A Full Moon
Chapitre 1 : Appel à l'aide
Le spectacle sous mes yeux ce matin-là était désastreux. Mes pires craintes se confirmaient, j'avais tant espéré ne jamais voir une telle vision d'horreur en me réveillant.
J'étais au beau milieu d'une forêt ou plutôt de ce qui fût une forêt. Les arbres autour de moi étaient couchés, déracinés, comme frappés par une violente tornade. Je connaissais le nom de cette tempête, Ellyanna Eiwens... Moi.
Je n'avais jamais atteint un tel stade de violence pendant une crise. Je pensais qu'en dormant, tout s'arrangerait, mais au contraire, c'était de pire en pire. J'avais l'impression de devenir un monstre incontrôlable …
Ma première crise remontait à deux semaines et j'avais immédiatement fait appel à mon père, un médecin réputé en France pour savoir ce qu'il m'arrivait. Et malgré une batterie de tests, il n'était pas parvenu à poser un diagnostic. Il m'avait alors conseillé d'aller voir un de ses vieux amis qui vivait aux États-Unis, le docteur Carlisle Cullen. Il était ma seule chance de découvrir ce qui n'allait pas chez moi.
J'avais donc pris la direction de Forks, une petite ville dans l’État de Washington. J'avais passé la journée à traverser le pays avant de m'évanouir à seulement quelques kilomètres de mon but…
Je m'asseyais pour visualiser l'ampleur du champ de désolation et ce que je vis ne me rassurait pas du tout. J'attrapais quelques vêtements dans le sac que j'avais pris avec moi. Bien sûr, le tissu n'était pas épargné, rien ne résistait à la puissance d'un vampire en transe …
Le vent m'apportait des nouvelles rassurantes, je m'étais rapprochée de ma destination finale. J'avais peur que l'odeur du sang dû à la proximité de la ville me rende folle mais il ne me fît absolument aucun effet, ce qui était surprenant vu que je n'avais rien mangé depuis l'apparition des premiers symptômes.
Je m'étais toujours imaginé le pire, que je me transformais en monstre sanguinaire la nuit mais aucun meurtre n'avait été répertorié et les fins traits de mes pupilles n'avaient pas changé de couleur, ils étaient toujours dorés.
Reconnaître un vampire était une chose assez simple, même pour un humain. Premièrement, sa peau pâle scintille au soleil tel un diamant. Deuxièmement, regardez ses yeux, s'ils sont rouges, vos heures sont comptés, vous n'aurez même probablement pas le temps de voir leur couleur. Vous avez plus de chance s'ils sont dorés, c'est le signe qu'il ne se nourrisse que de sang animal. Enfin, lorsque nous sommes affamés, ils sont aussi noirs qu'une nuit sans lune. Dans ce cas-là, vous n'avez qu'à prier pour être dans le second cas.
Personnellement, mon régime animalier me donnait des fins traits dorés mais mes yeux étaient principalement marrons, une caractéristique que je tenais de ma mère, une humaine.
Je devais me remettre en chemin pour trouver le docteur Carlisle Cullen. Je craignais que ma prochaine crise ne soit mortelle et elle serait sûrement beaucoup plus proche que je ne le pensais vu ma fatigue. J'étais à peine parvenue à me relever...
J'avançais lentement dans la forêt, rassurée de voir que certains arbres avaient survécu à mon assaut, lorsqu'une odeur attira mon attention, un vampire était dans les parages. Je pouvais le voir filer à toute vitesse dans ma direction. Il était grand et très musclé, son visage ne semblait pas menaçant mais je n'étais pas d'humeur à discuter. J'accélérais le pas pour garder mes distances mais il était rapide et j'étais fatiguée.
« Attends ! Je ne te veux pas de mal, je veux juste parler ! » me cria-t-il alors qu'il me rattrapait.
Je ne gagnerais pas, contrairement à moi, il était en pleine forme. Je m'arrêtais pour lui faire face et découvris ses cheveux bouclés bruns et ses yeux dorés, ce n'était pas un ennemi au moins.
