Nouvelle ère

Mai 2006, Square Grimmaud, Londres

Le regard d'Harry se perdit dans le vague, indifférent au paysage Londonien qui s'offrait devant lui. Il se perdit dans les souvenirs. Dix ans avaient passé depuis que sa vie avait basculé. Depuis que la guerre amorcée par Voldemort avait pris fin avec la mort de celui-ci.

1997. Harry n'oublierait jamais cette année. Pas parce qu'il avait réussi à vaincre Voldemort mais parce qu'il avait perdu énormément cette nuit là. Son humanité entre autre… Ce qui l'avait depuis conduis à perdre tous ses amis et sa famille de substitution. Après qu'il ait vaincu Voldemort, dans les minutes qui avait suivies, un vampire l'avait attaqué. Harry ne pensait pas le vampire ait réalisé à qui il s'était attaqué sur le moment. Le vampire l'avait mordu, certes, mais il avait dû finir par réaliser l'identité de sa victime… et paniqué face à elle. Le vampire l'avait abandonné et avait filé loin de Harry, certainement terrifié par ce qui pourrait lui arriver pour avoir mordu Harry Potter. Condamnant, ainsi, Harry à devenir un vampire.

Harry qui pensait vivre heureux et profiter d'un peu de paix et de liberté s'était vite vu détrompé. Il n'avait pas pu faire le deuil de ceux qu'il avait perdu dans la bataille avant de devoir faire face à l'abandon de ses meilleurs amis et de sa famille de substitution. Harry avait été surpris par leur réaction. Ils avaient toujours eu l'air d'accepter Remus (et un vampire n'était pas si différent d'un loup-garou, n'est-ce-pas ?). Mais, apparemment, Harry s'était trompé. Ils ne devaient avoir fait que tolérer Remus parce qu'il était dans l'ordre.

Ils l'avaient rejeté si vite en apprenant qu'il était devenu un vampire… Les presque sept ans qu'il avait passé à les côtoyer n'avaient eu aucune importance.

Alors, en une nuit, il avait tout perdu. Tout ce qui comptait vraiment pour lui en tout cas. Il avait gardé son argent. Les gobelins étaient des créatures, eux-mêmes, et n'avaient pas les préjugés des sorciers. Ils n'avaient jamais laissé les sorciers interférés dans les affaires de la banque. Pour eux, tout ce qui comptait, c'était l'argent. Et, Harry était le dernier héritier direct d'une vieille famille de sang pur… Ce qui signifiait beaucoup d'argents, comme l'avait découvert Harry après la guerre. Il avait réalisé pourquoi les gobelins n'avaient pas cherché à faire justice après le vol de Gringotts. La voute qu'il avait connu toute sa scolarité n'était qu'une infime partie visible de l'iceberg qui était sa fortune. Ce n'était que la rente que ses parents avaient mis en place pour lui pour sa naissance. Oui, Harry était immensément riche. Mais cette richesse était quasiment tout ce qu'il avait avec son titre de sauveur du monde magique.

Un titre qui n'avait plus représenté grand-chose pour les sorciers à peine un an après la disparition de Voldemort.

Contrairement aux espérances de certains, les choses ne s'étaient pas améliorées après la disparition de Voldemort. La peur et les préjugés avaient été plus forts que jamais. Les gens avaient peur de voir l'émergence d'un nouveau mage noir et prendre la place de Tom Jedusor. Ils avaient été terrifiés de se voir gouverner par les créatures des ténèbres. Alors, ils avaient pris les devants.

Les lois étaient tombées par dizaines. Des lois injustes et cruelles. Les créatures magiques, en particulier celles jugées sombres, avaient vu leur liberté plus entravé qu'elle ne l'était déjà… Peu à peu, ils n'avaient plus aucun droit de travailler dans le monde magique. Ils avaient eu des heures autorisées pour se déplacer.

Puis, même ceux qui n'étaient pas des créatures à part entière avaient été touchés par ces lois. Bill et Fleur Weasley, déjà en froid, avec le reste de la famille Weasley avaient, finalement, quitté leur maison pour la France.

