • Oh…tu as bien fait ! J’étais insupportable !

Nous éclatâmes de rire, à la grande consternation de tout le monde. Jake croisa mon regard et je vis que sa colère avait disparu.

7 – Avenir

 

Paul se leva et rejoignit Rachel d’une manière assez détendue, étant donné les circonstances. Plus personne ne parla de cet incident pendant la journée, comme si tout était normal. Paul avait provoqué Jacob, celui-ci lui avait foutu une raclée et voilà … les choses reprenaient leurs cours…ou alors, était-ce parce que c’était mon anniversaire que tout le monde se forçait à paraître joyeux ? Cela étant, je laissais tomber, préférant éviter une discussion houleuse avec Jake sur ce léger problème. Car pour moi, il n’y avait pas vraiment lieu de s’inquiéter. Paul ne me toucherait jamais et je ne souhaitais rien d’autre que son amitié. Tout le monde savait ici que pour moi, il n’y avait que Jacob et qu’il n’y aurait plus que lui.

Jake ne me lâcha pas de la journée et j’appréciais son bras protecteur autour de mes épaules ou de ma taille. J’espérais qu’il en serait toujours ainsi à présent, qu’on ne se quitterait plus jamais. Mais, un pincement au cœur me ramena à la réalité. Je ne lui avais pas encore parlé de ma décision. D’ailleurs, la personne la plus concernée par ce projet était en train de garer sa voiture. Heureuse de le voir enfin après tout ce temps, je me levais d’un bond et courrais vers mon père. Il étouffa un cri lorsque je me jetais dans ses bras.

  • Oh doucement Bella !
  • Pardon papa…j’avais oublié tes côtes…
  • C’est rien, répondit-il en riant. Tu es …radieuse. Bon anniversaire ma chérie.
  • Merci ! Tu as retiré ton attelle ?
  • Oui enfin ! J’en pouvais plus de ce truc…

Il scruta mon visage attentivement, cherchant à savoir si j’étais heureuse ou non, puis me sourit en me prenant par les épaules, rassuré.

Nous nous dirigeâmes ainsi, enlacés, vers le groupe qui constituait maintenant toute ma famille.

  • Sue n’est pas là ? Remarquais-je.
  • Elle viendra plus tard…avec Seth. Leah ne quitte plus son pharmacien pour l’instant.

Je souris, comprenant parfaitement ce que Leah vivait en ce moment.

 

Emily apporta un immense gâteau, je n’en avais jamais vu un aussi énorme, même le jour du mariage de Sam ! J’éclatais de rire en voyant la tête gourmande de Quil à l’approche de la montagne de crème. Je soufflais mes dix neuf bougies dans un état d’esprit nouveau…ne manquant pas de me rappeler que j’avais failli ne jamais les avoir. Et je me dis que j’aurai sûrement cette pensée à chacun de mes anniversaires. Je jetais un œil vers Jake qui, à ma grande surprise, lisait en moi comme dans un livre à cet instant. Son sourire en disait long sur le bonheur qu’il ressentait à me voir fêter cet événement. Je pouvais même entendre ses pensées à cet instant : « J’ai gagné ! Je l’ai sauvée ».

Charlie aussi était heureux mais pas pour les mêmes raisons. Je compris qu’il était content de me retrouver « normale » et je savais qu’il aborderait le sujet qui fâche avant de partir. Je décidais donc de lui couper l’herbe sous le pied en tranchant mon gâteau.

  • Espérons que le restaurant universitaire me propose des plats aussi succulents que les tiens Emily ! Sinon, je vais être malheureuse toute la semaine…

Charlie et Jacob me firent des yeux ronds, Jacob en resta même la bouche ouverte pendant quelques secondes et je ris doucement de l’effet que je venais de produire sur eux.

  • Bah, on t’apportera des plats en douce, répondit Quil en me prenant la première assiette de gâteau des mains.
  • T’inquiète pas poulette, on ne te laissera pas mourir de faim, renchérit Jared dans un clin d’œil.
  • Tu auras un appart ou une chambre ? me demanda Kim.

Je jetais un regard vers Jacob qui semblait perdu dans ses pensées.

  • Une chambre, répondis-je. Je m’y suis prise trop tard pour un appart. Et puis, c’est moins grand à entretenir…

J’avais fait toutes les démarches en juin, je n’avais encore rien préparé pour la rentrée qui était le lendemain, mais je me dis qu’il serait encore temps après. J’avais prévu une chambre à l’époque car je ne comptais pas continuer mes études, ayant prévu un autre avenir…un appart incluait une caution et un engagement, une chambre non.

  • Quelles études entreprends-tu ? demanda Emily.

En juin, j’avais pris la filière dans laquelle je pensais être la moins mauvaise, ne comptant pas m’y rendre…maintenant, je n’avais plus le choix mais je me disais que j’arriverai bien à m’en sortir.

  • Biochimie, option génétique.

Les loups-garous et ce qui m’était arrivé cet été m’avait conforté dans ce choix. Je voulais en savoir plus sur leur métabolisme, pour mieux comprendre l’espèce à qui j’allais appartenir.

Charlie souriait d’un air satisfait en goûtant au gâteau et Jacob me fixait toujours, buvant mes paroles sans trop y croire.

  • Et en clair, ça veut dire quoi ? Marmonna Quil la bouche pleine.
  • Ça veut dire que je pourrais savoir comment tu fonctionnes, lui répondis-je dans un grand sourire.
  • Quoi ? Pouffa Embry. Tu aurais la patience de passer des heures dans un laboratoire, enfermée toute la journée ?
  • Bien sûr qu’elle pourrait ! Intervint mon père. Bella a une patience d’ange et elle est très douée dans cette matière !
  • N’exagère pas papa, je me débrouille …
  • Bella ? Patiente ? Rigola de bon cœur Jared. Ah ben je veux voir ça moi !
  • Jared…, coupa Jacob qui avait retrouvé ses esprits.

L’intéressé se tortilla brièvement sur sa chaise, craignant pendant une seconde de subir le même châtiment que Paul.  

  • Tu en as pour combien de temps ? s’intéressa à nouveau Kim.
  • Trois ans minimum, si tout va bien…après je peux me spécialiser et tirer encore deux ans.

Pour ça, fallait déjà que je supporte la première semaine !

  • Et elle sera à deux pas de mon école ! Déclara Rachel.
  • Oui…, soufflais-je dans un sourire.

C’est Rachel qui m’avait convaincue de continuer mes études, m’annonçant qu’elle avait elle-même changé d’université pour se rapprocher de Paul. Elle m’avait convaincue qu’à nous deux, nous supporterions plus facilement la séparation d’avec nos loups.

Je savais aussi que je retrouverai plein de connaissances de Forks à Seattle, comme Angela et Ben ou Mike…je finirai peut-être par trouver le temps moins long.

Je pris deux assiettes et allais m’installer sur les genoux de Jake qui me lança un regard satisfait. Je me forçais à lui sourire, espérant le convaincre que j’étais heureuse de ma décision.

 

Le repas terminé, Jacob me tendit la main pour faire une ballade, comme nous faisions toujours pendant ces moments-là, s’isolant afin de nous retrouver, même cinq minutes. Il laissa passer quelques mètres avant de déclarer :

  • Tu comptais me secouer demain en me disant « lève-toi Jake, on va être en retard ! » ?
  • Tu n’es pas content ? Murmurais-je, espérant vaguement que ça soit le cas. 
  • Si …bien sûr que si ! s’écria-t-il d’une voix heureuse. Pourquoi ce revirement ?
  • Parce que c’est ce que tu souhaites…, murmurais-je, prise d’une soudaine pulsion de vérité.

Jacob s’arrêta et me dévisagea pendant une longue minute, l’air soucieux.

  • Tu ne le fais même pas pour toi ?!
  • Moi, ce que je veux, c’est être près de toi, avouais-je d’une petite voix.
  • Bella …, soupira-t-il.
  • Mais j’irai à Seattle ! Je l’ai décidé et je m’y tiendrais ! ajoutais-je précipitamment, devant son impatience.
  • Mais comment veux-tu que ça marche si tu y vas avec les pieds de plomb ?!
  • Je n’irai pas avec les pieds de plomb…j’irai …point !

Il secoua la tête en soupirant à nouveau. Je regrettais d’avoir été franche avec lui. J’aurai dû me contenter de lui dire que je le faisais parce que c’était comme ça, parce que j’en avais envie. Est-ce que j’allais devoir toujours lui cacher mes motivations pour ne pas le décevoir ? Les larmes me montèrent aux yeux sans que je puisse les retenir. Jacob me passa le pouce sur la joue et murmura :

  • Je t’aime ma chérie…si tu ne veux pas aller à l’université, ce n’est pas si grave. Je regretterai juste que tu sois passée à côté de ça à cause de moi…
  • Com…ment ça ? Bégayais-je.  Tu…Tu n’y es pour …rien.
  • Oh si…c’est tout ça …, dit-il en secouant la tête. Cette satanée…
  • Mais Jake…, le coupais-je, ne voulant pas l’entendre dire la suite de sa pensée, je suis heureuse maintenant ! J’ai reçu le plus beau cadeau qui soit…je t’ai toi !
  • Tu parles, marmonna-t-il.
  • Oh non…

Cette fois, les larmes coulèrent à flot. Jake me prit dans ses bras, me serrant très fort.

  • Tu regrettes hein ? demandais-je, la voix brisée. Tu regrettes…comme Paul…
  • Quoi ?

Il me dégagea de lui et me dévisagea durement. Les mains sur mes épaules, il me secoua doucement en s’écriant :

  • Ne redis jamais ça, tu m’entends ? Et je me fiche de ce que pense Paul ! Et le concernant, je préfère qu’on en parle une autre fois, tu vois ! J’ai déjà gâché ton anniversaire avec lui tout à l’heure…

Il inspira, fit une pause puis continua, plus calme :

  • Je t’aimais avant tout ça, je t’aimerai toute ma vie !
  • Mais tu regrettes, je le sens Jake…, couinais-je. Tu me fuis, tu es déçu…
  • Non !
  • Si, tu l’es ! m’écriais-je.
  • Non, je ne suis pas déçu, sûrement pas ! Tu te sors ça de la tête ! Tu m’entends ?  déclara-t-il d’une voix sourde. Et je ne te fuis pas ! Je resterai toujours là maintenant, même si je suis mort de fatigue, murmura-t-il dans un demi-sourire qui détendit brièvement la dureté de son visage. J’étais bouleversé…et je m’excuse encore de ne pas avoir assuré…
  • Qu’est-ce que tu racontes ? marmonnais-je.
  • Tu n’étais plus celle que j’ai connue, avoua-t-il. Celle qui me résistait, celle qui se révoltait dès que je la touchais…j’ai eu du mal à te voir autrement...et si j’ai fuis, c’était pour me remettre en question…et pour me reposer aussi, ajouta-t-il.

Un beau sourire fendit son visage et je le vis rougir. Quand il était comme ça, je me sentais quitter cette terre et remonter dans mon nuage, éclairé par mon soleil.

  • Et si tu veux la vérité, continua-t-il, l’air plus sérieux, la seule chose que je regrette c’est que cette imprégnation te fasse autant souffrir.
  • Je ne souffre pas…
  • Si, tu as déjà eu un aperçu et tu vas encore souffrir. Quand tu seras à Seattle, tu vas avoir du mal Bella…et ça va me rendre dingue, je le sens. Je serai même capable de te faire arrêter moi-même les études si je vois que tu souffres trop !
  • Je tiendrais le coup…pour toi, murmurais-je.
  • Arrête de dire ça …
  • Pourtant, c’est ce que je pense, déclarais-je durement. 

Il posa sa tête sur mon front en fermant les yeux…

  • Moi aussi je vais avoir dur, chuchota-t-il.

Alors, il me lâcha une épaule et je le senti fouiller dans sa poche de pantalon. Je me dégageais pour regarder ce qu’il faisait pendant qu’il me prenait la main gauche d’un geste tremblant. A ma grande stupeur, je vis ses doigts frémissants me glisser une bague à mon annulaire. Le bijou était composé de deux anneaux, un en or, l’autre d’éclats de diamants. Les deux anneaux emprisonnaient une rangée d’ambre qui s’illumina avec la lumière.

  • Jake…, soufflais-je. Mais …
  • Je ne te fais pas tout le tralala parce que je sais que tu es contre le mariage, déclara-t-il d’une voix tremblante, tout en fixant la bague à mon doigt, mais je te vois comme ma femme maintenant et je veux que tu le saches.

La gorge serrée, le cœur au bord de l’explosion, j’étais incapable de parler. Je fixais les petites pierres incrustées dans ma bague, réalisant que Jacob avait tout faux ! Je n’étais pas du tout contre le mariage…je VOULAIS me marier et avec lui ! Je l’aurais même fait tout de suite si le vieux Quil avait été là pour nous unir… Jake s’agita un peu et je compris qu’il prenait mon silence pour de l’embarras face à cette demande qui n’en était pas une. Je levais les yeux vers lui, rouge de plaisir et me jetais à son cou brusquement.

  • Oui ! Lui chuchotais-je à l’oreille, ivre de joie. Oui, je veux t’épouser Jacob Black…

 

8 – Séparation

 

Sue était enfin arrivée avec Seth et je fus impressionnée par les changements physiques du garçon. Seth avait clairement grandit, il dépassait Sue d’une bonne tête et ses muscles s’étaient considérablement développés, rattrapant un peu la carrure de Jacob au début de sa transformation. Ainsi, ces deux là commençaient à se ressembler si fortement que plus personne ne pouvait ignorer qu’ils soient frères. Pendant que je le détaillais, Seth s’approcha de moi avec un grand sourire aux lèvres et je dus lever la tête pour accueillir son baiser sur ma joue.

  • Salut Bella ! Désolé pour le retard…
  • C’est rien, le principal est que tu sois là…enfin, que vous soyez là, ajoutais-je dans un sourire confus.

Seth comprit tout de suite que ma gaffe n’avait rien de bien méchant, je comptais bien apprendre à apprécier Sue et même Leah, j’avais accepté le choix de mon père.

  • Je t’ai apporté un petit cadeau, m’annonça-t-il d’une voix chaleureuse.
  • Oh ! Merci !

Je pris le paquet qu’il me tendait et l’ouvrit fébrilement pendant que Sue passa à côté de moi en me lançant un « bonjour Bella » poli. Je découvris alors un objet en bois que je tournais dans mes mains sans vraiment comprendre ce que c’était. Seth gloussa et je lui souris, gênée.

  • C’est un promontoire…pour le totem de votre premier enfant.
  • Oh …

Le sang me monta aux joues et mon cœur s’emballa.

  • Ouais je sais, c’est un peu tôt mais la petite branche était facile à travailler et je n’avais pas la patience d’attendre votre mariage alors comme je n’avais rien pour ton anniversaire … 

Je levais les yeux vers lui, surprise qu’il énonce notre mariage alors que Jake venait à peine de m’en parler…et encore ! Il ne comptait pas m’en faire la demande au départ…

  • Qu’est-ce qu’il y a ?
  • Rien…c’est seulement que…comment sais-tu que Jacob et moi allons nous marier ? Nous n’en avons encore parlé à personne…
  • Bah je mute souvent en même temps que lui, répondit-il, gêné, je le sens quand il se transforme…et…enfin, tu sais bien qu’on communique entre nous…je l’ai vu t’acheter la bague ce matin, finit-il dans un très grand sourire.

Son visage si heureux me fit sourire à mon tour et je l’attirais contre moi en lui chuchotant à l’oreille :

  • Merci Seth ! Je t’aime très fort tu sais…
  • Bon anniversaire Bella ! Répondit-il en riant, me serrant dans ses bras trop grands.

Le restant de cette journée se passa dans le calme et la bonne humeur pour tout le monde. Seul Sam semblait un peu tendu et perdu dans ses pensées. Ma tête à moi bouillait avec intensité. J’avais eu ma part d’émotion entre la déclaration de Paul, la mienne concernant mes études et celle de Jake… ajouté à ça, le cadeau de Seth et la joie immense de mon père qui n’avait pas arrêté de me dire qu’il était fier de moi (faisant bien sûr allusion à ma décision pour l’université car je ne voulais pas lui donner des cheveux blancs avec celle que Jake et moi venions de prendre), et mon angoisse quand à la journée du lendemain…je me sentais très nerveuse mais impatiente, anxieuse mais excitée…tout était contradictoire et c’était pour ça que ma tête me serrait, tentant de contrôler ce flot de sentiments sans que personne ne remarque mon trouble.

 

Jake était aux anges. Pendant toute la soirée, je l’avais observé et ses yeux brillants en disaient long sur le bonheur immense qu’il ressentait à cet instant. Pendant une fraction de seconde, je revis l’adolescent que j’avais connu en arrivant à Forks…il avait tellement changé ! Nous avions fait tellement de chemin depuis, que j’avais l’impression encore une fois que c’était une autre vie alors que ça datait d’une année ! Ma réflexion m’amena à penser avec un certain amusement que Jacob n’était même pas encore majeur ! C’était difficile à croire en le regardant tel qu’il était aujourd’hui mais le fait était que nous devions attendre pour nous marier…j’avais trituré mon anneau fébrilement pendant toute la soirée, ce qu’avais évidemment remarqué les filles de la meute. Côté garçon, seuls Sam et (évidemment) Paul avaient vu le bijou à mon doigt. Mais personne n’avait fait d’allusion ouverte, comprenant sûrement que nous souhaitions en parler formellement à Charlie d’abord.

 

Nous étions ensuite rentrés à la maison rouge. J’avais informé Billy avant de partir qu’il pouvait revenir maintenant que je quittais la maison, ce qu’il l’avait fait beaucoup rire. Je n’avais pas compris les raisons de son hilarité mais au moins, j’avais eu le courage de lui dire moi-même que le « danger » était écarté.

Jacob et moi avions passé une bonne partie de la nuit à faire l’amour, savourant les dernières minutes que nous pouvions passer ensemble avant le week-end suivant, puis j’avais sombré dans un sommeil peuplé d’arbres et d’oiseaux, jusqu’à ce que le vent fasse craquer la maison et me fasse sursauter.

 

Cela faisait donc maintenant un bon quart d’heure que, perdue dans mes pensées, j’essayais de m’arracher au lit où l’être que j’aimais le plus au monde dormait paisiblement. Je passais ma main sur ses épaules, faisant glisser mes doigts sur le contour de ses muscles jusqu’au creux de son dos. Résistant à continuer mon chemin, je remontais sur ses bras, m’amusant à faire le tour de chaque tendon comme si c’était un véritable paysage. Jake grogna un peu lorsque mon doigt parcouru sa nuque, un endroit sensible constatais-je…j’y déposais donc un baiser et il ouvrit les yeux difficilement. Il était si beau, couché sur le ventre, les yeux mi-clos, dans un état de total abandon, que mon cœur se serra en pensant que demain, à la même heure, je me retrouverai seule dans un lit, en face d’une parfaite inconnue qui me secouerait peut être parce que je serais en retard pour le cours de la journée…

  • Quelle heure il est ? Bougonna-t-il.
  • L’heure de se lever…
  • Hum…tout est prêt ?
  • Oui, j’ai fait mon sac pendant ton absence, affirmais-je.

Dans un effort surhumain, Jake se leva donc du lit et je le regardais s’habiller, gravant dans ma mémoire chaque partie de peau qu’il couvrait. Comme il allait me manquer ! Je soupirais et enfouis ma tête dans son oreiller. Il se retourna et posa sa main chaude sur mon épaule.

  • Bella…tu peux encore changer d’avis…
  • Ne me dis pas ça ! Grondais-je d’une voix étouffée par le coussin.
  • Alors lève-toi ! On va finir par être en retard…

Je relevais ma tête, mes cheveux couvrant une bonne partie de mon visage et il passa sa main dedans pour mieux me voir. Je lui tirais la langue et il sourit, amusé par mon image rebelle.

  • où est ton sac ?
  • Sous le lit…

Il le tira et fit des yeux ronds en découvrant des affaires à lui sur le dessus des miens.

  • C’est au cas où…, expliquais-je, confuse. Au cas où je fasse une crise et que je t’appelle en urgence …
  • Ah …

Il sembla réfléchir un moment puis se pinça les lèvres dans un demi-sourire.

  • Sage décision…, déclara-t-il en hochant la tête.

 

Nous avions convenu qu’on prendrait ma Chevrolet afin que j’aie une voiture sur place. Jake rentrerait « à pattes » jusqu’à Forks et reviendrait de la même façon le vendredi.

Mon cœur battait la chamade lorsqu’il gara ma voiture devant le bâtiment dans lequel j’allais m’enfermer pendant ces cinq longs jours…il coupa le moteur et nous restâmes ainsi en silence durant quelques minutes. Les élèves passaient autour de la voiture, certains très heureux d’être là…je regardais chaque visage sans les voir vraiment, me demandant avec qui je serai en cours cette année, espérant que ces études passent le plus vite possible et surtout, espérant que je tienne le coup aujourd’hui !

Jacob me passa un bras autour des épaules et m’attira contre lui. Je respirais à son contact, profitant une dernière fois de sa chaleur…Puis, avec une force dont je ne me sentais pourtant pas capable, je m’arrachais à lui et ouvrit la portière. L’air frais me saisit et je frissonnais, ne sachant pas trop si ces tremblements étaient dus au froid ou à la séparation qui se rapprochait de plus en plus.

J’entendis sa portière claquer et il fut à mes côtés en moins de deux, portant mon sac. Il le posa à terre et me prit dans ses bras, me collant doucement contre la voiture. Je l’enlaçais de toutes mes forces, la tête enfuit dans son tee-shirt.

  • On y sera vite, murmura-t-il. Et puis, tu le sais…je peux être là en un quart d’heure.
  • Oui…je sais…
  • Tu veux que je reste là aujourd’hui ? Dans les parages ?
  • Non…c’est reculer pour mieux sauter…ça ira…
  • Comme tu veux …

Il se dégagea doucement et se pencha pour attraper ma valise.

  • Allez, je vais porter ton sac jusqu’à ta chambre.
  • Non ! Non…pars s’il te plait…, demandais-je avec précipitation.
  • Tu es sûre ?
  • Oui, pars vite…plus tu resteras, plus j’aurai dur…

Ma gorge me brulait, mes tempes me serraient, mon cœur battait si fort que j’avais l’impression d’être sourde. Jacob prit une profonde inspiration, comme s’il sentait déjà tout ce qu’il se passait dans mon corps.

  • Très bien…, murmura-t-il.

Il se détacha de moi, évitant un dernier baiser. Nous nous dévisageâmes pendant une longue minute, gravant chacun dans notre tête les traits de l’autre puis nos doigts se démêlèrent. Il partit à reculons à travers les élèves qui semblaient si petits à côté de lui et finit par se retourner pour courir vers je ne sais où, là où il pourrait muter et galoper vers Forks.

La déchirure me traversa le ventre et je m’enlaçais brusquement afin d’atténuer la douleur. Un spasme me secoua et les larmes coulaient à flots, sans que je puisse les retenir. C’était si dur…ce mauvais côté de l’imprégnation était une vraie punition…un sanglot s’étrangla dans ma gorge…cette séparation avait été si rapide, si brutale…

  • C’est moi où il a encore grandit depuis la dernière fois ? fit une voix familière à mes côtés.

Je sursautais et tournais mon visage ravagé vers son propriétaire.

  • Ils les nourrissent à quoi ces Quileute ? Au sang d’ours ? Continua-t-il en riant.
  • Salut Mike…, réussis-je à articuler d’une voix rauque.
  • Oh la…c’est dur…, déclara-t-il en fronçant les sourcils.
  • Oui…, soufflais-je.

Il m’observa un instant puis ajouta dans un sourire :

  • Je suis content, j’ai gagné mon pari !
  • Quel pari ? murmurais-je, tentant d’ignorer la brûlure qui me secouait toujours l’estomac.
  • Celui que j’avais fait avec Ben…j’avais parié que ça serait l’indien qui l’emporterait et j’ai gagné, assura-t-il en me faisant un clin d’œil, essayant ainsi de me détendre.
  • Oh…

Encore une fois, cette époque me semblait si lointaine…et je me dis qu’il n’y avait même pas de pari à faire…idiot de ma part mais c’était dans l’état d’esprit que je me trouvais maintenant.

Il fit un pas et je décidais de le suivre. Je pris mon sac, fermais les portes de ma voiture et avançais à ses côtés.

  • Alors ? Tu vas faire quoi ? réussis-je à demander.
  • Gestion…je compte reprendre le magasin un jour…
  • Ah …
  • Je serai dans le bâtiment B là-bas.

Je regardais le vieil immeuble à la façade délavée et m’imaginais ce que pourraient être les cours cet hiver, dans des classes surchauffées aux vitres pleines de buées.

  • Et toi ? demanda-t-il.
  • Biochimie…
  • Biochimie ! Rien que ça ! S’exclama-t-il.
  • Ouais …
  • Ah mais tu seras dans le beau bâtiment rouge !

Il me montra un immeuble de deux étages, flambant neuf, à grandes baies qui donnaient sur le parc de l’université…celui où j’avais justement un mauvais souvenir mais celui-ci s’effaça aussitôt pour laisser place à une vague nostalgie.

  • Ah oui…lorsque je suis venue la dernière fois, on ne pouvait pas le visiter, me rappelais-je.
  • Bella !!!!

Je tournais la tête vers celle qui venait de nous rejoindre, un large sourire aux lèvres.

  • Angela ! J’y crois pas ! M’écriais-je, très heureuse de revoir la seule amie que j’avais eue au lycée.
  • J’avais bien reconnu ta voiture ! Ah bon sang ! Je suis trop contente de te voir !
  • Moi aussi !!
  • Salut Mike …
  • Salut Angie…, répondit ce dernier, vaguement ennuyé que nous soyons interrompus.
  • Oh Bella, je croyais que tu allais en Alaska !
  • Euh…ouais…y a eu un petit changement de programme, marmonnais-je.
  • Mais, tu as tellement changé !
  • Ah bon ? m’étonnais-je. Tant que ça …

Je levais un œil vers Mike qui me le confirma dans un grand sourire.

  • Oui, tu es …plus féminine…je ne sais pas, il y a quelque chose, déclara Angela en me scrutant attentivement.
  • Ah …, répondis-je en rougissant.
  • En tous cas, je ne sais pas ce que tu as fait mais tu as un teint magnifique. Tu vas chez l’esthéticienne ?
  • Euh…non…, rigolais-je, gênée par leurs regards examinateurs.
  • Allez, mettez-vous tous les deux là, avec le bâtiment derrière ! demanda-t-elle.

Et elle vint m’enlacer en tendant son appareil photo devant elle. Nous penchâmes tous les trois la tête pour être cadrés dans l’objectif et Angela déclara :

  • Pour la prospérité !

Le clic de son appareil numérique retentit et nous fit rire. Angela prit alors immédiatement une deuxième photo.

  • Bon, alors ? Tu es là pour quoi ? S’enquit-elle, aussitôt qu’elle me lâcha.
  • Biochimie, répétais-je.
  • Ah je m’en doutais, répondit-elle dans un clin d’œil. Moi aussi !

J’avais vraiment de la chance, Angela serait une parfaite alliée pour cette année de galère. Avec elle, pas besoin de trop en dire, elle comprenait tout, tout de suite. Et j’avais désespérément besoin d’une amie.

  • Alors allons vite au secrétariat pour prendre notre chambre, annonça-t-elle.
  • Tu crois qu’on peut être ensemble ? Demandais-je, septique.
  • Bien sûr ! Allez viens !
  • Euh…salut les filles, à la prochaine, marmonna Mike.
  • Oui à plus ! Lui criais-je, pendant qu’Angela me trainait vers le bâtiment principal.

 

 

9 – L’amie

 

La secrétaire ne fit aucune difficulté et nous tendit nos clefs avec un grand sourire. Je respirais, heureuse de me retrouver avec celle qui semblait vraiment apprécier ma compagnie.

Nous montâmes dans la chambre et nous nous installâmes dans cette toute petite pièce, tout naturellement, sans se prendre la tête sur qui prendrait quoi et comment. Je constatais que la douleur s’était atténuée, laissant place à une sensation de lourdeur au niveau de l’estomac, comme un manque. Mais surtout, la petite onde d’amour que j’avais déjà ressentie lorsque Jake me quittait, commençait à m’envahir et je me sentais bien.

  • Je devais être dans un dortoir, m’expliqua-t-elle en faisant le tour de la pièce puis de la salle de bain. Mais, je refusais l’idée que Ben soit près du campus et moi à deux kilomètres de là…à force de harceler le directeur, j’ai réussi à obtenir une chambre. Je suis contente qu’on ait pu prendre la même !
  • Oui, répondis-je en souriant. C’est vraiment super…

Je vidais mon sac et la petite boule se contracta lorsque je rangeais les affaires de Jake dans le bas de mon armoire.

  • Euh…ça, ce n’est pas un tee-shirt à Edward ! Constata mon amie, toujours aussi perspicace.

A l’évocation de son prénom, je ressentis une étrange sensation, comme un ami très cher qui appelait pour vous dire qu’il pense à vous. Je souris brièvement tout en rangeant le reste des vêtements.

  • Bella ?
  • Oui ? Euh … non, ce n’est pas à lui, répondis-je aussitôt, comprenant qu’elle attendait une réponse.
  • Alors, il est encore parti hein ? Murmura-t-elle sur un ton attristé.
  • Oui !
  • Tu tiens le coup ?

Je relevais la tête et vis que mon expression la surprit. Je ris doucement, me rappelant qu’elle n’était au courant de rien.

  • En fait, je … je ne suis plus avec lui.
  • Tu as craqué alors ? Déclara-t-elle en riant.
  • Quoi ? M’étonnais-je.
  • Oui, tu as craqué devant les yeux de chien battu de Jacob Black !

L’image me fit beaucoup rire.

  • Oui, on va dire ça …, répondis-je enfin..
  • Ah…c’était le plus beau de toute façon…, soupira-t-elle.
  • Quoi ?
  • Oui, moi je le préférais à Edward. Il était plus … chaud, déclara-t-elle dans un sourire.
  • Ah oui, rigolais-je. Tu ne m’avais jamais dit ça…tu es toujours avec Ben au fait ?
  • Oui …

Je l’observais, elle semblait soudain soucieuse.

  • Où est-il ? demandais-je.
  • Ici, à Seattle mais à l’autre bout de la ville. Finalement, il a décidé de préparer un master en infographie. Les jeux vidéo …, ajouta-t-elle dans une petite moue.
  • Oh…

Je ne pus m’empêcher de rire devant sa tête dépitée. Mais, elle ne se joignit pas à moi. J’arrêtais de rire pour lui demander :

  • Tout va bien ?
  • Oui…, soupira-t-elle, en fait, tu sais, Ben a beaucoup changé depuis la fin de l’année.
  • Comment ça ? M’inquiétais-je.
  • Et bien…il a rencontré des gars d’ici, de Seattle, pendant son boulot d’été et au départ, je pensais que c’était le job qui l’épuisait mais apparemment, c’était autre chose…
  • La drogue ? Demandais-je aussitôt.
  • Je ne sais pas Bella…déjà, il s’est mis à jouer…à jouer beaucoup, tard la nuit et tout, en réseau, avec des mecs de l’autre bout de la Terre et puis, c’est vrai, je l’ai soupçonné de se droguer.
  • Mais il a démenti j’espère ?
  • Je ne lui en ai jamais parlé, déclara-t-elle en plantant ses yeux inquiets dans les miens. En fait, je crois que je n’ai pas envie de savoir …
  • Angela …
  • Je sais Bella mais tu vois, on a eu un autre petit souci entre temps et franchement, je n’avais pas envie d’en créer d’autres.
  • Quel genre de problème avez-vous eu ? Demandais-je, réellement inquiète devant la mine contrariée qu’affichait mon amie.
  • Disons que…il voulait et …pas moi, avoua-t-elle d’une petite voix.
  • Oh…

J’imaginais déjà les moments difficiles qu’avaient du vivre le couple face à ça.

  • Pourquoi ? me permis-je de demander, sentant qu’Angela voulait continuer à se confier.
  • Je ne me sentais pas prête, déclara-t-elle tristement, et Ben ne l’a pas compris.

Je repensais au Ben que je connaissais, joyeux, assez vif mais cool, je ne le voyais pas se fâcher pour ça…où alors, Angela avait raison : il avait vraiment changé !

Elle s’assit sur son lit et demanda, essayant de changer de sujet :

  • Allez ! Raconte-moi tout ! C’est comment la vie avec ton indien ?
  • Euh…

Je m’assis face à elle, ne sachant pas trop par où commencer. Je n’avais pas tellement envie d’en parler mais en regardant Angela, je me dis que parler de Jacob avec elle m’aiderait peut être à surmonter la douleur. Surtout si elle comprenait le lien qui nous unissait.

  • Et bien…c’est cool, répondis-je en hochant la tête.
  • Mais, vous êtes ensemble depuis combien de temps ?
  • Euh…je ne sais pas…

Et c’était vrai, j’avais du mal, comme ça, à évaluer le temps que nous avions passé ensemble. Je dus faire un terrible effort pour calculer …

  • Quinze jours …, murmurais-je.
  • Oui, donc vous n’en êtes pas encore au problème que j’ai connu avec Ben, marmonna-t-elle.
  • Et bien …en fait, on a commencé par ça…, avouais-je.

Elle me regarda, bouche bée, vraiment abasourdie parce que je venais de lui dire.

  • Oui mais bon, tu l’as dit toi-même, Jake est chaud…, ajoutais-je, espérant la faire rire.
  • Mais attend…il a quel âge ? Seize ans ? S’écria-t-elle.
  • Euh…

Je regrettais vraiment que mes amis du lycée aient rencontré Jacob avant sa mutation. J’aurai alors pu mentir aisément sur son âge.

  • Dix sept, bientôt dix huit…

Bon, c’était encore dans quelques mois, un an même, pensais-je mais ça n’avait aucune importance.

  • ça, ça s’appelle du détournement de mineur ma vieille ! Plaisanta-t-elle, affichant une mine faussement sévère. Mais, je suis d’accord avec toi, il fait plus !

J’éclatais de rire et cette fois, elle se joint à moi.

  • En tous cas, il doit te rendre vraiment heureuse parce que tu es superbe !
  • Merci Angela…en effet, je le suis.
  • Il n’a pas un copain ou deux célibataires ?
  • Angie ! M’étonnais-je.
  • Je plaisante, rigola-t-elle. Je suis très bien avec Ben malgré tout, je l’aime tu sais…mais en ce moment, lui c’est l’air de sa chambre avec ses copains et moi…et bien, l’air que dégage la ventilation de l’ordinateur me va très bien, ajouta-t-elle sur un ton mordant.

Une lueur traversa ses yeux et je compris alors qu’Angela et Ben passaient vraiment un cap difficile. Je me souvenais d’elle, prenant toujours des photos, de tout et de rien… Je me promis de l’inviter à la Push un dimanche afin qu’elle voit dans quel univers je vivais. J’étais sûre qu’elle apprécierait. Elle vint alors s’asseoir près de moi sur le lit et tendit à nouveau son appareil devant elle en déclarant d’une voix qui avait retrouvé toute sa légèreté :

  • Allez, première journée dans cette chambre que nous n’allons pas quitter pendant trois longues années !

Je ris et entendis le clic de l’appareil. Le flash nous éblouit. 

 

Comme je le craignais, la nourriture du self était loin d’être divine mais Angela et moi passions tellement de temps à discuter que le repas passa très vite.

  • C’est franchement fade, se plaignit Angela. Rien à voir avec Forks !
  • Hum, ça me fait presque regretter la nourriture de Charlie, répondis-je en avalant un morceau de viande. Et puis, ce steak est beaucoup trop cuit !

Angela jeta un œil dubitatif à mon assiette et acquiesça dans une moue dégoutée.

  • Comment tu arrives à avaler tout ça ? L’entrée n’avait déjà pas de goût…
  • Salut les filles ! Nous interrompit Mike. Je peux m’asseoir près de vous.
  • Bien sûr ! Rétorqua Angela. Alors ?
  • Bah alors rien. Je suis dans un dortoir à un kilomètre d’ici…
  • Ah oui ! Je devais y être, répondit mon amie. Pas génial quand il va pleuvoir…
  • Mouais…

Mike tripota son plat avec sa fourchette d’un air peu appréciateur.

  • Bon je crois que je vais manger juste la viande.
  • Elle est trop cuite..., répétais-je.
  • Non, je trouve que ça va, répondit Mike en coupant un morceau. En tous cas, ça ne t’a pas empêché de la manger, ajouta-t-il en regardant mon assiette vide.

J’haussais les épaules en buvant une gorgée de mon eau.

  • Oh zut, déclara Angela, il va être l’heure de se présenter à l’amphi.
  • C’est ça, lâchez-moi, se plaignit Mike.

Angie se leva et j’en fis autant, sans oublier de prendre mon dessert.

  • Bella, on n’a pas le droit de manger dans les salles de classes, me rappela Mike.
  • Je l’aurai avalé avant ! ripostais-je en mordant dans le gâteau au chocolat.

Mon amie fit rouler ses yeux, écœurée et prit son sac. Je lançais un clin d’œil à Mike et la suivit.

 

L’amphithéâtre principal était bondé, nous étions là afin de faire la rencontre de nos professeurs et surtout, pour procéder au dispersement des classes.

Une fois ceci terminé, Angela et moi nous retrouvâmes dans une classe de quinze élèves, et nous étions les deux seules filles ! Tous paraissaient sympas mais très coincés, ce qui fit beaucoup rire Angela qui prit une photo discrètement du groupe.

  • Au moins, nos hommes ne seront pas jaloux !
  • Pourquoi Ben l’est ? Demandais-je, étonnée.

Je ne voyais pas Ben se préoccuper des relations d’Angela. Que ce soit celui que je connaissais, ou celui qu’elle m’avait décrit.

  • Oh non ! Me confirma-t-elle. Et parfois, j’aimerai bien…ça me permettrait de penser qu’il tient plus à moi qu’à Colin Mac Rae.

 

Nous étions déjà le soir que je n’avais finalement pas vu le temps de passer. Angela se jeta sur son lit en s’écriant :

  • Ouf ! Et une de moins !
  • Oui, rigolais-je.
  • Je sens que ça va vite passer avec toi Bella, déclara-t-elle, rejoignant mon point de vue.
  • Contente que ma compagnie te plaise, répondis-je en souriant.

Nous fûmes interrompues par la sonnerie de mon téléphone. Je le saisis, tremblante, ce que ne manqua pas de remarquer Angela.

  • Oui ?
  • Tu vas bien ?demanda-t-il de sa voix chaude et feutrée que j’aimais tant.

Mon cœur s’accéléra violemment et je fermais les yeux.

  • Oui, soufflais-je.

J’étais consciente que je venais brutalement de changer d’attitude mais je me dis autant qu’Angela sache tout de suite à quoi s’en tenir avec moi.

  • La maison est vide sans toi,murmura-t-il. Mais, je m’occupe…le temps passe plus vite.
  • Je…je suis avec Angela Weber dans la chambre. Tu te souviens ?  
  • Oui, une amie je crois ?
  • Oui…

Jacob laissa passer un temps puis murmura :

  • Tu me manques…tu es sûre que tu ne veux pas que je vienne ?
  • Non…ça ira.

Angela me fit un clin d’œil et je réussis à lui sourire.

  • Je t’aime Bella. J’espère que tu ne vas pas avoir trop dur cette nuit…

Ma gorge se serra si fort qu’il me fallut un petit temps avant de lui répondre :

  • Ne t’en fais pas. Je t’aime aussi Jake. Très fort…

Je l’entendis sourire puis il raccrocha. Je restais ainsi à écouter la tonalité, sentant que la vague brûlante était à nouveau en train de me submerger. Angela s’approcha doucement de moi et je levais vers elle un œil surpris car elle semblait très préoccupée.

  • Tu veux un mouchoir ?
  • Quoi ?

Je passais ma main sur ma joue mouillée. Je ne m’étais même pas rendue compte que je pleurais ! Jacob m’avait prévenu de ces crises de larmes incontrôlables. C’était désolant.

  • Et bien ! C’est le grand amour entre vous…, constata-t-elle sans moquerie.
  • Oui…c’est fusionnel, répondis-je en essuyant mon visage.
  • Je vois ça…c’est beau.

Elle me prit ma main sur laquelle elle venait de remarquer mon anneau.

  • Ne me dis pas que …
  • Si, la coupais-je, décidée à lui en dire le plus possible.
  • Bella ! Mais, c’est fou cette histoire ! Mais…mais tu es aussi sûre de toi ? Demanda-t-elle, les yeux ronds. Je veux dire…tu étais encore avec Edward il y a quoi ? deux mois ?