« Tu n'aurais pas vu un loup… immense par hasard ? », il me montra une hauteur d'au moins un mètre vingt mais cela ne me surpris pas. Dans son soucis d'équilibre, la nature avait donné la possibilité à certains humains de se transformer en loups. Ils étaient les ennemis mortels des vampires. Heureusement, les seuls que je connaissais étaient des alliés, en quelque sorte…
« Non. » répondis-je, honnêtement.
« Dommage, il a causé de sacrés dégâts la nuit dernière ! »
Un loup était dans les parages ? Je n'avais pas la force de gérer cette menace en plus de ma maladie ! Cependant j'étais soulagée de ne pas être la seule à avoir provoqué ces dégâts. Nous nous étions peut-être battus. Avec un peu de chance j'en étais venue à bout…
« Attends … Ton cœur bat ? » dit-il, surpris.
J'acquiesçai. La conversation était lancée, j'en connaissais déjà la suite. « Qu'es-tu au juste ? » allait-il enchaîner, et je répondrais que je suis une hybride, avant d'ajouter devant son air ébahi que ma mère était une humaine, que mon père était assez fou pour l'aimer comme son égal et qu'elle était assez courageuse pour me porter tout en sachant qu'elle y perdrait la vie.
Ce n'était pas une pratique courante pour un vampire d'aimer une humaine au point de faire un enfant avec elle. Même les végétariens aimaient l'odeur et le goût du sang. Il fallait être incroyablement masochiste pour cela et pourtant nous étions presque dix dans le monde, à ma connaissance. Cependant, j'étais fière que mon père fasse parti de ses hommes, je n'aurais jamais vu le jour sans ça.
Il me demanderait enfin ce que nous avions de différent par rapport à eux si ce n'est notre cœur qui bat faiblement. Je lui dirais que notre peau scintille beaucoup moins que la sienne, à tel point qu'il est presque impossible pour un humain de le voir, ce qui m'avait valu de nombreuses heures passées dans la forêt pour reconduire les marcheurs égarés. En revanche, notre humanité nous obligeait à dormir, quelques heures par semaine suffisaient. Nous pouvions également pleurer, rougir et tomber malade apparemment.
« Tu es la première hybride à venir ici sans être invitée, je ne savais pas qu'il en existait d'autres. » répondit-il.
Ce n'était définitivement pas la réponse que j'attendais. Deux questions me vinrent en tête, comment connaissait-il les hybrides et que voulait-il dire par « sans être invitée » ?
Mais aucune de ses phrases sortirent de ma bouche, je sentis mon corps me lâcher et je ne pus que prononcer le nom du médecin que je voulais voir.
« Carlisle Cullen ».
Je n'avais pu résister plus longtemps, j'espérais de tout cœur que je ne blesserais personne et surtout pas ce vampire.
Tout était devenu calme et paisible, j'étais de retour chez moi, mais je savais que c'était un rêve, mon père était à la maison. Il lisait, sa troisième activité préférée après l'enseignement et la pratique de la médecine. Soudain, un nuage noir entra, je ne savais ce que c'était mais je n'avais pas un bon pressentiment.
Une terrible douleur dans le ventre me sortit de mon rêve. Je connaissais trop bien ce sentiment, d'importants pouvoirs se trouvaient à proximité de moi.
Certains vampires possédaient des dons, ils étaient assez rares mais pouvaient être très puissants. J'avais eu la chance (ou la malchance) de naître avec la capacité de copier tous les pouvoirs environnants. Ça aurait été très bien si je ne souffrais pas à chaque fois que je sentais un pouvoir que je ne contrôlais pas, et le pire, il me fallait parfois des semaines pour ne plus sentir les plus puissants.
J'ouvrais les yeux dans une pièce très claire et vit deux yeux dorés qui me fixaient, les mêmes que j'avais vu dans la forêt.
« Bien dormi ? Au fait, moi c'est Emmett. »
Trois autres vampires étaient à côté, il émanait d'eux une force extraordinaire. Je m'enfuis au fond de la pièce d'un bond tentant d'atténuer la douleur, mais rien n'y faisait. Pour ne rien arranger, des milliers de voix se bousculaient dans ma tête, cela provenait sûrement de l'un d'entre eux. J'enfermais mon crâne dans mes genoux pour les faire taire puis tout ceci s’apaisa.