Harry avait regretté leur départ. Bill et Fleur avaient fait partis des rares personnes à rester en contact avec lui. Même si cela avait été secrètement pour la protection de tous.

Une des rares autres personnes à lui parler avait été Androméda Tonk. Pour le plus grand soulagement d'Harry. Le jeune vampire n'aurait pas aimé être séparé de son filleul. Filleul qu'il aimait comme un fils. Ils se voyaient régulièrement. Et, Harry seraient toujours reconnaissant à Androméda de lui avoir permis de faire parti de la vie de Teddy.

Même si cela en était fini de ce temps là. Harry ne pouvait rester plus longtemps en Angleterre, dans le monde magique. Son titre de Sauveur du monde magique l'avait protégé jusqu'à maintenant… Mais, maintenant, c'était terminé. Les dernières lois à être passées étaient telles qu'Harry ne passerait pas à travers cette fois. D'autant plus qu'on le voyait, de plus en plus, comme le futur seigneur des ténèbres du fait de sa puissance et de sa condition de vampire. Il serait forcé de « s'enregistrer » après du ministère s'il restait plus longtemps ici. C'est-à-dire se faire tatouer comme un vulgaire animal. Harry frémissait à l'idée du prochain stade de répression. Il ne préférait pas rester dans le monde magique pour le découvrir. Il n'était pas certain qu'il ne s'en sorte qu'avec une marque d'identification s'il se rendait au ministère. Il craignait plutôt d'être envoyé directement à Azkaban.

Harry lâcha un soupir et se détourna de la fenêtre au moment même où sa cheminée s'activait d'un vert intense. Dans les secondes qui suivirent, Androméda Tonks se tenait dans le salon avec son petit fils endormi dans les bras.

« Androméda ! Qu'est-ce que tu fais là ? »

Ils s'étaient parlé la veille. Harry avait parlé de ses projets et de son obligation de couper les liens avec eux… Pour sa protection. Elle en avait été dévastée mais elle n'avait pas protesté. Elle avait compris les raisons d'Harry. Elle n'aurait pas dû se trouver ici aujourd'hui. Elle savait qu'il devait partir aujourd'hui.

« Je suis venu te confier Teddy… définitivement. Il faut que tu l'emmènes. »

« Pourquoi ? Qu'est-ce qu'il se passe ? »

Teddy était tout ce qui restait à Androméda. Harry et lui étaient le centre de son univers depuis la fin de la guerre. Les dernières personnes qui la reliaient à sa fille et à son mari disparus. Se séparer de son petit fils était la dernière chose qu'elle ferait… Surtout alors qu'Harry (qui était un lointain cousin) devait partir… A moins d'y être contraint, bien entendu.

« Kingsley m'a contacté. Il a encore été contraint de signer une loi… A présent, même les personnes qui ont un peu de sang de créatures doivent s'enregistrer. Teddy est concerné, Harry. Je ne peux plus le protéger. »

Harry soupira. Kingsley était devenu ministre après la guerre. Il était un excellent ministre en dépit des circonstances. Sans lui, les choses seraient bien pires. Malgré la pression publique et celle du Magenmagot, il réussissait à bloquer des lois vraiment infamantes. C'était la raison qui le poussait à rester à sa place. C'était de cette place qu'il pouvait aider au mieux. Mais, l'ancien auror restait soumis à la bureaucratie et au Magenmagot. Il ne pouvait le défier. Pas impunément.

Harry regarda son filleul avec désolation. S'il avait combattu Voldemort et ses sbires avec autant d'acharnement, c'était pour assurer aux enfants comme Teddy une meilleure vie.

Inutile de dire que ce n'était pas une réussite.

« Harry ? »

Le vampire se tourna vers Androméda qui s'était assise devant la table avec une pile de papier. Harry s'approcha en détaillant les documents. Ce qu'il vit le stupéfia.