J’hochais la tête, consciente que mon attitude pouvait paraître folle aux yeux des gens qui n’étaient pas dans le secret.

  • Oui Angela…je suis sûre. Et je te souhaite d’être aussi sûre que moi un jour. Assurais-je, sincère.

 

10 – Nous sommes tous des mutants …moi le premier…

 

Je n’avais jamais été aussi motivé à faire quelque chose…si, peut être le jour où j’avais fabriqué le bracelet de Bella. En fait, en y réfléchissant, il n’y avait qu’elle qui m’avait toujours motivé et il n’y aurait jamais qu’elle, quelque soit la difficulté de la tâche. Je me sentais tellement transporté à chaque fois que je pensais à elle que j’arrivais à me dépasser ! Et puis, cette fois, elle n’était pas la seule concernée…Billy devait retrouver sa maison et moi, je devais dégager. Enfin, nous devions dégager ! Les dégâts étaient déjà réparer, j’avais commencé par ça : la porte de ma chambre, le lit de mon père…la table de la cuisine… heureusement, elle s’était enfin calmée. J’avais eu du mal à le croire au début mais sa décision de reprendre les cours m’avait confirmé que Bella était à nouveau elle-même. A quelques détails près … il fallait juste que je me réhabitue à son absence… pas facile pour cette première nuit, cette douleur que j’avais réussi à maitriser pendant l’été était revenue au pas de charge, me rappelant que je n’échapperais pas à mon destin… mais ce matin, je me sentais déjà mieux et puis, je m’occupais l’esprit à une belle chose : notre maison.

«  J’espère pour toi qu’elle aura tout le confort dont elle mérite… »

  • Et qu’est-ce que tu crois hein ? Que je ne suis pas capable de lui faire quelque chose de bien ! Bougonnais-je à l’intention de la voix qui aimait me rappeler à l’ordre quand je n’en avais pas besoin. Je te signale que mes ancêtres construisaient des baleiniers, alors une maison !

« Des baleiniers…tu m’en diras tant »

  • Va te faire voir Cullen ! Répondis-je, encore à voix haute, je n’ai pas ta fortune moi !
  • A qui parles-tu ?

Je sursautais. Nom d’un chien, j’étais tellement parti dans mon délire que je n’avais pas entendu, ni senti, Sam approcher.

  • Euh, à personne, marmonnais-je, conscient que j’étais un peu fou depuis le départ d’Edward. 

Je l’entendais assez souvent en ce moment, surtout pendant ma « retraite », il n’avait pas manqué de se foutre de moi et de me faire la leçon. Même lorsque je conduisais sa voiture, j’avais entendu sa voix me rappeler de faire attention au bolide, que Bella était à côté. Mais bon…je ne savais pas si c’était réel ou si je rêvais tout ça mais parfois, « ses remarques » ne me faisaient pas de mal…même si c’est clair, je pouvais passer pour un fou !

  • J’aimerai qu’on parle Jake.
  • Si c’est pour parler de Paul, c’est non ! Répliquais-je, en prenant un rondin de bois que je balançais plusieurs mètres plus loin.
  • Ça ne sert à rien de jouer à la politique de l’autruche. Affronter les choses est beaucoup plus sain et puis, je ne viens pas parler que de Paul.

Je balançais un deuxième rondin, plus fort que le premier et soupirais lorsque je le vis faire rouler tout un tas que j’avais mis du temps à ranger quelques heures avant.

  • Explique-toi !

Sam se rapprocha, l’air soucieux.

  • Je viens de comprendre quelque chose…et c’est très perturbant. Nous recevons tous des images de Bella et de toi quand tu es sous ta forme lupine…
  • Ça, on l’avait compris et ce n’est pas un scoop ! Marmonnais-je, irrité.
  • Mais en fait, on en reçoit aussi lorsque tu es humain…
  • Normal puisque l’autre fantasme sur elle !!!! M’écriais-je en levant la main dans la direction de la maison de Paul.
  • Non Jacob…je ne reçois pas des images comme ça…, m’expliqua calmement Sam.

Je lui jetais un œil, pas dupe …fallait quand même pas qu’il me prenne pour un idiot !

  • Bon, j’en ai reçu oui, affirma Sam, de la part de Paul, et tu les as vues également, à travers moi…mais j’en reçois d’autres…de ma meute, et ça n’a rien à voir avec tes souvenirs ou avec les rêveries de Paul.
  • Tu en reçois de qui ?! Demandais-je, soudain très énervé à l’idée qu’un autre s’amuse encore à fantasmer sur ma femme.
  • Il n’ose pas m’en parler mais j’en reçois aussi d’Embry …
  • Embry? Et qu’est-ce qu’elle fait dans ces images ? Sifflais-je.

Sam remarqua mon air furax et me répondit aussitôt :

  • Ce n’est pas ce que tu crois ! Elle parle, le guide, et elle répète toujours la même chose : fais attention…

De quoi est-ce qu’il parlait ? Ils pétaient tous un câble dans cette meute ! C’était la dernière fois que je leur permettais de voir mes souvenirs !

  • Je crois…je crois que ce sont des rêves, ajouta Sam.
  • Des rêves ? M’étonnais-je.
  • Oui … car depuis quelques temps, je la vois mais différente.
  • C'est-à-dire ?

Sam hésitait et me fixait, les yeux plissés, réfléchissant à la façon dont il allait m’annoncer la chose … ça m’agaça fortement et j’explosais :

  • Comment tu l’as vois hein ? En vampire ? C’est ça !
  • Non, en loup…, m’avoua Sam, d’une voix tendue.
  • Quoi ?!

Mes jambes me lâchèrent et je dus m’asseoir sur la souche dont je me servais pour couper mes rondins. Ainsi, c’était notre punition ! Bella aurait dû mourir, Bella aurait dû être un vampire, Bella devait être avec Edward ! Et j’avais tout fait pour lui arracher ! J’en étais sûr maintenant : si elle s’était imprégnée c’est parce qu’elle avait reçu mon sang, j’avais chamboulé son organisme ! Et maintenant …maintenant … elle allait devenir un monstre !

« L’imprégnation va dans les deux sens Jacob, aucun des deux n’y échappe, Bella devait s’imprégner… », me rappela la foutue voix paternaliste qui avait toujours raison !

  • Non…Non…tu as tout faux…Elle résistait, elle ne devait pas…
  • Mais Jake ! De quoi parles-tu ? Demanda Sam, inquiet.

Je devais avoir l’air d’un dingue.

  • Jake ! Ce sont des rêves ! Bella ne se transforme pas ! Ressaisis-toi ! La preuve, c’est que je ne la vois jamais de la même couleur !
  • Mais…de quoi est-ce que tu parles ? Demandais-je d’une voix lasse.
  • Elle prend toujours la même couleur que celui qu’elle accompagne, comme une copie. Mais je la reconnais à ces yeux …
  • Ses yeux couleur chocolat, marmonnais-je.
  • Oui… son cas m’intrigue de plus en plus, continua Sam, ignorant ma désolation.  D’abord sa capacité à lutter contre ton imprégnation, sans parler de cette même capacité à empêcher le fils Cullen à lire dans ses pensées… Maintenant, elle parvient à entrer dans nos têtes…allant jusqu’à perturber l’état d’esprit de ton frère.
  • Sa « capacité » n’a rien à voir avec les fantasmes de Paul ! M’écriais-je, énervé que Sam lui trouve encore des excuses.
  • Comment peux-tu en être aussi sûr ?
  • Parce que j’ai senti sa déception, bien avant que Bella ne s’imprègne ! Elle l’a toujours attirée…depuis le début, il n’a jamais été indifférent !

Sam hocha la tête, comprenant qu’il ne servait à rien d’essayer de me convaincre pour l’instant. Ou peut-être était-il d’accord avec moi ? L’un comme l’autre, je préférais qu’il se taise avec ça sinon, je me sentais capable de muter et d’aller lui foutre une autre raclée.

  • Mais pourquoi Embry n’en parle pas ?
  • Nous ne voulons pas subir le même sort que Paul…, expliqua Sam d’une voix tendue.
  • Nous ? répétais-je.
  • Oui, j’ai rêvé de Bella cette nuit … et ce n’est pas la première fois…
  • Quoi ?!

Cette fois, s’en était trop ! Ils commençaient tous à me chauffer ! Mes membres tremblaient de rage et j’entendis vaguement Sam me dire :

  • Jacob, nous devrions tous en parler…et si tu mutais plus souvent avec nous, tu comprendrais peut –être déjà ce qu’il nous arrive !

Son reproche en englobait beaucoup d’autres ! Sam avait espéré que je sois un Alpha plus « présent », plus « meneur », or je ne mutais pratiquement plus, sauf quand ça m’arrangeait, genre pour aller plus vite à Forks ou à Seattle… ma mini meute faisait sa petite vie pendant que moi je faisais la mienne de mon côté …en même temps, je ne voyais pas trop pourquoi je ferai des Conseils tous les jours comme Sam, surtout pour une histoire de rêves …

  • D’accord…je vais prévenir les miens…, répondis-je, ayant retrouvé mon calme. On se retrouve ce soir, à la clairière.
  • Parfait…Merci à toi Jacob.

Il me quitta et son « merci à toi Jacob » résonna longtemps dans ma tête…comme si je venais de lui faire une faveur. Je réalisais alors qu’il était réellement inquiet.

 

 

Billy était très heureux de retrouver sa maison. Je l’avais regardé inspecter tout ce que j’avais refait, mais j’avais gardé la tête basse, attendant une remarque de sa part sur ce qu’il s’était passé ces derniers jours. Il se contenta d’hocher la tête d’un air satisfait et je me sentis frustré.

  • Tu n’as rien d’autre à dire ?
  • Tu attends quoi de moi ? demanda-t-il d’un œil amusé.
  • Bah, je ne sais pas…que tu m’engueules ! Tu as quand même dû quitter ta propre maison ! Et on a failli la démolir…

Il éclata de rire et je le regardais les yeux ronds.

  • Je ne me suis jamais autant amusé que depuis que Bella partage notre vie ! Cette fille est si …explosive, ajouta-t-il. Ta mère l’aurait adorée. Vous allez me manquer quand vous allez me quitter…où comptes-tu t’installer ?
  • Pour l’instant, je n’en ai aucune idée, avouais-je. Je suis en train de préparer ce qu’il faut et puis après, j’irai voir s’il n’y a pas un terrain à vendre à Forks…

Billy rapprocha son fauteuil près de moi, son sourire s’était effacé.

  • Tu ne comptes quand même pas quitter la réserve !
  • Mais où veux-tu que j’aille ? Il n’y a pas de terrain ici ! et tous ceux que nous avons sont pris…Rachel et Paul ont celui de maman. Rebecca a revendu le sien au vieux Quil depuis des années…
  • Mais …et ici ! rétorqua mon père. Ici, c’est à toi !

Je soupirais.

  • Mais papa, c’est encore chez toi ici à ce que je sache !
  • Ce terrain est à toi Jake ! Et il est hors de question que tu quittes la réserve ! Tu construiras ta maison ici ! Il y a assez de place non ? Ajouta-t-il presque furieusement, en balançant son bras dans le vide.  

Les mains sur les hanches, je me dandinais, penaud. Billy se fâchait rarement et là, je sentais que je l’avais vexé. Je tournais la tête vers l’extérieur, réfléchissant à sa proposition.

  • A l’arrière…, marmonnais-je, en repensant à l’idée de Bella. Il y a peut-être assez de place oui…
  • Bien sûr ! S’exclama-t-il. Allez…, continua-t-il en faisant faire demi-tour à son fauteuil, n’en parlons plus. Demain, je veux te voir commencer les fondations sur CE terrain !
  • Ouais, ouais…

Il hocha la tête d’un air satisfait et me planta là, dans la cuisine. J’entendis alors l’appel de Sam et réalisais qu’il était l’heure. Je me déshabillais et mutais en courant vers la forêt.

 

Lorsque j’atteignis une petite butte à quelques kilomètres des propriétés de chacun, j’émis un hurlement pour ameuter tous les miens. Je réalisais alors que c’était la première fois que je faisais ça et espérais qu’ils m’entendraient. Puis, je rejoignis Sam et sa meute. A mon arrivée, je prenais bien soin de concentrer mes pensées que sur lui, afin d’éviter de m’énerver dès le début de cette réunion. Je commençais à recevoir des images de Seth puis de Leah. Paco et Lien arrivaient déjà. Tous se placèrent à mes côtés, Seth prit sa place tranquillement à ma droite.

Eh bien…j’ai cru que c’était une blague, lâcha Leah.

Les jumeaux pouffèrent et je jetais à Leah un regard de travers.

Que se passe-t-il ?demanda Seth.

Soudain, des images de Bella telle que Sam me l’avait décrite, à marcher dans la forêt, à montrer le chemin, à murmurer des « fais attention » à tout va, flashèrent mon esprit.

Oh la ! Qui est en train de penser à ça ?

Mes frères captèrent l’écho de leurs pensées.

Tu comprends mieux maintenant ?  déclara Sam.

C’est moi, me dit Seth timidement.

Moi aussi je rêve d’elle, ajouta Leah, amère. Et franchement, ça me prend la tête !

Nous, non, affirma Paco. Lien et moi n’avons jamais rêvé de Bella, nous captons juste les images de Seth et Leah lorsque nous mutons au même moment.

Tiens donc…, répondis-je en même temps que Sam.

Jacob, nous sommes tous là ce soir…s’il te plait.

Je compris ce que Sam me demandait et me concentrais pour autoriser sa meute à capter mes pensées et eux les miennes. Ainsi, nous étions tous connectés. J’essayais d’occulter celles de mon « faux-frère ».

Bon alors résumons, déclarais-je, vraiment intrigué par ce que je venais d’apprendre.

Vous êtes combien à faire exactement le même rêve ?

Sam se concentra et déclara :

De mon côté, il y a Embry, Paul et moi…du tiens, Seth et Leah.

C’était de la folie ! Pourquoi certains et pas tous ? Pourquoi les mêmes images ? Pourquoi tout court ?

Depuis quand ?Leur demandais-je à tous.

Je les voyais réfléchir, certains rêves qui semblaient dater défilaient dans ma tête…je vis la fameuse version « loup » de Bella, dans plusieurs couleurs…un truc de dingue !

Pour ma part, déclara Sam, j’ai fait un premier rêve la nuit de son imprégnation.

Moi aussi …, confirma Paul.

Je crois que moi, ça a commencé un peu plus tard, affirma Embry.

Je tournais la tête vers Seth et Leah.

Moi je ne rêve d’elle que depuis peu et toujours en « louve »,m’annonça Seth.

Je secouais la tête, dépité par cette nouvelle…si j’avais muté plus souvent !

Je ne te le fais pas dire ! Rétorqua Leah. Elle me gâche mes nuits depuis quinze jours ! J’en ai marre de la voir et de l’entendre !

Elle apparaît en « louve » que depuis une semaine je dirais, précisa Sam qui avait vu l’évolution depuis le départ.

Mais, je ne comprends pas…pourquoi moi je ne rêve pas d’elle ? Enfin, je ne fais pas les mêmes rêves que vous ! Je ne l’ai jamais vue sous cette forme !M’étonnais-je. J’en oubliais même ma colère contre Paul. Ce dernier baissa la tête. 

Ecoute Jake…nous devions en parler ensemble, te montrer ce que nous vivons, mais pour l’instant, il n’y a rien de grave,répondit Sam. Laissons-nous un peu de temps…Bella vient de subir plusieurs changements dans sa vie, ne la bouleversons pas avec ça !

J’étais plutôt d’accord…ça allait passer…ça devait passer…même si au fond de moi, j’avais un mauvais pressentiment sur cette histoire. Soudain, un détail me revint en mémoire :

Elle a entendu ton appel Sam…c’est normal de la part d’une humaine ?

Non…

Alors nous avons un problème…, murmurais-je, anéanti.

11 – Attraction

 

La première nuit avait été très dure. Angela avait un peu paniqué de me voir souffrir autant, elle avait même osé me demander si je me droguais aussi et si j’étais en période de désintoxication ? Cette idée m’avait fait beaucoup rire, bien que la comparaison ne fût pas si stupide. J’avais réussi à me calmer sur le coup du matin, m’endormant pour rêver de paysages et de pins verts…et c’est dans un grand état de fatigue que nous avions abordé notre première heure de cours. Angela, comme à son habitude, n’avait pas posé beaucoup de questions, se contentant de me réconforter en m’assurant qu’elle ferait tout son possible pour me rendre ces études agréables.

Je m’en voulais de lui avoir fait subir ça, ne pouvant pas lui expliquer la véritable raison de ma crise.

 

Pendant notre pause déjeuner, je reçus la visite de Rachel qui me fit signe depuis l’entrée du parc dans lequel Angela, Mike et moi mangions, profitant de la douceur exceptionnelle de cette journée de Septembre.

Je courrais vers elle, heureuse de pouvoir parler à un « membre » de la meute. J’avais l’impression qu’ainsi, je me rapprochais de Jacob.

  • Eh Bella ! Alors ? Cette première journée ? Demanda-t-elle dans un sourire éclatant.
  • Salut Rachel ! Pas terrible mais je tiens le coup…, répondis-je en grimaçant. Et toi ?
  • Bien ! Paul est venu me voir hier soir.

J’accueillis cette nouvelle comme une douche froide. Je sentis mon visage se décomposer. Paul était venu et Jake non ! En même temps, je lui avais demandé de partir … mais quand même ! Rachel avait pu en profiter…pendant que moi je souffrais de martyre.

  • Bella ? s’inquiéta-t-elle devant mon silence. Tout va bien ?
  • Oui…il est …il est resté avec toi sur le campus ? réussis-je à demander.
  • Non…nous nous sommes donnés rendez-vous dans le parc et nous nous sommes baladés toute la soirée puis il est reparti.

Evidemment…, pensais-je en hochant la tête. Rachel et Paul n’avaient évidemment pas les mêmes rapports que nous. Je me sentais soudain moins jalouse. Maintenant, je comprenais mieux pourquoi Paul était perturbé par ma façon d’être avec Jake. Moi, si Jacob devait venir ici, ça ne serait pas pour une ballade et dans notre cas, c’était difficile ! Je levais la tête vers la fenêtre de ma chambre, à la vue de tout le monde, donnant sur la cour et au quatrième étage en plus ! Non…dans notre cas, c’était plus difficile. Je soupirais.

  • Jacob va bien, m’annonça-t-elle. Il t’appellera dans la soirée.
  • Oui…merci !
  • Ta classe et ta chambre te plaisent ? Demanda-t-elle.
  • Super ! Je suis avec une amie…

Elle fronça les sourcils et je lui jetais un regard étonné, l’invitant à préciser sa pensée.

  • Si tu as besoin de parler, je suis à deux pas de toi Bella, ne l’oublie pas.
  • De quoi as-tu peur ? Répondis-je, légèrement agacée.
  • Tu as supporté ta première nuit ?
  • Oui…, mentis-je.
  • Pas de crise démesurée ?
  • Non… pas de crise…juste quelques larmes dans l’oreiller, tout ce qu’il y a de plus normal pour une fille séparée de son copain, la rassurais-je.
  • Bon…, répondit-elle en souriant, je te laisse alors…appelle-moi si ça ne va pas.

Je lui fis un petit signe et elle me quitta. Je la regardais s’éloigner, me disant qu’elle était quand même très différente de Jacob.

 

L’après-midi se déroula en plein air car nous avions sport. La plupart des classes étaient concernées et c’est avec plaisir que nous retrouvâmes Mike sur la piste de course.

Nous devions effectuer vingt minutes d’endurance pour commencer et je démarrais mon parcours aux côtés d’Angela. Mike nous suivait de près, accompagné de quelques copains de classe qui ne me quittaient pas des yeux. Leurs regards ne me gênaient pas mais j’étais quand même étonnée de l’intérêt que me portaient tous ces garçons. Angela dut comprendre ce à quoi je pensais car elle déclara :

  • Tu es beaucoup plus sexy qu’avant Bella …tu les rends dingues.
  • Quoi ?!
  • Franchement, je t’assure, je ne sais pas ce que tu as fait mais on dirait que tu dégages une sorte de phéromone …même moi je le ressens ! Rigola-t-elle.
  • Arrête ! m’écriais-je, gênée.

Je pensais alors que si elle m’avait vue trois semaines plus tôt, elle ne m’aurait pas trouvé sexy du tout, déchiquetée de partout ! J’accélérais le pas pour mettre une distance entre nous et le groupe des garçons. J’entendis Mike rire et je me promis de le choper après pour lui demander de calmer ses copains.

Au bout de dix minutes, je remarquais qu’Angela manquait de souffle et je ralentis.

  • Merci, souffla-t-elle.
  • Fallait me le dire, répondis-je, surprise que je ne sois pas essoufflée moi-même.
  • Et bien… tu as fait …du sport …pendant les vacances ?
  • Euh non…

Pas comme ça en tous cas, pensais-je malgré moi.

  • Tu as …une meilleure …endurance …en tous cas…
  • Oui, c’est vrai, admis-je, étonnée.

Je me sentais toujours aussi sur-vitaminée depuis … cette sensation ne m’avait toujours pas quittée. Angela s’arrêta en se tenant le ventre. Je stoppais ma course, sans même reprendre mon souffle. Je me tournais alors à son opposé afin qu’elle ne remarque rien. Une fois son point de côté passé, elle recommença par petites foulées et je la suivis, en douceur. Elle haletait et je m’étonnais de plus en plus de ne pas ressentir la fatigue. Moi qui avais toujours été très nulle en sport, j’avais l’impression de pouvoir tenir un marathon ! Je fus même surprise lorsque le prof émit son coup de sifflet. Je me rappelais alors qu’avant, je ne finissais jamais les vingt minutes, j’étais toujours arrêtée par des points de côté ou des crampes…un léger malaise m’envahit…

 

Jake m’appela après le dîner et j’eu beaucoup de mal à raccrocher. Je décidais de ne pas lui parler de ma super forme, par peur de l’inquiéter. Je savais qu’une fois la connexion coupée, les larmes arriveraient à flots et ne manqueraient pas d’inquiéter à nouveau Angela. Par chance, cette dernière m’annonça qu’elle devait filer à la bibliothèque. Je pus donc pleurer à mon aise pendant deux heures et faire croire que je dormais lorsqu’elle revint.

Mon réveil fut par contre catastrophique. Mes mains cherchèrent instinctivement le corps de Jacob et ma déception fut tellement grande en comprenant que je me trouvais loin de lui qu’une nouvelle crise de larmes me submergea. Je mis beaucoup de temps à la calmer et c’est un visage bouffi qu’Angela découvrit en ouvrant les yeux sur moi. Elle en fut si désolée que je crus pendant un instant qu’elle allait pleurer avec moi.

 

La matinée passa au ralenti. Nous avions commencé les cours depuis trois jours et le week-end semblait encore tellement loin. Je venais d’avoir mon premier cours d’introduction à l’enzymologie et malgré ma frustration devant l’horloge qui ne tournait pas assez vite, je l’avais trouvé passionnant ! J’avais aussi hâte de commencer les cours sur le métabolisme, la biochimie cellulaire et la génétique. Je savais qu’en fait, toutes mes études me serviraient à mieux comprendre Jacob et les enfants que j’aurai avec lui. Mon estomac fourmillait à chaque fois que cette pensée me traversait l’esprit mais je savais qu’un jour, ça arriverait et qu’il faudrait que je comprenne comment ils fonctionnent. Curieusement, je ne ressentais aucune peur face à ça, sûrement mon côté barge comme disait Jake mais, moi qui avait refusé de l’envisager avant…je sentais qu’à présent, les choses étaient différentes. Jacob avait beau répété qu’il était humain, cinquante pour cent de son temps, il ne l’était pas. J’enviais Carlisle d’avoir pu analyser son anatomie et d’avoir pu en comprendre une partie. J’espérais aussi qu’un jour les loups-garous n’auraient plus de secret pour moi.

 

La journée était maussade mais il ne pleuvait pas. Nous décidâmes donc d’aller dans le parc autour des bâtiments pour déjeuner. Mike nous rejoignit.

  • Salut les filles !
  • Salut Mike, fîmes-nous en cœur.  
  • Alors ? ça roule ?
  • A merveille…, répondit Angela sur un ton qui me surprit.

Je n’avais pas remarqué sa triste mine, trop occupée à penser à Jacob et à son loup. Pourtant, Angela paraissait sombre. Je me promis de lui parler plus tard.

  • Et bien moi, c’est le pied ! Je n’ai pas cours le mercredi après-midi et il y a deux filles vraiment pas mal dans mon groupe, ce qui me permet de voir cette année avec plus d’optimisme ! Déclara-t-il dans un grand sourire.
  • Tes copains sont des nigauds, lâchais-je, me rappelant que je devais lui toucher deux mots sur son attitude pendant le sport.
  • Euh oui…mais bon…ton short était moulant Bella…

Je mordis dans mon deuxième sandwich et manquais de m’étrangler lorsque je le vis faire les cents pas devant la grille du campus. Même de si loin, je l’aurai reconnu à sa silhouette plus nerveuse mais dégageant la même puissance que Jacob.

  • Excusez-moi, dis-je en posant mon repas sur mon sac.
  • Eh mais attends, cria Mike. C’était pour rire !

Je courrais presque, ignorant la protestation de mon ami.

En me rapprochant de lui, je remarquais son anxiété. « Oui, tu n’as rien à faire là » pensais-je. Lorsqu’il me vit, il stoppa son va-et-vient et attendit, le visage tourné vers la rue, guettant peut-être quelqu’un ou pour ne pas me regarder tout simplement. Je décidais de rester derrière la grille.

  • Salut Paul…
  • Bella…, répondit-il d’une voix tendue, sa manière à lui de me saluer.

Sa mâchoire se serra et il agrippa d’une main un barreau de la grille pour enfin planter ses yeux dans les miens. Ils étaient si troubles que leur couleur me fit penser à de la vase…reflétant parfaitement l’état d’esprit de Paul à cet instant. J’y lus tellement de choses en quelques secondes que je commençais à paniquer. Est-ce que je devais craindre quelque chose de sa part finalement ?

  • Qu’est-ce qu’il se passe ? Demandais-je d’un ton léger.
  • Je voulais savoir si tu allais bien…je viens de passer voir Rachel.
  • Oui…C’est Jacob qui t’envoie ?

Ainsi, j’espérais remettre les choses dans l’ordre.

  • Non, avoua-t-il. Je passais par là …c’est tout…

Je baissais la tête et me raclais la gorge…il fallait qu’il arrête ça. Jake ne manquerait pas de voir cette scène dans sa tête et il allait le tuer !

  • Ecoute Paul…
  • Je ne fais que passer, d’accord ?
  • Oui…

Cette fois, il agrippa la grille de ses deux mains et rapprocha son visage.

  • Je rêve toujours de toi…toutes les nuits…ça me rend dingue ! explosa-t-il. J’aimerai que tu arrêtes ça !
  • Quoi ?!
  • Je ne sais pas comment tu fais, si ce sont tes petits copains vampires qui t’ont appris ça mais je vais devenir cinglé ! Et puis…j’aime Rachel ! Tu m’entends ?!
  • Paul…
  • Elle se doute que quelque chose ne va pas ! Elle le sent !

Il fulminait mais je sentais qu’il ne me voulait aucun mal. Il était plutôt en colère contre lui-même et je me rapprochais de la grille, plus près de son visage. Ses jointures des doigts blanchissaient et je posais mes mains sur les siennes, espérant le calmer. Il baissa les yeux et je compris que ça marchait.

  • Ecoute …je ne sais pas non plus ce qu’il se passe mais …enfin, tu rêves toujours de la même chose ? De toi et moi dans la forêt ? Murmurais-je, consternée.
  • Oui, souffla-t-il. Tu me répètes toujours de faire attention mais, à quoi ? Hein Bella ? A quoi ? ! S’emporta-t-il.
  • Je ne sais pas …
  • Je me sens traqué ! On me poursuit …
  • Dans tes rêves ? M’étonnais-je.
  • Oui…Et là, tu arrives et tu es si …calme…si…sûre de toi…tu dis que tu me protèges !
  • Oh …

Il leva les yeux vers le ciel, sa souffrance le minait…

  • Tu occupes toute ma tête Bella…je n’en peux plus …j’essaie de passer beaucoup de temps avec Rachel pour faire contre-pied mais ça ne marche pas…Jacob est très en colère…, ajouta-t-il en secouant la tête.
  • Oui…, murmurais-je, imaginant très bien ce que Jake devait penser, même s’il ne m’en parlait pas.
  • Mais…quand tu dis que j’occupe ton esprit, tu parles des rêves ou c’est encore les mêmes …pensées… ? Enfin tu sais…, marmonnais-je.
  • Oui…ça aussi…mais ça, c’est encore un autre problème, déclara-t-il plus tendu.

Je me sentis rougir et je lâchais ses mains pour mettre les miennes dans mon blouson. Un groupe d’étudiant passa un ce moment-là et une des filles me regarda d’un air entendu. Je réalisais que nous devions donner l’image d’un couple…cette idée me révolta et je reculais encore d’un pas.

  • Ecoute Paul, je ne sais pas ce qu’il t’arrive mais je ne crois pas être en mesure de t’aider…

Il s’agita, près à exploser. J’eu soudain le sentiment que je devais faire quelque chose avant qu’il ne mute devant toute l’université. J’ouvris donc la grille pour me retrouver près de lui. Encore une fois, il regardait ailleurs, craignant que je lise tout son désir dans son regard. Je décidais de l’éloigner d’ici et avançais dans la rue. Au bout de quelques pas, il me suivit. Je marchais ainsi pendant plusieurs mètres puis bifurquais dans une rue déserte. Je ne savais pas trop si je risquais quelque chose ou pas mais Paul était à bout et il fallait qu’il se calme. Le bruit de la rue s’atténuait et mon rythme cardiaque s’accéléra quand Paul me rejoignit à grandes enjambées. 

Il s’arrêta tout près de moi et me fixa pendant plusieurs secondes. Je soutenais son regard, le défiant d’oser me toucher. Je pouvais sentir son souffle chaud sur mon visage tellement il était proche. Alors il respira profondément et je crus pendant un moment qu’il tentait de se contrôler mais en fait, il humait mon parfum et mon malaise s’intensifia. Jake allait me tuer d’avoir osé prendre autant de risques ! Paul n’osait plus bouger mais ses mains tremblaient de plus en plus fort et je sentais qu’il se retenait. Je posais ma main sur son bras, espérant le calmer. Il grogna et recula d’un bond puis il se transforma dans un déchirement de vêtements.

  • Il valait mieux ici…, murmurais-je.

Je tendis à nouveau la main, un grondement sourd remonta dans sa poitrine mais il ne s’enfuit pas. Je posais alors ma paume sur sa tête en douceur. Un léger spasme le secoua le long du dos.  

  • Paul, je suis désolée mais si tu ne te calmes pas, tu sais ce que Jacob va décider ? Il va vouloir qu’on quitte la réserve ou il va te foutre dehors ou pire encore ! Et je refuse qu’on en arrive là…

Il baissa la tête dans un râle. Il savait que j’avais raison. Je caressais le dessus de sa tête puis son encolure argentée, c’était plus facile ainsi…

  • Tu devrais peut-être parler avec Rachel…lui dire ce que tu ressens et pourquoi… elle comprendrait peut-être ? Proposais-je. Elle a peut-être peur de paraître ridicule ou peut-être ne sait-elle pas comment s’y prendre ?

Je continuais mes caresses, sentant qu’il se calmait de plus en plus, écoutant attentivement ce que je lui racontais.

  • Tu devrais peut-être lui montrer ? Murmurais-je.

Il leva ses yeux sur moi et je compris qu’il avait déjà essayé. Je poussais un soupir.

  • Paul, je t’ai toujours beaucoup apprécié et plus encore depuis que je fais partie de votre famille.

Ma main continuait de passer inlassablement sur son poil argenté.

  • Je t’aime comme un frère, murmurais-je (vaguement consciente que le terme était un peu fort mais je le ressentais ainsi), je refuse que tu souffres à cause de moi et je refuse que Jacob et toi soyez en froid à cause de moi…je ne sais pas ce qu’il t’arrive mais on va trouver une solution…je te le promets.

Il secoua sa grosse tête, et je ne sus pas trop ce qu’il pensait mais il ne tremblait plus et je sus que la tempête était passée.

  • Bon…tu devrais filer maintenant…avant que quelqu’un n’appelle la fourrière, rigolais-je, heureuse de l’avoir calmé.

Il se dégagea et fila si vite que je sus que personne ne le verrait vraiment … heureusement qu’à cette heure de la journée, les rues autour de l’université étaient désertes. Je soupirais et repartis vers le parc la tête basse, sachant que je devrais affronter Jake sur cet incident d’ici peu et qu’il ne comprendrait peut-être pas. J’espérais que Paul et lui allaient finir par se réconcilier mais une petite voix au fond de moi me disait que c’était mal parti…

 

* * *

 

 

Dans un silence absolu, je regardais Bella jouer avec son morceau de viande qui traînait dans son assiette depuis maintenant un quart d’heure…Rachel, à ses côtés, n’osait pas la lui retirer, espérant toujours qu’elle finirait par manger mieux que ça. Je lui jetais un regard pendant qu’elle m’interrogeait du sien et elle comprit le message. Elle quitta la pièce et je me levais pour m’approcher de Bella. Je m’accroupis près d’elle et elle sursauta lorsque je lui dis:

  • Bella ? Tu m’entends ? …Bella, il faut que tu manges plus que ça ! Je sais que c’est dur, mais ça ne le fera pas revenir …penses au bébé Bella !

A ma grande surprise, elle hocha la tête. D’habitude, elle se fermait complètement lorsque je lui parlais nourriture. Elle posa sa fourchette et pris un morceau de pomme de terre entre ses doigts. Je n’osais rien dire, de peur que ma voix lui coupe son élan. Elle le porta à sa bouche et l’avala, les larmes aux yeux.

  • Voilà…, murmurais-je en lui tendant un verre d’eau.

Elle me le prit des mains et bu une gorgée, qui fut très difficile à passer car sa gorge était très serrée. Sa main tremblait, je lui repris le verre aussitôt puis, une fois posé sur la table, je capturais ses doigts dans ma main, qui étaient toujours aussi glacés.

  • Bella, je dois partir cet après-midi…Rachel reste près de toi…d’accord ?

Sam continuait les recherches tous les jours et aujourd’hui, c’était à mon tour de l’accompagner.

  • Bella, tu m’as entendue ? Je ne serais pas là…

Elle hocha la tête.

  • Ok, il fait froid dehors, je veux que tu ailles dans ta chambre? Pas sur la terrasse ! D’accord ? Insistais-je.

Elle hocha à nouveau la tête, comme une enfant.

 

* * *

 

 

12 – Impatiente

 

A mon grand soulagement, vendredi arriva très vite et je me sentais excitée comme jamais. Réveillée aux aurores par la pluie claquant contre les vitres, j’avais entrepris de faire mon sac bien avant d’aller en cours, histoire de ne pas perdre de temps. La fermeture éclair de ma valise réveilla Angela.

  • Bella ? Mais qu’est-ce que tu fais ?
  • Excuse-moi si je t’ai réveillée…
  • Mais…mais tu as vu l’heure ? Bougonna-t-elle en mettant ses lunettes et en essayant de regarder sa montre.
  • Oui…désolée…, répétais-je.

Je l’étais mais ma joie de retourner à Forks m’empêchait d’être vraiment contrariée.

 

Le temps tournait au ralenti et j’eu l’impression que ça faisait des heures que j’étais levée lorsque nous commençâmes le premier cours sur le métabolisme. Heureusement pour moi, c’était très intéressant et la matinée passa relativement vite.

Au moment du déjeuner, Angela reçu un appel de Ben et se renfrogna. Je me permis de lui demander ce qu’il n’allait pas, cherchant n’importe quoi qui pouvait me changer les idées ou m’occuper jusqu’au soir. Et puis, elle semblait si triste…

  • Ben reste ici pour le week-end, m’annonça-t-elle.
  • Oh zut…tu avais prévu quelque chose ?
  • Non pas vraiment…

Elle baissait la tête et je vis ses lèvres trembler légèrement.

  • Si tu veux tu peux venir à la Push dimanche ? proposais-je, pensant à la promesse que je m’étais faite de l’inviter.
  • Je ne serai pas à Forks ce week-end Bella…je devais rentrer avec Ben. Je n’ai pas de voiture.
  • Ah mais je peux te ramener ! Si tu veux rentrer chez toi bien sûr…

Elle réfléchissait et je compris qu’elle hésitait entre laisser Ben avec ses copains et avec lequel elle ne pourrait rien faire ou rentrer auprès des siens, retrouver un peu de chaleur familiale. En fait, son hésitation allait bien au-delà de ça…si elle rentrait sans lui, quelque chose allait se briser. Ça serait le début d’un rouage qui mènerait sûrement à leur séparation et même moi, j’en étais consciente. Je n’insistais donc pas et la laissais réfléchir pendant tout le reste de la journée. Jake m’appela pendant la pause de l’après-midi.

  • Je serai là quand tu sors, m’annonça-t-il, joyeux.
  • Euh…en fait, je dois peut-être ramener Angela.
  • Ah…

Je sentis sa déception mais elle fut de courte durée parce qu’il savait que ça ne reportait nos retrouvailles que d’une heure. J’étais heureuse de le retrouver mais si Angela était embêtée, je devais l’aider.

  • Bon, si tu es seule, rappelle-moi, sinon, je t’attendrai à la maison…bien sage.

Je ris en entendant sa voix de petit garçon malheureux. A cet instant, rien ne pourrait entacher ma bonne humeur, j’étais trop heureuse de rentrer à Forks !

En raccrochant, je remarquais qu’Angela semblait nerveuse. Je me rapprochais d’elle en demandant :

  • Tu as pris ta décision ?
  • Oui ! Je rentre avec toi, déclara-t-elle, une lueur d’acier traversant son regard.
  • Oui, alors… il reste le cours de math et je te préviens, dès que la sonnerie retentie, je fonce à la voiture.

Angela me fit les yeux ronds puis lorsqu’elle comprit que je ne plaisantais pas, elle me dit :

  • Dis au prof que j’aurai cinq minutes de retard. Je file dans la chambre faire ma valise.
  • Ok…

Elle ne fut pas longue, après tout, nous ne rentrions que pour deux jours. Le cours était assommant et je tremblais tellement j’étais impatiente que cette fichue sonnerie retentisse.

  • Tu as froid ? Chuchota Angela.

Je secouais la tête et elle fronça les sourcils. Je me dis qu’elle devrait s’habituer car ce genre de mini crise allait certainement se reproduire tous les vendredis.

 

Enfin, la fin du cours arriva et je plongeais ma main à terre pour choper mon sac qui était à mes pieds. Angela me suivait, n’osant pas me retarder. Je dévalais les escaliers, frappais un grand coup dans la porte à double battants pour qu’elle s’ouvre assez grande pour nous deux et courrais sous la pluie jusqu’à la Chevrolet qui n’avait pas bougé de la semaine.

  • Pourvu qu’elle démarre ! Souhaitais-je en m’engouffrant dans la voiture.

Angela lissa ses cheveux mouillés, n’osant encore pas m’interrompre. Ma voiture non plus ! Elle démarra au quart de tour et je ris de bonheur en faisant marche-arrière. Angela leva son appareil et me prit en photo en riant de me voir si excitée.

 

Pendant tout le trajet, elle resta songeuse, pensant sûrement à Ben qu’elle venait de laisser derrière elle. Moi, j’avais des bulles pleins la tête, poussant ma voiture jusqu’à ses limites lorsque la route était belle. Je préférais ne regarder aucun panneau qui m’indiquait le nombre de kilomètres restant jusque Forks sinon, j’aurai fait exploser le moteur. La pluie battante rendait la chaussée glissante et je me dis que je devais quand même faire attention. Un accident m’aurait encore retardé et je ne pouvais pas l’envisager !

 

Enfin le panneau « Bienvenus à Forks » apparu dans un virage, accroché à un pin et je poussais un gros soupir de soulagement. Soudain, mon œil fut attiré par une couleur familière et je vis le loup roux que j’aimais tant, observer attentivement la route. Puis, il leva ses pattes avant et bondit vers la forêt. Je souris devant son impatience, égale à la mienne quand soudain Angela s’écria :

  • La vache ! Tu as vu cette bête immense !

Je tournais brusquement la tête vers elle, pendant qu’elle collait sa tête contre la vitre, dans la direction où Jake avait disparu.

  • Euh non…C’était quoi ? marmonnais-je.

Elle regarda droit devant elle, son visage exprimait une réelle stupeur.

