La fille invisible.
« Euh… Qu'est ce que c'est ? »
Je me suis tournée vers Catherine, un peu dégoutée par le bruit qu'elle avait fait. On regardait ce qui semblait avoir été un thon. Celui-ci était en bouilli dans l'une des poêles industrielles de la cafétéria du Lycée de Quileute Tribal.
« Euh, honnêtement je ne veux pas le savoir »
J'haussais les épaules avant de m'emparer de l'une des assiettes fumantes pour la poser sur mon plateau vert pale.
« Oh Kim » à soupirée Catherine en attrapant mon bras pour me diriger jusqu'à l'accueil du « Mama Cooking » où s'étalait devant nous différentes salades. « Tu souhaites vraiment un empoisenement alimentaire ? »
Comme je ne répondais pas, elle à soupirée mais, cette fois de façon plus spectaculaire.
« Kim ! Ce n'est pas une prison pour femmes. Nous avons le choix. Alors soit tu prends une salade, soit… une superbe crise de foie. Alors, tu préfères quoi ? ».
Derrière nous, les autres élèves commençaient à s'impacienter. Ils dévisageaient ma meilleure amie et, par la même occasion moi-même. Je sentis mes joues rougirent d'embarras. Et comme leurs ricanements et leurs roulements d'yeux, que je savais dirigés contre moi commençaient à me taper sur les nerfs, je décidais de m'effacer. Je continuais silencieusement mon chemin et me saisissant de différents aliments sans vraiment les voire.
Catherine me suivait de près et fini par me demander :
« Comment arrives-tu à faire ça ? »
« Faire quoi ? »
« Simplement, disparaître comme ça ! » me répond Catherine dont la voix avait augmentée de dix bons décibels.
Je grimaçais face à son intensité.
« C'est comme tout à l'heure, une seconde plus tôt tu es à côté de moi, je me retourne et tu as disparue ».
Je n'aimais pas particulièrement attirer l'attention, même ci elle venait de ma meilleure amie.
Nous avons payés nos déjeunés en silence ce qui était rare, Catherine restant silencieuse rarement durant plusieurs minutes d'affilées. Elle parle même dans son sommeil, ce dont je m'étais aperçu lors de notre première pyjama party, lorsqu'on avait onze ans.
« Alors, on fait quoi ce weekend end ? »
Et elle repartit de nouveau dans un monologue.
On pourrait peut être descendre sur la plage s'il ne fait trop moche. Ou peut être qu'on pourrait aller jeter un coup d'œil à cette nouvelle librairie qui vient d'ouvrir à Port Angeles. Il y a des livres que je voudrais m'acheter. Ou alors… »
Catherine alimentait si bien la conversation à elle seule que je ne pus me contenter que de placer quelques « Uh, uh » ici et là. Nous avons traversées la cantine jusqu'à notre table habituelle qui se trouvait au fond de la salle.
A mi-chemin, mon rythme cardiaque accéléra. Comme d'habitude.
Ma respiration devint saccadée avant de s'arrêtée complètement. Comme d'habitude.
Catherine n'a pas remarquée mes joues rosies, ni mes avant bras saisis d'une puissante chaire de poule. En fait, personne n'a remarqué quoi que ce soit d'anormal.
Il n'a rien remarqué. Comme d'habitude.
Je jetais un coup d'œil discret à leur table.
N'importe qui aurait été effrayé à leur vu.
Ils étaient cinq. Il avait de longs cheveux noirs qui encadraient son visage et arrivaient jusqu'à ses puissantes épaules. La plupart des autres élèves évitaient de le croiser lui et ses amis. Mais, ce n'étaient pas seulement leur carrure. Leurs yeux ne laissaient personne de marbre. Si sombres, si mystérieux…
Des yeux dont je ne pouvais plus détacher mon regard.
Jared.
Rien qu'en pensant à son nom, je sentis un frisson me parcourir dans tout le corps. Je combattu le sourire béat qui menaçait d'éclater sur mes lèvres.
Contrôle. Contrôle Kim. Contrôle. Je me répétais ces paroles comme une prière. Je m'y accrochais comme à une bouée de sauvetage que j'aurais agrippée au beau milieu de l'océan Pacifique. J'étais en train de me noyer. Je le savais. Je me noyais dans mon océan personnel.
Je me noyais dans ses yeux.
Je ne suis pas une personne émotionnelle. Normalement je ne suis pas sujette aux explosions ou aux crises de colère. Bien sur, le normalement n'inclue pas les deux minutes écoulées entre 12h13 et 12h15. C'est à cet instant que chaque jour, mon cœur s'arrête.
Les autres assis autour de lui avaient les même longs cheveux noirs et la même carrure. A l'extérieur, ils se ressemblaient tous, mais à l'intérieur, ils ne pouvaient pas être plus différents.
Leurs noms : Jacob, Paul, Embry, Quil…
Ces noms là ne reçurent aucune réaction de mon cœur douloureusement maltraité.
Et aussi rapidement que ça avait commencé, tout s'arrêta. Nous étions arrivées à notre table sans aucun autre incident cardiaque pour ma part.
« Hé Kim ? » Catherine me sortis de mes pensées et je me tournais vers elle. « Ça va ? T'as l'air bizarre. Tu te sens bien ? T'as de la fièvre ? »
Sans attendre la réponse elle posa sa main sur mon front. Elle pinça des lèvres et retira sa main d'un air satisfait.
« Non, tu es bien. C'est probablement dut à la vue de cette nourriture qu'ils essayaient de faire passée pour comestible. C'est normal. Surtout si tu as l'estomac fragile ».
Elle sembla satisfaite de son diagnostic. J'hochais la tête en signe d'accord et lui offrais un léger sourire que j'espérais convainquant.
En regardant le contenu de mon plateau, je remarquais que la nourriture que j'avais achetée était légèrement moisie et que la viande semblait avoir connue de meilleurs jours. De toute manière, je me fichai pas mal de ce que j'avais acheté. Qu'elle soit comestible ou non je n'y aurais pas touchée.
Les papillons qui virevoltaient dans mon estomac m'avaient coupés l'appétit.