« Elle copie les pouvoirs. Nous ferions mieux de partir. » annonça l'un d'eux.
J'entendis des pas qui quittaient la pièce, à mon grand soulagement, les pouvoirs les plus puissants étaient partis, mais il en restait un.
Je m'appuyai contre la table de chevet pour me redresser mais celle-ci ne résista pas à ma nouvelle force.
« Désolée », lançai-je aux vampires qui me regardaient.
« Ce n'est rien, ça m'arrive aussi. » il était donc le propriétaire de ce don.
« Emmett m'a dit que vous me cherchiez, je suis le docteur Carlisle Cullen. »
Alors c'était lui, le vampire que je recherchais. J'étais à la fois ravie et terrifiée, il était peut-être capable de me dire ce qui n'allait pas chez moi, mais il n'était pas seul. Il vivait en groupe et je ne pouvais pas risquer de les blesser.
« Je suis désolée, je n'aurais pas dû venir… » m'excusai-je.
Je tentai de m'enfuir mais Emmett me rattrapa par le bras.
« Attends, tu es une hybride et tu t'es évanouie. » dit-il, inquiet.
« Oui » avouai-je « je suis malade ».
« C'est possible ? »
Cette question ne m'était pas destinée, il regardait le médecin.
« Je ne sais pas » répondit-il décontenancé, « je pensais que non. »
« Dans ce cas nous sommes deux… » ajoutai-je « mais c'est trop dangereux, je pensais que vous étiez seul, je ne peux pas prendre ce risque… »
Ils se raidirent et échangèrent un regard inquiet.
« Je ne sais pas de quel risque tu parle, mais je suis prêt à le prendre. Nous avons une hybride avec nous et je veux savoir ce qui peut lui arriver. Emmett, va dire aux autres de ne pas s'approcher. »
Le grand gaillard obéit et partit. J'étais soulagée d'un poids, le médecin n'avait pas de pouvoirs, pourtant j'étais terrifiée par son choix, je ne voulais pas le blesser et je ne savais même pas ce que je pouvais faire pour ça.
Une fois seuls, sa réaction me surprit, il me sourit et se détendit.
« Et si nous commencions par les présentations » enchaîna-t-il sans perdre sa sérénité.
Quelle malpolie je faisais… Mes mois de solitude n'avaient rien arrangé à ma vie sociale.
« Pardonnez-moi, je ne me suis pas présentée. Je m'appelle Ellyanna, vous connaissez mon père, William Eiwens et vous avez raison pour ma mère, elle était humaine. »
Était… Le plus grand regret de ma vie, je n'avais pas eu la chance de connaître la connaître, elle était morte en me donnant la vie. C'était le prix qu'elles payaient pour avoir un enfant avec un vampire. Mon père avait accouché des dizaines de femmes mais il n'en sauva aucune. Il avait failli réussir une fois, mais la naissance de jumeaux avait réduit ses chances à néant.
Des souvenirs du passé semblaient avoir envahi son esprit puis il se mit à sourire à nouveau.
« Comment va William ? Nous ne nous sommes pas parlés depuis des siècles ! »
Je ne savais si c'était une expression ou non…
« La dernière fois que je l'ai appelé, il m'a dit qu'il était occupé, ce qui est plutôt bon signe. »
Le vampire rit et je ris avec lui. Quelque chose chez lui m'inspirait confiance.
« Et que pense-t-il de ta maladie ? »
« Il n'a rien trouvé. »
Il me regarda perplexe et un peu inquiet.
« Je pensais que vous étiez seul » continuai-je « je n'aurais pas dû venir… »
« Tu n'arrêtes pas de dire ça, en quoi penses-tu être dangereuse ? »
« Je deviens incontrôlable, principalement la nuit, mais je ne me souviens de rien. Je constate juste les dégâts… En plus, vous avez un loup à vos trousses. »
« Ne t'en fais pas pour ça, nous serons prudents. »
À y réfléchir, Emmett ne semblait pas effrayé lorsqu'il m'avait annoncé qu'il était là. Ils étaient pour le moins étonnant, ils connaissaient les hybrides et les loups… Je me demandais quel âge ils pouvaient avoir.