  • Je ne sais pas …un ours peut-être ? Mais tu te souviens l’année dernière, Ben et moi avions vu un monstre noir aussi gros que celui-là ! Je me demande …zut, si le temps n’était pas aussi pourri, j’aurai pu l’avoir en photo... pas grave…

Je n’entendais plus ce qu’elle disait. Je venais de voir à quelques mètres de là la route qui menait à la Push.

  • ça ne t’embête pas si je passe voir Jake deux minutes avant de te ramener chez toi ? la coupais-je, brusquement, oubliant même à quoi elle pensait juste avant.
  • Euh non, bien sûr !

Elle me sourit, attendrie par mon impatience.

Je tournais sur la route qui menait à la réserve puis accélérais jusqu’au chemin de terre qui allait jusqu’à la petite maison rouge. Quand la Chevrolet s’engagea sur le sentier, Angela et moi furent un peu ballottées, ce qui la fit beaucoup rire.

  • Eh, doucement ma belle !

Le chemin était boueux et je ralentis. Mais soudain, mon cœur fit un bond et je poussais un petit cri en le voyant surgir du bois, à une centaine de mètres devant nous, juste avec son short malgré la pluie battante. Je stoppais la Chevrolet et Jake se mit à courir vers nous. Je sautais de la voiture et manquais de glisser à terre. Je parvins à me rattraper à la portière pendant que Jake courrait à toute vitesse vers moi en criant :

  • Bella !!!
  • Oh lala ! s’écria Angela en le voyant arriver.

Mais pour le moment, je me moquais qu’elle se demande ce qu’il faisait à moitié nu, ou qu’elle puisse le trouver trop rapide… ou qu’elle se demande comment il faisait pour courir dans la boue, pieds nus…

  • Jacob !!!! Criais-je lorsqu’il m’attrapa et me fit voler dans ses bras.

J’étais ivre de joie, je riais de bonheur et je m’accrochais à son cou de toutes mes forces. J’enroulais mes jambes autour de sa taille pendant qu’il enfouissait son visage dans mes cheveux, en me faisant tourner.

  • Bella…, murmura-t-il à mon oreille. Comme je t’aime, comme tu m’as manqué…
  • Je t’aime Jake, répondis-je, la tête dans son cou, respirant son parfum qui me rendait si folle. Je t’aime tellement fort…

Nous levâmes la tête en même temps, la pluie dégoulinait sur nos visages heureux et, ne pouvant plus attendre plus longtemps, je l’embrassais avec passion, savourant la chaleur de ses lèvres sur les miennes. Ma tête tournait mais je me sentais revivre. Jake était aussi fou que moi, me rendant mon baiser si furieusement qu’il me plaqua contre le flan de la Chevrolet. Je sentis la voiture tanguer sous le choc. Puis, j’entendis une portière claquer et me rappelais Angela, qui était encore dans la voiture. Je repoussais Jake, gênée. Ce dernier braqua son regard sur mon amie qui, debout sous la pluie, nous regardait en souriant timidement.

  • Je vais rentrer à pieds, déclara-t-elle.

Jacob me fit descendre de lui et je fis le tour de la voiture pour me retrouver rapidement près d’elle.

  • Non, Non ! Désolée…je te ramène.
  • Non Bella, ça va aller…je peux rentrer à pieds, répéta-t-elle. Reste avec lui…vous êtes …tellement heureux de vous revoir, ajouta-t-elle, en souriant tristement.

J’étais embarrassée d’avoir oublié mon amie…il fallait que je me rattrape.

  • J’insiste Angela ! Je te ramène tout de suite. Remonte dans la voiture.
  • Mais Bella…
  • Remonte où je demande à Jacob de t’y faire grimper de force ! Plaisantais-je à demi.

Angela jeta un œil inquiet vers lui et il hocha la tête, les bras croisés, prenant l’air le plus sérieux qu’il connaissait. Alors elle remonta, à mon grand soulagement.

Je retournais près de Jake.

  • Je n’en ai pas pour longtemps.

Il prit mon visage entre ses mains et déposa un baiser mouillé et brûlant sur mes lèvres.

  • Je t’attends, murmura-t-il, le souffle chaud.

Je m’arrachais à lui et remontais dans la Chevrolet, trempée.

 

Je fis marche-arrière comme je pus, priant pour ne pas embourber la camionnette. Jake m’observa faire ma manœuvre jusqu’à ce que j’atteigne la route. Je lui klaxonnais avant de redémarrer, pendant qu’il filait vers les bois.

  • Ces indiens sont vraiment chauds ! Déclara-t-elle en grelottant. Il n’a pas froid comme ça?
  • Non…
  • En tous cas, il est dingue de toi, je n’ai plus aucun doute, continua-t-elle en riant.
  • Désolée Angie…je…j’étais si contente de le revoir. J’ai oublié que tu étais dans la voiture. Je suis une égoïste…
  • Mais il n’y a aucun mal Bella…je comprends, répondit-elle, la voix rauque.

Je tournais la tête vers elle, redoutant une crise de larmes. Elle fixait l’horizon, en se mordant les lèvres. Je posais alors ma main sur la sienne et elle sursauta.

  • Angela…
  • Ce n’est rien Bella…c’est seulement que…vous avez l’air de tellement vous aimez…

J’imaginais parfaitement ce qu’elle ressentait, l’ayant moi-même vécu lorsque j’avais rencontré Sam et Emily. Je savais quelle image on pouvait donner aux autres et même si j’étais triste pour Angela, j’étais heureuse de vivre ce pur bonheur aujourd’hui.

  • En tous cas, tu lui donnes des ailes ! Tu as vu à quelle vitesse il est arrivé ! S’écria-t-elle.
  • Oui…

Je lâchais sa main et déglutis doucement. Si je comptais faire venir Angela à la Push, il faudrait que Jacob soit plus prudent car mon amie était très observatrice.

 

13 – Elle est si belle, je ne me lasserai jamais de la contempler…

 

C’était bien la première fois tiens…la première fois que Bella dormait et que moi, j’étais réveillé. Ainsi, je pouvais l’observer à mon aise. La seule fois où elle avait dormi dans mes bras et que j’étais encore conscient remontait à l’époque où elle ne m’appartenait pas encore et nous n’étions pas seuls dans cette tente…maintenant que je la contemplais, immobile, couchée sur le ventre, la bouche entrouverte, plongée dans un sommeil si profond que même sa respiration semblait silencieuse, je ne pouvais m’empêcher de penser que j’avais vraiment de la chance qu’une fille, ou plutôt qu’une femme, aussi belle soit à moi, à moi tout entière ! Je souris en regardant ses cheveux, encore humides, plaqués contre sa tête…voilà encore un des côtés négatifs de ma condition…Bella semblait toujours sortir tout droit d’un sauna à chaque fois qu’elle restait trop longtemps collée contre moi. Ça me gênait un peu pour elle mais en même temps, ça me plaisait car ça traduisait tout ce qu’elle vivait dans mes bras. Elle était quand même beaucoup moins « affamée » et violente qu’au début mais elle restait malgré tout très enthousiaste et surtout, toujours très à l’écoute de nos corps. Ses caresses dans mon dos me faisaient toujours un bien fou ou lorsqu’elle passait et repassait ses mains dans mes cheveux tout en m’embrassant… Peut-être qu’en faisant ça, elle voulait me montrer que je ne rêvais pas, qu’elle était bien là, sur moi…n’empêche que cette nuit, elle m’avait encore fait décoller.

Je passais ma main sur ses cheveux humides et comme elle ne bougeait toujours pas, je continuais mes caresses sur son dos nu…elle était vraiment magnifique, presque irréelle dans cette lumière de l’aube…j’avais toujours du mal à respirer quand je contemplais son corps. J’aimais la couleur de sa peau, sa couleur pêche au lait. Une peau blanche et fragile comme de la porcelaine, aussi douce que de la soie. Le contraste avec la mienne était saisissant et j’avais toujours peur que mes mains rocailleuses ne soient pas agréables pour elle mais elle ne semblait pas s’en plaindre. Je caressais l’endroit que je préférais le plus chez elle : le creux de son dos, puis la courbe de ses hanches… et elle poussa un léger soupir. Elle était peut-être aussi sensible que moi dans le cou à cet endroit … elle était si belle, elle m’avait tellement manqué…fallait vraiment que je me trouve des occupations pour les semaines où elle ne serait pas là sinon, j’allais devenir dingue. Pendant tout l’été, j’avais réussi à vivre loin d’elle mais à l’époque, les choses étaient différentes. Maintenant, je le sentais, j’allais avoir dur à chaque fois qu’elle me quitterait les lundis matins… mais j’avais voulu qu’elle aille à Seattle et elle semblait bien supporter notre séparation donc ma souffrance passait au second plan. Je retirais ma main car elle commençait à transpirer…elle bougea un peu, gémit et je vis ses paupières s’entrouvrirent doucement. Elle me sourit pendant que mon cœur battait plus fort la chamade.

  • Salut…
  • Bonjour ma chérie.

Elle vint se coller contre moi et je soupirais de bonheur en la prenant dans mes bras. Elle enfouit son visage contre ma poitrine et commença à y déposer des petits baisers légers. J’emprisonnais sa tête entre mes bras et fermais les yeux, savourant le plaisir qu’elle me procurait.

  • Des papillons…, murmura-t-elle.

Je rouvris les yeux, me demandant de quoi elle me parlait.

  • Quoi ?
  • Je réponds à ta question…des papillons. Je veux des papillons gravés sur la fenêtre de la porte d’entrée.
  • Ah ! Tu m’as quand même écouté ? m’exclamais-je en repensant à tout ce que je lui avais raconté cette nuit.
  • Je t’écoute toujours …, répondit-elle entre deux baisers sur mon torse. Ta voix est la plus belle mélodie qui soit à mes oreilles.

J’éclatais de rire et elle vint aussitôt capturer mes lèvres.

J’étais tellement impatient de lui montrer les plans de notre futur maison que lorsqu’elle était revenue de Forks et que nous nous étions empressés de rattraper le temps perdu, je lui avais parlé de tout ce que j’avais fait et des projets que j’avais pendant qu’elle m’embrassait et même pendant notre étreinte. Elle avait fini par me demander de me taire mais mon impatience était toujours là. J’allais démarrer à nouveau ma tirade lorsque, tout à coup, elle se dégagea et une lueur traversa ses yeux.

  • Je meurs de faim !
  • Alors allons-y, fis-je en me levant.

Elle sauta du lit et enfila un de mes tee-shirts qui trainait là puis fonça dans la cuisine.

  • Billy est encore chez les Clearwater ? demanda-t-elle en ouvrant le frigo.
  • Ouais, il n’était pas sûr de supporter…nos retrouvailles.
  • Oh ! s’écria-t-elle joyeusement en sortant un plateau de charcuterie.
  • Bella, tu veux que j’aille en ville te chercher quelque chose ?
  • Non, non, ça ira !

Je remarquais que ses mains tremblaient légèrement pendant qu’elle se coupait du pain.

  • Bella, ça va ?
  • Oui, oui…je meurs de faim !
  • Je vois ça, murmurais-je.

Elle s’enfila une tranche à une vitesse déconcertante puis un morceau de jambon. Je m’assis lentement face à elle, repensant à ce que Sam et la meute m’avait raconté… j’étais très inquiet.

  • Tu ne manges pas assez à Seattle ? demandais-je, pendant qu’elle se coupait une nouvelle tranche.
  • Si…mais ce n’est pas terrible…ça manque de goût…
  • Ah…tu devrais manger plus doucement…
  • Oui, oui papa…, me répondit-elle en souriant. Tu ne manges pas ?

Le fait est qu’elle m’avait coupé l’appétit. Mon angoisse me prenait aux tripes et je ne savais pas comment lui en parler. Pourtant, quand on y pensait,  ça n’avait pas de sens ! Bella ne descendait pas des Quileute, elle ne pourrait jamais changer, même si elle avait reçu de mon sang, ça ne pouvait pas la changer au point que son esprit soit assez fort pour muter. Parce qu’en fait, c’était ça qui était différent chez moi…mon esprit, celui qui descendait tout droit de mes ancêtres qui avaient le pouvoir de quitter leur personne et de parcourir des kilomètres sous leur forme incorporelle. Oui mon corps aussi était différent mais je me refusais de croire que la structure de Bella ait pu changer au point qu’elle devienne un loup-garou. Pourtant, elle était en train de me dévorer le plateau de viande, dès le matin…et elle avait entendu l’appel de Sam…et ils rêvaient tous d’elle en loup…non, c’était impossible ! Pourtant, Carlisle l’avait envisagé…il devait sûrement en savoir plus que moi sur les conséquences de tout ça. J’avais encore le numéro de la sangsue quelque part dans ma tête …

  • Jake ?
  • Hum...
  • Tu ne m’as pas écouté hein ? me reprocha-t-elle.
  • Excuse-moi, je pensais à un truc que je devais faire pour la maison…, mentis-je.
  • On ira voir ça après ! Je te disais donc que j’envisageais d’inviter Angela à manger ici un week-end. Tu serais d’accord ? demanda-t-elle en rangeant enfin le reste de nourriture qu’elle avait épargné.  
  • Oui, pourquoi ?
  • Et bien, je ne sais pas…je ne voudrais pas te l’imposer, marmonna-t-elle.
  • Arrête de raconter des bêtises Bella. Tu peux me ramener qui tu veux ici… surtout si c’est ton amie.
  • Elle est très perspicace tu sais…elle a remarqué ta vitesse hier…il faudrait que tu fasses attention.
  • Ouais enfin, de là à découvrir que je suis un loup-garou, y a quand même une marge tu ne crois pas ? Rigolais-je. Sans insulter l’intelligence de ta copine …
  • Oui mais quand même...

Je l’observais, elle semblait ennuyée. Je me levais pour la prendre dans mes bras.

  • ça ne serait pas plutôt toi le problème ? murmurais-je à son oreille.
  • Quoi ? marmonna-t-elle en battant des cils, surprise que je vois toujours aussi clair en elle.
  • Tu aimerais qu’elle devienne une vraie amie, pas vrai ? continuais-je en plantant mes yeux dans les siens. Tu aimerais tout lui dire …

Elle baissa les yeux et rougit. Je pouvais comprendre son besoin de se confier mais ce qu’elle souhaitait était impossible.

  • Bella, si tu as besoin de parler, tu peux le faire avec Kim ou Rachel…ou Emily !
  • Oui, je sais, souffla-t-elle.
  • De quoi veux-tu parler avec Angela que les filles ne peuvent pas comprendre ?
  • Ce n’est pas ça Jacob, déclara-t-elle en se dégageant. C’est seulement que …je vais passer trois ans avec elle et je vais devoir toujours tout lui cacher …
  • Mais lui cacher quoi ? M’exclamais-je. Que je sois un loup ? Ce n’est quand même pas dur ! Le reste, il n’y a rien à cacher Bella ! Tu vis à la réserve, avec pleins d’indiens qui ne vivent pas comme ton amie…mis à part le fait que nous changeons de forme, je ne vois pas ce qu’il y a à cacher. Ce problème là me concerne, je dois faire attention c’est tout.

Elle hocha la tête et son expression me rappela à quel point elle était déterminée…si Bella avait décidé de mettre au courant Angela, elle le ferait un jour et je ne pourrais pas l’en empêcher. Je soupirais et elle leva brusquement la tête vers moi. A ses yeux, je compris qu’elle craignait de m’avoir fâché. Je me rapprochais d’elle en souriant et la pris dans mes bras.

  • Bella, Angela n’a pas besoin de trop en savoir pour être ton amie…
  • Elle me prend pour une droguée, murmura-t-elle. Quand je pique des crises, que tu n’es pas là …
  • Et bien laisse-la croire ce qu’elle veut ! rétorquais-je. Et puis, je croyais que ça allait ?
  • Oui…enfin parfois je pleure sans m’en rendre compte…ça me prend souvent le soir…et le matin aussi….

Je la serrais contre moi, sachant parfaitement ce qu’elle pouvait vivre et la douleur qu’elle ressentait.

  • Une vraie saleté ce truc là, déclarais-je, durement.
  • Non, c’est merveilleux, chuchota-t-elle. Seulement, ce bonheur a un prix…

Elle releva la tête, toute trace de tristesse avait disparu de son visage.

  • Bon, montre-moi ce que tu as commencé !
  • Bah…y a pas grand-chose en fait, marmonnais-je. J’ai juste fait les plans et couper le bois. Ça va prendre un peu de temps quand même …
  • Pourquoi tu fais ça seul ? Les gars ne peuvent pas t’aider ? Comme ils ont aidé Paul ? s’indigna-t-elle.
  • L’ambiance dans la meute n’est pas au top en ce moment, avouais-je.
  • C’est encore à cause de…Paul ? demanda-t-elle, inquiète.

Je la lâchais, me rappelant que je devais lui parler de lui en effet, mais ce sujet m’agaçait au plus haut point…agacer n’était pas le terme non, ça me foutait les nerfs en boule ! Je serrais le poing, me retenant de l’abattre sur la table… du coin de l’œil, je la vis s’affoler et je me calmais aussitôt. Elle n’y était pour rien.

  • Non, ce n’est pas à cause de lui, répondis-je, assez tranquillement.
  • Jake…pour l’autre jour…
  • Je sais, la coupais-je. Tu n’as pas demandé à ce qu’il vienne te voir mais, Bella, la prochaine fois, évite de le provoquer.
  • Je ne savais pas quoi faire, murmura-t-elle.
  • Tu as eu de la chance qu’il ne te blesse pas…
  • Il ne me fera jamais de mal.
  • Pourquoi j’ai l’impression que tu le protèges ! Explosais-je, malgré moi.

Je savais parfaitement que Bella se fichait de Paul, point de vue sentimental, mais ça me mettait hors de moi lorsque je la voyais le caresser pour soit disant le calmer ! Elle ne se rendait pas compte à quel point il la désirait ? Et ma sœur … bordel, il me foutait vraiment en rogne !

  • Jake…il souffre et je le considère comme un frère.

Mon sang ne fit qu’un tour.

  • Tu sais quoi, j’ai…j’ai l’impression de me retrouver à la place d’Edward ! Criais-je.

Elle sursauta et je m’en voulu de lui infliger ça mais il fallait que ça sorte !

  • Edward, tu te rappelles ? Le mec que tu aimais avant moi !
  • Jacob…
  • A lui aussi tu lui racontais que tu m’aimais comme un frère !

Bon sang, qu’est-ce que je faisais …des conneries, j’étais en train de lui faire du mal comme un imbécile. Mais elle m’énervait aussi à faire comme si il n’avait jamais existé !

Et puis Paul ! Lui, il fallait que je me le fasse sinon je ne me calmerais jamais.

Et voilà…j’avais gagné, elle pleurait.

  • Bella…pardon, demandais-je en lui tendant la main.

Elle secoua la tête et sortit de la maison en claquant la porte. Bon…valait mieux que je la laisse se calmer, ou plutôt que je me calme moi-même.

 

14 – J’ai si peur de la perdre…

 

Au bout de quelques minutes, je remarquais qu’il avait recommencé à pleuvoir et qu’elle ne rentrait pas. Je sortis et ne la vis pas. Un peu paniqué, je fis donc le tour de la maison et la trouvais assise sur ma souche, là où je travaillais habituellement. Je respirais, soulagé qu’elle ne soit pas partie, en me disant aussi que je l’aurai bien mérité.

Je m’approchais d’elle, elle avait cessé de pleurer et fixait ses mains en se mordant les lèvres.

  • Bella … Je peux m’asseoir?

Elle hocha la tête et je m’assis près d’elle. Elle se colla contre moi et j’enlaçais aussitôt ses épaules.

  • Je n’arrive pas à voir son visage, murmura-t-elle tristement après un moment.
  • Quoi ?

Elle renifla et releva la tête, les yeux perdus vers la forêt. Elle se pinça les lèvres et répéta :

  • Edward…je n’y arrive pas…
  • C’est quoi encore cette histoire ? rétorquais-je, froidement, sentant que mon sang avait quitté mon corps.
  • Emily m’avait prévenue…et c’est vrai. Ça changera peut-être comme lorsque j’étais folle au début mais pour l’instant, je n’y arrive pas…

Je déglutis et fermais les yeux….j’en avais vraiment marre de tout ce truc soit disant magique !

  • J’essaie pourtant…je t’assure, continua-t-elle, la voix brisée par les larmes, surtout lorsqu’on me parle de lui…j’essaie…mais tout ce que je ressens c’est un bon souvenir, quelque chose de bien que j’aurai vécu…

Mes mains commençaient à trembler, je les serrais pour ne pas qu’elle le voit mais je le sentais, la colère remontait, lentement, entrainant avec elle pas mal de rancœurs que j’avais depuis ma mutation…

  • Et les autres ? tu t’en souviens ? Réussis-je à demander.

Elle marqua un temps, fronça les sourcils et je sentis la bête gronder en moi.   

  • Oui mais…par flash.

Je me levais d’un bond et fonçais droit vers la forêt…Paul ? L’arbre là ? Paul ? Non…je pris le premier arbre qui me tomba sous la main et en un coup de poing, je le brisai en deux. Il tomba avec fracas contre ceux qui se tenaient derrière. J’avais entendu Bella hurler et maintenant, elle était derrière moi, m’enlaçant par la taille. Ma colère retomba d’un coup et je me mis à genoux puis m’assis complètement par terre, dans la boue. Bella avait suivi le mouvement et me tenait toujours fermement mais cette fois, par le cou. Elle haletait et je regrettais de lui avoir fait aussi peur. Au moins, j’avais canalisé ma rage sur autre chose qu’elle ou Paul, à qui j’avais d’abord pensé, histoire de me défouler.

  • Jacob …
  • Ça va…il fallait que ça sorte, murmurais-je, complètement calmé.

Elle me serra plus fort et je lui pris une de ses mains pour la rassurer. 

  • J’aimerai que tu arrêtes de te mettre en colère Jake…
  • Je sais, mais là…ce n’est pas possible. Edward…il fait parti de toi Bella…tu ne peux pas l’avoir oublié ! Moi, je n’aurai pas voulu que tu m’oublies si tu l’avais choisi lui ! J’ai tellement l’impression que …
  • Quoi ?
  • Mais, ce n’est pas naturel Bella ! Rien de tout ça n’est naturel ! M’écriais-je.

Je me dégageais et me relevais d’un bond…ça aussi ce n’était pas naturel… j’étais en pleine déprime là, je le sentais…une profonde lassitude était en train de m’envahir à nouveau. Le changement radical de Bella (qui heureusement n’avait pas duré !), Paul, cette histoire de rêve et de louve…Bella m’inquiétait, voilà pourquoi j’étais en colère ! Que cette histoire de loup-garou me touche moi, je m’y étais fait, mais Bella ! C’était hors de question ! Elle avait déjà perdu une partie de son identité en s’imprégnant, maintenant elle avait perdu ses souvenirs de celui qu’elle aimait le plus monde avec moi… non, je refusais tout ça ! Ça me rendait dingue ! Je me tournais vers elle et son regard vide me fit froid dans le dos. J’en oubliais ma colère et m’accroupis aussitôt près d’elle.

  • Bella ? Bella ma chérie, ça va ? murmurais-je en posant ma main sur son épaule.
  • Tu parles comme Paul…tu m’as dit que tu ne regrettais pas mais tu me mens Jake ! me répondit-elle froidement, le regard toujours dans le vide.
  • Non, je ne regrette pas ! Mais franchement Bella…ça ne te gêne pas de ne plus maitriser ton esprit ?

Elle leva ses yeux sur moi et ils étaient si noirs que je déglutis. Elle ne m’avait jamais regardé comme ça, même avant … je la lâchais, appréhendant soudain que sa colère ne provoque autre chose, quelque chose que je redoutais par dessus-tout … elle comprit l’effet qu’elle venait de me faire car elle baissa les yeux.

  • Je ne me souviens peut-être pas bien …d’Edward, déclara-t-elle d’une voix blanche, mais je me souviens encore lorsque je t’ai choisi…toi…et c’était bien avant que je te demande de me faire l’amour, cette nuit où je n’étais pas encore imprégnée…

Je voyais où elle voulait en venir et je regrettais d’avoir exposé mes doutes à voix haute.

  • Moi, j’étais déjà sûre de ce que j’éprouvais pour toi à ce moment là et j’avais fait mon choix sans regret ! Confirma-t-elle en se relevant. Si maintenant toi, tu n’es plus sûr de moi …ou de toi ! Si tu crois que je t’aime artificiellement…et bien laisse-moi encore Jake ! File dans la forêt ! Va t’éclater la tête contre un mur ! Va te jeter d’une falaise ! Ou va te battre avec Paul jusqu’à ce qu’un des deux y reste ! Mais moi… je suis sûre de moi, imprégnation ou pas, magie ou pas, et je l’étais bien avant ! Toi aussi d’ailleurs !
  • Bella …

Mais c’était trop tard, elle filait vers la maison. Je baissais la tête, submerger par le remord et aussi la honte d’avoir douté pendant une minute de la sincérité de ses sentiments… quelques instants après, j’entendis une portière claquer et le moteur de la Chevrolet vrombir. Elle avait raison de me laisser, j’étais bon à rien de toute façon. Je n’avais pas le droit de la blesser comme je l’avais fait, surtout au nom de celui qu’elle avait quitté pour moi. Mais voilà, j’étais un imbécile et j’étais mort de trouille.

 

Je ne savais pas trop où elle était partie…j’espérais chez Charlie ou chez sa copine ? Je décidais de ne pas la chercher car elle avait besoin de se calmer et moi aussi. Je continuais donc à travailler, malgré la pluie.

Je te manque tant que ça que tu te sens obligé de lui rappeler mon existence ?

  • Faut croire…, marmonnais-je. En fait, ouais…j’ai l’impression d’avoir perdu mon père…celui qui était là pour rattraper mes conneries si je la faisais trop souffrir… comme le jour où je l’ai jetée de ma vie.

Elle te pardonnera, comme toujours …

  • ça fait deux fois que je n’assure pas, parfois, je ne suis pas sûr de la mériter …

Bella t’a choisi Jacob…tu ne devrais pas oublier ça.

  • Oui, je sais…

Je soupirais, conscient que mon monologue avec « Edward qui n’était pas là » m’aurait valu un allez simple à l’asile dans une autre époque, puis j’entrepris de dégager l’arbre que je venais de pulvériser.

 

Il devait être dans les environs de midi lorsque j’entendis la voiture s’engouffrer sur le chemin. Elle avait tenu bon, presque trois heures. Je ne me retournais pas lorsqu’elle se gara. Elle claqua à nouveau la portière, moins violemment constatais-je. Puis j’entendis ses pas sur le perron et la porte d’entrée s’ouvrir et se refermer doucement. Je respirais, heureux qu’elle soit rentrée à la maison. La pluie n’avait pas cessé, travailler le bois sous l’eau était loin d’être pratique mais ça m’aérait les idées.

Je me demandais quand même ce qu’elle faisait et dans quel état d’esprit elle se trouvait. En fait, je n’osais pas rentrer, peur qu’elle me jette sûrement ? Mais bon, si d’ici ce soir elle n’était pas venue me chercher, je me déciderai quand même à l’affronter.

 

Une heure passa encore et je désespérais qu’elle se calme. Elle avait toutes les raisons de m’en vouloir et je me sentais minable…en plus, je n’étais pas concentré, j’étais en train de couper n’importe comment ce pauvre morceau qui, maintenant, était bon à mettre au feu ! Je levais la tête vers le ciel, laissant la pluie me laver le visage. Soudain, j’entendis la poignée de la porte tourner et des pas feutrés descendre les escaliers en bois. Elle était pieds-nus. Le clapotis de sa marche se rapprochait de moi, je baissais la tête, le cœur battant. Elle prit ma main en douceur et je me tournais vers elle, évitant son regard. J’avais trop peur d’y lire de la colère ou autre chose…J’osais la serrer contre moi et elle m’enlaça en poussant un gros soupir.

  • Je t’aime Jacob, me chuchota-t-elle.

Ma gorge se serra et j’enfouis ma tête dans ses cheveux. Je ne la méritais pas.

  • Regarde-moi, continua-t-elle.

Je relevais la tête, penaud et lorsque mon regard croisa le sien, je me sentis fondre.

  • Je ne veux plus que tu doutes Jake…si je suis avec toi, c’est que je l’ai choisi ! assura-t-elle. Ce qui est arrivé après est la cerise sur le gâteau. C’est vrai que parfois je souffre mais c’est une bonne douleur…j’aime ressentir cette souffrance !
  • Tu es barge Bella, marmonnais-je.
  • Peut-être, rigola-t-elle. Mais je ne regrette absolument pas d’avoir été touché par cette grâce, je vois ça comme un cadeau et je suis très heureuse avec toi.
  • J’aimais bien notre relation avant tout ça, avouais-je d’une petite voix.
  • Je sais, murmura-t-elle en passa une main dans mes cheveux puis sur ma joue. Tu n’aimes pas celle que je suis devenue ?
  • Tu n’as pas vraiment changé en fait, marmonnais-je. J’aurai juste voulu que notre relation soit plus…
  • Humaine ?

Moi qui avais toujours mis un point d’honneur à lui répété que j’étais humain, aujourd’hui, j’étais forcé de constater que ce n’était pas le cas. Sinon, pourquoi avais-je si peur pour elle ? Si peur qu’elle devienne ce que j’étais ….je ne savais même pas trop ce que j’étais en fait … un animal ? Un mutant ? Un monstre ?

  • Tu sais, quand tu doutes comme aujourd’hui, souviens-toi du jour où tu m’as emmené dans la forêt…souviens-toi comme je t’aimais déjà. Souviens-toi du jour où je t’ai annoncé que tu avais gagné…
  • Tu as raison…, soupirais-je. Mais je ne peux pas m’empêcher de penser que maintenant, tu n’as plus le choix…

Elle se tendit et je regrettais encore d’avoir insisté sur ce point. Je savais déjà ce qu’elle allait me dire : je parlais comme Paul.

  • Je pense que ma volonté est assez forte pour que, si je le voulais, je lutterai contre cette imprégnation, déclara-t-elle. Peut-être que cette magie fait que je t’aime plus que si ça n’existait pas, que je te désire plus que si ça n’existait pas mais moi, j’aime ça ! J’aime ce que je ressens pour toi, j’aime cette souffrance et cette aura d’appartenance quand tu n‘es pas là, j’aime cette certitude de rester près de toi toute ma vie. Et même si ça ne te plait pas, sache que j’aime d’avoir tout oublier sauf toi.

Nous étions trempés et je vis les lèvres de Bella frémirent. En fait, elle grelottait et je la pris contre moi pour la réchauffer. Elle posa sa main sur ma joue et se mit sur la pointe des pieds pour m’embrasser doucement.

  • Rentrons Jake…je veux te montrer quelque chose, chuchota-t-elle, ses lèvres contre les miennes.

Quand elle me parlait comme ça, je ne répondais plus de rien. Elle me prit la main et m’entraina jusqu’à la maison. Et en effet, cet après-midi là, Bella me montra quelque chose…elle me montra à quel point elle m’aimait et je n’étais pas prêt de l’oublier.

15 – Entraide

 

Ce week-end arrivait déjà à sa fin. Dans quelques heures, je serai de retour à Seattle, loin d’eux, loin de lui. Emily s’était encore surpassée pour ce repas ! J’étais venue plus tôt que Jake pour l’aider à préparer, mais surtout pour me rendre compte des quantités que je devais prévoir pour toute cette bande d’affamés lorsque ça serait mon tour de les inviter à la maison. Le rôti de bœuf était excellent, je n’avais pas pu m’empêcher de me resservir plusieurs fois, sous les yeux ronds de Quil et Embry qui faisaient déjà le concours de celui qui mangerait le plus de tranches. J’avais beaucoup ri car j’avais réussi à tenir le rythme pendant un petit moment. Mais, là, je le sentais, j’étais gavée. Jake semblait inquiet, je me demandais pourquoi ? Ou peut-être pensait-il déjà à notre séparation de demain ? Sam avait rallumé la cheminée et l’ambiance dans leur maison était si chaleureuse que j’enregistrais chaque détail mentalement pour pouvoir y penser cette semaine quand j’aurai le cafard. Charlie et Sue étaient venus en milieu d’après-midi, ainsi que Seth, qui était toujours très heureux de me revoir. Mon père aussi avait été content que je passe le voir hier matin alors qu’il venait de se faire retirer son attelle, pensant que je ne quitterais pas Jacob du week-end…je ne lui avais bien sûr rien dit car je savais que cette crise était passagère. Il était inutile de l’inquiéter pour rien.

De temps en temps, je croisais le regard de Paul, parfois je le sentais sur moi, mais je faisais mon possible pour rester naturelle, légère, insensible. Le fait est qu’il m’inquiétait beaucoup. Et je voyais que Rachel était aussi inquiète que moi mais sans savoir sûrement pourquoi Paul était aussi tendu. Ses traits étaient tirés, elle semblait très fatiguée ou triste ? Paul semblait nourrir une obsession pour moi qui ne pouvait que mal se finir. En fait, quand j’observais bien Sam, lui aussi semblait ennuyé. J’espérais seulement que ça n’était pas plus grave que je ne le pensais déjà.

 

Jake avait l’air d’être plus détendu maintenant que le repas était terminé. Tout en discutant avec Emily, il me prenait la main, me caressait les doigts ou le genou, il ne me lâchait jamais vraiment. Parfois, il triturait mon anneau ou mon bracelet, moi je savais que je n’aurais jamais rien à triturer car Jacob ne pourrait jamais porter de bague.

Ça n’avait en fait aucune importance, le principal étant que nous soyons ensemble.

Une main se posa sur mon épaule et je me retournais pour découvrir le visage souriant de Billy Black.

  • Alors, pas trop dur cette semaine ?
  • Ça a été, répondis-je en faisant une petite moue qui le fit rire.
  • Tu as vu ce que Jake te prépare ?
  • Oui ! Mais j’aurai aimé qu’il soit aidé…

J’espérais que Billy pourrait en parler aux autres. Ça le concernait aussi après tout. Nous étions dans sa maison en permanence et il se sentait même obligé de la quitter le week-end.

  • Il le sera…ne t’inquiète pas.
  • Hum…ce n’est pas l’impression que j’ai, insistais-je.

Il jeta un regard circulaire sur la meute puis reposa son regard noir corbeau sur moi.

  • J’ai un peu d’argent que je réservais à Jacob pour son mariage mais si vous voulez, vous pouvez l’avoir maintenant, pour vous aider à meubler cette maison, m’annonça-t-il.

Ça me faisait pensé que nous n’avions encore pas annoncé à nos parents notre décision de nous marier, ni à Billy, ni à mon père !

  • Oh…c’est très gentil Billy mais, c’est à Jake que vous devez parler de ça, répondis-je, gênée.
  • Pourquoi ? Cet argent est pour toi aussi et c’est toi qui va décider de ce qu’il y aura ou pas dans votre foyer alors, c’est à toi que je le propose, déclara-t-il, les yeux brillants.

Je compris alors qu’il était vraiment heureux de nous faire ce cadeau et je lui souris, reconnaissante.

  • Alors ça sera avec plaisir Billy. Merci.

Charlie s’approchait justement de nous et posa ses mains sur mes épaules.

  • Qu’est-ce que tu embêtes encore ma fille vieux brigand ?
  • Je crois qu’elle voudrait être embêtée comme ça tous les jours ta fille ! Rigola Billy.

Je levais la tête vers mon père en lui faisant un grand sourire, confirmant la pensée de mon futur beau-père. Billy nous laissa et mon père se pencha sur moi.

  • Ta mère vient le week-end prochain, m’annonça-t-il dans l’oreille.
  • C’est vrai ? Elle vient ici ? A Forks ???

Charlie éclata de rire, il n’avait pas du y croire non plus au départ. Il s’accroupit à mes côtés et ajouta :

  • Oui…elle attend toujours ton coup de fil je te rappelle.
  • Ah oui…

Mes joues s’empourprèrent. Bon sang ! Je n’avais plus donné de nouvelles depuis tellement longtemps, mon esprit étant focalisé sur Jacob.

  • Alors, je te préviens, elle en est restée à toi et « l’autre » en vacances en Europe car elle n’aurait pas reçu ton dernier mail…je te laisse le soin de lui expliquer comment ta vie a changé, se moqua-t-il.
  • Oui…elle risque de ne pas trop apprécier, murmurais-je.
  • C’est clair…s’il y a bien un truc qu’elle n’aimait pas ici, c’était la façon dont vivait les indiens…trop rustre, tu penses ! Heureusement qu’elle ne sait pas tout !
  • Oui…

J’imaginais déjà ma mère ici, parmi la meute…et Phil…

  • Phil vient aussi ? m’enquis-je aussitôt.
  • Non, mais tu plaisantes ! Pas assez de confort pour lui ici…même chez moi. Et puis, je ne pense pas qu’il souhaite me voir.
  • Et elle sait pour toi …et Sue ?
  • Non !

Je lui fis les yeux ronds puis éclatais de rire à mon tour.

  • Comme ça, nous serons deux à lui raconter notre nouvelle vie et avec un peu de chance, elle se sauvera en courant ! Rigola-t-il.
  • Papa !
  • Je plaisante, assura-t-il.
  • J’en doute…

Charlie se releva en me faisant un clin d’œil. Je ne pus m’empêcher de penser que ce jour-là serait riche en émotion car, ça serait l’occasion d’annoncer aussi mon mariage. Ma mère n’allait pas en revenir…mon père puis moi… Charlie aussi serait surpris, bien qu’il doive s’en douter. Parfois, j’oubliais que mon père était au courant de tout et je pensais qu’il était quand même très ouvert.

Je me tournais vers Jake pour lui annoncer la nouvelle.

  • Oui, j’ai entendu, me répondit-il. Tu es contente ?
  • Evidemment !

Il se pinça les lèvres, comme lorsque quelque chose le contrariait et qu’il n’osait pas me le dire. Je compris alors à quoi il pensait.

  • Elle va t’adorer…ne t’inquiète pas !
  • Tu crois ça toi ? Avec toutes mes mauvaises manières ?
  • Même avec ça, rigolais-je. Elle ne pourra pas résister à ton sourire.
  • Faudra encore que j’ai envie de sourire ce jour-là ! rétorqua-t-il, mi-sérieux.
  • Tu n’es quand même pas stressé ?!
  • Bah c’est ta mère …
  • Et alors ?
  • Et alors, elle ne te ressemble pas sinon elle n’aurait jamais quitté ton père.

Cette réponse me surprit mais Jacob ne connaissait pas ma mère. Elle et moi, on se ressemblait mais je constatais maintenant que je ne tenais pas seulement d’elle.

 

Le soir, Billy rentra avec nous, estimant sûrement qu’il nous avait laissé assez de temps pour profiter de la maison. On voyait bien qu’il n’avait jamais été imprégné celui-là ! pensais-je malgré moi. Mais il était chez lui, et Sue était déjà bien gentille de lui laisser sa maison pendant le week-end. Cela dit, Billy était content de passer plus de temps avec Seth. Leah ne revenait presque plus de Forks pour le moment, profitant pleinement de son intimité chez son pharmacien.

J’étais morose pendant le repas, pensant qu’il ne nous restait presque plus de temps ensemble, que le jour arriverait vite et qu’il faudrait que je reparte. En plus, je devais repartir avec Angela, donc quitter Jacob plus tôt que la semaine passée… la nuit tombait déjà, l’hiver s’installait doucement et j’espérais que ce fichu temps ne me bloquerait pas un jour à Seattle pour le week-end ! Je me dis alors qu’au pire, je demanderai à Jake de venir me chercher « à pattes » et que je rentrerais comme ça ! Je pensais à tous ces trucs farfelus lorsque Billy annonça :

  • Sam et Embry viendront t’aider cette semaine Jacob. Ainsi que Seth…

Ce dernier releva la tête vers son père, une tête aussi maussade que la mienne.

  • Ils estiment que la maison sera finie avant l’hiver.
  • Ok…, marmonna Jake.

Son père sourit, satisfait.

  • Merci Billy ! Déclarais-je, sachant que cette initiative venait de lui.

Je ne comprenais toujours pas pourquoi il avait dû intervenir ! Où était le problème ? Il faudrait que j’insiste auprès de Jacob pour en savoir plus.

Une fois le repas terminé, Billy fit rouler son fauteuil jusqu’à sa chambre et s’enferma, nous laissant seuls dans la cuisine.

Nous restâmes au moins une minute tous les deux à fixer la porte en silence, aussi mal à l’aise l’un que l’autre, ayant la même impression de déranger.

