Une autre vie
Aro fit quelques pas et regarda ses trois visiteurs. Edward semblait encore plus pâle que d'habitude, les bras immobilisé par Félix. Alice se triturait les lèvres, fermement tenue par Démétri. Seule Bella était libre, mais la terreur la clouait sur place aussi efficacement qu'une corde l'aurait fait.
- Ha, mes amis, dit Aro en joignant les mains. Nous avons clairement un problème.
Il s'approcha d'Edward et posa sa main sur sa joue. Il tressaillit violemment.
- Je vois. Tu refuses d'en faire une vampire par peur de lui voler son âme. C'est très intéressant. Tout comme l'amour fou que tu lui portes.
Bella ne comprenait pas. L'amour fou qu'il lui portait ? Mais il l'avait abandonnée !
- Hélas, elle en sait trop sur notre monde. Tu refuses de faire d'elle une immortelle. Très bien. Il ne reste plus qu'à la tuer.
- Jamais !
Alice se débattit, en vain.
- Qu'elle soit humaine n'est pas un danger ! dit-elle.
- Erreur. Elle représente une faiblesse. Il faut aussi prendre en compte le fait qu'elle possède un don très puissant. Ce serait du gâchis que de le laisser. Alors, Edward ?
Il y eu un instant de silence. Bella n'osait plus bouger. Les deux Cullen se regardèrent.
- Laissez-lui un peu de temps, plaida Edward. Quelques années.
- Hors de question. Elle sera mordue aujourd'hui. Et si vous ne voulez pas d'elle, elle restera ici.
Bella hoqueta. Les frères d'Aro eurent un petit sourire de convoitise. Alice supplia son frère du regard. Il hocha la tête.
- Nous sommes d'accord, sourit Aro.
Bella fit un bond en arrière lorsqu'il s'approcha d'elle.
- Attendez une minute ! Je ne veux pas...
Paniquée, elle regarda autour d'elle. Autrefois, rejoindre les Cullen était son voeux le plus cher. Mais la donne avait changé. Grâce à Jacob, elle avait redécouvert la vie en-dehors des vampires. Elle n'était pas encore prête à y rennoncer. Et que deviendrait Charlie ? Sa mère ? Tous ses amis ? La peur la plus abjecte lui nouait l'estomac.
- Je préfère que ce soit Carlisle qui s'en occupe, dit précipittement Alice. Il a l'habitude de faire ça.
Aro réfléchit un court instant.
- Soit, finit-il par concéder. Mais je vous enverrai de la visite sous peu pour vérifier que vous avez tenu votre parole.
Il fit signe à ses gardes de relâcher les Cullen. Edward se précipita aussitôt sur Bella et la serra contre lui à l'en étouffer.
- Au revoir. Et à bientôt.
Ils s'éloignèrent tous les trois. Bella, le visage innondée de larmes, trébuchait sans cesse, se raccrochant comme une noyée à Edward. Il la souleva souplement et la porta jusqu'à la sortie. Alice leur trouva une voiture et ils quittèrent enfin Voleterra.
- Je vais appeler la famille.
La jeune fille se calmait peu à peu. La peur faisait battre son coeur à une vitesse folle. Mais elle se sentait bien. Edward était avec elle, tout contre elle, et il l'aimait. Rien d'autre n'avait d'importance.
Le reste du voyage fut confus. Ils prirent un avion pour rentrer. Bella, à moitié dans les vappes, était dans les bras de son vampire adoré, qui l'embrassait régulièrement et lui caressait les cheveux. Il la portait à moitié en sortant de l'avion. Près des portes de l'aéoroport, le reste de la famille les attendait. Alice sauta dans les bras de Jasper et l'embrassa à pleine bouche devant tout le monde. Esmé serra Bella dans ses bras.
- Merci d'avoir sauvé mon fils, murmura-t-elle.
L'interessé reprit sa petite amie contre lui. Elle peinait à tenir debout. Rosalie s'excusa de son comportement.
- Partons.
Ce ne fut que qelques minutes plus tard que Bella reprit conscience.
- Attendez, murmura-t-elle faiblement en voyant qu'ils s'engagaient sur l'autoroute. Il faut que j'aille retrouver mon père.
Il y eu un silence gêné. Au volant, Emmet se crispa légèrement. Carlisle prit la main de la jeune fille avec douceur.
- Je suis désolé, Bella, mais tu ne peux pas retourner chez toi.
- Pourquoi ? couina-t-elle.
- Nous ne pouvons plus nous permettre de te laisser mener ta vie humaine. Tu dois devenir l'une des nôtres.
- Pas déjà !
- Les Volturi ne nous lâcheront pas comme ça, tu dois le comprendre.
Bella se dégagea séchement.
- Et mon père ? Il va me croire morte !
- Je suis désolé, répéta-t-il.
Edward enlaça sa petite amie et elle enfouit son nez dans sa chemise. Alice essaya de la réconforter mais son amie la repoussa. Finalement, les Cullen la laissèrent pleurer en silence, jusqu'à ce que le sommeil l'emporte à nouveau.
Jacob faisait les cents pas dans le salon d'Emily, faisant tourner la tête à ses amis. Sam lui grogna de se calmer et de s'asseoir mais le garçon lui renvoya un regard si dégoûté qu'il se tut. Il recommença à user le tapis, les mains dans le dos. Elle était partie depuis plusieurs jours avec l'autre suçeuse de sang chez ces malades Italiens. Que s'était-il passé ? Est-ce qu'elle était morte ? Ou pire, transformée en vampire à son tour ? Avait-elle retrouvé son buveur de sang ? Allait-elle revenir un jour ? Et si oui, sous quelle forme ?
- Eh ! lança Quil. C'est la voiture de Charlie !
Tout le monde se figea.
- Surtout, restez naturels, ordonna Sam en se levant. Nous ne sommes pas censés être au courant de quoi que se soit.
Charlie débarqua comme un fou, les cheveux en bataille, les yeux brûlants de fièvre.
- Vous l'avez vue ?! cria-t-il. Vous avez des nouvelles ?!
- Charlie...
- Ma fille ! Est-ce que vous avez vu ma fille ??!
Il faisait tant de peine à voir que Jacob faillit lui dire la vérité. Il se retint de justesse et se mordit les lèvres jusqu'au sang.
- Appelez-moi si vous avez du nouveau, d'accord ? Même en pleine nuit, peu importe.
Il se sauva et démarra en trombe, sans doute pour aller interroger les autres amis de Bella. Seth, le plus jeune, et plus récent avec sa soeur, membre de la meute, suggéra d'une petite voix :
- On ne pourrait pas tout lui dire ?
- Non. Il serait capable d'aller chez ces Italiens. Je crois qu'il vaudrait mieux... oublier tout ça.
Il récolta un flot de regards incrédules et furieux. Levant les mains, il prit une voix apaisante.
- Notre priorité, c'est la Push. Nous ne pouvons pas défendre toute la planète. Et nous ne reverrons sans doute jamais les Cullen.
- Et Bella ? cracha Jacob.
- Si elle n'est pas morte, elle est devenue l'une des leurs. On ne peut plus rien faire pour elle.
- Dans les deux cas, le traité a été rompu !
- Exact. Mais nous ignorons où ils sont et ce qu'il s'est vraiment passé. Laissons tomber.
Toutes les personnes présentes, certaines à contrecoeur, finirent par hocher lentement la tête. Seul Jacob resta debout et furieux. Quoi qu'il arrive, il n'abandonnerait pas.