« L'adoption ? »

Androméda hocha la tête et lui expliqua, sans attendre, que Kingsley avait tout organisé à sa demande, il y a plusieurs mois déjà. Les choses s'étaient faites rapidement en raison de son identité (être le Sauveur se révélait utile parfois.). Le fait qu'il soit déjà le parrain de Teddy avait aussi permis que les choses se fassent plus rapidement.

Androméda poussa les documents vers Harry.

« Ils sont charmés pour qu'ils soient valables dès la signature. Une fois que tu les auras signés, Théodore sera considéré comme ton fils dans le monde moldu et dans le monde magique.

Harry tira les documents plus proches de lui. Il ne demandait pas mieux. Que Teddy devienne légalement son fils serait comme un rêve devenu réalité. Mais il hésitait. Il n'était pas certain de faire un bon père. Pas avec l'enfance qu'il avait eu… Et, il ne voulait pas prendre la place de Remus. Il ne voulait pas le trahir en prenant son fils.

Androméda soupira comme si elle comprenait où le menaient ses pensées. Ce qui devait être le cas. Elle avait bien appris à le connaitre ces dernières années, après tout.

« Tu fais déjà un excellent parrain, Harry. Tu feras un tout excellent père. »

En faisant cette déclaration, Androméda s'était emparée des mains d'Harry et les avait serrées, réconfortante.

« Et Remus serait tout à fait d'accord avec cela. Il en serait même ravi et rassuré. De même que ma fille. Tu ne les trahis pas en adoptant Théodore. Bien au contraire ! »

Harry prit une inspiration inutile et orienta son regard vers petit forme de son filleul. Il fut, aussitôt, confronté à un regard. Parfois, il avait l'impression d'être face à Remus. Il avait à peine croisé le regard de Teddy, cependant, que celui-ci changea. Du bleu, ses pupilles passèrent au vert émeraude.

Harry nota un mélange d'espoir, d'attente, de joie et d'un peu de tristesse.

Harry comprenait Teddy. Il fut un temps où il avait eu l'espoir de vivre avec son propre parrain. Un temps où il avait espéré que Sirius devienne un père. Il était attristé de ne jamais connaitre son père mais il n'avait, alors, pas pu s'empêcher de se réjouir à l'idée que Sirius devienne quelque chose comme un père pour lui.

C'est donc cet espoir familier qui poussa Harry à s'emparer de la plume que lui tendait Androméda et de signer. Aussitôt que la plume quitta le parchemin, la pile de papiers disparue en un « POP » qui marqua le commencement de sa vie en tant que père.

A la disparition des documents, Teddy bondit aussitôt sur Harry pour l'enlacer avec un « papa ! » ému. Harry referma les bras autour de son nouveau fils avec prudence et leva les yeux vers la grand-mère de celui-ci. Androméda souriait, les larmes aux yeux, mais heureuse pour les personnes qu'elle aimait le plus au monde.

Au même instant, Forks, USA

Edward se tenait aussi immobile qu'une statue devant la fenêtre de sa chambre, sa fille de quelques jours dans les bras. Il n'arrivait pas à réaliser, ou plutôt à accepter, les évènements de la dernière heure. Tout son univers avait brusquement basculé. Bella était partie. Définitivement.

Lorsqu'elle s'était réveillée, Edward avait pensé que tout se passerait bien. Il avait, enfin, eu le sentiment que tout était à sa place. Tout s'était bien passé. La chasse avait été magique !

Il n'aurait pas réalisé que quelque chose n'allait pas jusqu'à ce qu'il soit trop tard. Il n'avait pas réalisé que Bella n'avait posé aucune question sur sa fille. Il n'avait pas réalisé qu'elle ne semblait pas préoccupée par le sort de Renesmée. Ce n'était qu'en revenant à la maison que la vérité (dans toute sa cruauté) avait éclaté. Jacob était venu à leur rencontre dans l'attention de mesurer le danger que représentait la mère pour son enfant.

Le choc avait, alors, été total pour Edward et sa famille pour Jacob et sa meute… Bella avait déclaré se moquer de la fillette. Elle avait, à partir de là, dévoilé toute la vérité sur elle-même et son plan pour devenir un vampire. Pour devenir quasi immortelle. Elle avait brutalement et sans compassion dit la vérité.