  • Jake…qu’est-ce qu’il se passe avec les autres ? Pourquoi ton père a dû demander de l’aide ? Finis-je par demander, rompant le silence.
  • Rien, répondit-il en soupirant.
  • Arrête de te foutre de moi !
  • Je te l’ai dit…l’ambiance n’est pas au beau fixe en ce moment…
  • Mais…c’est quoi le problème ??? M’écriais-je.
  • C’est moi…, murmura-t-il. Je veux la faire seul, cette maison ! J’en suis capable, je n’ai pas besoin de les avoir tous dans mes pattes ! Répondit-il plus hargneusement.
  • Mais Jacob…tu es fort et rapide mais pas encore assez ! On ne peut pas rester indéfiniment ici, m’écriais-je en balançant ma main vers la porte de Billy.
  • J’y arriverai ! Lança-t-il en se levant brusquement.
  • Et tu vas encore être crevé !
  • Je ne ferai pas ça le week-end…
  • Mais ! Mais là n’est pas la question ! M’écriais-je.
  • Pas ici…, me dit-il, les dents serrées.

Je sursautais devant l’expression tendue qu’il affichait. Je me levais et filais vers notre chambre. Il me rejoignit quelques minutes plus tard et lorsqu’il ferma la porte, il soupira :

  • Bella, je sais que tu ne comprends pas mais je t’assure que ça ne me dérange pas de le faire seul ! Je veux le faire seul…j’accepterai peut-être l’aide de Seth et encore…je dois réfléchir.
  • Mais pourquoi ? C’est toi qui t’exclu de la meute ?
  • Je ne m’exclus pas sinon nous ne serions pas aller chez Sam aujourd’hui, me fit-il remarquer.
  • Jacob, parle-moi. Je sais que tu es très en colère après Paul et pourtant, tu ne m’en parles pas…
  • C’est beaucoup plus compliqué que ça Bella et je ne veux pas en parler, pas ce soir !

Je sentais un nouvel orage s’approcher.

  • Bon stop ! M’écriais-je, en levant les deux mains face à lui.

Il se tourna vers moi, surpris.

  • Stop, parce qu’on va encore se prendre la tête…, continuais-je.
  • C’est vrai qu’on s’est pas mal engueulés ce week-end, marmonna Jacob tristement.

Alors, il s’assit sur le lit près de moi et je me blottis dans ses bras. Tout de suite, ça allait mieux. Il posa son menton sur le sommet de mon crâne et respira un grand coup.

  • Bon, qu’est-ce qu’on fait ? Murmurais-je, histoire de détendre l’atmosphère.
  • Rien…

Il se dégagea, me regarda et nous éclatâmes de rire comme deux gosses, que nous étions en fait…

  • Moi je te propose un truc, déclarais-je dans un sourire. On s’embrasse jusqu’à ce qu’on s’endorme.
  • Ça me va…

Nous éclatâmes encore de rire puis je le poussais sur le lit pour me blottir dans ses bras. Ses baisers à l’infini m’apportèrent un immense réconfort et au bout de quelques heures, je finis par sombrer dans un rêve merveilleux où encore une fois, je me promenais avec Jacob dans la forêt, sous un soleil éclatant.

 

 

Le lendemain matin, comme je n’avais pas voulu perdre du temps à préparer mes affaires pendant le week-end, souhaitant avant tout profiter au maximum de Jacob, je dus me lever plus tôt pour le faire et heureusement pour moi, Jake m’aida. J’étais en train de ranger mes chaussures quand on entendit le bruit d’un moteur dans la cour. Billy souleva le rideau et déclara :

  • Ah, voilà la grande !

Au même moment, Rachel ouvrit la porte et s’engouffra dans la cuisine sous son manteau qu’elle avait mis sur sa tête pour se protéger de la pluie battante. Je sentis Jake se crisper.

  • Salut Bella, Salut p’tit frère !

Elle se pencha sur son père et l’embrassa en murmurant :

  • Bonjour Papa…

Puis, elle se releva et se tourna vers moi.

  • Bella, je voulais te proposer de t’emmener à Seattle. ça te dit ?
  • Euh …le problème c’est que je ne suis pas rentrée seule vendredi, je dois prendre mon amie, Angela…
  • Pas de problème ! Paul a le 4x4, c’est un cinq places ! 

Je vis la mâchoire de Jacob se serrer mais il continua de ranger mes affaires, en silence.

  • Non, écoute, je…j’ai besoin de ma voiture là-bas…c’est gentil, préférais-je répondre afin d’éviter sa colère.
  • Tu rigoles, elle n’a pas bougé la semaine dernière ! fit remarquer gentiment Rachel. On ne va quand même pas prendre deux voitures, c’est ridicule.
  • Elle vient de te dire non ! la coupa sèchement Jacob.

Rachel tourna ses yeux vers lui, sans comprendre. Jake soutint son regard sans sourciller et je vis soudain Rachel toute petite face à lui. Elle baissa les yeux puis les releva sur moi en souriant doucement.

  • Bon…alors à plus tard Bella.
  • Oui…
  • Au revoir Papa !
  • Salut ma belle, répondit Billy, tristement.

Lorsqu’elle ouvrit la porte, je vis Paul qui attendait au volant de sa voiture et malgré la pluie qui réduisait ma visibilité, je le vis aussi tendu que Jacob. Cette idée devait venir de Rachel…le problème est que ni lui, ni Jacob, ni moi pouvions lui expliquer le problème !

  • Jacob, c’est ta sœur … tu n’as pas à la traiter comme ça, déclara Billy, durement.
  • Ne te mêle pas de ça papa…
  • Billy a raison, Jake…Rachel ne comprend pas ce qu’il se passe, confirmais-je.
  • Et moi non plus ! Renchérit le père de Jake.
  • Je te le répète : ne te mêle pas de ça !

Le ton de Jacob était sans appel. Je vis Billy hocher la tête et faire faire demi-tour à son fauteuil pour regagner le petit salon.

Génial…super ambiance avant de partir, pensais-je.

Je m’approchais de Jake et posais ma main sur son bras.

  • Jacob, il faut que tu te calmes…je t’en prie…
  • On voit bien que tu ne sais pas à quoi il pense ! Constamment ! Répondit-il d’une voix sifflante.
  • Ce n’est pas volontaire Jake, il en souffre…
  • Arrête bordel ! Arrête de le protéger ! Cria-t-il.
  • Je ne le protège pas, répondis-je doucement, afin que Billy en entende le moins possible. Je veux juste que tu comprennes que je me fiche de ce qu’il pense, moi je ne pense pas à lui et il ne me touchera pas…
  • Ça tu n’en sais rien ! Riposta-t-il, sèchement.
  • Il sait qu’il perdrait tout s’il faisait ça. Moi la première … Jake, c’est notre frère, nous sommes de la même famille, il faut que ça cesse ! ajoutais-je, presqu’en l’implorant.

Jacob hocha la tête. Je ne savais pas trop ce que ça voulait dire mais il semblait se calmer. Il tourna ses yeux noirs vers moi, si noirs que je pouvais y lire toute la colère qui l’habitait. Il posa ses deux mains sur mes épaules.

  • Promets-moi de ne plus jamais le caresser ! Ce n’est pas un chien Bella ! Tu ne t’imagines pas l’effet que ça fait !
  • Jacob…
  • Non ! me coupa-t-il d’une voix claquante. Je ne veux plus jamais que tu poses tes mains sur lui. 
  • Très bien, promis-je, sachant qu’il avait raison de toute façon.

Il me prit alors dans ses bras et me chuchota à l’oreille :

  • Un bon week-end bien prise de tête hein ?
  • Oui…
  • On fera mieux au prochain…

Et, il me berça doucement jusqu’à ce que je décide de le lâcher pour une semaine de souffrance.

16 – Mauvaise ambiance

 

Retrouver le froid de la chambre et le rythme des cours fut pour moi un véritable supplice. La matinée passa avec une lenteur désespérante. En plus du manque que je ressentais pour Jacob, je n’arrêtais pas de penser à Rachel et à la tristesse que j’avais lu sur son visage lorsque son frère lui avait répondu sèchement. Je me dis qu’elle devait sûrement souffrir de cette froideur qui ne semblait pas passer et qui n’avait aucun sens à ses yeux.

Il faudrait quand même trouver une explication plus valable que cette histoire de coup sur la tête ! Pensais-je.

Angela était maussade. Elle avait passé un week-end complet enfermé chez elle avec tous les enfants qui avaient crié pendant deux jours, attendant désespérément un appel de Ben qui n’était survenu que le dimanche après-midi et encore…cinq minutes m’avait-elle dit amèrement. Je me demandais ce que Ben avait dans la tête en ce moment ! Comment pouvait-il laisser passer le jeu avant Angela ? Ou alors, mon amie avait raison…Ben filait un mauvais coton.

L’heure du repas arriva enfin et nous rejoignîmes Mike à la cafétéria.

  • Salut les filles !
  • Salut Mike, répondis-je, seule.
  • Pas trop dur d’avoir quitté ta réserve Bella ? se moqua-t-il gentiment.
  • J’y retournerai bien maintenant, rétorquais-je.
  • Et bien figure-vous que je suis resté ici ce week-end ! Et j’ai trouvé une boite vraiment sympa à deux pas d’ici ! Il faudrait qu’on y aille en semaine…ça vous tente ?
  • Mouais…, marmonnais-je, pas trop décidée à sortir sans Jacob.

Surtout dans ce genre d’endroit où la musique était assourdissante et qui sentait toutes sortes d’odeur dont il valait mieux ne pas connaître l’origine…

  • Angela ? demanda Ben. Ça te tente ?
  • Je ne sais pas…, répondit-elle, crispée. Tout dépend…

Je me dis que ça serait peut-être l’occasion de faire une sortie avec Ben, histoire que je sonde le nouveau personnage qu’il était devenu.

  • Allez Angie … pourquoi pas mercredi ? appuyais-je.
  • On verra…

Je n’insistais pas, voyant que ça ne servait à rien pour l’instant. Angela avait d’abord besoin de revoir Ben avant de décider quoique ce soit. J’avalais mon morceau de viande que je trouvais trop sec et les légumes trop fades, repensant avec nostalgie aux bons petits plats d’Emily.

 

Le cours de chimie débuta après le repas et j’étais heureuse de me retrouver dans un environnement où j’assurais vraiment. Les autres étant trop nouveaux pour que je sache dire si j’allais comprendre ou pas.

Grâce à ce cours, l’après-midi passa beaucoup plus vite et, une fois la séance terminée, je fonçais dans la chambre sans attendre Angela pour pouvoir me retrouver seule lorsque Jake m’appellerait.

Cinq minutes après l’heure que je lui avais indiquée, le téléphone sonna.

  • Oui ! répondis-je aussitôt, le cœur battant.
  • Tu m’attendais depuis longtemps ?
  • Non, non … mais ce fut cinq minutes atrocement longues.

Il rigola de son rire si chaud et je fermais les yeux, m’imaginant qu’il était près de moi.

  • Qu’est-ce que tu as fait aujourd’hui ? Demandais-je. Sam et Embry sont venus ?
  • Non…
  • Jake !
  • Je n’ai pas besoin d’eux Bella…et si tu veux savoir, j’ai bien avancé.

Je soupirais, contrariée par son attitude vis-à-vis de la meute. Qu’il soit fâché après Paul, d’accord mais les autres n’y étaient pour rien !

  • Tu l’as vu aujourd’hui ?demanda-t-il sans juger nécessaire de préciser de qui il parlait.
  • Qui ? répondis-je, faisant mine de ne pas comprendre.
  • Paul…, s’impatienta-t-il.
  • Non, pourquoi ? Il devait venir ?
  • Il est resté à Seattle, m’annonça-t-il. S’il revient te voir, tu me préviens, je monte !
  • Comme si tu n’allais pas le savoir dans la seconde ! Répliquais-je

Je le soupçonnais de passer une bonne partie de sa journée en « loup » pour surveiller Paul à distance à travers Sam dès que c’était possible. Son silence confirma mes doutes.

  • Il ne viendra pas …, ajoutais-je pour le rassurer.

Le problème est que s’il venait, je ne pourrais pas l’en empêcher et encore moins lui cacher !

Angela entra dans la chambre et je raccrochais non sans avoir répéter trois fois « je t’aime » à Jacob qui coupa la communication en riant.

Mon amie se jeta sur le lit en soupirant et je sus qu’elle avait des nouvelles de Ben.

  • Il a passé un bon week-end, c’est ça ? murmurais-je.
  • EX-CE-LLENT ! lâcha-t-elle, une pointe d’hystérie dans la voix.

Je baissais la tête, ne sachant pas quoi lui dire…elle semblait si abattue.

 

Comme prévu, j’eu beaucoup de mal à m’endormir. Grelottante, j’avais dû plusieurs fois mordre l’oreiller pour étouffer mes spasmes de douleur et essuyer mes larmes. Angela n’avait rien vu, ni entendu et je finis par m’assoupir un peu après minuit, les bras enroulés autour de ma taille, me concentrant sur cette douce chaleur rassurante qui m’habitait lorsque Jake était loin de moi.

Mon réveil fut à nouveau difficile à supporter. Mon corps cherchant à nouveau celui de Jacob, je finis par me blottir contre le matelas, la tête enfouie dans l’oreiller, tendue à l’extrême. Je tentais de respirer doucement pour faire passer l'envie de lui qui me tiraillait violemment. A cet instant, j'avais l'impression que Jacob pouvait ressentir mes caresses mentales. Je laissais mes mains courir sur le drap, j'agrippais l'oreiller et j'attendis, murmurant à moi-même des "je t'aime Jake" ou des "tu me manques" telle une prière, jusqu'à ce qu’un bruit dans le couloir me ramène doucement à la réalité. Angela bougea, je me levais assez vite pour foncer à la salle de bain avant mon amie, histoire de me passer la tête sous l’eau froide et d’atténuer les ravages.

 

Angela ne s’aperçut de rien lorsque je sortis de la pièce, trop focaliser sur ses mauvaises pensées qui ne la quittaient plus depuis la semaine dernière.

Elle ne me parla pas de la matinée et je commençais à me demander si elle attendait quelque chose de moi ? Ou si au contraire, j’avais fait quelque chose qui ne fallait pas ?

 

Lorsque midi arriva, je constatais que je mourrais de faim et n’attendis même pas mes amis pour attaquer mon assiette de pâtes lorsque nous fûmes à table.

  • Tu te souviens qu’il y a sport cet aprèm ? me rappela Mike.
  • Et alors ? Répliquais-je. J’ai faim, je n’ai pas assez mangé hier.
  • Tu as vu à la vitesse que tu manges ?

Je lui jetais un regard noir et il tourna les yeux vers son assiette.

Angela n’avait toujours pas parlé. Je commençais à m’inquiéter.

 

Cette séance de sport fut assez mouvementée. Sans raison apparente, une blonde semblait me « chercher » pendant tout le match de basket jusqu’au moment où elle me lança la balle en pleine tête. La violence du coup me fit tomber et Angela (qui n’était décidément pas de bonne humeur) se permit de lui crier:

  • C’est quoi ton problème?!

Visiblement, mon amie avait remarqué l’intérêt que me portait cette fille malgré l’impression d’absence qu’elle me donnait. Mike, qui avait vu la scène depuis l’autre bout de la salle, courut vers moi et m’aida à me relever. Je le remerciais en jetant un regard mauvais à la fille qui retournait dans son équipe, un léger sourire aux lèvres. Angela revint près de moi.

  • Tu la connais ?
  • Non, je ne sais pas, répondis-je en me frottant la tête.
  • En tous cas, ta tête ne lui revient pas ! Plaisanta Mike.

La blonde était à présent entourée d’un groupe de copines et toutes me regardaient en riant. C’est alors que la lumière se fit : cette blonde, je la connaissais, je l’avais même bien agressée il y a quelques semaines ! C’était celle qui s’était collée à Jacob sur le parking du supermarché et elle, contrairement à moi, ne m’avait pas oublié. Je la défiais alors du regard, lui faisait comprendre que j’avais compris le message et que ça ne s’arrêterait pas là. Elle hocha la tête dans un rictus mauvais. Angela, qui avait vu notre échange, s’écria :

  • Eh mais tu fais quoi là Bella ?
  • Finalement, je me suis trompée, je la connais, lâchais-je en ricanant.
  • Et ?

Je ne répondis pas, me contenant de faire rebondir le ballon au sol. Mike rigola et déclara :

  • Bon bah, je vous laisse vous crêper le chignon ! A plus les filles !
  • Oui merci Mike ! Répondis-je en souriant.
  • Bella ? répéta Angela. Où est passée la fille qui voulait être invisible et ne pas faire de vagues ?
  • Elle ne veut plus se faire marcher sur les pieds ! Répliquais-je en lançant la balle à une fille de notre équipe qui attendait pour recommencer le match.
  • Mais, tu ne comptes quand même pas rentrer dans son jeu ? Elle t’a provoqué là ! La prochaine fois, c’est la baston dans la boue !
  • Aucun problème ! Rétorquais-je, consciente que ça ne me ressemblait pas mais pourtant ….J’ai besoin de me défouler ! Ajoutais-je en me pinçant les lèvres, le regard braqué sur la blonde qui souriait toujours niaisement.

J’entendis Angela soupirer et je laissais de côté cette fille pour m’occuper de mon amie.

  • Contente d’entendre à nouveau ta voix, murmurais-je dans un petit sourire.
  • Oh…excuse-moi Bella, répondit-elle en baissant la tête. Je suis de mauvaise compagnie aujourd’hui.
  • Je comprends tu sais…parle-moi si tu veux.
  • Je ne sais plus quoi penser avec Ben, soupira-t-elle.
  • Tu lui as déjà posé la question directement ? demandais-je. Le mettre au pied du mur ?
  • Quelle question ?

Son regard était voilé, elle semblait un peu perdue.

  • Et bien…de savoir s’il veut continuer ou pas ?

Je sentais qu’elle était au bord du précipice pourtant, ce que je lui proposais ne pouvait que l’aider. En restant ainsi à ne pas savoir où elle en était avec lui devait être insupportable à vivre !

  • ça te permettrait d’aller de l’avant, murmurais-je, consciente que ma phrase allait la choquer.

Elle fronça les sourcils et la prof siffla la reprise du match. Nous dûmes nous remettre à notre place et je lui jetais un regard en biais, tentant de déchiffrer l’expression de son visage. Angela se remit dans le jeu, l’air naturel et j’en conclu qu’elle n’était pas encore prête à envisager une rupture.

 

Les après-midis comme ça permettaient toujours aux journées de passer super vite et je poussais un soupir de soulagement lorsque mon amie éteignit la lampe de chevet de notre chambre. Encore une de passée !

Jacob m’avait appelé une minute plus tôt, me souhaitant bonne nuit tout en me rappelant à quel point je lui manquais et qu’il m’aimait. Ses appels journaliers m’aidaient vraiment à tenir le coup et la douleur avant de dormir s’atténuait de plus en plus rapidement. Je gère mieux, pensais-je, fière de moi.

Je me concentrais à nouveau sur cette petite boule chaleureuse et sombrait dans le néant.

 

  • Bella ! Bella réveille-toi !

La voix d’Angela me parvenait à travers mes hurlements. Mais soudain, mon esprit me rappela qu’une armoire et des rideaux n’avaient rien à faire dans une forêt et je réalisais enfin que tout ceci n’était qu’un cauchemar. Je haletais, reprenant doucement ma respiration. Angela me passait la main dans les cheveux et je tournais mes yeux vers elle. Elle était si inquiète !

  • Là…ça va mieux…tout va bien…
  • Oui…dé…désolée…
  • Ça va …mais je pense que tu as réveillé une bonne partie du campus, plaisanta-t-elle.
  • J’aurai dû te prévenir…
  • De quoi ? demanda-t-elle en fronçant les sourcils.
  • Je suis sujette aux cauchemars…je cris assez souvent en fait…
  • C’est pas grave… tant que tu ne sautes pas de la fenêtre ! Rigola-t-elle.
  • Je pensais pourtant que je ne ferais plus ce genre de rêve, marmonnais-je. Je suis heureuse maintenant.
  • Bah, ce Paul a de la chance, tu l’auras bien prévenu…
  • Quoi ?
  • Oui…tu n’as pas arrêté de crier « Paul ! Paul, fais attention ! »
  • Oh…

Le trouble m’envahit. Je repensais alors à ce que m’avait dit ce dernier « je me sens traqué », « tu dis que tu me protèges »…

  • Qui est Paul ? Murmura-t-elle, inquiète devant l’expression que je devais afficher.
  • Un ami Quileute…, répondis-je.
  • Tu as l’air de beaucoup tenir à lui…
  • Oui, c’est un ami…un frère, ajoutais-je en me mordant les lèvres.
  • C’est celui qui est venu te voir l’autre jour ?

Décidément, je ne pouvais rien cacher à Angela ! J’hochais la tête, sachant qu’il ne servait à rien de lui mentir. Et puis, je ne voulais pas qu’elle s’imagine quoique ce soit ! Pourtant, des images très troublantes étaient en train d’affluer dans mon esprit. Mon rêve me revenait par bribes…comme si j’étais en train de le rembobiner pour pouvoir mieux le regarder par la suite, une fois que je serais seule.

  • Je vais essayer de me rendormir, déclarais-je, avec une soudaine envie de m’isoler pour mieux analyser ce que je venais de voir.
  • Oui…si tu as besoin d’en parler, je suis là.
  • Je sais. Merci Angela !

Je me tournais sur le côté pendant qu’Angela regagnait son lit. Elle éteignit sa lampe et la première image m’éclata au visage dans un tourbillon de honte.

D’abord ses mains brunes, plus fines et nerveuses que celles de Jake, sur mon corps, puis ses yeux verts levés vers moi qui se brouillaient, comme lorsqu’il était venu me voir, m’invitant à plonger dedans…dans ses eaux troubles. Ma main sur sa joue... Il semblait si malheureux… ses lèvres sur ma cuisse qui remontaient doucement, déposant des petits baisers légers sur ma peau, sans me quitter des yeux.

Mon estomac se révulsa. Comment pouvais-je rêver de lui ainsi ? Comment était-ce même possible ? Je me concentrais à nouveau sur cette image et me rappelais la suite… quelque chose entraînait Paul loin de moi. Je me relevais, découvrant que nous étions au beau milieu de la forêt. Je le voyais se débattre, crier que je devais appeler Jacob mais je me sentais capable de l’aider seule ! Je me sentais en colère contre cette chose qui entraînait mon ami vers un coin sombre. Je fonçais vers l’intrus et mes doigts se refermèrent sur un voile noir. Un voile que j’avais déjà vu quelque part … Paul avait disparu, je hurlais de toutes mes forces que j’allais le retrouver…que nous allions tous le chercher puis j’avais entendu Angela.

 

17 – Obéissance

 

La journée suivante, je fus d’humeur très maussade. En fait, j’étais très en colère après moi-même. Comment mon esprit avait-il pu m’envoyer ces images? Est-ce que mon subconscient me jouait des tours ? Est-ce que je ne regardais pas la réalité en face ? Non…c’était autre chose car je ne ressentais rien pour Paul mis à part une profonde amitié. Je n’avais aucun désir physique, ni aucune attraction, seulement de l’amitié, de la tendresse et de la peine lorsque je le voyais me regarder tristement. Plongée dans mes pensées, je n’avais pas tout de suite senti mon portable vibrer et c’est Angela qui le tira de ma poche du blouson pour me le coller au visage.

  • Oh, merci !

Aucun numéro sur mon écran…je fronçais les sourcils, me demandant qui ça pouvait bien être.

  • Bella ? C’est Rachel….

Je déglutis avant de répondre.

  • Salut ! Tu vas bien ?
  • Oui…je me demandais si tu étais libre à midi ? J’aimerai qu’on mange ensemble.
  • Euh…oui…bien sûr !

J’espérais qu’elle ne capterait pas mon trouble, ni Angela qui faisait semblant d’être absorbée dans un magasine de mode, pour laquelle, je le savais, elle n’avait aucun intérêt.

  • Alors je t’attendrais devant ta grille, on ira manger dans le parc. Il fait bon aujourd’hui.

Je regardais le ciel à travers la vitre du couloir, en effet, il ne pleuvait pas.

  • Parfait ! A tout à l’heure, midi.

Elle raccrocha et j’enfonçais le téléphone dans ma poche en souriant à mon amie.

  • Je ne mange pas avec vous aujourd’hui.
  • Ok …
  • Je mange avec Rachel, la sœur de Jake, me sentis-je obligée de préciser.
  • Ah oui…Rachel, la copine de Paul…

Décidemment, Angela retenait bien la moindre explication que je lui donnais ! Je regrettais d’avoir passé une heure à lui développer la famille de Jacob et les membres de la meute à mon arrivée au campus. Je soupirais, j’avais vraiment hâte d’être au week-end…

 

Comme par hasard, cette fois le temps défila très vite et je me retrouvais déjà dans la cour à apercevoir ma « belle-sœur » sur le trottoir du campus. De là, j’essayais de deviner son état d’esprit en scrutant son visage mais comme d’habitude, elle ne laissait rien paraître.

  • Salut ! lui lançais-je en arrivant à sa hauteur.
  • J’ai déjà acheté les sandwichs, m’annonça-t-elle en me tendant un paquet, histoire de gagner du temps.

Du temps pour pouvoir discuter de tout ce qu’elle avait à me dire…ça devait être important…je pris une profonde inspiration en prenant le paquet, espérant qu’elle avait pris assez pour moi car je mourrais de faim.

Nous nous installâmes sur un banc froid mais au soleil. L’hiver approchait à grand pas.

  • Alors, ça va ? Tu supportes bien ? me demanda-t-elle.
  • Oui, ça peut aller …et toi ? Tu t’adaptes bien à ta nouvelle école ?
  • Oui…et heureusement que Paul vient souvent me voir…

Et voilà, elle attaquait déjà…même pas deux phrases de répit. Je mordis dans mon sandwich, histoire de me donner une contenance. C’était idiot de ma part mais j’avais l’impression que toute la meute avait été témoin de mon rêve ! Je me sentais tellement connectée à eux depuis cette fameuse nuit où je m’étais imprégnée, comme si un lien invisible nous reliait.

Elle m’observait en coin et je réalisais que je n’avais pas répondu.

  • Oui, tu as bien de la chance ! M’écriais-je aussitôt.
  • Jake ne vient pas parce que tu le lui as ordonné …
  • Euh… demandé oui … c’est moins difficile à gérer que les séparations à répétition, précisais-je, un peu choquée par le terme qu’elle venait d’employer.
  • Bella, dans un couple comme les nôtres, c’est la femme qui dirige, c’est elle qui fait subir l’attraction…et Jake, comme Paul ou Sam ne font que devenir ou faire ce que la compagne veut…

Je lui jetais un regard en biais pendant qu’elle mordait dans son pain. Elle parlait de ça d’une façon si bizarre. Je n’avais pas l’impression de « diriger » Jacob. Comme si c’était des chiens ! La comparaison me fit sourire mais c’était vraiment le sentiment que j’avais par rapport à sa façon de voir les choses. Et elle avait beau me dire ce qu’elle voulait, moi j’avais plus l’impression d’être « l’esclave » de Jacob, j’étais complètement accro à lui, j’aurai pu me traîner à ses pieds pour le supplier de me faire l’amour s’il me le refusait !

Puis je me souvenais vaguement des explications que j’avais eue…surtout une fois où Jacob m’avait dit que Quil serait ce que Claire voudrait …grand-frère, ami puis amant…

Comme je ne répondais toujours pas, elle ajouta :

  • Si tu le voulais vraiment, il serait là tous les soirs…
  • Non, mais ça va, je maitrise bien la situation.

Elle fronça les sourcils et je compris qu’elle réfléchissait à la façon dont elle voulait me dire les choses.

  • Jacob n’a pas l’air de maitriser lui, il semble frustré, murmura-t-elle enfin, les yeux plissés comme son frère.

J’arrêtais de mâcher, surprise par le ton qu’elle venait d’employer. Elle semblait si amer…me tenait –elle pour responsable de l’agressivité de Jake ? En fait, je compris que pour elle, il était comme ça parce que je l’éloignais de moi ! Pour une fille dont le copain se plaignait de son manque « d’activité » c’était quand même gonflé ! Je me retins de lui mettre ma réflexion en pleine face et répondis, assez calmement:

  • Ne t’inquiète pas, Jacob et moi profitons bien l’un de l’autre le week-end… 
  • Oui mais tu ne devrais pas l’empêcher de venir te voir…, insista-t-elle.
  • Je ne l’empêche pas de venir ! M’exclamais-je, agacée.
  • Très bien…excuse-moi. Je me mêle de ce qui ne me regarde pas…je suis un peu à cran en ce moment.

J’avalais mon morceau de pain, lui pardonnant aussitôt. Après tout, elle pouvait dire ce qu’elle voulait, moi je savais où on en était.

  • Tu as l’air fatiguée oui, répondis-je.
  • Oui…souffla-t-elle, le visage crispé.
  • Rachel, tout va bien ?
  • Non…

Et là, contre toute attente, elle se mit à pleurer à chaudes larmes. Je posais à regret mon sandwich et l’enlaçais puis l’attirais contre moi. Elle se laissa faire et pleura un bon moment. Les étudiants qui passaient nous jetaient des regards étonnés et je leur souriais d’un air contrit tout en lui caressant les épaules.

  • Est-ce que …tu sais…pourquoi Jake déteste autant Paul ? réussit-elle à articuler, la tête toujours contre mon épaule.
  • Jacob ne déteste pas Paul, murmurais-je.
  • Il m’en veut, je le sens …

Elle faisait allusion à ce fameux incident du lundi matin…il était temps que je la rassure.

Quitte à inventer n’importe quoi pour ensuite mettre les gars au courant.

  • C’est…c’est une histoire de mec tu sais …une histoire de clan…Jacob voudrait justement bien que Paul rejoigne son groupe mais il refuse…

Elle releva la tête, surprise. Je m’en voulu de lui débiter des mensonges pareils car je profitais de son côté doux et naïf … il était clair que Paul serait la dernière personne que Jacob voudrait dans sa meute !

  • Pourquoi refuse-t-il ? Murmura-t-elle.
  • Et bien…par loyauté vis-à-vis de Sam…et puis, il y a autre chose aussi…
  • Ah oui ?
  • Oui, Paul ne m’aime pas beaucoup tu sais… en fait, il me déteste carrément ! déclarais-je en riant. Pour lui, je serai toujours la fille à …vampires (j’avais eu dur à le dire celui-là !).
  • Mais il t’a aidé la dernière fois…, murmura-t-elle. Il a dépassé ce stade.
  • Non je ne crois pas …notre animosité réciproque ne s’éteindra pas comme ça …je suis désolée mais il n’admet pas que Jake m’ait choisi, pour lui, je suis une traitre…
  • Mais c’est idiot, on ne choisit pas ! Tu t’es imprégnée, tu fais partie de notre famille ! Tu es notre sœur !
  • Oui, mais bon, il y a des sentiments comme ça, qu’on ne change pas en un claquement de doigts, expliquais-je,-le plus sérieusement possible. C’est pour ça que Paul ne rejoindra jamais la meute de Jacob…
  • Oh… je comprends mieux maintenant.
  • Ah oui ?

Ça avait marché ! Il faut dire que notre relation était si houleuse que ce n’était pas bien difficile à croire.

  • Oui car lundi, lorsque je lui ai demandé de venir te chercher, il a d’abord protesté puis il a franchement râlé quand j’insistais, continua-t-elle. Mais je ne lui ai pas laissé le choix tu sais…
  • Oui, c’est nous qui dirigeons hein ! répétais-je, histoire de rester dans son sens.
  • Il était soulagé que tu ne viennes pas…évidemment, maintenant que je sais tout.
  • Oui, une heure avec moi dans sa voiture…imagine le supplice ! Plaisantais-je.

Elle rit doucement avec moi puis sembla réfléchir un moment à ce qu’elle venait d’apprendre.

  • Il t’a vraiment frappé l’autre jour ? demanda-t-elle enfin.
  • Oh oui ! Et, malgré l’amitié que Jake a pour lui, il a estimé qu’il avait été trop loin…mais entre nous Rachel…il m’a rendu ce que je lui avais mis moi-même l’année dernière, ajoutais-je dans un clin d’œil.
  • Tu l’as frappé ?
  • Oui ! Un bon coup de poing !
  • Mais enfin…Bella !
  • Désolée…tu n’étais pas encore avec lui, m’excusais-je en riant.

Elle se triturait le bracelet Quileute que Paul avait dû lui fabriquer, symbole de son engagement à vivre sa vie à ses côtés. Je souris en voyant le petit loup argenté dans ses doigts.

  • J’aime discuter avec toi Bella…, déclara-t-elle dans un soupir. Je …j’aimerai qu’on parle aussi de quelque chose mais c’est gênant.

Je serrais la mâchoire, sachant parfaitement à quoi elle faisait allusion.

  • Mais, visiblement Jacob et toi avez dû régler un problème similaire il y a quelques temps et toute la meute s’en est mêlée alors…j’aimerai que pour moi, ça n’en arrive pas là ! J’aurai trop honte…

Pourtant, elle n’avait pas eu honte de me dire comment je devais gérer mon couple quelques minutes auparavant ! Enfin, elle semblait si désespérée…

  • Vas-y, murmurais-je.
  • Je sens…non, je sais…que Paul n’est pas heureux avec moi.

Je fixais le sol, la laissant continuer. Je me dis qu’en ne croisant pas mon regard, elle aurait plus facile.

  • C’est un peu le contraire de vous je dirais…

Elle devait estimer qu’elle en avait assez dit pour que je comprenne car elle garda le silence.

  • Oh, et bien…qu’est-ce qui te fais dire ça ? Il t’en a parlé ? Demandais-je.
  • Pas en termes clairs…mais j’ai l’impression qu’il attend quelque chose de moi.
  • Peut-être un ordre, plaisantais-je à demi, tentant de reprendre sa logique.

Je souris malgré moi en levant les yeux vers le parc qui n’était pas beaucoup fréquenté à cette période de l’année. Paul allait peut-être me remercier, pensais-je.

 

 

 

* * *

 

Rachel revenait de la cuisine. A ses yeux, je vis qu’elle avait encore pleuré. Je m’approchais d’elle et la pris dans mes bras. Elle sanglota, anéantie et je la berçais doucement.

  • Il ne reviendra pas hein ? Chuchota-t-elle tout bas pour ne pas que Bella l’entende.
  • Chut …
  • Je le sens Paul…il ne reviendra pas…

Je la serrais plus fort tout en ne quittant pas Bella des yeux qui fixait le vide, toujours assise sur le fauteuil du salon.  

  • Tu dors près de moi cette nuit ? murmura Rachel en levant son beau visage ravagé par les larmes vers moi.
  • Oui…si Bella n’a pas besoin de moi, répondis-je sans baisser le regard.
  • Très bien…Paul, je t’aime tu sais…

La porte s’ouvrit et Sam entra pendant que le vent glacé s’engouffrait dans la maison. Je lâchais brusquement Rachel et me précipitais sur Bella pour qu’elle se lève et qu’elle quitte cette pièce, afin qu’elle n’est pas froid. Je la dirigeais vers sa chambre et l’installais sur son fauteuil à bascule près de la fenêtre. Puis, je déposais un rapide baiser sur ses cheveux avant de refermer la porte derrière moi.

En revenant dans la cuisine, Sam m’attendait, le regard furieux et je compris que mon attitude protectrice venait de l’énerver. Tant pis…j’allais encore me prendre un savon mais tant qu’il ne m’en donnerait pas l’ordre, je continuerais à assurer la protection de Bella. Jacob comptait sur moi !

 

 

* * *

 

 

 

18 – Présentations

 

Vendredi…et encore mon état de fébrilité intense durant toute la journée ! Finalement, je détestais cette journée car c’était la plus lente de toute la semaine. Cette fois, Angela rentrait avec Ben. Elle le rejoindrait après les cours et on se reverrait le lundi parce qu’ils avaient apparemment décidé de passer tout le week-end ensemble. J’espérais que tout se passerait bien.

Lorsque la sonnerie retentit, je ne pris même pas le temps de lui dire au revoir et quittais la salle de cours en courant, mon sac sur l’épaule. Mais, dehors, une surprise m’attendait. En levant la tête vers ma voiture, je découvrais Jake, bras croisés, adossé contre le capot et je poussais un petit cri de joie en accélérant le pas. Il riait de me voir dans cet état et me réceptionna sans problème lorsque je sautais dans ses bras, en jetant mon sac par terre. Comme d’habitude, j’enroulais mes jambes autour de sa taille, la tête enfouie dans son cou, le serrant le plus fort possible.

  • Salut ma belle ! murmura-t-il en riant dans mes cheveux.
  • Merci ! soufflais-je à son oreille. Une heure en moins à souffrir !
  • Laisse-le respirer Bella ! Lança Mike en passant près de nous.

Je relevais la tête pour le voir partir vers sa voiture en riant. J’imaginais le spectacle que je devais donner mais me fichais éperdument de ce que les autres pouvaient penser. Jacob se dégagea de mes cheveux et je l’embrassais sans retenue. Puis, il me fit descendre doucement et ouvrit la portière de la Chevrolet.

  • Allez, quittons cette ville de malheur ! déclara-t-il.

Je montais dans la voiture pendant que Jacob balançait mon sac dans le coffre. Puis il monta à la place du conducteur et fit démarrer le moteur. Je m’installais à ses côtés de manière à pouvoir le contempler pendant tout le trajet.

 

Lorsque nous passâmes le panneau de Forks, mon cœur s’accéléra car je savais que nous serions bientôt à la maison et que j’allais pouvoir me perdre à nouveau dans ses bras pendant des heures. Mais, je me relevais brusquement lorsque je ne le vis pas prendre la direction de la réserve.

  • Où est-ce qu’on va ?
  • Je t’emmène chez Charlie, m’annonça-t-il, l’air un peu triste en tournant la tête vers moi.
  • Comment ça tu m’emmènes chez Charlie ? répondis-je froidement.
  • Bella…ta mère est là ce week-end, me rappela-t-il.  

Oh non ! Je l’avais oubliée !

  • Et elle ne pouvait pas attendre une heure ma mère ! Rétorquais-je, quand même agacée.
  • Ton père m’a demandé de t’emmener directement…
  • Jake, tu ne vas pas me faire ça ? m’écriais-je au bout d’une minute où j’étais passée de l’agacement à la frustration.
  • On se voit après, murmura-t-il dans un demi-sourire. Je suis désolé, mais j’ai promis à ton père. Je ne veux pas qu’il soit furax après moi.

Je vis alors que ça l’ennuyait autant que moi et soudain, je pensais à Rachel. 

  • Au prochain chemin vers les bois, tu tournes !
  • Quoi ?
  • C’est un ordre Jake ! annonçais-je en souriant pleinement. Au prochain chemin, tu tournes !
  • Euh ok …

J’éclatais de rire et Jake aussi, comprenant à quoi je jouais. D’habitude, il ne m’écoutait pas aussi facilement mais lorsque ça concernait mes désirs, il était plus réceptif. Il vit un chemin en même temps que moi et s’y engagea aussitôt. Au bout de quelques mètres, il stoppa le moteur et tourna son visage vers moi, en se pinçant les lèvres, se retenant de me sortir un truc du genre « madame est servie ». Je ris à nouveau et grimpais sur lui en faisant attention cette fois de ne pas me cogner la tête. Il me fit un large sourire puis m’embrassa pendant que je passais mes mains dans ses cheveux avec bonheur.

  • Hum, quel pouvoir…, murmurais-je.
  • Arrête un peu, rigola-t-il. J’en ai autant envie que toi…
  • Oui mais même…je suis en train de penser que tu capitules toujours quand j’insiste, chuchotais-je en lui caressant la joue de mon doigt.
  • Bah c’est normal, se renfrogna-t-il. N’importe quel mec capitulerait quand sa nana lui donne l’ordre de faire ça.
  • Peut-être…mais je sais que pour toi, c’est différent…, insistais-je.
  • Ok, si tu le dis. Mais j’aimerai que tu n’en abuses pas !
  • Même pour ça ? le taquinais-je.

En guise de réponse, il m’embrassa en grognant. Mais au bout de quelques minutes, il se dégagea et me rappela :

  • Ta mère nous attend Bella … Ton père va me tuer !
  • Elle attendra bien encore un peu, murmurais-je en continuant de lui déposer des petits baisers sur les lèvres, le nez, le front …
  • Bella …

Il m’agaçait et je plaquais ma bouche contre la sienne pour qu’il se taise. Il finit encore une fois par céder et à se laisser complètement aller, pour mon plus grand plaisir.

 

Je ne savais pas quelle heure il était mais la buée envahissait les vitres de la voiture et je soupirais de bonheur en me calant un peu plus contre lui, constatant que le cuir du siège était bouillant.

  • Nom d’un chien…, marmonna Jacob, ton père va vraiment me tuer !
  • En parlant de chien…
  • Oui ? Répondit-il en souriant.
  • Rachel a une drôle de façon de voir l’imprégnation. Elle dit que …que je peux te contrôler. C’est vrai ?
  • Tu le sais bien, puisque tu viens de t’amuser là…
  • Mais, ça veut dire quoi ? Que je peux te donner des ordres ? Insistais-je.
  • Pas sur tout…mais comme je t’ai déjà expliqué, je peux être ce que tu veux. Ce « contrôle » concerne principalement le couple…je veux dire, on s’imprègne lorsqu’on trouve sa partenaire…sa partenaire sexuelle…, précisa-t-il dans un sourire coquin. Donc tes ordres, s’il y a, se limitent à ce domaine. Autrement dit, si demain tu me dis que c’est fini, que tu ne veux plus faire l’amour avec moi, je t’obéirais…
  • Sans discuter ?
  • Et sans que ça me manque ! Je deviendrais l’ami et ça ne me fera rien. Regarde Quil…il va être privé de ça pendant presque quinze ans ! Rigola-t-il.
  • Mais…tu souffres autant que moi lorsque nous sommes séparés ?
  • Oui mais là, ça serait différent ! Si tu me donnais cet ordre, je ne pourrais que t’obéir ! Je me plierais à ton désir…comme un chien obéit à son maître…tu es mon Alpha, ajouta-t-il en m’embrassant doucement les lèvres.
  • Mais c’est affreux ! m’écriais-je en me dégageant.
  • Pourquoi ? Si je ne suis pas malheureux …
  • Je ne te demanderais jamais ça ! Jamais !
  • J’espère bien ! Rétorqua-t-il, faussement outré.
  • Jake, tu ne comprends pas ! Moi j’ai l’impression que c’est toi qui me domine ! Je ne comprends pas cette vision de Rachel ! J’aimerai d’ailleurs en parler avec Emily, voir si elle le voit comme elle.
  • Oui, elle le voit comme ça aussi…, m’assura-t-il.
  • Mais c’est fou !
  • Toi et moi, c’est toujours différent des autres Bella, on fonctionne un peu à l’envers…il faut voir ça comme une chance.

Je pensais alors à Paul et à sa souffrance. J’hésitais puis me dis que je voulais quand même être sûre d’avoir bien compris.

  • Pour Rachel…c’est aussi différent…je veux dire, que Quil…, marmonnais-je.
  • Je ne comprends pas…
  • Bon ok, pour Paul…c’est différent, déclarais-je d’une voix pas très sûre. Il souffre lui ! Il souffre du fait que Rachel soit moins, enfin je veux dire plus…froide que moi. Pourtant, il ne devrait pas si je suis ta logique.

Jacob s’était crispé dès que j’avais prononcé le prénom de Paul et soupira. Cependant, je savais qu’il s’efforcerait de bien m’expliquer les choses.

  • Concernant Paul, sa « souffrance » ne vient pas du fait que ma sœur est moins « active » que toi, Bella ou qu’elle ne lui demande pas quoi que ce soit.
  • Alors c’est quoi ?
  • Il souffre parce qu’il te désire…sexuellement, ajouta-t-il du bout des lèvres.

Mon cœur s’affola un peu mais je réussis à me contenir. Dans les bras de Jake, c’était différent, je me sentais protégée.

  • Mais comment est-ce que c’est possible Jacob ? Il est imprégné de ta sœur…
  • Tu sais ma chérie, notre espèce a encore beaucoup à apprendre je crois, m’annonça-t-il dans un soupir.

 

Il devait bien être dix-neuf heures trente lorsque Jacob gara la Chevrolet devant la maison et je me doutais déjà en voyant la lampe allumée sur le perron que nous allions nous prendre un savon par mon père qui savait parfaitement que je devais être là depuis longtemps ! Je savais aussi que s’il râlait, ce n’était pas pour notre retard mais pour l’avoir laisser seul avec Renée.

Il ouvrit la porte avant même que je ne toque. Son regard furieux passa de mes cheveux (que je savais dans un état épouvantable) au ciel étoilé complètement dégagé, puis sur Jacob qui ne savait pas lui mentir (même quand il ne disait rien), et encore sur moi avant de ronchonner :

  • Vous revenez d’où ? De la piscine ? Tu ne pouvais pas venir directement pour une fois ?
  • C’est bon Charlie, rétorquais-je, souriant à demi de sa réaction si prévisible.
  • Ta mère t’attend Bella !
  • Je sais ..., répondis-je en lui passant devant.

Renée m’accueillit, un large sourire aux lèvres en me prenant dans ses bras, pas du tout fâchée par mon retard. Ce qui calma aussitôt Charlie qui finit quand même par serrer la main de Jacob en déclarant :

  • Je ne t’avais pas dit « tout de suite » ?
  • Bah si … mais …, l’entendis-je marmonner.
  • Oh c’est bon ! Lâcha mon père en filant vers la cuisine.  
  • Ma chérie ! Murmura-t-elle dans mon oreille. Je suis heureuse de te revoir !
  • Oui, soufflais-je, ça fait longtemps…
  • Comme tu es belle ! Laisse-moi te regarder ! Tu es …rayonnante !

Je rougis de plaisir en tournant mon visage sur Jacob qui était resté en retrait près de la cuisine.

  • Merci maman…

Renée suivit mon regard et sourit. Je me dégageais et allais prendre la main de Jake pour l’amener vers ma mère qui leva des grands yeux sur lui lorsqu’il se trouva devant elle.

  • Jacob Black…, déclara-t-elle lentement, sur un ton qui en disait long. J’entends tellement parler de toi ! Tu as sacrément grandit !

Nous fîmes tous les deux les yeux ronds, étonnés que ma mère semble le connaître en personne. Après tout, je lui avais beaucoup parlé de lui mais dans mes mails et Charlie lui en faisait l’éloge depuis le début à chacune de leurs conversations téléphoniques, mais je ne me rappelais pas qu’elle ait rencontré.

  • Oui, nous éclaira-t-elle, je t’ai connu petit et je t’ai aperçu avec Billy lorsque je suis venue l’année dernière.

Ma mère se rappelait donc aussi de Jacob enfant alors que moi non. Je me sentis à nouveau frustrée.

  • Ah…bonjour madame…, répondit-il tout sérieux en lui tendant sa grande main libre.
  • Renée, le coupa-t-elle, en lui serrant juste les doigts dans un geste affectueux. Pour moi, il n’y a pas de madame ! J’ai horreur de ça, rigola-t-elle, le visage crispé.

Il semblait si stressé que je lui serrais la main que je tenais en riant doucement.

Une ombre traversa le visage de ma mère pendant une seconde puis, elle me prit par l’épaule et m’entraina vers le canapé. Je lâchais Jake qui se sentit soudain bien seul.

  • Alors ? Raconte-moi ! Comment ça se passe à Seattle ?

L’attitude de Renée me surprenait. Elle n’était pas impolie mais elle me voulait pour elle toute seule et, déçue qu’elle agisse ainsi avec l’homme que j’aimais, je mis un certain temps à rassembler mes idées avant de lui répondre :

  • Et bien…pour l’instant, c’est intéressant. Je suis dans une bonne classe et je partage ma chambre avec une amie.
  • Super ! S’écria-t-elle.

Je ressentis une légère pointe d’hystérie, comme si elle se forçait à paraître intéressée ou contente ? Je ne savais pas trop comment l’interpréter… Jacob s’était adossé contre le mur de l’entrée de la pièce, bras croisés, et nous observait en silence.

Charlie revint de la cuisine avec des verres, une bouteille et des petits fours que je reconnus aussitôt pour venir du boulanger de Forks. Je fus à nouveau surprise, mais cette fois par les efforts de mon père.

Il posa le plateau sur la table, tendit un verre à Jake qui l’attrapa aussitôt et je cru pendant un instant qu’il allait le boire cul-sec mais il se retint, son regard noir fixé sur moi. Je lui souris faiblement puis concentrais à nouveau mon attention sur ma mère.

  • Et toi ? Pas trop dégoûtée de revenir à Forks ? Plaisantais-je.
  • Oh…je n’ai pas que des mauvais souvenirs ici Bella.

Mon père me jeta un rapide coup d’œil avant de s’asseoir sur le fauteuil face à nous. Jacob n’avait toujours pas bougé et je n’osais pas lui demander de venir près nous, sachant qu’il préférait rester à l’écart pour le moment. 

  • Il fallait bien que je vienne ici puisque tu n’as plus l’intention de quitter cet endroit d’après ce que j’ai compris, annonça-t-elle en riant à demi.

Charlie se renfrogna dans son fauteuil.

  • Oui, écoute maman…je suis désolée…, marmonnais-je.
  • Non, non, il n’y a pas de mal ma chérie ! ça ne me dérange pas de monter ici de temps en temps …
  • Comment va Phil ? demandais-je aussitôt, espérant que ce malaise qui ne nous quittait pas depuis le début allait vite se dissiper.
  • Oh, il va bien ! Toujours à ses petites occupations…tu le connais !
  • Oui…

Renée prit son verre et je la regardais boire doucement le liquide doré, me demandant pourquoi je ne me sentais pas bien. Quelque chose clochait ! Ma mère n’avait plus ses petites bulles pétillantes dans les yeux qui la rendaient si rêveuse à mes yeux. Y avait-il un souci avec Phil ? Avec moi ? Pourquoi était-elle si …angoissée ? Je vis du coin de l’œil Jacob poser son verre vide puis il déclara en s’avançant vers nous :

  • Je vous laisse en famille…je repasserais demain.

Mon père était surpris mais n’eut pas le temps de répondre que ma mère s’écria :

  • Oh non ! Reste Jacob… Bella ne sera pas contente si tu pars. Et nous non plus !

Mais je savais qu’il était inutile d’insister. Jake avait comme moi sentit le trouble de Renée et ne voulait pas s’imposer. Mon cœur se serra mais je m’entendis répondre :

  • Sam a besoin de lui à la réserve…il reviendra demain.
  • Mais j’avais prévu pour toi ! S’écria mon père qui je le savais, avait du acheter trois fois plus de viande que d’habitude.
  • Je mangerais demain, répéta Jake dans un grand sourire. Ne t’en fais pas Charlie.

Je me levais du canapé et le rejoignis pendant qu’il saluait d’un geste mes parents. Une fois dehors, je l’enlaçais tendrement contre moi, profitant de sa chaleur dans le froid de la nuit.

  • On se voit demain ?
  • Tu ne viens pas me chercher après ? murmurais-je tristement.
  • Je pense que ça serait mieux que tu dormes ici Bella…ta mère a besoin de toi.
  • Je ne sais pas ce qu’elle a…il faut l’excuser.
  • Pas de souci ! Je t’aime ma chérie, répondit-il en m’enlaçant.
  • Moi aussi, soufflais-je en le serrant plus fort contre mon cœur.

Il se dégagea, m’embrassa amoureusement puis me quitta pour filer vers la forêt derrière la maison. Je ressentis un grand vide puis comme une main chaude qui me soutenait entièrement et souriais lorsque je rentrais à l’intérieur. 

 

Ma mère ne se détendit pas mais moi si, car je savais qu’il était inutile que j’aborde le sujet « mariage » ce soir. Je me concentrais donc sur ce que Renée me racontait, ces derniers hobbies, les derniers livres qu’elle avait lus…sa vie quoi ! Charlie et moi l’écoutions, souriants, chacun mettant de côtés tous les mots qu’on avait préparé, sachant parfaitement qu’il faudrait quand même que ça sorte avant la fin du week-end.

 

Charlie nous quitta quelques minutes pour préparer le café et je fus surprise que ma mère me dise, en me prenant la main :

  • Tu as l’air heureuse, Bella…je suis vraiment contente pour toi.
  • Oui, je le suis maman…

Son regard se posa sur ma bague et je la vis sourire.

  • C’est sérieux hein ? Encore plus qu’avec Edward ?

Ma gorge se serra face au souvenir qu’elle évoquait, mais je réussis à répondre:

  • Oui, on comptait vous en parler ce soir mais bon …
  • Et bien, n’oublie pas de le faire demain, déclara-t-elle en me souriant tendrement.

Je constatais que l’idée ne lui déplaisait pas, pourtant, elle m’avait toujours dit de ne pas me marier trop jeune, de ne pas faire les mêmes bêtises qu’elle ! Elle prit mon anneau entre ses doigts en souriant, l’air absent.

  • Elle est magnifique…Jacob a très bon goût.
  • Oui…elle est vraiment belle et je l’aime de tout mon cœur.
  • J’ai vu ça oui…
  • Ah bon ?

J’étais étonnée que Renée ait eu le temps d’analyser notre relation vu le peu de temps que Jake était resté. Mais elle était si perspicace et observatrice…elle me sourit et murmura, tout en me caressant les doigts :

  • Tes yeux s’allument quand tu es près de lui ou lorsque tu le regardes. C’est encore différent d’avec Edward. Avec lui, tu étais comme…possédée, dépendante…un peu folle, rigola-t-elle doucement. Ça me mettait mal à l’aise, tu le sais ..., me rappela-t-elle dans un regard. Avec Jacob, tu es radieuse, amoureuse, maternelle…tu n’agis pas comme un satellite, tu sembles te fondre en lui…comme si vous étiez liés par un beau fil lumineux.
  • Maman, rigolais-je, amusée par sa manière bien à elle de toujours voir les choses. Tu es trop romantique.
  • Tu crois ? murmura-t-elle un peu tristement. Mais en tous cas, il dégage une sacrée force…tu seras toujours en sécurité avec lui.
  • Oui, c’est un protecteur, affirmais-je, amusée de l’appeler ainsi alors que c’était sa véritable fonction en tant que loup-garou.

Je me demandais si cette idée ferait peur à ma mère ? Elle qui aimait tant le surnaturel… en y pensant, je n’aurai vraiment pas pu être différente avec des parents aussi prédisposés à accepter l’extraordinaire. Charlie revenait de la cuisine et ma mère me lâcha.

La soirée se déroula tranquillement et mon père fut étonné lorsque j’annonçais :

  • Bon, je vais chercher mon sac.
  • Tu dors ici ?
  • Oui, ça pose problème ? demandais-je, réalisant soudain que mon père avait peut-être donné mon lit à Renée.
  • Non pas du tout ! rétorqua-t-il.
  • Bon…

Je les laissais, sortis pour récupérer mes affaires puis montais à l’étage. Une étrange sensation m’envahit lorsque je pénétrais dans cette chambre où j’avais connu des moments aussi sombres qu’heureux. Instinctivement, mon regard se posa sur la fenêtre et malheureusement, seule l’image de Jake en train de se faufiler au travers me parvint. Les autres souvenirs étaient occultés et je soupirais, sachant qu’il était inutile que je fasse l’effort de les retrouver. Rien n’avait bougé depuis ma visite éclair d’il y a quelques semaines, lorsque j’étais venue comme une furie récupérer le peu d’affaires dont j’avais besoin pour vivre à la réserve. Je souris en découvrant le tee-shirt noir de Jacob en boule sur mon oreiller, là où je l’avais laissé avant tout ça et cette fois, un souvenir brulant refit surface. Cette soirée là avait été le déclencheur de tout et les promesses que j’avais ressenties dans ses bras ne m’avaient pas déçue. Je sentis une présence derrière moi et me retournais pour trouver mon père sur le pas de la porte.

  • J’y fais le ménage toutes les semaines, déclara-t-il. Sauf sur ton lit, ajouta-t-il en faisant un geste gêné vers mon oreiller.
  • Nostalgique papa ? Me moquais-je affectueusement.
  • Un peu, soupira-t-il. Mais ça ne dure pas longtemps.
  • Tu lui as parlé de Sue ?
  • Non, pas encore…elle est trop absorbée par autre chose dont elle nous parlera quand elle se sentira prête.
  • Toi aussi, tu l’as remarqué…, murmurais-je.
  • Oui, j’espère que tout va bien avec Phil…, soupira-t-il.
  • Oui moi aussi.
  • Bon…je lui laisse ma chambre et je dors sur le canapé.
  • Ok…
  • Je suis heureux que tu dormes là cette nuit Bella.

Je lui souris puis vint me blottir contre lui, et je le senti prendre une profonde inspiration. Je remarquais alors seulement maintenant qu’il ne portait plus son attelle.

  • ça va ta cheville ? demandais-je.
  • Oui, elle s’est bien remise …malgré le fait que je l’ai autant malmenée depuis l’accident.

Je le serrais plus fort contre moi avant qu’il se dégage et qu’il parte rejoindre Renée.

 

19 – Renée

 

Sa main bien familière me caressait la joue et je me réveillais doucement, découvrant le visage triste mais souriant de ma mère au-dessus de moi. Je tournais la tête vers mon réveil pour découvrir qu’il n’était qu’une heure du matin. Je me relevais d’un coude, surprise et un peu angoissée car je savais que le moment était venu…celui où ma mère allait m’annoncer ce qu’il n’allait pas.

  • Maman ? Tout va bien ?
  • J’aime te regarder dormir, tu es si belle.

Je lui souris mollement et elle baissa les yeux, consciente que j’avais compris.

  • Bella, ma chérie…je…je ne sais pas trop comment te le dire…je ne voulais pas t’en parler mais après tout, tu as le droit d’être au courant …
  • Maman, tu me fais peur…

Son visage se crispa et des larmes perlèrent à ses paupières.

  • Bella…on vient de me diagnostiquer la maladie d’Alzheimer, déclara-t-elle calmement.

Je la regardais, hébétée, ne sachant pas très bien si cette maladie était très grave ou non, ne sachant pas si je devais m’effondrer ou non…

  • Bon, la maladie n’en est qu’à son début et je suis encore assez jeune donc elle va mettre du temps à évoluer…
  • C’est quoi cette maladie ? La coupais-je brutalement.
  • Et bien, c’est une maladie qui touche le cerveau…plus précisément, la mémoire.
  • C’est la maladie où tu ne sauras même plus qui je suis ? M’alarmais-je.
  • Oui Bella…, affirma-t-elle dans un souffle.

Je mis ma main sur ma bouche pour étouffer le sanglot qui venait de sortir de ma gorge mais les larmes affluèrent abondement, sans même que je ne cherche à les retenir. Ma mère me prit dans ses bras, pleurant à son tour et je la serrais fort, ma tête bouillonnante de milliers de questions et d’angoisses face à ce que l’avenir serait.

  • Oh maman, sanglotais-je. Maman mais…mais…est-ce que tu vas …
  • Non ma puce…pas comme ça, pas tout de suite et puis, je suis encore jeune, je vais faire travailler ma mémoire, mon cerveau, pour ralentir le processus…je serais suivie par de bons médecins…
  • Il …n’y a pas…de traitement ?
  • Non…pas vraiment…mais j’aime autant être franche avec toi. Quand j’aurais atteint l’âge de soixante ou soixante cinq ans, il y a de grandes chances pour que je ne me souvienne de rien…sauf peut-être de mes plus vieux souvenirs, m’expliqua-t-elle, ses yeux plongés dans les miens, essayant de me rassurer. C’est pourquoi, je veux en profiter dès maintenant et avoir pleins de souvenirs avec toi pour m’en rappeler lorsque je serai vieille ! Que je ne me souvienne pas de mon petit déjeuner ou de l’infirmière qui me soigne à ce moment-là n’aura aucune importance si je peux nourrir mon esprit des instants les plus beaux de ta vie !
  • Mais maman…nous habitons si loin l’une de l’autre !
  • Je sais Bella…c’est pourquoi je ferai l’effort de venir souvent te voir, même si je déteste cet endroit ! Et j’espère que toi aussi, tu viendras plus souvent ? demanda-t-elle dans un sourire tendu.
  • Oh oui ! Oh oui je viendrais souvent te voir ! M’écriais-je en la serrant à nouveau dans mes bras.

Nous restâmes longtemps ainsi, à nous bercer mutuellement et pendant un instant, je regrettais de l’avoir quittée pour venir m’installer avec Charlie mais une voix au fond de moi me rappela que ça n’aurait rien changé…que je n’aurais pas pu empêcher cette saleté d’empoisonner le corps de ma mère…j’aurai pu passer plus de temps avec elle, mais elle n’allait pas mourir demain ! J’avais encore le temps de profiter d’elle.

  • Pourquoi ne viens-tu pas t’installer ici ? M’écriais-je soudain.
  • Non Bella…ce climat ne convient pas à cette maladie…il faut du soleil, il parait que ça rend les gens heureux, plaisanta-t-elle.
  • Maman, tu devrais y réfléchir, insistais-je.
  • Si je ne supporte pas ton absence, j’y penserai ma chérie, je te le promets.

Pour ma part, je savais qu’il m’était impossible de quitter Forks, plus maintenant. Jacob ne pouvait pas partir de la terre de ses ancêtres et je ne pouvais plus me passer de lui donc je me retrouvais dans une impasse, aussi égoïste que ça pouvait paraître. Cette pensée me mit mal à l’aise, je ne tolèrerais pas que ma mère pense que j’étais égoïste ! je savais que Jacob m’interdirait de tout lui expliquer et pourtant, je ne pouvais pas laisser Renée dans l’ignorance !

Après tout, pensais-je amèrement et avec une certaine ironie, elle l’oubliera ! Mais en attendant, il fallait qu’elle comprenne pourquoi je ne pouvais pas quitter cet endroit.

  • Maman…je ne peux pas revenir vivre près de toi…, annonçais-je.
  • Je sais Bella, je ne te demande rien.
  • Non, écoute-moi. Je ne peux plus quitter Forks pour une raison très simple : je fais maintenant partie de la famille de Jacob.
  • Pas encore ma chérie…
  • Maman, viens près de moi, s’il te plait, insistais-je, j’ai quelque chose à te raconter et je crois que ça va prendre toute la nuit.

Renée rigola tout en reniflant puis se leva, fit le tour du lit et vint se mettre contre moi. Je me blottis dans ses bras, l’enlaçant très fort puis je débutais ma longue tirade, sans même me laisser le temps de changer d’avis…une longue confession, qui je le savais, allait la surprendre et la ravir plus que tout, elle qui rêvait de vivre une aventure fantastique, elle qui avait quitté Forks parce qu’elle trouvait cette ville déprimante et pas assez merveilleuse, elle qui ne se doutait pas qu’elle était passée à côté de la vie la plus extraordinaire qu’il soit !

20 – Je vais finir par croire qu’on n’en sera jamais débarrassé …

 

Encore une nuit tout seul mais cette fois, c’était pour une bonne cause. Finalement, Bella n’avait pas eu tout à fait tort, Sam me réclamait. J’espérais quand même qu’elle n’avait pas dit ça parce qu’elle avait entendu son cri ! Il faudrait que j’éclaircisse ce point avec elle mais pour l’instant, je préférais croire qu’elle avait menti pour m’aider à m’éclipser de cette ambiance d’enfer…je m’étais senti vraiment de trop entre ces trois-là ! La mère de Bella m’avait clairement ignoré après son accueil pourtant assez chaleureux. Bella avait eu l’air inquiète, je voyais encore ses sourcils se froncer tout en observant sa mère…quelque chose ne tournait pas rond et il avait mieux fallu que je les laisse entre eux.

Sam était aussi assez préoccupé mais pour tout autre chose. Embry et Quil étaient persuadés d’avoir senti à nouveau l’odeur des vampires mais ils étaient incapables de dire du quel ! Je m’étais légèrement énervé devant leur incompétence, complètement inconcevable de la part d’un loup-garou !

  • Mais enfin ! C’est quand même pas compliqué ? Ils étaient sept ! Sept odeurs à retenir !
  • Moi je suis sûr que c’était le costaud ! avait répondu Embry.
  • Non ! Celui-là, je me suis souvent retrouvé près de lui, avait affirmé Quil. Ce n’était pas lui !
  • Je ne peux pas croire que vous ne soyez pas capable de les identifier ! Avais-je insisté, hors de moi.
  • Et bien on y retourne si tu veux ! Avait rétorqué Quil.
  • Et c’était où ?
  • Bah…près de la villa des Cullen, avait marmonné Embry.

J’avais jeté un regard à Sam, cherchant à comprendre ce qu’ils étaient partis faire là-bas.

  • ça nous arrive de patrouiller dans le coin, m’avait-il répondu.
  • Mais ! Mais ils sont partis ! Avais-je riposté, agacé par leurs manies à continuer de jouer les gardiens alors qu’il n’y avait plus personne !
  • Je te dis qu’on a senti la sangsue là-bas !
  • Vous auriez du rentrer dans la maison tant que vous y étiez ! je suis sûr que la puanteur y était encore plus forte là-bas !
  • Jacob …
  • Non Sam, c’est ridicule ! On dirait que vous vous cherchez une occupation ! Ils vont trainer autour de la crypte… comment veux-tu que ça ne sente pas autre chose que le vampire !
  • Ce n’était pas l’odeur des Cullen, avait répondu Sam, patiemment.
  • Tu y étais ? Avais-je rétorqué, un peu plus fort que je ne le voulais.

Sam avait baissé la tête, se balançant sur ses pieds.

  • Très bien ! Puisque tu le dis ! M’étais-je écrié, recommencez à monter la garde ! Mais ça sera sans moi ! Et dans dix ou vingt ans, quand l’odeur aura disparu et que vous ne saurez même plus pourquoi vous êtes là, je passerais vous voir et je me foutrais bien de vous tiens !

Ils m’avaient tous regardé, ne sachant pas trop s’ils devaient continuer à croire à leur idée ou se rallier à la mienne. Devant leur inaptitude à prendre une décision, je les avais laissés en plan et étais parti continuer les fondations de ma maison qui devait être finie avant l’hiver.

 

Mais dans la nuit, les regards hébétés de Quil et Embry et cette histoire d’odeur m’avait turlupiné et j’avais filé vers la villa pour vérifier par moi-même les propos de mes frères.

Je n’avais pas eu besoin d’être trop près de la maison pour sentir l’intrus ! J’avais stoppé net, tous mes sens en alerte, cherchant dans le noir où se trouvait la sangsue mais en quelques secondes, l’odeur avait filé, me laissant sur mes gardes pendant encore deux heures. La puanteur était enregistrée dans mes narines, rien à voir avec les Cullen ! La prochaine fois, je la détecterais plus tôt ! En attendant, je devais des demi-excuses à mes frères (oui parce qu’ils n’avaient quand même pas été foutus de faire la différence !) et il fallait qu’on mette un plan en place pour la prochaine visite de cette créature.

J’étais retourné directement chez Sam pour en discuter avec lui et nous avions convenu que chacun monterait la garde autour de la crypte à partir du matin. Mon clan et celui de Sam avaient été assez sympas avec moi (malgré le fait que j’avais franchement mis en doute leur jugement) : mon tour ne se ferait que lorsque Bella serait retournée à Seattle.

 

En arrivant devant la maison de Billy, je fus surpris de trouver la mère de Bella sur le banc du perron, à contempler le vide puis à me sourire chaleureusement lorsqu’elle me vit approcher. Elle se leva et je remarquais que son attitude avait clairement changé par rapport à la veille. Elle semblait plus sereine, plus heureuse…

  • Bonjour Jacob ! m’accueilli-t-elle dans un grand sourire, les yeux brillants. 
  • Bonjour madame…Renée ! marmonnais-je.

Elle tendit les bras et je compris qu’elle voulait m’embrasser. Je me penchais et elle me prit par le cou puis me planta un baiser sur la joue.

  • Bella t’attend avec impatience, elle est dans sa chambre, m’annonça-t-elle en me serrant contre elle.
  • Très bien, merci ! répondis-je, un peu déstabilisé par la lueur qui habitait son regard lorsqu’elle se dégagea.

Elle me caressa la joue puis me lâcha. Troublé, je rentrais dans la maison, saluais Charlie qui préparait encore quelque chose dans la cuisine (décidément, vivre avec Sue l’avait drôlement changé !) et montais quatre à quatre les escaliers. Je toquais doucement et entendis sa douce voix dire : « Entre ! »

Elle était en train de se coiffer et lorsqu’elle me vit, balança sa brosse sur le lit et se jeta sur moi, les bras autour de mon cou, pendue dans le vide. Je la serrais contre moi.

  • Oh ! Je croyais que c’était Renée !
  • Salut ma belle…
  • Tu m’as tellement manqué…, murmura-t-elle d’une voix étouffé dans mon cou.

Je respirais son parfum à plein poumon puis fermais les yeux, heureux de la sentir contre moi. Elle finit par descendre mais elle se mit sur la pointe des pieds et m’attira contre elle pour m’embrasser. Je me laissais complètement aller, savourant le goût de sa langue, la douceur de ses lèvres, caressant son corps plaqué contre le mien. Elle relâcha son étreinte et je mis quelques secondes à reprendre mes esprits.

  • Tu as bien dormi ? Lui demandais-je.
  • Je n’ai pas dormi…
  • Ta mère ne va pas bien hein ?

Elle soupira et des larmes perlèrent à ses yeux.

  • Bella ? M’inquiétais-je.

Ses bras s’enroulèrent autour de ma taille et elle se jeta contre mon torse, en sanglot.

  • Oh Jacob…ma mère…elle est malade…
  • Je suis désolé ma chérie, murmurais-je en lui caressant les cheveux, bien que je m’en doutais un peu.
  • Elle va perdre la mémoire…elle ne saura même plus qui je suis !

Elle releva la tête vers moi, le visage ravagé par la souffrance. Je me sentais complètement impuissant.

  • J’ai si peur ! Murmura-t-elle, j’ai si peur de la perdre…Ce n’est pas juste !
  • Je sais …
  • Comment…comment as-tu fait ? Quand ta mère est partie ?

Je levais les yeux au ciel en serrant sa tête contre moi. En fait, mes souvenirs étaient très nets de cette période de ma vie mais je les avais enfouis bien au fond de moi. C’était quelque chose dont je n’avais jamais envie de discuter, la blessure était beaucoup trop profonde.

  • Qu’est-ce qu’elle a exactement ? Demandais-je, conscient que je venais d’éluder sa question.
  • La maladie d’Alzheimer. Ils viennent de lui diagnostiquer…Jake…je ne supporterai pas de la voir comme ça !
  • Dis-toi qu’elle ne va pas vraiment souffrir, car elle ne se rendra pas compte, répondis-je en la berçant, c’est toi qui va devoir être forte…et je sais que tu es capable de tenir le coup Bella ! Tu ES forte !
  • Non…tu te trompes Jacob…pas quand il s’agit des gens que j’aime…

Elle se laissa bercer un petit moment, en silence puis, elle releva la tête d’un coup, une lueur un peu folle dans les yeux que je connaissais que trop bien et qui me fit tout de suite peur.

  • Et si on lui donnait de ton sang !
  • Bella…, soupirais-je.
  • Quoi ? ça a bien marché sur moi ! ça pourrait guérir ses cellules !

Je la repoussais assez fortement, soudain furieux qu’elle puisse avoir encore des idées aussi dingues !

  • Pourquoi pas Jake ?
  • Bella, arrête ça tu veux ! m’écriais-je. Arrête de croire que tout est merveilleux, que tout est possible ! On a déjà pris un gros risque avec toi ! On ne connaît même pas les conséquences !
  • Il n’y a pas de conséquences ! Cria-t-elle. Je suis vivante ! Voilà la conséquence !
  • Mais Bella ! Ce n’est pas une blessure physique ! C’est une maladie !
  • Elle va mourir Jake ! Ma mère va mourir ! Tu peux comprendre ça !
  • Qu’est-ce que tu dis ? Entendis-je derrière moi.

Je fis volte-face pour trouver Charlie à l’entrée de la chambre, le visage décomposé. Je me mordis les lèvres en jetant un regard vers Bella qui semblait pétrifiée. Charlie avait du nous entendre crier et était monté pour voir ce qu’il se passait. Il entra dans la pièce tout en continuant de fixer Bella puis répéta :

  • Qu’est-ce que tu as dit ?
  • J’ai dit que …maman est malade, papa.

Charlie semblait encore plus effondré que Bella et je me sentis à nouveau de trop dans cette maison. Il fixa le vide un moment puis fit demi-tour pour redescendre les escaliers. J’entendis la porte de dehors claquer puis des voix à l’extérieur. Bella tourna ses yeux pleins de larmes vers moi et je m’approchais d’elle pour la prendre dans mes bras.

 

Charlie nous appela pour le repas et lorsque je descendis avec Bella, je les trouvais tous les deux assis à table, calmes, se tenant la main et souriants. Bella me tenait par le bras et me dirigea vers ma place, près de Charlie. Elle et moi nous sentions un peu stupides mais le sourire de Renée détendit sa fille aussitôt. Charlie me passa immédiatement le plat de viande dans un sourire entendu, me faisant comprendre que ça lui restait sur les bras à cause de mon départ d’hier. Je lui fis un bref sourire et me servis, la tête dans l’assiette.

Je les laissais discuter ensemble, de tout et de rien, de Seattle, des côtes cassées de Charlie, du fameux Phil. Renée posait des questions puis les écoutait raconter leurs histoires avec plein d’amour dans les yeux. Je sentais souvent son regard posé sur moi et quand il m’arrivait de tourner la tête ou les yeux pour la capter, elle rougissait comme une gamine et baissait les siens. Je me demandais pourquoi son attitude avait changé depuis hier. Elle avait eu l’air presque émerveillée en me voyant arriver ce matin. Mais Bella m’avait vaguement expliqué qu’entre elle deux, c’était Bella la plus responsable. Renée était une femme-enfant, vivant dans un petit monde bien à elle et Bella devait souvent la raisonner quand aux décisions qu’elle prenait. Je me demandais quelles conséquences auraient l’annonce de sa maladie sur Bella ? Allait-elle partir souvent de Forks pour retrouver sa mère ? Avec la découverte de ce fameux visiteur près de la villa, ça ne serait peut-être pas une mauvaise chose ….

 

21 – Quand faut y aller, faut y aller !

 

Charlie se leva pour préparer le café et Bella débarrassa la table si bien que je me retrouvais seul avec Renée qui me fixait toujours de son regard brillant. Elle me sourit et je me mis bêtement à rougir, ne sachant absolument pas quoi dire ni faire…

  • J’aime la façon dont tu aimes ma fille Jacob, déclara-t-elle soudain. C’est un amour puissant, unique et indestructible.

Je compris soudain ce que Bella voulait dire quand elle disait que sa mère était une vraie romantique, la tête pleine de rêves. Elle parlait comme un livre ! Je lui fis un grand sourire puis réussi à articuler :

  • Oui…J’aime Bella de tout mon cœur…depuis toujours.
  • Et tu la protègeras toute ta vie.

Ce n’était pas une question, c’était une affirmation. Renée continuait de me fixer, sa main tenant sa tête dans une position rêveuse. Je lui souris à nouveau et me tortillais sur ma chaise en jetant un coup d’œil à la cuisine dans l’espoir que Bella revienne vite !

  • C’est pour quand votre mariage ?

Ainsi Bella avait mis au courant sa mère…

  • Nous n’en avons pas encore vraiment discuté …, répondis-je, un peu surpris par sa question directe.  
  • Il faudrait peut-être en informer Charlie ?
  • Oui...

Elle rit doucement et je ris à mon tour devant son air de conspiratrice.

  • Je ne voulais pas que Bella fasse la même erreur que moi tu sais mais toi…toi elle ne pouvait pas te laisser passer, soupira-t-elle.
  • Hum…

Je ne voyais pas trop ce qu’elle voulait dire, elle triturait sa serviette, pensive puis elle sourit à nouveau en ajoutant :

  • En même temps, c’est comme ça dans ta « famille », non ?
  • C'est-à-dire ?
  • Vous vous mariez jeunes…
  • Disons que nous sommes toujours sûrs de notre choix donc pourquoi attendre ? Répondis-je.
  • Oui…mais ce n’était pas vraiment un choix, hein ?

Devant mon regard interrogateur, elle sourit à nouveau puis ajouta :

  • Bella… c’était ta destinée.

Voilà qu’elle recommençait à parler comme un livre !

  • Oui, on va dire ça, répondis-je.
  • Tu la vois autrement ? Demanda-t-elle.

Je plongeais mon regard dans le sien, cherchant ce qu’elle attendait exactement de moi puis, lorsque je compris qu’elle voulait seulement être rassurée, je répondis :

  • Bella est ma femme, c’est tout.
  • Eh pas encore mon garçon ! s’exclama Charlie derrière moi, la cafetière à la main, suivit par Bella qui portait le plateau de tasses, les yeux rougis.

Je compris alors pourquoi ils avaient été si longs…ils avaient du discuter puis pleurer de l’état de Renée. Je jetais un regard en biais à Charlie qui avait aussi les yeux rouges. Je me sentis à nouveau mal à l’aise mais Bella posa le plateau et vint m’embrasser dans la  nuque, ce qui me déclencha un frisson. Elle rit doucement et je me dégageais, gêné de l’effet qu’elle me faisait devant ses parents.

  • Justement Papa, l’entendis-je déclarer dans mon dos, les bras toujours autour de mon cou. Jacob et moi avons quelque chose à te dire.
  • Pourquoi seulement moi ? répondit Charlie, un peu tendu. Renée est déjà au courant je suppose…

En guise de réponse, Renée sourit puis posa son regard sur la main de Bella qui me tenait toujours. Charlie ne capta pas le message et je me sentis soudain très mal.

  • Maman est plus observatrice que toi papa…
  • Hum…alors ? Jacob ?

Je levais mon regard sur lui, ses yeux me fixaient comme deux poignards. Il mêla ses mains devant sa bouche, attitude complètement réfractaire. Je me raclais la gorge, tournais légèrement la tête vers Bella qui me sourit puis sourit à son père, attendant clairement que j’annonce le truc ! Le regard de Renée me donna du courage.  

  • Oui…euh…voilà, Bella et moi allons nous marier…au printemps, lâchais-je.
  • Au printemps ? s’exclama Bella. Mais tu n’auras dix huit ans que cet été !
  • On fera la fête Quileute au printemps parce que c’est à ce moment-là que les fleurs sont les plus belles…, murmurais-je, la tête complètement tournée vers elle, oubliant la présence de ses parents. Pour le côté officiel, oui, on attendra juillet.
  • D’accord, répondit-elle dans un grand sourire avant de m’embrasser.
  • Euh…est-ce que j’ai encore quelque chose à dire ? Entendis-je Charlie dire, me faisant sursauter et me dégager de Bella aussitôt.

Je déglutis devant la mine fermée de son père. Renée comprit immédiatement mon malaise et prit la main de son ex-mari. Charlie se détendit et déclara :

  • Ne t’inquiète pas Renée, j’aime ce garçon, je ne vais pas le massacrer. Seulement j’aimerai juste savoir comment tu comptes subvenir aux besoins de ma fille ?
  • Papa, on n’a pas besoin de grand-chose ! Rétorqua Bella, agacée.
  • Non chérie, ton père a raison de s’inquiéter, la coupais-je. Je vais travailler Charlie, je finis la maison et je m’y mets ! Je t’en fais la promesse.
  • Et tu vas t’installer où ? A la réserve ?
  • Dans un premier temps oui…je n’ai pas vraiment le choix.
  • Tu crois franchement que les gens vont venir ramener leur voiture jusque là-bas ?

Billy avait déjà du le mettre au courant de mes projets car il semblait bien informé…des vraies pies ces deux là, je ne cesserais jamais de me le répéter.

  • J’irai les chercher, je travaillerai sur place au départ s’il le faut…
  • Hum…
  • Charlie ! Ne le décourage pas ! S’écria Bella, toujours accrochée à mon cou.

Je la sentais très stressée.

  • Je n’y compte pas ! Pour qui tu me prends ? Riposta Charlie. Je réfléchis juste à quelque chose …

Il semblait en effet réfléchir et nous le regardions tous les trois, perplexes.

  • Je connais personnellement Carl Snake, le garagiste du nord de Forks, finit-il par ajouter. Il compte prendre sa retraite dans deux ans. Tu pourrais peut-être l’aider puis lui proposer de reprendre son affaire ? Il n’a pas d’enfant…

Bella et moi nous jetâmes un coup d’œil en même temps, puis Bella tourna la tête vers son père :

  • C’est trop beau et facile ça papa ! C’est quoi l’arnaque ?

Renée pouffa de rire, amusée par la vivacité d’esprit de sa fille.

  • Bah…il est assez insupportable…c’est pour ça qu’il est toujours resté seul à gérer son affaire et que ça n’a jamais vraiment évolué.
  • Et il a quand même des clients ce Snake ? demanda Bella, septique.
  • Un peu …des vieux ronchons comme lui… mais il a surtout un beau local et bien placé ! Répondit Charlie dans un grand sourire.