Edward ne parvenait pas à croire que sa douce et innocente Bella se révélait être, en vérité, un être manipulateur et cruel. Depuis qu'elle avait découvert la véritable nature des Cullens, elle avait tout à fait pour devenir comme eux. Surtout après avoir découvert que le pouvoir d'Edward était inopérant sur elle. Elle avait patiemment mis son plan à bien. Se mettant sciemment en danger pour devenir un vampire. Provoquant James, allant à sa rencontre… Elle s'était sciemment coupée à son anniversaire (cela avait profondément blessé l'ensemble de la famille, en particulier Jasper et Alice)… Puis, elle avait tenté d'attirer Victoria, sachant que la meute éloignerait la rouquine avant qu'elle ne la tue. Elle avait, ensuite, tenté de profiter des Volturis, puis de l'armée de nouveaux nés… jusqu'à sa grossesse. Sa dernière chance d'être tournée.

L'enfant ne lui importait pas. Elle avait joué le jeu de la mère aimante. Maintenant, elle avait eu ce qu'elle voulait. Elle avait tout dévoilé et était partie sans un regard en arrière.

Edward était rapidement partie s'isoler avec sa fille. Toutes les pensées des autres étaient trop accablantes… Surtout qu'il avait ses propres pensées et ses propres émotions à gérer.

Bella l'avait fait plus souffrir que toute autre chose avant elle. Elle avait mis sa famille en danger et avait fait souffrir tous ses membres. A ses degrés divers, pour différente raison mais elle les avait tous fait souffrir.

Pourtant, Edward ne regretterait rien. Parce que quelque chose de précieux était né des actes affreux de Bella.

Ce télépathe baissa les yeux sur sa fille. Edward ne regretterait jamais les évènements qui avaient conduis Renesmée à naitre. Jamais !

Edward effleura, en douceur, la joue de son enfant avec un sourire.

« On va s'en sortir Nessie. Tu vas voir. »

°° Edward ? °°

La voix mentale hésitante de Jacob le figea un instant puis il alla ouvrir la porte de la maisonnette.

Sans surprise, Jacob semblait lamentable. Sans doute Edward regardait-il aussi lamentable. Edward l'invita en silence à rentrer. Il ne ressentait plus aucune animosité envers Jacob depuis que le loup s'était imprégné de sa fille. Une légère irritation mais rien d'inquiétant. Edward respectait l'imprégnation et il était plutôt rassuré que sa fille trouve en Jacob un farouche défenseur et un homme respectable et respectueux.

Jacob s'installa gauchement sur le canapé et ne quitta pas Renesmée des yeux. Les pensées du loup, pour le plus grand soulagement et la plus grande surprise d'Edward était calme. Mais, à en juger ses tremblements, c'était avec effort qu'il restait calme.

« Comment ça se passe là bas ? »

« Aussi mal qu'on peut s'attendre. Carlisle et Esmée ont émis l'avis de se déplacer… Pour s'éloigner des souvenirs. »

Edward soupira et baissa les yeux sur sa fille endormie. Sa fille grandissait si vite que cela en était inquiétant.

« L'idée de quitter Forks est tentante mais je ne veux pas vous éloigner l'un de l'autre… Et, je ne peux pas te demander de quitter ta famille… La meute non plus d'ailleurs. »

« Je suis prêt à vous suivre. Papa comprendra. Ma meute, c'est Seth et Léa… Ils m'ont dis qu'ils me rejoindront où que je sois lorsque Seth aura fini ses études. »

Edward hocha la tête, soulagé de pouvoir quitter Forks et ses souvenirs.

« Est-ce que Nessie ira bien ? Vous ne savez rien sur les mi-vampires ? »

« Non mais on va trouver des réponses. On va trouver une solution. Je ne suis pas prêt à la laisser partir. Je ne laisserais rien lui faire du mal. »

Edward croisa le regard tout aussi déterminé de Jacob. Ils avaient une entente.