 

Après le repas (où Bella avait encore mangé plus que la normale à mes yeux), je lui demandais discrètement si on ne pouvait pas aller à l’extérieur, histoire de se retrouver un peu et surtout de prendre l’air ! J’étouffais dans cette maison, j’étouffais surtout de cette ambiance si intime et morose. Elle accepta aussitôt et je fus heureux de constater qu’elle en avait autant envie que moi. Elle me prit la main et fit un petit signe à ses parents avant de m’entraîner dehors. Le temps était très frais mais sec, les arbres étaient déjà complètement nus, l’hiver approchait à grand pas avec la neige…il fallait que je m’active si je voulais que nous soyons installés avant la grosse période.

Nous fîmes le tour de la maison, main dans la main, chacun perdu dans ses pensées. Je tournais la tête vers elle et remarquais son air renfrogné pendant qu’elle traînait ses pieds dans les feuilles mortes. Elle devait être préoccupée par sa mère et je me dis qu’une fois notre petite balade terminée, je la laisserais pour qu’elle en profite. Je la dirigeais vers la lisière du bois puis l’invitais à stopper notre marche ici.

Je m’allongeais sur l’herbe, les bras croisés derrière la nuque, Bella vint s’asseoir sur moi, me dominant totalement.

  • Alors, raconte-moi ! Tu en es où avec notre maison ? déclara-t-elle dans un sourire en me tapotant le torse de ses deux mains.
  • J’ai fini les fondations…
  • Déjà ? S’étonna-t-elle.
  • Je t’ai dit que je travaillais vite.
  • Toujours seul ?
  • Oui … n’insiste pas s’il te plait.
  • Pourtant j’aimerai que tu m’expliques, appuya-t-elle sérieusement.
  • Très bien …, répondis-je en soupirant. J’ai vraiment envie de la faire seul cette maison ! Je ne sais pas si tu peux comprendre ça mais j’en ai besoin…, expliquais-je. Et puis, en ce moment, je n’ai pas envie d’être avec eux …pour plusieurs raisons…
  • A cause de Paul, murmura-t-elle.
  • Entre autre oui…

Je n’avais pas envie de lui faire peur avec ces histoires de rêves de loup de la part de quasi tous mes frères ! Rien que de penser à ça, ça me foutait en boule. Pourtant, Bella méritait une explication.

  • Tu sais, ce dont nous parlions hier, sur le fait que Paul te…désire, réussis-je à articuler sans trop m’énerver, et bien, c’est l’incompréhension générale dans la meute et ils ne parlent que de ça …j’en ai assez tu vois…, expliquais-je.

J’en avais aussi assez de me retrouver près d’eux en sachant qu’ils rêvaient de ma femme toutes les nuits et qu’ils voyaient tous ce qu’elle et moi faisions ensemble. C’était un fait, j’avais du mal à partager…

Elle se coucha sur moi et croisa ses bras sous son menton. Elle me fixait en souriant et je me demandais ce qu’elle attendait.

  • Oui ?
  • Tu ne t’es pas démonté devant Charlie tout à l’heure…c’est bien, déclara-t-elle en changeant complètement de sujet.
  • J’avais le choix ?
  • Au moins maintenant c’est fait…

Je dégageais mes mains de sous ma nuque et lui caressais les cheveux pendant qu’elle me fixait toujours. Je fis descendre une de mes mains sur ses reins et la serrais doucement contre moi pour la réchauffer car une légère brise fraîche venait de la faire frissonner. Elle m’enlaça et posa sa tête sur mon cœur en soupirant.

  • Tu restes encore là cette nuit ? demandais-je.
  • Oui … ça ne t’embête pas ?
  • Non, je comprends.

N’empêche que si ça continuait, je ne la verrais pas du week-end ! [Elle soupira à nouveau et je la sentis bouger contre moi ce qui éveilla mon désir immédiatement.

  • Tu me manques quand même, ajoutais-je d’une voix rauque.

En réponse, elle se pressa plus. Je la sentis soudain tendue et compris qu’elle était dans le même état que moi. Je passais alors mes deux mains sous son pull pour caresser son dos. Elle releva la tête et son regard troublé me confirma mes pensées. Elle se mit à se frotter doucement contre mon jean, ses yeux plantés dans les miens, la bouche entrouverte…l’endroit était loin d’être discret, face aux fenêtres de sa maison et pourtant, je ne voulais pas bouger. Alors, je décidais de faire un truc que je voulais expérimenter depuis longtemps, Bella ne me laissant pas trop l’occasion en temps ordinaire. Je passais ma main sur son ventre et fit glisser mes doigts sous son jean, puis sous son léger sous-vêtement, pendant que je la maintenais par la nuque. Lorsque ma main descendit encore plus bas, je la vis ouvrir de grands yeux, surprise par mon audace et pour éviter qu’elle m’empêche de continuer, je l’embrassais aussitôt. Lorsque j’atteignis mon but, elle gémit doucement et se cabra légèrement, m’encourageant à continuer mes caresses. Elle se pressa plus fort contre moi, haletante, les yeux fermés…je la regardais, émerveillé par sa beauté. Puis sa respiration se fit plus rapide, je la maintenais toujours, ne lâchant pas prise, ne la quittant pas des yeux…elle poussa un gémissement rauque et enfouit brusquement sa tête dans mon cou. Je laissais ma main là où elle était brûlante, savourant les soubresauts de son corps sur le mien.

Au bout d’un petit moment, je me libérais, à regret, me promettant de renouveler l’expérience aussi souvent que possible. Elle releva la tête, son regard était un peu fou, elle semblait revenir d’un autre monde.

  • C’était quoi ça ?
  • Ma réponse au week-end dernier ! répondis-je dans un demi-sourire.

Elle rit doucement, m’embrassa dans le cou puis me mordilla l’oreille, m’arrachant un violent frisson.

  • Et toi ? chuchota-t-elle.
  • T’occupe pas, murmurais-je. Mon plaisir c’est toi.

Elle reposa sa tête contre ma poitrine et je sentis son cœur battre violemment. Elle respira profondément pour calmer le tumulte qui l’habitait.] Nous restâmes comme ça pendant un bon moment, mes bras autour de son corps pour ne pas qu’elle prenne froid. Elle finit par s’assoupir, fatiguée de sa nuit blanche à pleurer, et je resserrai mon étreinte pour bien la protéger du vent.  

 

Je sentais le jour décliner, l’atmosphère changea, une lumière s’alluma dans la maison de Charlie et j’entendis une porte claquer puis des pas dans l’herbe. Vu le léger frottement que je percevais, je sus tout de suite que Renée s’approchait de nous. Son visage m’apparut, elle me sourit puis regarda tendrement sa fille qui dormait sur moi, paisiblement. Elle s’accroupit et je remarquais un manteau dans ses bras.

  • Elle n’a pas l’air d’avoir froid, murmura-t-elle.
  • Non, elle est bien là…elle dort souvent comme ça…sur moi.

Renée me sourit d’un air entendu et je rougis à nouveau, bêtement.

  • Je peux ? me demanda-t-elle en tendant légèrement la main.

Je compris qu’elle voulait la caresser et hochait la tête, en dégageant un peu mes bras. Bella tressaillit mais Renée posa sa main sur ses cheveux, le regard brillant. Ce geste affectueux me serra le cœur. J’avais une soudaine envie de partir, de la laisser profiter de sa fille mais Bella semblait bien dormir et je ne voulais pas la réveiller.

  • Vous êtes si beaux tous les deux, murmura-t-elle, tout en caressant la longue chevelure de Bella.

Je l’observais, sans bouger. Cette femme se retrouvait seule, à l’autre bout du pays...sans eux et malade.

  • Pourquoi ne revenez-vous pas ici ? A Forks ? Demandais-je, intrigué qu’elle ne l’envisage même pas. Comment pouvez-vous vivre loin d’elle ?
  • Jacob…ce n’est pas aussi simple…j’ai ma vie là-bas…j’ai Phil.
  • Et il n’est pas capable de faire l’effort de venir ici ? M’indignais-je soudain, conscient pourtant que ça ne me regardait pas.
  • Je…je ne sais pas, souffla-t-elle.

Elle stoppa son geste et plaça sa main sur sa bouche, se retenant de pleurer. Je m’en voulu d’avoir éveillé en elle un sujet douloureux. Apparemment, elle y avait pensé mais ce type là n’était pas d’accord.

 

Bella se réveilla, l’air un peu perdu car la nuit tombait et elle venait d’ouvrir les yeux sur sa mère, assise à mes côtés. Elle se dégagea de moi puis se releva péniblement et j’aidais Renée à en faire autant. Charlie nous attendait sur le perron, le visage fermé.

  • Bon, et bien je vais vous laisser ! Déclarais-je.

Bella, qui me tenait la main, se tourna vivement contre moi.

  • Oh non ! Reste encore un peu !
  • Bella chérie, murmurais-je en lui prenant le menton, je préfère vous laisser…j’ai encore du travail et vous avez besoin d’être ensemble.
  • Tu ne nous gênes pas Jacob, ajouta Renée.
  • C’est gentil mais c’est mieux comme ça. Je reviendrais demain vous dire au revoir.

Je vis la souffrance traverser le visage de Bella et la pris dans mes bras.

  • On se voit demain, chuchotais-je à son oreille.
  • Oui…tu me manques déjà.

Je l’embrassais avec passion, occultant complètement ses parents qui étaient derrière moi, profitant de mes dernières secondes avec elle avant des heures.

Ce week-end était vraiment à oublier…

 

22 – L’autre femme

 

Dormir dans ses bras, retrouver le parfum de mon enfance, jamais je n’avais autant savouré ces instants partagés avec elle. Pourtant, je savais que la fin n’était pas si proche, qu’elle avait encore du temps devant elle mais de savoir que la maladie était là, en elle, en train de lui grignoter le cerveau, ça me rendait folle ! Mais je savais aussi que Jake avait raison, que nous ne pouvions pas jouer à Dieu…pourtant, même si je ne voyais son visage que par flash, à cet instant, je ne pouvais m’empêcher de penser à Carlisle et à sa détermination à vouloir sauver les âmes perdues. Je n’avais pas parlé des Cullen à ma mère, j’avais eu peur de son jugement concernant ma relation avec Edward. Je m’étais contentée de lui expliquer ce qu’était vraiment Jacob et pourquoi il existait, sans préciser. Elle avait été si horrifiée à l’idée que les vampires existent vraiment que je n’avais pas insisté, préférant lui peindre un décor beaucoup plus magique, comme elle les aimait. J’avais alors vu la différence avec laquelle elle avait traité Jacob…elle l’avait dévoré des yeux ! Heureusement, il ne s’en était pas aperçu à chaque fois mais moi, je connaissais ma mère et je savais qu’elle ne rêvait maintenant plus que d’une chose : voir Jacob se transformer en loup-garou ! Et je savais aussi que, rien que pour ça, elle reviendrait plus souvent ! Et ainsi, je la verrais plus souvent…Je savais qu’elle essaierait d’acquérir sa confiance pour qu’il se dévoile à elle sans me mettre en cause car j’avais bien insisté sur ce point : elle ne devait pas dire qu’elle savait ! Même pas à Charlie !

Mon père n’avait toujours pas parlé de Sue à Renée…je me demandais s’il comptait le faire aujourd’hui ou pas du tout. Peut-être envisageait-il de lui annoncer par téléphone ?

Je me demandais aussi comment Sue prenait le fait que ma mère soit là ce week-end ?

Nous avions dormi toutes les deux dans mon lit d’une place et il ne nous restait plus que quelques heures ensemble avant qu’elle ne reprenne l’avion.

Charlie m’avait déjà dit qu’on partirait ensemble à Seattle, comme je reprenais l’école le lendemain, ça éviterait deux trajets…évidemment, l’idée était bonne mais ça me faisait repartir de nombreuses heures plus tôt et donc, des heures en moins avec Jacob.

 

La porte s’ouvrit et je vis Charlie avec un plateau dans les mains, s’approcher du lit sans bruit. Renée dormait encore mais je levais la tête pour que mon père voie qu’il pouvait poser le petit-déjeuner sur ma table de nuit. Une délicieuse odeur de café vint me chatouiller les narines et ma mère bougea un peu.

  • Salut ma belle …bien dormie ?
  • Oui ! Chuchotais-je. Merci papa, tu es un ange. Je meurs de faim !

Ma tête me tournait un peu, mes mains tremblaient, je mourrais vraiment de faim ! Je me jetais sur le morceau de pain qui se trouvait à ma portée et mordit dedans presque avec férocité. Après deux morceaux que Charlie me regarda avaler dans un demi-sourire, je me sentais déjà mieux. Mon père me tendit ma tasse et je bus une gorgée du liquide brûlant avec soulagement. Renée ouvrit les yeux et nous lui sourîmes. Il n’y avait pas beaucoup de place sur mon lit mais nous étions bien là, tous les trois.

  • Quelle heure est-il ? marmonna-t-elle.
  • L’heure de se lever ! répondit-on en cœur.

Ma mère pouffa de rire devant cette réplique qu’elle s’amusait toujours à me sortir lorsque j’avais du mal à émerger pour aller à l’école.

Je sentais beaucoup d’amour dans l’air et ce moment partagé avec mes parents, resterait à jamais gravé dans ma mémoire. J’espérais qu’il en serait de même pour Renée.

 

Une fois levée, je me jetais sur le téléphone pour appeler Jake et lui expliquer ce que je comptais faire pour le départ de ma mère.

  • En gros, tu ne viendras pas ici du week-end ! Répliqua-t-il, bougon.
  • Jacob …
  • Ouais, je sais…c’est bon. Je le savais de toute façon.

Sa déception me touchait trop, surtout que j’étais aussi frustrée que lui. Je réfléchis et répondis :

  • Ecoute, je vais quand même venir, même une heure, histoire de voir ce que tu as fait…
  • Non, laisse tomber ! Y a rien à voir d’intéressant…
  • Jake, arrête de râler…
  • C’est bon…j’arrête.

Je l’entendis souffler puis sourire.

  • Bon, je peux passer te voir quand même ?
  • Mais je t’attends !
  • Ok…je viendrais après le repas.
  • J’ai hâte ! Avais-je répondu, impatiente.

A peine avais-je raccroché que la sonnerie de la porte d’entrée retentit. J’allais ouvrir et fus surprise de trouver Sue sur le perron, un large sourire aux lèvres.

  • Bonjour Bella !
  • Oh, bonjour Sue, répondis-je, soudain un peu angoissée à l’idée que ma mère rencontre la future femme de mon père.
  • Je ne m’attendais pas à te trouver ici…
  • Eh bien si ! Ripostais-je, en me forçant à sourire.

Cette femme, aussi gentille soit elle, me rappelait trop Leah et, Leah et moi….c’était loin d’être le grand amour. J’essayais d’occulter son physique et demandais :

  • Tu es venue voir Charlie ?
  • Euh oui…évidemment, répondit-elle en jetant un regard derrière moi.

Elle se dandina légèrement et je constatais que je ne l’avais même pas encore faite entrer !

  • Entre Sue ! Déclara Charlie derrière-moi.

Je baissais les yeux sous son regard sévère, me disant que j’aurai du réagir plus vite ! Je me poussais, honteuse, pour laisser passer l’amie de mon père. Ce dernier l’entraina dans la cuisine et je montais les escaliers à toute vitesse pour rejoindre ma mère dans ma chambre (qui devait finir de se préparer) mais, soudain, leur discussion m’arrêta et je stoppais même ma respiration pour écouter ce qu’ils se disaient…

  • Tu aurais du téléphoner…
  • Charlie, je ne pensais pas que ça te gênerait …tu avais dit que vous viendriez manger ce midi…j’ai été surprise par ton message…
  • Oui, je sais…, entendis-je soupirer mon père. Mais…on fera ça une autre fois…

Il y avait un si gros silence que je me demandais si elle pleurait ou s’ils s’embrassaient…je penchais la tête au-dessus de la balustrade, respirant en douceur pour ne pas louper un bruit.

  • Pourquoi j’ai l’impression que quelque chose à changé ? murmura Sue, la voix brisée.

Bon sang !Pensais-je. Charlie n’allait quand même pas tout remettre en question !

  • Rien n’a changé Sue, pas pour nous si c’est ce que tu crois…seulement je voulais que Renée profite exclusivement de sa fille aujourd’hui et j’ai préféré annuler.
  • Très bien…on pouvait quand même se rencontrer non ? Murmura-t-elle tristement.
  • Oui …

A cet instant, ma mère claqua la porte de la salle de bain et me surprit sur la première marche de l’escalier, clairement en position d’espionnage. Je me mordis les lèvres et elle fronça les sourcils. En bas, Charlie et Sue avaient cessé de parler.

  • Bella ? Qu’est-ce que tu fais ? demanda-t-elle, un peu trop fort.

Confuse, je secouais la tête et au même moment, je vis la tête de Charlie en bas de l’escalier.

  • Renée, peux-tu descendre quand tu as un moment ? Appela-t-il en me fusillant du regard.
  • Bien sûr ! Répondit-elle en me jetant un œil inquiet.

Elle posa ses affaires sur le meuble de ma chambre et descendit les escaliers. Je décidais de la suivre. L’air de la pièce se chargea soudain d’électricité. Ma mère comprit immédiatement qui était Sue en captant le regard angoissée que cette dernière lança à mon père. Celui-ci était si tendu qu’il mettait mal à l’aise tout le monde.

  • Euh…Renée, je te présente Sue Clearwater, annonça-t-il en tendant une main vers l’indienne qui réussit à sourire à ma mère. Sue, voici Renée, mon ex-femme.

Je savais que malgré tout ce qu’elle pouvait dire, ma mère n’était pas prête à ça ! Même après toutes ces années ! Pour elle, mon père était et resterait toujours celui qui continuait à l’aimer malgré qu’elle l’ait quitté et qu’elle avait refait sa vie. C’était très égoïste mais je ne pouvais pas lui en vouloir puisque mon père était resté seul durant quasi seize ans, attendant désespérément que ma mère change un jour d’avis. Je pouvais comprendre que l’arrivée de Sue la perturbe. Je vis Renée déglutir puis se composer un sourire en tendant sa main blanche à la Quileute.

  • Enchantée ! Déclara-t-elle, la voix légèrement tremblante. Charlie m’a beaucoup parlé de vous !

Je vis mon père baisser la tête pendant que le regard de Sue s’éclaira, rendant son sourire plus radieux. Ça, c’était ma mère…sauver les apparences et sauver mon père ! Je lui jetais un regard noir et il hocha la tête.

  • Je suis heureuse de vous rencontrer enfin ! Annonça Sue. J’aurai aimé que le dîner se fasse mais apparemment, ça sera pour une autre fois.
  • Oh…mais non…Charlie, on peut quand même aller manger chez Sue !
  • Comme tu veux…, marmonna mon père, se sentant soudain très idiot.
  • Mais oui ! Insista ma mère, les yeux brillants.

Je me demandais soudain pourquoi elle était si contente d’assister à ce repas.

  • Parfait ! Répondit Sue. Je vais préparer ce qu’il faut alors. Bella ?
  • Oui ?
  • Jacob sera de la partie ?
  • Je vais le prévenir, répondis-je.

Après tout, si nous n’étions plus tous les trois, il se sentirait moins gêné et je pourrais le revoir plus longtemps avant de partir ! Je fonçais immédiatement dans ma chambre pour l’appeler, oubliant instantanément le moment houleux que nous venions de partager.

 

Curieusement, je sentais ma mère très excitée pendant que nous faisions le trajet jusque chez les Clearwater. Charlie se demandait tout comme moi ce qui pouvait rendre Renée comme ça. Elle qui avait toujours détesté la manière de vivre des indiens, elle semblait maintenant désireuse de partager un repas avec eux à la Réserve. Mais, mon esprit s’éclaira lorsque je vis son regard s’illuminer à la vue de Seth qui nous attendait sur le perron ! Ma mère avait vu en Sue Clearwater la femme Quileute…celle qui vivait parmi les loups-garous ! En acceptant son invitation, elle se plongeait directement dans cet univers que je lui avais décrit. Elle était réellement fascinée, peut-être encore plus que je l’imaginais pour réussir à occulter le fait que mon père allait vivre avec une des leurs ! Seth descendit les marches du perron, nous accueillant de son immense sourire solaire qui me faisait immédiatement penser à Jake. Il ouvrit la portière à ma mère qui était aux anges, ce qui me confirma que j’avais vu juste.

  • Bonjour madame ! Lança-t-il.
  • Bonjour…
  • Seth ! Je suis le fils de Sue et …le demi-frère de Jacob, ajouta-t-il gauchement.

Ma mère me jeta un regard mi-étonné, mi-amusé.

  • Bon sang ! Encore un qui n’a pas oublié de grandir ! Répondit-elle en riant. Et bien, bonjour Seth, enchantée !

Je ris à mon tour, amusée par la petite taille de Renée à côté de l’indien qui avait bien grandit !

  • Seth…il est comme Jacob ? me chuchota-t-elle discrètement, lorsque celui-ci alla saluer mon père.

Je hochais la tête et son regard s’alluma à nouveau quand elle posa les yeux sur lui.

En la regardant, je me demandais comment elle réagirait si elle se trouvait un jour parmi toute la meute ! Elle serait sûrement aux anges la connaissant, émerveillée comme une enfant.

Sue apparut dans l’encadrement de la porte en souriant et mon père alla à sa rencontre. Je sentis une hésitation de sa part et fut aussi déçue que Sue lorsqu’il entra dans la maison sans lui déposer le baiser qu’elle attendait. Je me dis alors qu’il faudrait que, lui et moi, on ait une petite conversation ! Seth accompagnait Renée et je réalisais que c’était la première fois que je venais ici. La maison était toute en bois, comme toutes les maisons de la réserve et bien éclairée. Sue avait installé des plantes vertes un peu partout ce qui rendait l’atmosphère très saine. Le feu brûlait dans la cheminée et je me sentis tout de suite aussi bien que chez Sam et Emily. Je remarquais l’absence de Leah et en fut vaguement soulagée.

  • Installez-vous ! nous proposa Sue gentiment.

Puis, elle s’éclipsa dans sa cuisine, derrière des battants en bois qui me firent penser à un saloon. Je me dis alors que j’aimerai bien avoir la même chose chez nous. Au même moment, la porte d’entrée s’ouvrit et Jacob entra, me plongeant immédiatement dans un état fébrile, mon corps réclamant ses bras aussitôt. Je me levais et me dirigeais vivement vers lui. Il me serra contre lui et je poussais un profond soupir de bonheur.

  • Te voilà …
  • Quoi ? je ne suis pas en retard ?
  • Non, non…tu me manquais c’est tout.

J’entendis Seth rire en passant près de nous puis demander à mes parents si ça les intéressait de goûter une spécialité indienne que je connaissais déjà et qui, je le savais, allait détendre tout le monde en un rien de temps !

  • Jacob ! S’écria ma mère. Viens t’asseoir près de nous !

Jake et moi échangeâmes un regard amusé. Une fois assis sur le sofa, nos quatre mains se mêlèrent aussitôt sous le regard attendri de Renée.

Sue revint de la cuisine avec un plateau et les battants grincèrent encore un moment après son passage.

  • Je veux ça ! Chuchotais-je à l’oreille de Jake.

Il tourna la tête vers là où mon regard se portait puis hocha la tête dans un demi-sourire.

  • Et les mêmes grandes baies vitrées, ajoutais-je.
  • Hum…

Je gloussais de plaisir car je prenais conscience que Jacob était tellement doué que j’aurai pu lui demander n’importe quoi, il saurait le faire.

 

Le repas se déroula dans une bonne ambiance, Charlie s’était bien détendu avec le cocktail que Seth lui avait servi et je ne lâchais quasi pas Jacob. Ce dernier me jetait de drôle de regards pendant que je mangeais, si insistant parfois que je finis par lui demander discrètement :

  • ça ne va pas ? Tu n’aimes pas ?

Je trouvais ça si délicieux que je m’étais déjà resservie deux fois.

  • Si …
  • Alors quoi ?
  • Tu te goinfres ! rigola Seth qui était assis en face de nous. 

Mes joues s’empourprèrent lorsque tout le monde leva la tête vers moi en riant ou souriant. Je posais ma fourchette mais Sue s’écria :

  • Mais laissez-là ! Je suis contente de voir que Bella apprécie ma cuisine !

Je me forçais à lui sourire puis jetais un regard à Jake qui serrait les mâchoires tout en jouant avec sa fourchette dans son assiette. Mais qu’est-ce qu’il avait ? Je compris alors que je devais le gêner de manger autant mais la vérité, c’est que je ne savais même pas quelle quantité de nourriture j’avais vraiment avalé car c’était si bon que je ne m’étais concentrée que sur mon plat depuis le début du repas. Je posais définitivement ma fourchette, l’appétit coupé. Jacob vit mon geste du coin de l’œil. Je croisais le regard brillant de ma mère, indéchiffrable.

 

* * *

 

 

Je la regardais, accoutrée d’un des tee-shirts de Jake parce qu’elle ne savait plus rien mettre d’autre et puis parce qu’elle avait sûrement l’impression de le sentir près d’elle ainsi. Elle me faisait tellement de la peine.

  • Billy se demande quand est-ce que tu comptes épouser sa fille …, m’interrompit Sam.
  • Tu es sûr que c’est Billy ? Demandais-je sur un ton septique.
  • Paul, tu délaisses ta femme…elle te pleure autant qu’elle pleure son frère.
  • Je m’occupe de Rachel.
  • C’est faux…tu ne vis qu’à travers Bella !

Je serrais les dents, sachant que le moment tant redouté était venu.

  • Elle a besoin de moi, Jacob me l’a confiée.
  • Jacob ne reviendra pas …et tu vas faire quoi alors ? Epouser Bella ? Elever leur enfant ?

Je ne répondis pas…l’épouser je ne pouvais pas mais la garder près de moi et l’aider à élever son enfant, oui j’y avais pensé mais je ne savais pas si c’était possible. Comment réagirait la meute si je faisais ça et surtout, comment le faire sans blesser Rachel ? Car, Rachel et moi étions liés, d’une manière que rien ne pouvait briser…je devais faire ma vie avec elle mais je ne pouvais pas laisser Bella…c’était hors de question !

  • Paul … laisse-la…elle doit vivre seule maintenant et s’occuper de son enfant quand il sera là. Nos femmes l’aideront mais ça doit s’arrêter là.
  • C’est un ordre Sam ?
  • Si je dois en arriver là ….

En jetant un regard à son profil, je savais qu’il en serait capable… Et là, je n’aurais plus le choix. Je devrais l’abandonner.

 

 

* * *

 

23 – Animale

 

Assise sur mon lit, j’essayais désespérément de me concentrer sur les documents que j’essayais de classer pour le cours du lendemain. Angela était également revenue au campus lorsque je l’avais informée que j’y serai le dimanche soir puisque j’avais accompagné ma mère à l’aéroport. Elle avait passé un week-end assez morose malgré qu’elle ait passé avec Ben, elle s’était sentie si invisible et inutile qu’elle avait préféré écourter son passage à Forks pour rester près de moi.

Moi, je n’arrêtais pas de revoir le visage en larmes de Renée, me promettant qu’on se reverrait plus vite cette fois…je lui avais promis que je viendrais aussi la voir, peut-être pendant les vacances de Novembre ?

Mon esprit aussi était envahi par Jake. Il m’avait vite laissé pendant l’après-midi, suite à un appel de Sam que j’avais capté en même temps que lui pendant que nous mangions le dessert. Seth et lui nous avaient laissé quelques temps après et je ne l’avais pas revu. Comme il n’avait jamais son portable sur lui (ça ne servait à rien car il ne saurait pas quoi en faire s’il devait muter comme aujourd’hui), je n’avais pas pu lui dire au revoir. En fait, je m’inquiétais de ce départ précipité et du manque de nouvelle.

Le vol de Renée était à dix huit heures et nous avions du quitter Forks très tôt. J’avais pleuré durant tout le trajet, mes larmes partagées entre le départ de ma mère et l’absence de Jake.

Un autre moment de la journée me revenait à l’esprit, celui où Paul et Jared étaient venus chez les Clearwater, pensant que Seth et Jacob y étaient encore alors qu’ils venaient juste de partir. C’était moi qui étais allée ouvrir la porte et je revoyais encore l’attitude nerveuse de Paul lorsqu’il me vit dans l’encadrement. Bêtement, je n’avais pas pu m’empêcher de rougir en croisant son regard, mon rêve ou plutôt mon cauchemar bien en tête… Je fus même obligée de faire répéter Jared car mon trouble m’avait rendu sourde pendant quelques secondes. J’espérai seulement que Paul n’avait rien remarqué, car ça alimenterait encore son obsession vis-à-vis de moi. Je ne comprenais pas encore comment j’avais pu rêver de lui ainsi et le pire dans tout ça, c’est que je ne pouvais en parler à personne …

  • J’en ai marre Bella…

Je levais la tête vers mon amie.

  • Je ne sais pas ce que Ben attend de moi…il espère quoi ? Que je passe mon temps à le regarder s’éclater avec ses jeux stupides toute ma vie ?
  • Qu’est-ce que vous avez fait ce week-end ? demandais-je.
  • Rien ! Enfin, lui il a joué, moi j’ai traité mes photos…tu sais, je me suis inscrite pour un concours photos…j’en ai pris pas mal de Forks…enfin bref ! Sinon, à part ça, on a rien fait…
  • Tu avais prévu autre chose ?  
  • Je ne sais pas…sortir, voir des amis ou s’embrasser pendant tout le week-end, comme avant ! déclara-t-elle.
  • Et tu ne te sens toujours pas prête ? risquais-je de demander.
  • Sûrement pas avec l’attitude qu’il a ! Rétorqua-t-elle.

A cet instant, mon portable vibra, déclenchant la vibration de mon cœur.

  • Salut ma belle…
  • Jake, mais où étais-tu ? M’inquiétais-je.
  • Désolé, un petit problème à régler…
  • Rien de grave ?
  • Non…tout s’est bien passé avec Renée ? Je suis désolé, je ne lui ai pas dit « au revoir ».
  • Ce n’est rien, elle t’embrasse, lui répétais-je. Et tu peux être rassuré, elle t’adore !
  • Ouais,rigola-t-il.

Un petit silence s’installa et je compris que Jacob était préoccupé.

  • Super week-end, lâcha-t-il soudain. Pas mieux que celui d’avant finalement.
  • Jake…le prochain, je te promets qu’on ne se quitte pas d’une minute.
  • Hum … Tu me manques vachement là…

J’entendis de la souffrance dans sa voix ce qui provoqua aussitôt la mienne. Parfois, ça arrivait, il ne parvenait plus à se maitriser, malgré la force qu’il avait acquise à lutter contre ce phénomène. Je l’entendis soupirer et compris qu’il pleurait.

Incontrôlable…tout comme les larmes qui coulaient à flot sur mes joues en ce moment.

  • Jacob, je te promets qu’on fera mieux le week-end prochain, murmurais-je, la gorge serrée.
  • Bah, ta mère avait besoin de toi…mais m’endormir et me réveiller sans toi, c’est dur, déclara-t-il dans un soupir. Tes bras me manquent Bella.
  • Les tiens aussi, soufflais-je.
  • Bon, je crois qu’il vaut mieux que je te laisse, je ne suis bon à rien ce soir…A demain ma chérie.
  • Oui… à demain…, répondis-je, en sanglotant.

Une fois que la communication fut coupée, je mis ma tête entre mes bras, sur mes genoux et me laissais complètement aller. Mais je sentis aussitôt les mains d’Angela sur mes épaules. Zut…j’avais oublié que je n’étais pas seule ! Je relevais la tête et tentais de me calmer aussitôt.

  • Vous n’avez pas passé un bon week-end ? demanda-t-elle dans un murmure.
  • Oui et non…on ne s’est pas beaucoup vu en fait…enfin si …mais …, reniflais-je.
  • Mais vous n’avez pas été seuls…
  • Je ne pouvais pas laisser ma mère et …Charlie n’est pas prêt à accepter que Jake dorme dans ma chambre alors voilà…, expliquais-je.
  • Comment va ta mère ?

Je tournais les yeux vers mon amie et m’effondrais à nouveau. Une fois que je réussis à nouveau à me calmer, je lui racontais tout sur ma mère, tout sur ma profonde douleur.

 

La semaine reprit, aussi lente que les précédentes. Les matins étaient toujours aussi difficiles que les couchés, plus encore que les autres fois car je n’avais pas eu ma dose de Jacob ce week-end. Je me réveillais souvent trempée de sueur, parfois j'étais même secouée de tremblements lorsque je sortais d'un rêve où Jacob me faisait l'amour. Je me sentais complètement dépendante de lui et de son corps et j'avais beaucoup de mal à contrôler ces crises de manque. Mes mains le cherchaient et je finissais toujours pas agripper l'oreiller ou les draps pour leur donner une contenance. J’enfouissais ma tête dans le coussin, m'imaginant avec une clarté déconcertante que je l'enfouissais dans son cou ou dans son torse. Mais cette euphorie ne durait pas longtemps car il me manquait son parfum et je revenais vite à la réalité, encore plus en état de manque que jamais. J'avais l'impression d'avoir de la fièvre et je pense que c'était sûrement le cas...une fièvre qui ne tomberait que lorsque Jake me toucherait avec ses mains chaudes et puissantes.

 

Les cours devenaient quand même très intéressants, j’essayais toujours d’adapter des situations à mon cas personnel ou à celui de Jake et j’aimais lorsque j’avais une explication claire sur le fonctionnement de son organisme animal. Bien sûr, aucun cours ne parlait de mutation de loup-garou ou de magie, mais j’en savais un peu plus chaque semaine sur la façon dont le sang ou les cellules se comportaient dans notre corps, à quoi elles servaient, comment elles évoluaient…

J’avais également un cours sur les espèces et leur évolution. J’en apprenais beaucoup sur la nature, les forêts qui nous entourent, sur les animaux qui peuplaient cette région dans laquelle j’avais décidé de vivre. Par exemple, sujet traité aujourd’hui : « L’évolution du chien au loup : changements physiques et comportements » ! Mon cœur avait bondi de joie lorsque j’avais vu l’inscription sur le fascicule que notre professeur venait de nous tendre. Personne n’avait vraiment réagi mais moi je souriais bêtement de plaisir. Angela m’avait jeté un regard étonné lorsqu’elle m’avait vu feuilleter fébrilement le document.

Je fus surtout plus attentive lorsque le professeur aborda le paragraphe intitulé « La meute : structure sociale du loup ». Je savais déjà qu’une meute avait une hiérarchie stricte, même si j’avais parfois du mal à suivre qui était quoi dans les deux meutes mais je fus surprise d’apprendre qu’une meute était forcément dirigée par un couple de loups. Bon, évidemment, les loups proprement dits et les loups-garous n’avaient rien à voir mais malgré tout, cette idée me fit sourire. La prof insista sur le fait que la meute d’un loup devait être commandée par un mâle alpha et une femelle alpha, et que, généralement, ce couple de dirigeants était le seul à procréer. Je pensais alors à Sam et à Emily…pour l’instant, ils étaient les seuls à attendre un bébé. Jared et Kim, qui pourtant étaient ensemble depuis presque aussi longtemps n’étaient pas dans ce cas et ne parlaient même pas de mariage ! Pareil pour Paul et Rachel.

Ensuite, un autre sujet me fit beaucoup rire intérieurement. Les loups Oméga : les souffre-douleur de la meute, ceux vers qui convergeait toute l'agressivité des autres. Je ne pus m’empêcher de penser à Paul, qui était le souffre-douleur de Jake en ce moment. Mais lorsque la prof ajouta que certains de ces Oméga pouvaient décider de quitter la meute ou d’être bannis après avoir échoué lors d'un conflit, le sujet me fit moins rire.

 

La sonnerie retentit et Angela et moi rejoignîmes Mike au self.

  • Salut les filles ! Alors, vous avez réfléchi pour notre sortie ?
  • Je dois voir avec Ben mais pourquoi pas ? Répondit Angela.
  • Moi je veux bien, ajoutais-je, mais je ne resterai pas longtemps.

Ce genre d’endroit me hérissait. Je resterai juste assez longtemps pour cerner le nouveau Ben puis je rentrerai au campus.

  • Alors demain soir ?
  • Ok ! Répondit Angie.

J’hochais la tête tout en coupant ma viande qui ne semblait pas super tendre.

  • Oh ce steak est encore trop cuit ! Protestais-je.
  • Tu comptes manger des steaks tous les jours ? Répondit Mike en me jetant un drôle de regard.
  • J’ai mangé des pates hier, fis-je en me levant.
  • Où vas –tu ? S’étonna Angela.
  • Demander un steak moins cuit.

Je me dirigeais avec mon assiette vers l’endroit où l’on servait les plats chauds. Il n’y avait qu’une seule personne à attendre et le serveur était occupé à vérifier la cuisson du morceau qu’il allait servir.

  • S’il vous plait … s’il vous plait, est-ce vous pourriez me donner un steak moins cuit ? Demandais-je en tendant mon assiette au serveur qui affichait une mine renfrognée.
  • On n’est pas dans un resto ici ma belle !
  • Ok mais je n’arrive pas à manger ce morceau et je meurs de faim, répondis-je d’une voix que je voulais désespérée. 
  • Désolée, on les fait tous cuire en même temps, répondit-il moins catégorique.
  • Bon, donnez-en moi un cru alors ! M’entendis-je demander.
  • Quoi ? Fit-il en levant brusquement la tête de son four.
  • Vous avez bien compris…

Il parut un instant perturbé puis piocha avec sa fourchette dans un morceau qui attendait sur un tas et me le tendit.

  • Bon, ok, ce sont tes dents après tout…

Je tendis mon assiette et il le plaça dedans.

  • Merci ! Lâchais-je dans un grand sourire.

Tout en retournant à la table, mes yeux ne se détachaient pas de ce morceau de viande qui me faisait saliver.

  • Bella ??? Mais tu te sens bien ? Entendis-je Angela s’écrier lorsque je posais mon assiette sur la table.

A nouveau, je vis mes mains trembler pendant que je coupais un morceau, ma tête me tournait, j’étais presque dans un état second, me fichant complètement de ce qu’on pouvait penser de mon plat. Je mordis enfin dedans et mon corps se détendit.

  • Oui, là ça va mieux …hum…un délice…

La saveur de la viande froide était vraiment exquise. En mangeant un deuxième morceau, je savais que c’est ce que mon corps réclamait depuis un petit moment. Ça me surprenait car, même si je ne mangeais jamais ma viande trop cuite, je n’avais jamais eu ce genre d’envie.

  • Tu es écœurante ! Lança Mike qui m’observait depuis mon retour.
  • Pourquoi ? Tu n’as jamais mangé de steak tartare ? Répliquais-je, agacée qu’on me reproche ma façon de manger depuis un petit temps.
  • Euh si…
  • Et la viande est crue non ?
  • Oui…
  • Bah dis-toi que c’est pareil ! Ripostais-je.

Angela poussa son assiette devant elle en soupirant.

  • Je n’ai plus faim…
  • File-moi ton dessert, répondis-je.
  • Bella…franchement…
  • Je sais mais je meurs de faim ! Désolée…

Je ne l’étais pas vraiment mais je voyais bien que je venais de les choquer. Il était vrai que mon appétit s’était considérablement développé depuis un moment, depuis l’accident, pensais-je…et je finis par admettre que c’était peut-être du à ça…après tout, on m’avait administré du sang moitié animal, il était peut-être normal que j’avais aussi faim. Mon corps avait quand même beaucoup souffert avec cette attaque, il fallait qu’il se recompose doucement ! J’avais besoin de tous les éléments nécessaires pour ça et les protéines en faisaient largement parties !

 

24 – En général, je suis courageux mais cette fois, c’est au-dessus de mes forces.  

 

Sa main blanche dans la mienne était si petite que parfois, on ne la voyait même plus si je lui prenais complètement. Nous marchions ainsi depuis un petit moment, nous tenant très fort comme si quelque chose allait nous séparer, heureux d’être ensemble dans cette forêt aux couleurs flamboyantes de l’automne que le soleil nous faisait l’honneur d’éclairer aujourd’hui. Je humais le parfum des pins, l’air était frais mais sec, nos pieds faisaient craquer les feuilles mortes sur le chemin…les cheveux de Bella se balançaient dans son dos, captant toute la lumière brillante qui traversait les feuillages. Ainsi, ils prenaient une couleur chaude, d’un brun chocolat aussi intense que ses yeux. Elle me guidait à travers les buissons, je la suivais, m’abandonnant totalement à elle.

Elle se retourna vers moi, me sourit et je lui demandais où elle m’emmenait comme ça.

Elle plaça son doigt sur ses lèvres et je compris que c’était une surprise. Elle vint se placer derrière moi et me mit les mains sur mes yeux. J’éclatais de rire en continuant à avancer, droit devant moi. Soudain, elle m’arrêta et me lâcha. J’ouvris les paupières, la lumière du soleil m’aveugla un court instant puis me retournais pour la chercher du regard. Mais j’étais seul. Je tournais sur moi-même, l’appelant d’abord en riant puis je devins inquiet. Où était-elle ? Se cachait-elle ? Avait-elle disparu ?

Soudain, un mouvement attira mon regard et je me retournais vivement pour me trouver face à un loup blanc qui venait de grimper sur le rocher de cette clairière. Le pelage de ce loup était d’un blanc neigeux, presqu’irréel. Je ne le connaissais pas et pourtant, mon instinct me chuchotait d’être confiant. J’avançais d’un pas et le loup se dandina sur ses pattes avant…son attitude était très amicale, presque joueuse et je plissais les yeux pour mieux l’observer. Il baissa la tête et je remarquais alors que ce loup était fin et gracieux. Je compris alors que c’était une femelle mais était-ce une louve ou un loup-garou de mon espèce ? Je ne captais pas ses pensées, je n’avais pas muté, pourtant, cette louve communiquait clairement de par son regard. Une voix résonna alors dans ma tête : « Regarde-moi…Regarde-moi … » Je plongeais alors mon regard dans ses yeux…ses yeux couleur chocolat. Mon cœur fit un bond violent, je n’arrivais plus à respirer, j’étais bouleversé, partagé entre la souffrance et la peur. Mes jambes fléchirent et je me mis à genoux, le corps soudain secoué par des spasmes incontrôlables, le cœur explosé par la douleur.

  • Non…oh non…ma Bella, mon amour…pas toi…

Je vivais un cauchemar, j’allais me réveiller, c’était impossible ! Ce que je craignais le plus au monde était arrivé…je ne le supporterais pas, je ne pouvais pas …

Mais je sentis son souffle près de mon visage inondé par les larmes. Je relevais la tête et me trouvais face à elle, elle dont les yeux inquiets me fixaient avec intensité. Je me relevais, la respiration saccadée…elle m’arrivait à la poitrine, elle restait petite malgré tout mais elle était magnifique. Elle me donna un léger coup de tête et j’osais tendre la main vers elle. Elle approcha son museau et je sentis la fraicheur de sa truffe sous mes doigts. L’effet fut étrange et je me mis à rire, un rire très nerveux. Ses yeux riaient aussi et j’eu le courage de poser ma main sur sa tête. Son poil était aussi doux que sa peau, aussi blanc que son teint porcelaine, aussi parfait qu’elle.

  • Bella… 

Elle secoua la tête et je me mis à rire à nouveau. Elle vint se frotter contre moi, je fis glisser ma main sur son corps, le long de son dos puis sur son échine. Elle était si douce…je vins me remettre à la hauteur de son col et enfonçais mes doigts dans sa crinière blanche pour l’emprisonner par le cou. Curieusement, je me sentais bien, je n’avais plus peur…tout allait bien se passer, Bella semblait s’amuser…Je la lâchais et elle me donna un nouveau coup de tête. Je compris qu’elle voulait que je la rejoigne. Je me déshabillais et mutais, soudain impatient de me promener avec elle sous cette forme, voir de quoi elle était capable, mais elle avait disparu. Je me mis donc à galoper aux alentours puis plus loin et encore plus loin, cherchant dans ces bois le blanc immaculé de son pelage, sans la trouver. Je l’appelais, ne sachant pas trop si elle pouvait m’entendre car je ne recevais que le silence. Soudain, un voile noir parmi les arbres me fit stopper ma course mais le temps que je revienne sur mes pas, il avait disparu. A la place, le loup blanc de Bella surgit d’un buisson et j’entendis sa voix me crier : « Je te protège Jacob ! Je te protège ! Sauve-toi ! »

Je me réveillais en sursaut, le cœur battant ma poitrine avec violence.

 

Je me passais de l’eau sur le visage puis regardais mon reflet dans le miroir, j’avais une tête à faire peur. Mes yeux avaient toujours cet éclat un peu fou depuis mon réveil, comme si tout ça avait été réel. Pourtant, je le savais, ce n’était qu’un cauchemar mais j’étais mort de trouille. Le bien être que j’avais ressenti face à ce loup blanc avait complètement disparu, laissant place à une panique totale.

Billy apparut derrière moi, l’air inquiet.

  • Tu n’as pas l’air bien fiston.
  • Sale nuit…, marmonnais-je.
  • Comment va Bella ?

Cette question, aussi anodine soit-elle, me fit l’effet d’une décharge électrique.

  • Je monte la voir aujourd’hui, répondis-je sans réfléchir.  
  • Elle n’est pas venue voir ton travail ce week-end…
  • Quelle importance ! Rétorquais-je. Ça sera mieux quand ça sera fini.

Je jetais un regard en biais à mon père et comprit sa remarque.

  • Elle te manque ?
  • Tu sais que j’aime bien cette petite…, bougonna-t-il.

Je réussis à lui sourire, malgré ma tête qui bouillonnait, puis le laissait pour retourner m’habiller dans ma chambre. J’enfilais un de mes jeans que je n’avais pas mis depuis une éternité quand soudain, le souvenir de la dernière fois où je l’avais porté me revint comme un flash. Je passais ma main dans la poche arrière et retrouvais un morceau de papier délavé…ce fut pour moi comme une lumière ! Une bouée de sauvetage que le destin me lançait et qui venait de loin pour m’aider à traverser ce cauchemar. Le numéro inscrit était encore lisible malgré qu’il soit passé à la machine, de toute façon, je m’en souvenais parfaitement. Je pris le téléphone portable dont je ne me servais jamais, espérant qu’il ait encore un peu de jus et filais dehors à toute vitesse, à l’abri des oreilles indiscrètes de mon père. Je composais le numéro, les doigts tremblant puis me concentrait sur ce que j’allais bien pouvoir lui dire sans qu’il ne se foute encore de moi.

Ça sonne ! Etonnant qu’il n’est pas changé de numéro…Ou alors, il n’attend que ça…, pensais-je.

Ça sonna pendant environs dix tonalités interminables puis j’entendis sa voix suffisante annoncer : « Edward Cullen…laissez votre message… » Le bip retentit et je mis trois bonnes secondes à réagir :

  • Euh…Salut vieux ! C’est Jake…euh…voilà, j’aimerai discuter d’un truc avec toi …ou plutôt avec Carlisle…enfin voilà…rien de bien grave mais bon …Bella va bien hein, elle est super heureuse et tout, je m’occupe bien d’elle, t’inquiète pas ! Mais voilà…je stresse un peu là…bon ok ! J’ai peur …elle va bien mais j’ai peur que ça ne dure pas…je crois que les craintes de ton père sont justifiées…rappelle-moi ! … ou passe me voir…c’est comme tu veux. (Je laissais passer un petit temps puis rajoutais d’une voix tendue) Je ne sais pas comment je vais gérer ça Edward…  

Un bip me coupa et j’expirais, soulagé d’avoir eu le temps de tout dire sur un seul message. Restait plus qu’à ce qu’il vienne maintenant. Ou qu’il me rappelle !

Je ne sais pas trop ce que je préférais…

 

La journée passait au ralenti, la pluie tombait de plus en plus forte…je posais ma main régulièrement sur ma poche pour vérifier que j’avais toujours mon téléphone, espérant qu’il sonne rapidement. A la fin de l’après-midi, je dus me rendre à l’évidence : Edward ne rappellerait pas.

Mais alors, peut-être qu’il passerait ? J’avais pourtant été très attentif aux odeurs durant toutes ces heures et aucune puanteur n’était venue chatouiller les narines. J’étais super nerveux, partagé entre la gêne d’avoir du le contacter et l’impatience de le voir débarquer, d’entendre ses conseils. Je m’en voulais d’avoir été trop fier pour demander le numéro du doc ou d’Alice. Bella les avait peut-être encore ? Mais comment lui demander sans l’inquiéter ?

Peut-être que je m’inquiétais pour rien mais d’habitude, je ne me souvenais jamais de mes rêves, je dormais d’un sommeil trop profond…là, c’était quasi la première fois et en plus il semblait si réel ! Pour moi, le loup de Bella ne s’était pas montré de la même couleur que le mien, comme dans les rêves de mes frères, où elle était comme une copie d’eux-mêmes …moi je l’avais vue blanche et je savais au fond de moi que c’était SA couleur. Comme si, elle avait attendu de la trouver pour se présenter à moi ! Je la voyais encore, elle semblait rieuse, joueuse, fière de ce qu’elle était devenue…Bella quoi ! Bella et toute sa folie …Ce qui m’angoissait c’est que dans ce rêve, j’étais bien…comme si une part de moi-même me préparait doucement à l’inévitable.

Je jetais encore un regard à mon téléphone, vérifiant qu’il avait toujours un peu de batterie puis soupirais. J’avais demandé à Billy de m’appeler si celui de la maison sonnait mais il n’était pas sorti de la journée…le temps me rendait pessimiste. J’appellerai Bella à la même heure que d’habitude ce soir et je lui demanderais qu’on se voie. Il fallait que je lui parle ! Que je sache si elle allait bien. Mon cœur s’accéléra, j’étais terrorisé. Jamais ne supporterait qu’elle devienne un loup-garou…jamais ! 

 

25 – Grosse panique

 

En début de soirée, Angela se sentit soudain morose et décida de sortir pour rejoindre Ben à l’autre bout de la ville. Seule dans la chambre, j’en profitais pour appeler Jacob.

Il décrocha aussitôt et mon cœur fit un bond.

  • Tout va bien ? S’inquiéta-t-il.
  • Oui…pourquoi ? Bonsoir d’abord…
  • Salut ma chérie…c’est juste qu’il est tôt, on devait s’appeler plus tard…
  • Angela est partie et …
  • Tu es seule ?me coupa-t-il, d’une voix joyeuse.
  • Oui…
  • Mets un truc rouge sur ta lampe de chevet !Déclara-t-il avant de raccrocher.

Je regardais mon téléphone, mi-surprise, mi-irritée mais quand je compris la raison de sa demande, l’ivresse me submergea aussitôt. Je me levais d’un bond et couru dans mon armoire chercher un top rouge pour le mettre sur ma lampe. L’ambiance de la pièce changea aussitôt et j’attendis le cœur battant que mon téléphone sonne à nouveau. Jacob reconnaitrait ma chambre sans problème avec cette lueur. Un quart d’heure plus tard, j’entendis un bruit à ma fenêtre.

Je l’ouvrais avec empressement et un caillou me manqua de peu. Sous la pluie, Jacob attendait dans la cour, juste en short et je vis son sourire blanc éclairer son visage malgré l’obscurité. Je pouffais de rire : à un centimètre près, j’étais assommée !

  • Mais tu es barge ! criais-je doucement, craignant que quelqu’un puisse le voir. 

En réponse, je le vis prendre un peu d’élan et sauter contre le mur. J’étouffais un cri lorsqu’il s’accrocha après la gouttière qui vrombit jusqu’au sommet sous l’impact. Il leva son visage mouillé vers moi et me sourit à nouveau. Puis, il grimpa avec une agilité déconcertante sans un bruit. Je le regardais monter, émerveillée, le cœur battant de le sentir si proche. Il fut à ma fenêtre en moins de deux et s’agrippa au bord d’un seul bras.

J’éclatais de rire et le tirait par le cou à l’intérieur de toutes mes forces, bien qu’il n’en avait pas besoin.

  • Bella …attention ! s’écria-t-il d’une voix étouffée en se retenant d’une main à ma fenêtre.

Je tirais tellement que je manquais de nous faire basculer sur le lit et son poids n’aurait pas manqué de le détruire en une seconde. Nous rîmes à nouveau en se collant l’un contre l’autre.

  • Oh Jacob … tu es là …, chuchotais-je en l’enlaçant par le cou.

Son corps mouillé inondait ma chemise de nuit mais ça n’avait aucune importance. Sa chaleur était si douce et le sentir ainsi, contre moi, me rendait folle de joie.

Il lâcha la fenêtre et me serra si fort que le souffle me manqua pendant quelques secondes. Je capturais ses lèvres et l’embrassais passionnément pendant qu’il me soulevait pour mieux me coller contre lui. J’enroulais mes jambes autour de sa taille et il fit un pas vers le lit qui venait d’avoir la vie sauve.

  • Elle revient quand ? marmonna-t-il entre deux de mes baisers.
  • Plus … tard…
  • Tu vas bien ?
  • Oui, chuchotais-je.
  • Pas de malaise ? insista-t-il en se dégageant légèrement, pas de fièvre ?
  • Si, énorme depuis que tu es là, répondis-je en riant doucement.
  • Je suis sérieux Bella !

Je plantais mon visage face au sien, vaguement agacée.

  • Je vais bien Jake ! répétais-je, ne comprenant pas pourquoi il insistait autant sur mon état. Viens maintenant …

Il sourit et nous pencha alors dans le vide. Son bras se plaqua sur le lit pour retenir notre chute en douceur. Je me laissais tomber et l’attirait contre moi, impatiente.

Pendant qu’il m’embrassait avec ardeur, je fis glisser son short puis je me soulevais pour retirer ma chemise de nuit trempée. Il se plaqua contre moi et je soupirais de plaisir. C’était si bon de le sentir, quand il était en moi comme ça, on avait beau m’avoir répété que c’était moi qui faisait subir l’attraction, moi je me sentais complètement dépendante de lui, j’avais toujours la sensation que c’était moi qui était en lui, que mon âme envahissait son corps, je voyais avec ses yeux, je respirais avec sa bouche, mon cœur battait à la place du sien…c’était une sensation si enivrante qu’elle me faisait toujours perdre pied. J’avais la sensation physique que nous ne faisions plus qu’un, que je disparaissais complètement en lui. En fait, je revivais à chaque fois mon imprégnation et c’était toujours bouleversant.

Un bruit dans le couloir m’interpella vaguement. Je pensais alors que Jacob n’avait rien à faire ici ! Je pouvais me faire virer pour ça ! Cette idée me fit sourire et je l’embrassais avec plus de fougue. Campé sur ses bras pour ne pas m’écraser, c’est lui qui guidait le rythme et je m’abandonnais, m’arquant contre lui, l’agrippant de mes jambes et de mes bras. Ma tête tournait et j’enfouis mon visage dans le creux de son cou pour mieux m’enivrer de son parfum boisé. Soudain, je le vis braquer ses yeux noirs sur la porte derrière nous et il ralentit doucement son étreinte. Je penchais ma tête en arrière, pour voir ce qu’il avait alerté mais ne vis rien. Il baissa ensuite son regard sur moi et murmura en riant doucement :

  • Je crois que tu vas avoir une franche explication avec ta copine…
  • Quoi ?! M’écriais-je, paniquée.
  • Tu devrais aller lui parler parce qu’elle est au bord de la crise cardiaque, rigola-t-il.

Je me dégageais et chuchotais :

  • Elle est entrée ? Elle est encore là ???
  • Je sens son odeur dans le couloir…oui, elle est encore là, elle panique là…j’entends sa respiration.
  • Oh non ! Gémissais-je en me levant.

Jacob riait doucement en basculant sur mon lit.

  • C’est pas drôle Jake ! Rétorquais-je agacée, en enfilant mon tee-shirt de sport et mon short.
  • Oh si !
  • Tu n’as rien à faire là ! lui rappelais-je.
  • Oh c’est bon Bella ! J’espère bien qu’elle ne va pas aller te cafter ! Sinon, change de copine ! riposta-t-il.

Je courrais vers la porte et ma main tremblait lorsque je fis tourner la poignée. Le fait est que j’avais peur de sa réaction…Angela était très prude et je savais déjà qu’elle était en état de choc. Son attitude me le confirma lorsque je la découvris, plaquée contre le mur, les yeux fermés, un livre contre sa poitrine qui se soulevait rapidement.

  • Angie…, chuchotais-je.

Elle sursauta.

  • Oh Bella !

Ah bon sang ! Elle était hyper gênée … elle avait vraiment ouvert la porte…

  • Je … je suis désolée …, bégaya-t-elle. Je…je ne savais pas…
  • Ce n’est pas grave, réussis-je à lui répondre, aussi gênée qu’elle.

Je jetais un œil dans la chambre, Jacob avait filé. Mais je pensais qu’il ne devait pas être loin.

  • Viens…, lui annonçais-je en ouvrant la porte en grand pour qu’elle comprenne qu’elle pouvait entrer.
  • Non…non…ça va …je…
  • Mais viens ! Il est parti, répétais-je. 
  • Ah …, murmura-t-elle.

Elle se glissa jusqu’à la porte et constata que la pièce était vide. Alors, ça gêne s’envola aussitôt et elle fila jusqu’à la fenêtre.

  • Mais…mais il a fait comment pour monter ? Et pour redescendre ? S’étonna-t-elle en regardant la cour.

Soudain, je regrettais son esprit à toujours tout discerner rapidement. Jacob devrait être plus prudent à l’avenir sinon, Angela ne manquerait pas de découvrir rapidement la vérité sur sa nature.

  • Oh tu sais les indiens…ils ont l’habitude de grimper aux arbres, murmurais-je, espérant que cette explication farfelue suffirait.
  • Même à cette hauteur !
  • Oui … Jake est très agile.
  • Oui j’ai vu ça, murmura-t-elle à elle-même. Oh, je veux dire…, ajouta-t-elle à nouveau embarrassée, j’imagine…
  • C’est bon Angie…, rigolais-je.

J’allais m’installer sur le lit en soupirant. Avec tout ça, Jacob n’était plus là et il me manquait déjà. Angela alla s’installer sur le sien, toujours son livre contre sa poitrine. Je me passais la main dans les cheveux et sentis qu’elle m’observait.

  • Excuse-moi Angela…je pensais que tu passerais la soirée avec Ben…Jacob était dans le coin … enfin bref…, marmonnais-je.
  • Pas de problème Bella. La prochaine fois, dis-moi si tu veux que je te laisse la chambre pour la soirée, déclara-t-elle doucement.

J’osais lever les yeux vers elle et lui souris. J’appréciais vraiment cette fille.

  • Merci…en même temps, ce n’était pas prévu…
  • Tu sais qu’il risque de se faire choper et toi aussi…, me rappela-t-elle, sans réelle conviction.
  • Je sais…mais il me manque tellement.
  • Oui, ça je comprends ! affirma-t-elle, en écarquillant les yeux dans le vide.

Puis, elle me regarda et nous éclatâmes de rire devant sa réflexion qui ne laissait aucun doute sur ce qu’elle pensait. Je me mordis les lèvres, encore un peu embarrassée.

  • Je suis désolée Angela…Vraiment…, répétais-je.
  • Oh…ne t’en fais pas…ça m’a fait un électrochoc là, je le sens…, rigola-t-elle.

Mais ses yeux semblaient si tristes. Je me levais et vins m’asseoir près d’elle.

  • Qu’est-ce qu’il se passe ? Murmurais-je.
  • Rien, répondit-elle dans un soupir.

Les larmes lui montèrent aux yeux et je la pris contre moi.

  • Ce n’est rien, répéta-t-elle dans un sanglot, enfin…j’y suis allée pour rien…il faisait une partie de jeu en réseau…je suis restée et …enfin, j’en avais marre, tu comprends.
  • Oui…
  • Et quand je te vois avec …enfin, vous, vous passez votre temps à faire autre chose…vous profitez clairement l’un de l’autre…vous vous manquez…vous semblez tellement vous aimer, finit-elle dans un souffle. On dirait que vous vous dévorez, c’est tellement beau.
  • Euh…tu étais là depuis longtemps ? Osais-je demander.

Elle releva la tête, ses joues inondées par les larmes.

  • Non, je n’ai fait qu’ouvrir et refermer la porte mais bon…l’image que j’ai de vous est tellement …parlante.
  • Oh…
  • Désolée Bella…je suis entrée dans ton intimité, s’excusa-t-elle.
  • Non, c’est rien…je ne voudrais pas que tu sois choquée c’est tout…je suis très … enfin, Jacob me fait beaucoup d’effets…

Angela éclata de rire et je finis par me joindre à elle, tentant d’ignorer cette douleur qui recommençait à me tirailler le ventre.

 

Angela pleura encore pendant quelques minutes avant de sombrer dans le sommeil. J’étais restée près d’elle, à lui caresser les cheveux, espérant la calmer mais rien n’y faisait. Son couple était au bord de l’explosion et elle en souffrait beaucoup. Soudain, mon portable vibra et je la lâchais pour me précipiter dessus.

  • Pourquoi es-tu parti si vite ? l’accusais-je.
  • Tu voulais quoi ? Me rejoindre dehors ?
  • J’aurai pu !
  • N’importe quoi, tu as vu le temps ?

Je jetais un œil vers la fenêtre, où la pluie dégoulinait à flots. Le temps s’était dégradé en quelques heures.

  • ça va ta copine ? Pas trop secouée ?rigola-t-il à nouveau.
  • Non, ça va … elle a des problèmes avec son copain…
  • Ah…et toi ? ça va ?
  • Mais pourquoi est-ce que tu me demandes tout le temps ça ? Je maitrise ! Ripostais-je, franchement agacée.
  • Je ne parle pas de ça …,marmonna Jake. Bon, j’étais venu pour te parler en fait et avec ça… Enfin … je reviendrai demain. On peut se voir quand ?
  • C’est si urgent ? M’étonnais-je.
  • Bah je ne sais pas en fait …
  • Tu peux peut-être déjà m’en parler au téléphone ?
  • Hum…en fait, j’aimerai te poser une question…tu peux discuter là ?

Je détestais quand il prenait ce ton. Je soupirais fortement afin qu’il comprenne puis jetais un œil vers mon amie qui semblait dormir profondément. Par précaution, j’allais tout de même m’installer sur le seul fauteuil de cette chambre, près de l’entrée. Ainsi, je pouvais voir Angela.

  • Vas-y…
  • Tu te sens comment ? Je veux dire, tu n’as pas l’impression d’être fiévreuse ou au contraire, pleine d’énergie ?
  • Si … mais ça date de longtemps déjà…depuis que j’ai reçu ton sang, répondis-je.
  • Hum…
  • Quoi ?
  • J’ai peur Bella.

Le ton de sa voix m’alerta et j’en oubliais mon agacement.

  • Peur de quoi ?
  • Peur des conséquences de tout ça …
  • Je t’assure que je me sens bien ! Le rassurais-je. C’est normal que mon corps réagisse un peu, ton sang est spécial, non ?
  • Justement … il est différent du tiens, très différent.
  • Oui, et il m’a sauvé la vie ! Rétorquais-je, énervée qu’il puisse regretter de m’avoir aidé.
  • Mouais… et il y a peut-être un retour de la médaille…
  • Non, je n’y crois pas, je me sens bien ! Je te l’ai dit, je ne me suis jamais sentie aussi bien et je sais que ça n’a rien à voir avec ton sang. C’est toi qui me rends comme ça, affirmais-je. Angela trouve que je suis plus belle, ma mère aussi…
  • Ah ouais ? Angela t’a trouvé changé ?s’exclama-t-il, soudain inquiet.
  • Oui…
  • Mais comment ?
  • Comment ça comment ?! M’énervais-je.
  • De manière spectaculaire ou un peu ?
  • Jake … arrête ça !
  • Réponds-moi…

Je soupirais encore une fois, très fort.

  • Elle m’a trouvé très changé oui…elle me trouve plus sexy, plus belle …et toi ? tu me trouves plus sexy ? demandais-je d’une voix câline.
  • Bella …
  • Moi je pense que tout ça est du au fait que je suis heureuse avec toi ! point ! Répétais-je durement.
  • Il y a aussi autre chose…
  • Je t’écoute, soupirais-je.
  • Tu te souviens de tes rêves en ce moment ?
  • Oui …
  • Et ?
  • Je rêve de toi…, chuchotais-je, et de la forêt autour de la Push ! Je me sens toujours bien quand je rêve de la forêt, c’est …apaisant.
  • Tu rêves de la forêt ?
  • Oui…et je rêve de toi, rappelais-je. De ton loup aussi…d’ailleurs, quand tu es parti pendant ces trois jours, j’avais l’impression de me balader avec toi. C’était merveilleux.
  • Je n’ai pas bougé de ma clairière pendant ces trois jours. J’ai dormi non stop.
  • Pourtant, ça paraissait réel, affirmais-je.
  • Tu es sûre que c’était mon loup ?
  • Comme si je pouvais le confondre !
  • Il n’y avait personne d’autre ?
  • Si moi ! M’impatientais-je.
  • Hum… et tu faisais quoi à part te balader sur moi ?
  • Je n’ai jamais dit que j’étais sur toi ! J’ai dit avec toi … (je marquais une pause puis lançais le pavé dans la mare, sûre de l’agacer) Je crois que je me voyais en loup…c’était très drôle !
  • Quoi ?!
  • Ce n’était qu’un rêve Jacob…, rigolais-je. Je te vois et je vois un loup à tes côtés et je ne sais pas pourquoi…j’ai l’impression que c’est moi…, ajoutais-je plus sérieusement.
  • Quand…quand tu te réveilles, tu n’as pas les pieds sales ou les vêtements déchirés.

Il paniquait et je regrettais de l’avoir provoqué.

  • Jacob, tu te sens bien ? Tu me fais peur là…
  • Réponds-moi !
  • Bien sûr que non ! C’est n’importe quoi ! M’emportais-je.
  • Bon, finalement demain je ne viens pas…je dois faire un conseil.

Et voilà ! Il recommençait à « faire son Sam ». Je détestais quand il prenait ce ton froid et trop sérieux. J’allais encore devoir passer une journée sans le voir…mais il semblait si inquiet.

  • Jacob, qu’est-ce qu’il se passe ?
  • Je ne sais pas encore, je t’en parlerai quand j’en saurai plus.

 

Je restais un bon moment ainsi, le téléphone à la main, assise sur ce fauteuil, tentant de réfléchir à tout ce que Jake m’avait posé comme question, à l’angoisse que j’avais ressentie dans sa voix. Je pensais alors que je ne lui avais pas encore parlé de ce que j’avais ressenti en sport l’autre jour, quand je n’avais pas eu besoin de reprendre mon souffle. Je pensais aussi à toute la nourriture que j’avalais depuis quelques semaines, à cette faim irrationnelle que je ressentais devant de la viande crue…au bien-être que ça me procurait quand je la goûtais…est-ce que Jacob avait raison de s’inquiéter ? Est-ce que Carlisle avait vu juste ? Allais-je muter, comme il l’avait envisagé ? J’y avais beaucoup pensé lorsqu’il m’en avait parlé et sincèrement, cette idée ne m’effrayait pas…encore moins depuis que je m’étais imprégnée de Jacob. C’était même pour moi, la suite logique des choses … Ainsi, je ferais complètement partie de son clan et nous serions en parfaite harmonie.

 

26 – Une soirée à oublier

 

Mike était tout excité à l’idée de nous sortir ce soir dans sa fameuse boite « hyper tendance » comme il disait. Je rigolais de son enthousiasme, essayant de me composer une bonne figure pour ne pas lui montrer à quel point ce genre d’endroit me déplaisait et gâcher sa bonne humeur. Angela était tendue car Ben devait nous accompagner et elle ne savait plus trop où elle en était avec lui. Moi, j’avais hâte de le revoir, histoire de constater par moi-même quel genre de gars il était devenu et surtout, pour observer son attitude vis-à-vis de mon amie, qui souffrait un peu plus chaque jour.

J’avais informé Jake de ma sortie, espérant qu’il me proposerait de m’accompagner mais il semblait vraiment trop préoccupé par cette histoire de rêves. Il m’avait répondu « ah, bon, bah amuse-toi bien ! » et avait changé de sujet. Je savais qu’il n’aimait pas non plus les boites de nuit et n’avais pas insisté.

 

Comme je me l’étais imaginée, la salle était bondée, envahie par une musique assourdissante qui me faisait vibrer le cœur tellement les basses étaient à fond…Mike nous dirigeait vers le centre de la pièce où j’apercevais des sofas rouges dispersés un peu partout. Nous trouvâmes de la place, près d’un groupe d’étudiants que j’avais déjà vu dans le parc du campus.

  • C’est cool hein ? Cria Mike.

J’hochais la tête dans un sourire, bien décidée à ne pas me briser la voix inutilement pour répondre oui ou non. Angela guettait l’entrée avec fébrilité car Ben n’était toujours pas arrivé.

  • On aurait du lui donner rendez-vous au campus, criais-je dans son oreille.

Elle haussa les épaules et tourna à nouveau la tête vers l’entrée. Le serveur arriva à ce moment là et prit notre commande.

Je jetais un regard circulaire sur la population qui nous entourait et remarquais que la plupart des jeunes qui étaient là, étaient de l’université. J’apercevais un ou deux groupes de personnes plus âgées mais la majorité était des étudiants.

Le serveur revint avec notre commande et je fus surprise de voir Ben derrière lui qui attendait qu’il pose nos verres pour s’asseoir.

  • Salut Ben ! Criais-je.
  • Eh Bella ! Comment va ?

J’hochais à nouveau la tête et il sourit. Puis, il s’installa près d’une Angela en demi-teinte : heureuse mais tendue. 

Mike semblait apprécier le spectacle des filles qui se trémoussaient sur la piste. Je lui mis un coup dans l’épaule et criais :

  • Arrête de baver !

Il rigola de bon cœur et je me joignis à lui.

Ben tenait la main d’Angela mais semblait aussi plus absorbé par ce qu’il se passait sur la piste que par sa compagne. Je jetais un regard à mon amie puis m’approchais d’elle, une idée en tête.

  • Viens avec moi ! lui demandais-je dans l’oreille.
  • Où ?
  • Sur la piste ! Viens …, lui répétais-je dans un clin d’œil.

Elle comprit ce que je comptais faire et me sourit en se levant. Nous nous dirigeâmes en riant vers le groupe qui se démenait au centre et je tentais d’en faire autant, bien que j’avais une sainte horreur de danser. Angela, par contre, n’avait pas se problème et commença à faire bouger son corps d’une manière assez provocante, comme je l’espérais. Je jetais un bref regard vers les garçons, Ben ne la quittait pas des yeux. Parfait ! J’essayais de la suivre et Angela ne put s’empêcher d’éclater de rire devant ma gaucherie. Je n’étais pas habituée à ce genre de danse mais je tentais de me rappeler comment les Quileute m’avaient fait bouger lors de notre soirée en plein air et le résultat semblait convaincre Angela.

  • Je déteste ça ! Lui criais-je. Mais tu ne me laisses pas le choix !
  • Tu te débrouilles bien ! Répondit-elle en criant aussi.

Je haussais les épaules, pas convaincue.

  • ça va peut-être le faire réagir ? Fis-je en balançant légèrement ma tête vers Ben. Angie, Il faudrait vraiment que vous parliez! Mettre les choses à plat ! 
  • Je sais ! Mais je n’y arrive pas ! Me cria-t-elle avec un léger voile dans les yeux.

Au bout d’un moment, Ben vint nous rejoindre sur la piste et dansa près de nous, pour le plus grand plaisir d’Angie. Mike surveillait nos verres, bougon.

Je souris d’un air entendu à mon amie et décidais de rester encore un peu, sachant qu’une fois que je serais assise, je ne reviendrais pas me mêler aux danseurs.

Sans que je ne m’en rende compte, je venais de me faire encercler par deux garçons et l’un deux me jeta un regard envieux qui me fit froid dans le dos. Je stoppais immédiatement ma danse pour retourner près de Mike mais ils me collaient et l’un des deux se planta devant moi.

  • Tu vas où comme ça ? Cria-t-il.
  • Laisse-moi passer !
  • T’es pas bien là ? Entre nous deux ?

J’entendis l’autre éclater de rire derrière moi et une odeur de bière m’arriva jusqu’aux narines, écœurante. La musique baissa un peu de volume, le rythme se fit plus lent. Je me dégageais rapidement afin de leur enlever tout de suite l’idée de m’inviter (ou plutôt de me forcer) à danser un slow mais ils me suivaient. J’espérais que de voir Mike les arrêterait. Mais j’avais du mal à me faufiler parmi les étudiants et ils me collaient toujours. Je fus stoppée par un groupe qui passait et l’un des deux types me prit le bras pour me retourner vers lui. J’entendis alors un grognement à mon oreille. Je tournais la tête pour voir avec stupeur, Paul, le visage mauvais, défiant l’étudiant du regard. L’effet fut immédiat, le type me lâcha et je me tournais vers Paul en criant :

  • Mais qu’est-ce que tu fais là ?!
  • Et toi ?
  • Quoi ?!
  • Ce type te voulait du mal…s’il s’approche à nouveau, je n’hésiterais pas à l’affronter, grogna-t-il.
  • Mais ?! Paul ! Ce n’est pas à toi de me protéger ! Tu n’as rien à faire ici ! Jacob va te tuer !
  • Je ne te suivais pas, j’étais là pour passer la soirée, déclara-t-il.
  • Tu te fous de moi ?!
  • Pourquoi est-ce qu’il faut toujours que tu te mettes dans des situations impossibles ! Tu cherches les ennuis ou quoi ? S’écria-t-il soudain.
  • Mais enfin ! De quoi parles-tu ?!
  • Tu recherches toujours les défis Bella ! Tu joues avec le danger ! D’abord les vampires, puis les loups-garous, les sauts de falaise, les provocations, les coups ! Tu te crois invulnérable ?
  • Paul, tu délires…
  • Non je ne fais que constater les faits ! Pourquoi est-ce qu’il faut toujours qu’on s’inquiète pour toi Bella ? On ne sera peut-être pas toujours là pour te protéger !
  • Ce n’est pas à toi de me protéger, répondis-je froidement.
  • Tu sais que j’aurai pu te faire très mal la dernière fois ? Murmura-t-il les dents serrées, son visage à quelques centimètres du mien. Tu as vu Emily ? ça ne t’a pas suffit de te faire déchiqueter par Fenq ?
  • Paul arrête…
  • Tu n’es pas un aimant à danger, tu aimes le danger ! ça ne te fait pas peur la mort Bella ? me demanda-t-il son regard vert pistache planté dans le mien.

Comme je ne répondais pas, il continua en s’esclaffant :

  • Bien sûr que non ! Tu étais même prête à claquer pour les beaux yeux d’une sangsue puante !
  • Tu as bu ? M’inquiétais-je, en jetant un regard autour de nous pour vérifier que personne ne nous écoutait.
  • Tu aimes aussi provoquer Jacob…, continua-t-il. Tu espères quoi ? Qu’un jour il ne se contrôle plus et qu’il te fasse aussi mal ? Tu crois qu’il pourra toujours se maitriser ?
  • Mais de quoi tu parles ?! M’écriais-je, inquiète parce qu’il venait de me balancer.

Est-ce qu’il savait quelque chose que Jacob n’osait pas me dire ? Qu’est-ce qu’il insinuait ?

  • Tu n’es pas forte Bella ! Tu ne peux pas combattre, tu ne peux pas nous sauver comme tu t’entêtes à le répéter dans nos rêves ! C’est nous qui te sauvons ! Qui te protégeons…Qui te protégerons toujours. C’est notre rôle ! Pas le tiens !
  • Paul, s’il te plait…

Mon ton suppliant le calma aussitôt. Les yeux troubles et brillants, il me prit doucement le bras puis fit glisser sa main dans la mienne en soupirant.

Je déglutis mais lui serrais les doigts pour le remercier malgré tout. Son dévouement me touchait, je savais que ce qu’il pensait n’était pas correct vis-à-vis de Rachel, vis-à-vis de Jacob, vis-à-vis de la meute mais je savais aussi qu’il essayait de lutter contre ça et qu’il avait beaucoup de mal. Je le voyais vraiment comme un ami, comme un frère et je voulais tellement que notre relation soit comme ça. Paul sursauta et je reconnus sa main sur son épaule avant même de voir son visage. Paul me lâcha aussitôt.

  • C’est la dernière fois que je te le dis Paul…ne t’approche plus de Bella, murmura Jacob à son oreille.

Jamais je n’avais entendu cette voix. Jake était si tendu, si froid...pendant un instant, l’image de son loup m’apparut et je le crus capable de briser son frère sur le champ.

Je vis furtivement de la peur sur le visage de Paul lorsqu’il le tourna vers Jake qui restait dans son dos. Puis, il baissa les yeux et hocha la tête, la mâchoire serrée.

  • Jacob, calme-toi, m’entendis-je dire, Paul m’a aidé à me débarrasser de sales types.
  • Rentre à la réserve, je te rejoins, ordonna Jake toujours de cette voix méconnaissable, sans même tenir compte de ma remarque.

Paul me jeta un bref regard et nous laissa. Jake vérifia qu’il s’éloignait pendant quelques secondes puis reporta son regard noir sur moi. Je lui souris, heureuse qu’il soit là mais je vis sa mâchoire se contracter et il fit demi-tour pour regagner la sortie. Affolée, je me mis à le suivre comme je pouvais car je n’avais pas sa capacité à me faufiler aussi agilement parmi la foule. Je le vis passer la porte et continuer sa route sur le trottoir d’en face. Je me mis à courir et traversais la chaussée sans même regarder. Une voiture pila, je stoppais ma course. Jacob se retourna et vint me chercher sur la route en me tirant par le bras. Son geste rageur me fit peur.

  • Bordel, tu ne peux pas faire attention !
  • Jake, pourquoi pars-tu ?

Il se retint de me faire une autre remarque et recommença à marcher.

  • Mais Jake, où tu vas ?! M’écriais-je.
  • Je rentre !
  • Attend !

Je réussis à lui attraper le bras mais je n’étais pas assez forte pour le retenir. Je dus lui faire pitié car il stoppa le pas en soupirant. Je sentis les larmes me monter aux yeux et me blottis contre lui malgré la froideur qu’il affichait.

  • Jake, sanglotais-je, je t’en prie…ne me quitte pas.

Il ne me prenait même pas dans ses bras ! Je pleurais de plus belle, anéantie. Il me laissa vider mes larmes contre lui pendant un bon moment puis me poussa de ses deux mains. Je crus que mon cœur allait exploser de chagrin.

  • Jacob…je…je n’ai rien fait…il n’a rien fait…il voulait juste…

Il soupira très fort, les deux mains sur ses hanches. J’étais secouée de spasmes tellement je pleurais, je n’osais plus le toucher, j’espérais qu’il se calme. Je l’entendis prendre une profonde inspiration et osais lever la tête vers lui.

  • Je ne veux …pas que tu …partes, sanglotais-je de plus belle.
  • Bella, arrête de chialer s’il te plait…

Je remarquais que sa voix était plus calme et je tentais de stopper les spasmes qui me secouaient. Il me prit alors dans ses bras et mon cœur se mit à battre violemment. J’enfouis ma tête dans sa poitrine en m’arrêtant de respirer pour mieux écouter son cœur, sa respiration…pour mieux écouter la colère qui s’éloignait.

  • Il voulait quoi ? demanda-t-il dans un soupir.
  • Des mecs m’ont un peu collé et il les a éloignés.
  • Ils te voulaient du mal ?
  • Ils n’étaient pas clairs…
  • Ok…

Il poussa un profond soupir, la colère prenait le large.

  • Qu’est-ce que tu ressens pour lui ? Demanda-t-il au bout d’un moment d’une voix rauque.

Je relevais la tête brusquement.

  • Je sais que tu n’es pas attirée par lui, ajouta-t-il gravement. Je sais que tu ne l’aimes pas comme moi… mais Bella…aide-moi à trouver une bonne raison de ne pas le tuer ! Explique-moi parce que je ne comprends plus là…

Je déglutis, essayant de rassembler les mots justes dans ma tête, en espérant le convaincre.

  • La nuit de mon imprégnation, commençais-je, lorsque je suis revenue sur la plage avec toi, j’ai senti un lien très fort qui m’unissait à la meute…je pouvais presque voir ce lien qui me reliait à eux, comme un fluide magique…je me suis sentie soudain comme connectée ! Comme si nous étions tous nés ensemble dans une même bulle…c’était un sentiment très étrange mais je pensais que c’était normal…
  • Et depuis, tu entends Sam ? me demanda-t-il en fronçant les sourcils.
  • Oui, j’entends Sam…ce n’est pas normal ? M’inquiétais-je.
  • Non …
  • Oh…
  • Et tu te sens connectée à tout le monde ? A toute la meute ?
  • En fait non, répondis-je en réfléchissant bien.

Jake se dégagea de moi et m’invita à m’asseoir sur un banc près de nous pour mieux discuter. Il m’enlaça et je continuais :

  • Je ne ressens pas cette connexion avec Jared et Quil…ni avec les jumeaux…ni avec Kim et la petite Claire, énonçais-je, en réfléchissant bien à ce que je percevais lorsqu’ils étaient près de moi. Par contre, je ressens toujours comme une vibration, un très fort sentiment d’amour et de fraternité avec Sam et Emily, Seth, Embry, ton père, Rachel, même Leah ! Rigolais-je.

Je le vis sourire légèrement et continuais d’une petite voix :

  • Et c’est valable aussi pour Paul.

Jacob leva la tête vers le ciel, je sentais que ça bouillait en lui, qu’il essayait de comprendre cette manie que j’avais de vouloir l’empêcher de faire du mal à Paul.

  • J’ai comme un besoin de les protéger, je les vois vraiment comme MA famille. Est-ce que tu comprends ? Murmurais-je.

Jake hocha la tête et je sentis que lui aussi, cherchait les mots pour m’annoncer quelque chose.

  • Bella…je pense…nous pensons tous, reprit-il, que tu vas devenir l’une des nôtres.

Il osa enfin me regarder et je lui souris, pour tenter de le rassurer, sachant déjà ce qu’il avait en tête.

  • Tu comprends ce que je suis en train de te dire ? Insista-t-il, surprit par mon manque de réaction. Nous pensons que tu vas devenir un loup-garou…ça ne te touche pas plus que ça ?
  • Quand tu dis nous ? Tu veux dire quoi exactement ?
  • Cette connexion que tu ressens, tous ceux que tu as énumérés la sentent aussi…dans leurs rêves, précisa-t-il.
  • Paul m’en a parlé, confirmais-je en hochant la tête.
  • Ah oui ? S’étonna Jake.
  • Oui, le jour où tu l’as frappé…il m’a dit qu’il rêvait de moi, que je lui parlais et à chaque fois qu’il est venu me voir, il m’en a reparlé…encore ce soir. Ça a l’air de le rendre dingue…
  • Ça les rend tous dingues ! Ils te voient aussi en loup Bella. Je t’ai vue aussi, murmura-t-il tristement. Ça ne te fait pas peur ?

Je soupirais doucement, cherchant encore mes mots pour ne pas l’effrayer. La vérité est que je m’y étais préparée depuis longtemps, depuis le jour où Carlisle avait envisagé l’éventualité que ce sang fasse subir des changements à mon organisme. Tout à coup, je revis son visage très nettement et la conversation que nous avions eu à l’hôpital : « J’ai accepté de faire ça parce qu’Edward me l’a demandé et aussi parce que je sais que tu comptes faire ta vie ici, avec l’un des leurs. Si tu changes un jour, tu es dans le secret et je pense que tu accepteras, quoiqu’il se passe » Oui, je l’avais déjà accepté à ce moment là…

Jake m’observait et je réalisais que je ne lui avais pas répondu.

  • Non …, finis-je par dire. Et tu le sais. Tu me connais Jake, tu sais parfaitement que cette éventualité ne me fait pas peur. En fait, je pense que tu aimerais que je te rassure en te disant que tout va bien ?
  • Et ce n’est pas le cas hein ? Demanda-t-il d’une voix tremblante.
  • Non…je me sens toujours boostée à bloc, je peux courir longtemps sans être essoufflée, j’ai envie de viande crue, je rêve que je suis un loup …

Ses yeux devinrent brillants et je compris qu’il se retenait de pleurer. Je me soulevais pour m’asseoir sur lui et il inspira très fort pour se retenir de ne pas craquer. Je passais mes deux mains dans ses cheveux et il se mordit les lèvres. Il souffrait tellement et ça me faisait si mal de le voir comme ça…je me blottis contre lui et il me serra très fort contre sa poitrine où j’entendis un sanglot étouffé qui me fit monter les larmes aux yeux.

  • Je ne vais pas le supporter Bella, l’entendis-je murmurer, la voix brisée. Ce n’est pas possible…
  • Jake, pour l’instant, je vais bien, le rassurais-je en relevant la tête.

Il prit mon visage entre ses deux grandes mains et m’essuya les joues dans un geste tendre. Puis il déposa un baiser brulant sur mes lèvres mais son visage se crispa de douleur et ses yeux brillèrent à nouveau.

  • Jacob…tout va bien se passer…ce qui doit arriver, arrivera…nous ne pourrons pas lutter. Il faudra juste savoir le gérer et toi et moi, nous pouvons faire ça.

Il hocha légèrement la tête, pas convaincu.

  • Tu manges de la viande crue ? Murmura-t-il dans un sourire amusé.
  • Une envie de dingue ! Rigolais-je.

Je sentais qu’il avait soudain envie d’en plaisanter et je lui racontais mon épisode avec le serveur du self. Je réussis à le faire éclater de rire, pour mon plus grand plaisir. Puis, il réfléchit pendant un petit moment et déclara :

  • Je te préviens, ce week-end, tu es à moi !

 

27 – Rupture

 

Je réussis à convaincre Jake de venir finir la soirée avec moi dans cette fameuse boite de nuit. Lorsque nous arrivâmes, main dans la main, près de mes amis, je vis les deux garçons lever de grands yeux vers Jacob et même Mike qui le connaissait bien, se tortilla sur son fauteuil, impressionné. Puis, il réussit à serrer la main que Jake lui tendait pour le saluer. Je l’invitais à nous asseoir près d’Angela et Ben qui affichaient une mine tendue malgré les sourires qu’ils se forçaient à nous faire. Je me demandais ce qu’il y avait bien pu se passer entre le moment où je les avais laissés sur la piste, enlacés et maintenant ?  Angela semblait un peu troublée et je me souvins que la dernière fois qu’elle avait vu Jacob, il était nu et dans une position plus que gênante. Je rougis légèrement à ce souvenir et tentais de l’oublier aussitôt.

  • Alors ? Tu fais quoi maintenant ? Demanda Mike à Jacob.
  • Je cherche du boulot…, répondit-il, un peu crispé.
  • Tu as arrêté l’école ? S’étonna Mike.
  • Oui…
  • Mais pourquoi ? insista mon ami.
  • Pas assez doué ! Rétorqua Jake, avec une pointe d’agacement.

Il préférait se faire passer pour un idiot plutôt que de dire la vérité. Ça me révoltait mais en même temps, je n’avais pas de meilleures explications que lui. Je le laissais donc faire, les lèvres serrées. Angela m’observait et je détournais mon regard afin qu’elle ne comprenne pas à quel point j’étais irritée.

Soudain, la musique redevint assourdissante et Mike braqua ses yeux derrière nous. Nous nous retournâmes pour savoir ce qu’il l’intéressait autant et je vis une belle blonde qui se faufilait avec une copine parmi la foule. Mike se leva d’un bond.

  • Bon, bah je vous laisse ! S’écria-t-il, tout heureux.

Nous éclatâmes de rire et je le suivis des yeux jusqu’à ce qu’il intercepte la fille pour l’inviter à boire un verre au bar.

Mais notre amusement s’éteignit aussitôt lorsque notre regard se porta à nouveau sur le couple qui nous faisait face et qui ne semblait pas apprécier la soirée. Je me sentis soudain mal à l’aise, ne sachant pas trop comment nous allions pouvoir les dérider, de quoi nous allions parler, vu qu’ils semblaient très tendus et que la musique allait couvrir notre voix. J’imaginais déjà que ça allait tourner court vu que Jacob et Ben n’avaient rien en commun. Je vis Angela détourner son regard et Ben me fixait, gêné. C’est alors que Jacob passa son bras autour de mes épaules et m’attira contre lui pour m’embrasser amoureusement, en me serrant bien pour ne pas que je me dégage. Je compris alors qu’il voulait les provoquer, agacé par leur attitude coincée. Son baiser passionné dura un bon moment, je me laissais faire, sachant qu’ici beaucoup faisait ça et que ça ne choquait personne…je savais au fond de moi que Jake avait raison mais je craignais cependant une réaction violente de la part d’Angela. Je finis par me dégager en douceur, déposant des petits baisers sur ses lèvres, il soupira et enfuit sa tête dans mon cou en me prenant une main. J’osais lever un regard vers Ben et Angela qui regardaient dans deux directions opposées, toujours aussi tendus. Je pris mon verre et avalais une gorgée de mon soda qui n’avait plus de bulle depuis le temps qu’il trainait sur cette table. Jacob se dégagea, jeta un bref regard agacé vers mes amis puis s’approcha à nouveau de mon oreille en murmurant :

  • Tu viens danser ?
  • Jake…je ne sais pas danser…
  • Je te guiderais, chuchota-t-il d’une voix câline.   

L’idée de fuir cette mauvaise ambiance et de me retrouver contre lui me séduit et je lui tendis la main. Il se leva et m’aida à m’extirper du fauteuil. Je croisais le regard d’Angela, dégoutée que je les laisse mais leur attitude était trop insupportable et j’avais envie de profiter de Jacob.

En les laissant seuls, peut-être que ça les aiderait à faire le point !Pensais-je.   

Jake m’entraîna vers la piste et me colla immédiatement contre lui lorsque nous fûmes parmi les danseurs. Il me tenait une main contre sa poitrine et son autre main était plaquée sur le bas de mon dos, dans un geste possessif. Je passais mon bras libre autour de sa nuque, heureuse de partager ce moment avec lui. Il posa son front contre le mien et se mit à danser doucement afin que je puisse me calquer sur ses mouvements. Je me rappelais sa grâce lorsque je l’avais regardé dansé avec Alice, cette image me revint comme un flash (encore un, pensais-je) et je tentais de ne pas faire tâche à côté de lui. Curieusement, je n’avais aucun mal à le suivre, sûrement parce que j’étais si collée contre lui que mes mouvements ne pouvaient que suivre les siens. Peut-être aussi parce que nos corps avaient maintenant l’habitude de se calquer l’un sur l’autre, de bouger au même rythme ? Cette pensée me fit rougir et je levais vers lui des yeux que je savais envahi par le désir. Il ferma les yeux et m’embrassa avec ardeur, me faisant oublier pendant une minute que nous n’étions pas seuls. Le rythme changea et je repris doucement mes esprits en posant ma tête contre son torse. Mon regard croisa celui d’Angela et j’y lu tellement de tristesse que je stoppais ma danse. Au même moment, je vis mon amie se lever et laisser Ben en plan sur le sofa. Jake suivit mon regard et comprit le problème.

  • Ils ne s’aiment pas Bella…laisse-là partir. Il n’y a rien à sauver dans leur couple.

Je levais la tête vers lui, surprise.

  • Elle l’aime, murmurais-je.
  • Non, je crois que c’est finit…son regard est trop froid. Elle en a assez. Ne te mêle pas de ça, tu ne les aiderais pas en essayant de les remettre ensemble.
  • Je n’aurai pas le choix que de me mêler de leur histoire Jake…je partage la chambre d’Angela, lui rappelais-je.
  • Peut-être bien mais ça ne sert à rien de la faire changer d’avis. Elle vient de prendre la meilleure décision de sa vie !
  • Jacob ! M’indignais-je, irritée qu’il catalogue assez sec le couple de mon amie et qu’il soit aussi dur.
  • Mais tu les as vus Bella ? Il faut être idiot pour croire encore qu’il y a de l’amour entre eux !
  • C’était peut-être une simple dispute …
  • Tu veux aller la rejoindre ? me proposa-t-il.
  • Je vais peut-être rentrer oui…pas parce que je veux la rejoindre mais parce qu’il se fait tard.
  • Tu as raison…sortons d’ici !

Et il m’entraina vers l’extérieur avec facilité vu que tout le monde se poussait sur son passage.

L’air frais de la nuit me fit du bien et j’en pris une pleine bouffée comme pour nettoyer mes poumons de toutes les odeurs qui envahissaient cette boite.

Main dans la main, nous regagnâmes le campus et Jake s’arrêta à hauteur de la grille en me tendant les clefs de la Chevrolet.

  • Tiens, je te l’ai ramenée…
  • Oh ! Merci…
  • Bon…on se voit dans deux jours ? ajouta-t-il en se balançant sur ses pieds, nerveux.
  • Oui…

J’hésitais puis me lançais.

  • Tu comptes faire quoi avec Paul ?

Jacob fronça les sourcils et détourna son regard. Je le sentais tendu mais plus en colère.

  • Rien, finit-il par dire. Je rentre directement chez moi.
  • Ok…

Comme il ne me regardait toujours pas, je lui tournais le visage vers moi avec un doigt.

  • Ce week-end, je suis à toi, toute entière…, lui promis-je, en espérant que rien ne viendrait encore contrecarrer nos plans.
  • Y a intérêt !

Je me levais sur la pointe des pieds pour capturer ses lèvres et il m’enlaça pour me rendre mon baiser.

 

En rentrant dans la chambre, je trouvais Angela sur son lit, avec encore sa veste et ses chaussures, le regard vide.

  • Tout va bien ? M’inquiétais-je.
  • Non ! Demain, c’est décidé, je dis à Ben que c’est finit !
  • Ok…, répondis-je seulement, me rappelant les conseils de Jake.
  • Non mais tu as vu son attitude ce soir ! Distant, absent, en train de reluquer les autres filles ! Non, je n’en peux plus…c’est terminé !
  • Ok…
  • Quand je vous vois…tous les deux ! …

Elle se mit soudain à sangloter et je me rapprochais d’elle en me mordant les lèvres, sachant parfaitement que l’image de notre couple pouvait être blessante pour quelqu’un en mal d’amour.

  • Oh Bella…j’ai si mal…
  • Je sais Angie…Je sais…, répondis-je en la serrant contre moi.
  • J’aimerai tellement être heureuse…aussi heureuse que toi…je suis jalouse tu sais…, déclara-t-elle en me regardant d’un air malheureux.

Son expression me fit rire doucement et je lui frottais le dos en répondant :

  • Un jour, toi aussi tu trouveras quelqu’un…
  • J’aimerai quelqu’un qui m’aime autant que Jacob t’aime…il te dévore des yeux, il est à tes pieds…il t’aime bien au-delà que c’est possible d’imaginer ! Je n’ai jamais vu un amour aussi fort !
  • Moi si…, murmurais-je en pensant à Sam et Emily. 
  • Non c’est impossible !
  • Si je t’assure…c’est possible. Il faut le vouloir c’est tout, ajoutais-je, consciente qu’Angela ne connaitrait jamais l’imprégnation.

Mais, j’espérai sincèrement qu’elle puisse un jour rencontrer un garçon qui l’aimerait à sa juste valeur.

  • Tu sais Bella, je n’ai jamais eu d’amie comme toi, chuchota-t-elle. Je suis vraiment heureuse de te connaître.
  • Moi aussi Angela…, répondis-je, émue.

Elle se blottit contre moi et je la pris fermement dans mes bras afin de lui communiquer toute mon affection.

Je la berçais jusqu’à ce qu’elle finisse par s’endormir puis me déshabillais et me couchais dans mon lit, l’esprit un peu embrouillé par tout ce qu’il s’était passé durant cette soirée.

La tête envahie par le visage malheureux de Paul, celui d’Angela et les larmes de Jacob, je finis quand même par sombrer dans un rêve où le loup roux que j’aimais tant venait rejoindre ce loup blanc qui attendait patiemment une promenade, un loup blanc aux yeux malicieux couleur chocolat.

 

* * *

 

Seth sortit du bois et je remarquais sa mine de plus en plus fatiguée. Il ne lâchait pas prise, dépassant à chaque fois un peu plus les frontières, il le recherchait, il les recherchait mais revenait chaque fois un peu plus désespéré, un peu plus fatigué. Pourtant, il repartait, plus motivé que jamais et on ne le revoyait plus pendant des jours. J’admirais sa détermination. Moi je ne pouvais pas bouger. Je me contentais d’être à l’écoute et de rester près d’elle. Au cas où…

  • Salut Paul, me salua-t-il d’une voix molle.

Je ne lui demandais même pas s’il avait trouvé quelque chose...sa tristesse lui ravageait le visage.

  • Sam demande à ce que tu viennes près d’Emily ce soir…le bébé est malade et il a peur de les laisser seuls.
  • Il ne peut pas demander à quelqu’un d’autre ! Tu es son parrain non ?
  • Paul, il s’agit d’Emily et du bébé…Sam n’admettra pas que tu lui refuses ce service pour…
  • Pourquoi ?! Pour Bella ?

Seth baissa la tête.

  • Tu peux dire à Sam que je ne bougerais pas. Il n’a qu’à me ramener Emily ici. Rachel s’occupera d’eux.
  • Paul…
  • S’il a un problème, qu’il vienne me parler !
  • Ok…

Je le regardais s’éloigner, les épaules basses. Je savais déjà que dans les minutes qui suivraient, j’aurai Sam devant les yeux. Tant pis…il ne pouvait pas comprendre et un profond ressentiment m’animait tellement depuis que j’étais  assez furax contre lui pour lui tenir tête ! Oui…je me posais beaucoup de questions…sur lui, sur Sam, sur moi-même…je ne savais plus trop où j’en étais…ou si en fait ! Il fallait que j’arrête de me voiler la face ! …et ça aurait dû être comme ça  depuis le début ! Mais comment en être sûr maintenant qu’il n’était plus là ?

 

* * *

28 – Visite

 

Je sentis mon bras devenir froid puis une piqûre me réveilla complètement. J’ouvris les yeux et vis son visage blanc au-dessus de moi, me souriant doucement : Carlisle ! Je me relevais aussitôt mais il avait disparu. Avais-je rêvé ? Je me passais la main dans les cheveux et sentis un petit picotement sur mon bras. Je posais ma main là où la petite douleur me tiraillait puis allumais la lampe pour mieux voir. Je vis alors une légère tâche de sang sur mon doigt et vérifiais aussitôt mon bras pour y trouver un petit point rouge, là où j’avais eu mal. Mon cœur s’accéléra… Je n’avais donc pas rêvé ! que m’avait-il fait ? Une injection ? Mais de quoi ? Je réfléchis et regardais à nouveau le point rouge…une ponction de sang ? Mais pourquoi ? Mon esprit s’embrumait…Est-ce qu’il savait que Jacob était inquiet pour moi, à propos de cette soi-disant prochaine mutation ? Jacob l’avait-il appelé ? Mais qu’est-ce que Carlisle changerait si ça arrivait ? Je doutais qu’il soit capable d’inverser le processus qui devait déjà être en route depuis mes injections de sang massives. Je réfléchis et me dis qu’en fait, il pourrait seulement confirmer si oui ou non j’étais en train de devenir un loup-garou…ainsi, je pourrais mieux gérer la situation…non, Jacob pourrait mieux gérer la situation ! Car pour ma part, je m’étais déjà fait une raison depuis longtemps.

Je tournais la tête vers le lit d’Angela, elle ne s’était pas réveillée. Je me levais pour aller me passer de l’eau sur le visage et restais longtemps à m’observer dans le miroir. Pourtant, je me sentais bien…vraiment bien…mis à part cette faim excessive et une condition physique du tonnerre, je n’avais pas l’impression d’avoir de la température ou de ressentir d’autres changements dans mon corps…peut-être ma peau ? Elle était plus belle, plus lumineuse…mes cheveux aussi, ils étaient plus brillants, plus vigoureux…en me regardant bien, c’est vrai qu’on pouvait croire que j’allais chez l’esthéticienne toutes les semaines…mais à part ça ? Mon souffle ? Oui, j’avais plus d’endurance…ça oui, ça pouvait être du au fait que j’avais reçu du sang de loup-garou…ma faim aussi…une envie terrible de protéine, peut-être pour aider mes cellules à se reconstruire ? En même temps, cet accident datait de plusieurs semaines et j’étais bien remise…je jetais un dernier regard à mon reflet puis rejoignis mon lit, sachant que je ne dormirais plus. La visite éclair de Carlisle me troublait profondément.

 

29 – Au paradis

 

Jacob m’avait prévenue. Si je revenais avec Angela, il fallait que je la ramène d’abord chez elle avant de rentrer à la Push ! Sinon, il ne me laisserait pas repartir et elle resterait deux jours dans la Chevrolet ! Je souriais encore à la façon dont il m’avait annoncé ça lorsque j’avançais dans la cour des Black.

Jake sortit de la maison et se dirigea en courant vers ma voiture. Il avait ouvert la portière avant même que je ne coupe le moteur.

  • Pas trop galère la route avec toute cette flotte ?
  • Non, ça a été…
  • File moi ton portable.

Je lui tendis mon appareil que j’avais posé sur le siège passager. Je ris en le voyant l’éteindre en disant :

  • Hop ! ça fermé et dans la portière jusque lundi…
  • Jake ! Protestais-je assez mollement.
  • Tu n’en n’auras pas besoin ce week-end...si ?
  • Non…, rigolais-je.
  • On est bien d’accord ! Maintenant, viens-là !

Il m’attira à lui et je mis mes mains autour de son cou pour qu’il me porte hors de la voiture. D’un coup de pied, il ferma la portière de la Chevrolet et se mit à courir jusqu’à la maison, comme si je n’étais même pas dans ses bras. Lorsqu’il ouvrit la porte, je découvris la pièce principale plongée dans une ambiance tamisée, juste éclairée par le feu de cheminée qui brulait.

  • Billy est à la maison ?
  • Ça non ! Viré pour tout le week-end…interdiction à la meute d’approcher de la propriété…j’ai débranché le téléphone…j’ai prévenu Charlie que s’il t’appelait ou s’il se pointait, il aurait affaire à moi …
  • Quoi ?!
  • Non je rigole…mais je lui ai bien fait comprendre que ce week-end, tu étais à moi !
  • Jake … il faudra quand même que j’aille le voir…je dois lui parler…
  • Ouais bah on verra ça dimanche matin !
  • Ok …, rigolais-je.

Il me posa à terre et, tout en m’embrassant, m’enleva mon manteau puis mon pull…je déboutonnais mon pantalon pendant qu’il s’occupait du dernier sous-vêtement que j’avais en haut. En moins de deux, je me retrouvais nue contre lui. Alors, il me reprit dans ses bras et me dirigea vers le salon. Je tremblais tellement qu’il stoppa son mouvement et s’inquiéta :

  • Tu as froid ? Pourtant j’ai fait carburer la cheminée !
  • Non…non…
  • Alors qu’est-ce que tu as ?
  • Je suis impatiente, soufflais-je en rougissant, honteuse des émotions que Jake déclenchaient en moi.

Il me fit un large sourire solaire qui me réchauffa aussitôt et reprit sa marche pour m’emmener dans les nuages.

 

Je venais de passer le week-end que j’attendais depuis au moins trois semaines ! Celui que je m’étais imaginé de passer tous les week-ends lorsque j’avais décidé de reprendre les cours. Un week-end uniquement dans ses bras, à me décoller juste pour manger, et à m’y replonger une fois terminé. Un pur bonheur ! Cette fois, les rôles étaient inversés par rapport au début de mon imprégnation. Jake ne me lâchait pas, ne dormait pratiquement pas, avait du embrasser et caresser chaque centimètre de mon corps, comme si il allait disparaître demain !

Le jour se levait et je réalisais que nous n’avions même pas vu passer le samedi ! Il fallait quand même que je me lève, au moins pour deux heures histoire de rendre visite à Charlie…

Je me dégageais doucement de Jacob pour ne pas le réveiller et tentais de me relever de cette douce et confortable couverture sur laquelle nous venions de passer presque deux jours devant le feu de la cheminée. Je me sentais un peu courbaturée mais c’était une douleur très agréable. Je filais à la douche et souris au souvenir que j’avais de nous deux, la veille, lorsque nous avions quitté notre lit de fortune pour venir ici nous passer à tour de rôle le savon sur nos corps en riant, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus d’eau chaude. Je me passais la tête sous le jet qui avait toujours autant de mal à couler lorsque je sentis ses mains chaudes se poser sur ma taille.

  • Salut ma belle …, murmura-t-il en enlaçant mon ventre de ses bras.
  • Viens vite en profiter, l’eau chaude ne va pas durer vu tout ce qu’on a pris hier…
  • Pas grave…, marmonna-t-il, l’eau froide ne me dérange pas.
  • Moi si !
  • Pas si je reste comme ça, me taquina-t-il en se collant derrière moi et en posant sa tête sur mon épaule.
  • Non, c’est sûr, avouais-je, ça serait plus supportable.

Jake me déposait de légers baisers dans le cou, sur mes épaules et je me mis à frissonner de plaisir. Je levais ma main pour l’attraper par la nuque et attirer ses lèvres vers moi. Il me retourna contre lui puis me plaqua contre la paroi de la douche qui vibra.

  • Y a pas de place ici, marmonna-t-il entre deux baisers.

Je gloussais et posais ma tête sur sa poitrine, où son cœur battait aussi fort que le mien.

  • Rappelle-moi d’en faire une trois fois comme ça ! grogna-t-il.
  • Pas de problème…
  • Bon, je te laisse, annonça-t-il en sortant de la douche.
  • Ok, rigolais-je devant la mine teigneuse qu’il affichait.

J’augmentais le débit de l’eau froide et me passais entièrement sous le jet pour calmer mon corps qui venait de prendre feu.

Lorsque je sortis, enveloppée d’une immense serviette qui m’arrivait jusqu’aux pieds, je trouvais Jake assis à la table de la cuisine, l’air soucieux, devant plusieurs feuilles de papier où je découvrais des graphiques, des calculs et des croquis qui me firent sourire de bonheur.

  • Montre-moi ça ! M’exclamais-je.

Jacob me tendit les feuilles, souriant, faisant aussitôt disparaître la marque qui lui barrait le front quelques secondes plus tôt.

  • Avec tout ça, je n’ai pas encore pris le temps de regarder, m’excusais-je.
  • Pas grave…quand j’ai un souci, je te demande ton avis de toute façon, comme avec la porte d’entrée.

Je remarquais les portes battantes dessinées entre deux cloisons qui, je devinais, sépareraient le séjour de la cuisine… ma cuisine !

  • Merci ! Tu y as pensé…
  • Je les ai mises directement en rentrant dimanche dernier, m’avoua-t-il dans un léger sourire. Ça ce sont tes grandes baies vitrées…et la cheminée.

Je constatais qu’il avait gommé puis recalculé des surfaces par rapport aux fenêtres que je voulais grandes…je rougis de plaisir et de gêne d’être aussi exigeante.

Je remarquais soudain une autre feuille sous les autres, où il n’y avait que des chiffres mais je compris par rapport aux nombreuses ratures et aux listes inscrites que ça ne concernait pas les dimensions mais les coûts. Mon cœur se mit à battre plus fort car je venais seulement de prendre conscience que tout ça n’était pas complètement gratuit, même si Jake en faisait une bonne partie seul. Il me laissa lire toute la page sans m’interrompre puis il soupira et déclara :

  • Je vais vendre l’Aston…
  • Quoi ? murmurais-je.
  • Je ne veux pas commencer à chipoter sur des détails, pas pour toi Bella !
  • Mais Jake…
  • Edward savait très bien ce qu’il faisait en me faisant ce cadeau somptueux… j’avais deux choix : faire le gamin en jouant avec ou devenir adulte et responsable !
  • Qu’est-ce que tu racontes …c’est un cadeau, tu ne peux pas le vendre !
  • Il m’a donné la plus chère de ses voitures Bella ! S’exclama-t-il. Je suis sûr que ce n’était pas pour rien ! Si je la vends, je peux en tirer au moins deux cent milles dollars…
  • Combien ?! M’écriais-je, manquant de m’étrangler.
  • Oui je me suis renseigné…elle vaut deux cents cinquante milles mais elle n’est plus neuve maintenant donc je ne pourrais pas plus de deux cents milles…

Je restais les yeux dans le vide, mesurant l’énormité de la somme.

  • Bella, m’expliqua-t-il doucement, je ne suis pas idiot, il ne m’aimait pas au point de m’offrir ce bijou…il l’a fait pour toi…tu ne me l’enlèveras pas de la tête…

Je réfléchissais à cette histoire, essayant de me rappeler le jour où Edward avait offert cette voiture à Jake mais je ne voyais que des flashs et comme ça commençait à sérieusement m’agacer, je préférais laisser tomber. Mais le mot « bijou » m’interpella.

  • Alors je vais vendre aussi son diamant ! Répondis-je.
  • Quoi ?! …ça non !
  • Pourquoi non ? Rétorquais-je.
  • Parce que c’est non ! Avec la voiture, on aura déjà assez pour tenir avant que je gagne ma vie…
  • Pourquoi non ? Répétais-je. Je ne le porte même pas !
  • Parce que …parce que…
  • Parce que ça vient de lui ? M’écriais-je. Et bien justement ! Comme tu le dis, il savait ce qu’il faisait !
  • A l’époque où il te l’a offert, il voyait ça comme un vrai cadeau, un cadeau d’amour Bella !
  • Jacob, tu commences à m’agacer avec ta sacro-sainte manie à ne pas vouloir toucher à la mémoire d’Edward !

Il baissa la tête et je décidais de laisser tomber, ne tenant pas à encore gâcher un week-end à nous disputer pour mon ex petit ami. Je posais ma main sur la sienne et repris les feuilles pour regarder à nouveau le plan de notre maison. Jake dégagea doucement sa main et d’un doigt fit glisser ma serviette. J’éclatais de rire et reposais les croquis pour me blottir contre lui.

  • Y a de la place ici, chuchotais-je.
  • C’est justement ce que j’étais en train de me dire…

 

30 – Trahison

 

Je pensais que Charlie m’attendrait de pied ferme et fus surprise de constater que la porte d’entrée était fermée de l’intérieur. Je m’apprêtais à faire demi-tour pour attendre dans la voiture lorsque j’entendis le verrou se tirer et le visage à peine réveillé de mon père apparut dans l’encadrement. Il avait les cheveux en désordre et les traits tirés…il me laissa la porte ouverte et se dirigea vers la cuisine.

  • Pardon, je te réveille…, m’excusais-je, inquiète par son air renfrogné et son allure négligée.
  • Non c’est bon, il est l’heure que je me bouge de toute façon…

Il prit le journal et se versa une tasse de café froid de la veille que je lui pris des mains pour la passer dans le micro onde. J’avais compris à sa nonchalance qu’il avait l’intention de le boire comme ça. Une fois réchauffé, je lui posais le café devant les yeux en murmurant :

  • Tout va bien papa ?
  • Oui…, soupira-t-il. Je ne pensais pas te voir ce week-end…

Je m’installais face à lui et l’observais plus attentivement. Il avait l’air perdu.

  • Sue vient aujourd’hui ? Demandais-je en constatant que rien n’était prêt. Ou tu vas peut-être chez elle ?
  • Ça non !

Son ton catégorique me surprit et je me serrais les lèvres un petit moment avant d’oser demander :

  • C’est finit entre vous ?

Il hocha la tête en fronçant les sourcils, tout en continuant de lire son journal.

  • C’est à cause de maman hein ?

Il haussa les épaules.

  • Mais enfin Charlie ! M’exclamais-je, irritée, elle ne reviendra pas ! Même malade !
  • Ça je le sais ! Claqua-t-il.

J’avais sursauté et il s’excusa du regard aussitôt.

  • Ce n’est pas ta mère le problème !
  • Explique-toi…
  • C’est Sue…Sue est retournée avec Billy ! Explosa-t-il en renversant sa tasse sur le journal.
  • Quoi ?! M’étonnais-je. Tu en es sûr ?
  • Elle n’a pas voulu partir de chez elle ce week-end parce qu’il venait ! Et la semaine dernière, elle est allée avec lui manger au restaurant à Port Angeles !
  • Mais ils sont amis…, lui rappelais-je. Ils ont quand même eu un enfant ensemble… tu ne peux pas leur retirer ça !
  • Qu’est-ce que tu y connais toi hein ?

Sa remarque me fit l’effet d’une gifle. Jamais mon père ne m’avait pris de haut comme ça. Il devait être sacrément blessé pour parler ainsi.

  • Ce que je sais, c’est que Billy ne te volerait pas Sue ! Il est ton ami ! Ripostais-je.
  • Tu parles …
  • Charlie ! M’indignais-je. Comment peux-tu en douter ?

Il regardait par la fenêtre, les yeux chargés de colère et perdus dans le vague.

  • Et puis tu as vu comme tu l’as traitée la semaine dernière ! lui lançais-je, me rappelant pourquoi j’étais venue lui parler.
  • Quoi encore ? Ronchonna-t-il, plein de mauvaise foi.
  • Tu ne l’as même pas embrassée ! m’écriais-je. Tout ça parce que maman était là ! Tu as eu de la chance qu’elle ne te mette pas dehors ce jour-là !

Il haussa à nouveau les épaules en me jetant un regard mauvais. S’en était trop ! Son attitude me mettait hors de moi et je me levais d’un bond.

  • Tu pars déjà ? Demanda-t-il soudain inquiet.
  • Oui ! Je passerai te voir la semaine prochaine…si tu es de meilleure humeur et si tu as relevé tes manches pour te battre et récupérer la femme que tu devais épouser !
  • En parlant de ça, me coupa-t-il, même pas touché par ma remarque cinglante, je te remercie de m’avoir mis devant le fait accompli avec Jacob…
  • Arrête de raconter n’importe quoi ! On ne se marie pas avant l’année prochaine…, lui rappelais-je.
  • Mais tu avais prévenu ta mère avant moi !
  • Je n’avais rien dit du tout ! Elle est seulement plus attentive que toi à mon bonheur ! Criais-je malgré moi, en lui plantant ma bague devant les yeux.

Je regrettais aussitôt mes paroles, sachant parfaitement que je ne les pensais pas. Charlie avait toujours pris très au sérieux ma relation avec Edward puis avec Jacob. C’était d’ailleurs grâce à lui si aujourd’hui, j’étais heureuse car il m’avait aidé à faire mon choix …il m’avait ouvert les yeux et ses conseils étaient toujours très précieux. Seulement voilà, j’étais en colère de le voir baisser les bras aussi facilement !

Je pris ma veste et sortis de la maison en claquant la porte.

 

Lorsque Jake me vit revenir en trombe devant la maison, il vint à ma rencontre, l’air soucieux.

  • Qu’est-ce qu’il se passe ?
  • Il se passe que ton père s’amuse à jouer les jolis cœurs avec Sue !
  • Ah bon sang…celui-là ! Bougonna Jake entre ses dents. Je vais aller lui parler !
  • Non ! Laisse tomber ! Laisse-les se débrouiller, ils sont assez grands ! On ne va pas encore gâcher notre week-end…
  • Très bien, répondit-il en me prenant dans ses bras, espérant me calmer.

Le soleil faisait une percée et je levais mon visage au ciel quand une odeur de pin mouillé vint me chatouiller les narines, me rappelant un moment particulièrement troublant que j’avais vécu dans cet hôtel en Angleterre, lorsque mon cœur était loin de Jacob.

Je plantais mon regard dans le sien, soudain très détendue et heureuse.

  • Je t’aime Jacob, je suis tellement bien avec toi…j’ai hâte qu’on soit marié.
  • Ton père n’a pas été gentil avec toi, hein ? Constata Jake, qui me connaissait bien.

Je secouais la tête tristement.

  • Il doit vraiment être à cran…j’irai le voir cette semaine, me promit-il.

Je lui souris et me collais contre lui, profitant de sa chaleur. Le vent s’était calmé et il faisait presque bon.

  • Et si on allait faire une ballade ? Proposais-je.
  • Ok…où veux-tu aller ?
  • Sur toi …, chuchotais-je.

Il me lança un regard étonné puis éclata de rire, croyant que je parlais d’autre chose.

  • Je veux faire une ballade sur mon loup, précisais-je en l’embrassant.
  • Oh !

Il rit de plus belle, amusé par mes idées de dingue.

  • ça fait longtemps…tu ne veux pas ?
  • Si, si, rigola-t-il. Je reviens…, ajouta-t-il en me lâchant et en se dirigeant vers la maison pour y laisser ses affaires.

Quelques secondes plus tard, il revenait en trottinant et je m’agrippais à son encolure pour lui grimper dessus en riant. Cette sensation que je n’avais ressenti qu’une fois me fit le même effet qu’auparavant…je me sentais comme ivre, excitée par sa puissance, consciente de la chance que j’avais de vivre quelque chose d’aussi extraordinaire. J’eu une brève pensée pour ma mère lorsqu’il démarra son pas en direction de la forêt et que je serrais ses poils autour de son cou pour ne pas tomber.

 

Nous fîmes une longue ballade dans les bois puis Jacob bifurqua vers les plages de la Push, sachant parfaitement qu’à cette période et à cette heure de la journée, elles seraient désertes. Il stoppa son trot au bord des vagues et je glissais sur le sable mouillé. Il me jeta un regard interrogateur que je compris aussitôt et je lui répondis :

  • Non c’est bon, vas- y tout seul, l’eau est trop froide pour moi…

Il s’enfonça alors dans l’océan glacé. Je décidais de me promener le long de la berge. Puis au bout de quelques minutes, je le vis revenir sur le sable et se secouer. Mais soudain, il releva la tête et fila à toute vitesse, si vite que je ne vis qu’une forme rousse fuir vers les bois. Au même moment, j’entendis le clic d’un appareil et un flash s’alluma plus haut, près du parking. Je restais pétrifiée en reconnaissant Angela. Elle me fit un grand signe et se mit à courir vers moi. Lorsqu’elle arriva à ma hauteur, haletante, je n’avais toujours pas bougé.

  • Bon sang ! Tu as vu ça ??? C’est incroyable ! C’est un loup Bella ! Pas un ours ! Et il est immense !

Elle fixait sur son écran la photo que je devinais flagrante, le regard illuminé. En la regardant, je n’avais qu’une envie, c’était de lui arracher son appareil photo et de le jeter dans la mer ou de le piétiner jusqu’à ce qu’il n’en reste rien ! Mais il fallait que je me contrôle. Premièrement, parce qu’Angela pensait que je n’avais pas vu le « loup ». Deuxièmement, parce qu’il fallait que je trouve le moyen d’effacer cette photo sans qu’elle ne se doute de mes intentions et en y réfléchissant, la manière la plus simple était encore la meilleure…

  • Fait voir …, m’entendis-je demander d’une voix blanche.
  • Regarde ça ! Il était à quoi ? Dix mètres de toi !!!

Elle fit défiler ses photos.

  • Zut, les autres sont troubles…mais c’est rien. J’ai ce qu’il me faut !

Elle me tendit l’appareil et là, je sus que j’allais briser la seule amitié que j’avais, mettre en colère Angela qui avait une confiance aveugle en moi…j’allais maintenant casser cette confiance…à jamais.

D’une main tremblante, je pris l’appareil entre mes doigts. Elle se pencha sur moi pour me remettre la première photo. Le loup roux apparut, net, immense, fixant l’objectif …je posais alors mon regard sur le petit bouton en forme de corbeille et appuyait deux fois dessus, très vite. Puis, je le fis encore quatre ou cinq fois, espérant en effacer le plus possible et j’entendis alors le cri d’Angela.

  • Mais qu’est-ce que tu fais ?!

Je levais les yeux vers celle qui affichait un visage catastrophé…en lui tendant l’appareil, il m’échappa et je l’entendis tomber dans le sable sans que l’une de nous deux ne réagisse.

  • Bella !!! Mais pourquoi ?!

Je me mordis les lèvres, puis secouais doucement la tête, cherchant encore une dernière chance de sauver notre amitié…un bon mensonge, quelque chose de plausible …

  • Je…je ne peux pas te laisser publier cette photo.
  • Mais pourquoi ?!

Ça y est, je l’entendais, la colère qui prenait le dessus sur l’incompréhension… Elle ramassa son appareil et je tendis la main vers elle pour l’aider à le nettoyer mais elle fit un mouvement brusque pour que je ne la touche pas.

  • Avec cette photo, la police aurait eu une preuve de ce qui a tué à Forks l’année dernière !!!
  • Ce loup ne tue pas …
  • Comment tu le sais ?
  • Il ne te ferait pas de mal…
  • Mais comment tu le sais Bella ?! Hurla-t-elle, hors d’elle devant mon attitude.
  • Il est inoffensif Angela …, répétais-je.
  • Mais il n’est pas le seul monstre dans cette forêt ! L’année dernière, j’en ai vu un noir ! le même ! Et plusieurs témoins ont affirmé qu’il était responsable des morts que nous avons eus !

J’avais envie de lui répondre que ce n’était pas un monstre mais je ne savais plus quoi lui dire. Jacob m’avait interdit de lui dire la vérité, j’étais contrainte aux mêmes lois que lui maintenant et je ne pouvais pas trahir ma famille. Je décidais donc de sacrifier mon amitié avec Angela. Car, je le savais, cet incident allait faire boule de neige. Angela ne comprendrait pas mon geste, je ne pourrais rien lui dire, elle ne comprendrait pas mon silence, mon manque de confiance en elle et on finirait par ne plus se parler.

  • C’est pas grave, lâcha-t-elle. Je l’ai eu cette fois, je l’aurais une autre fois !

Et elle fit volte-face pour retourner vers sa voiture. Je tendis la main dans le vide, ne trouvant rien à lui dire pour la retenir.

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