Carlisle me posa une autre question mais je ne l'entendis pas. Une douleur vive s'empara de tout mon corps comme si des dizaines de poignards m'avaient traversés au même moment. Je ne mis pas longtemps à en comprendre la cause. Les détenteurs des dons étaient là, ils étaient plus nombreux qu'avant et plus forts. Ma vision se brouilla, je ne tenais plus le choc, je devais partir de là. Il m'était déjà arrivé d'avoir à faire à des pouvoirs trop puissants pour moi et à chaque fois, mon père était là pour me sauver.
Mon père, je le revoyais, en France. Il était en plein milieu de la place déserte et des ombres menaçantes s'avançaient vers lui. Je ne voulais pas voir la suite et sans que je bouge, cette vision disparut, lentement remplacée par des arbres devant moi. Carlisle me regardait, inquiet, il avait remplacé mon père et m'avait éloigné de la source de pouvoir.
« Que s'est-il passé ? » demandai-je.
« Ils ont eu peur pour moi, je suis désolé. »
Sept vampires marchaient vers nous. Je ne pouvais pas rester là, je ne voulais plus ressentir cette douleur.
« Stop ! » cria le médecin.
Je m'arrêtai net, ainsi que les personnes derrière moi.
« Elle s'appelle Ellyanna, fille de William Eiwens, le vampire qui m'a sauvé de Volterra et qui était toujours présent dans mes débuts de médecin. Si je peux aujourd'hui guérir quelqu'un sans sourciller, c'est grâce à lui. Alors je comprends que vous remettiez mon choix en question mais je ne reviendrais pas dessus, j'aiderais cette fille, peu importe ce qu'il m'en coûte. »
Je ne connaissais pas cette histoire, mon père ne m'avait jamais parlé de ça mais je le reconnaissais bien là-dedans, toujours prêt à aider son prochain.
« Je ne le laisserais pas faire. » ajoutai-je « je ne le laisserais pas m'aider quoi qu'il lui en coûte. C'est à vous tous de décider si je reste ou non. »
Ils me regardèrent, surpris. J'étais touchée par les choix du médecin, mais je ne voulais pas être la cause d'un conflit dans cette famille. J'avais vécu toute ma vie dans une atmosphère tendue, c'était une des raisons qui m'avait poussé à m'isoler, je ne voulais pas que cela se reproduise ici.
« De quoi parle-tu ? » me demanda le médecin.
« Je ne veux pas être une cause de disputes dans votre clan. »
« Nous sommes une famille. » me répliqua sèchement une vampire blonde d'une beauté inégalée.
« Pardon. Dans votre famille. » corrigeai-je immédiatement.
« Pourquoi es-tu venue ici ? »
La femme qui semblait plus âgée que les autres prit la parole. Elle avait une silhouette toute fine mais était ravissante avec ses longs cheveux châtains.
« Je suis malade. » répondis-je.
« Je croyais que ton père était médecin ! »
Cette blonde ne semblait pas trop m'apprécier.
« Rosalie ! Tu n'aide pas beaucoup avec ce ton. » lui rétorqua le médecin.
« J'ai l'habitude. Mon père travaille dans un village qui ne me porte pas dans son cœur. » je soupirais, j'avais l'impression de passer un examen, ou d'être devant un tribunal. « Je suis venue ici parce que je pensais que Carlisle était seul, je ne m'attendais pas à voir toute une famille. Et mon père m'a déjà ausculté, il ne sait pas ce que j'ai, il espérait que Carlisle ait une idée. »
« Tu dis que tu es malade… Pourtant tu es une hybride, les hybrides ne peuvent pas tomber malade. » intervint une jeune vampire aux yeux hésitants entre le rouge et le doré, comme tous les nouveaux-nées qui se nourrissaient exclusivement d'animaux. Elle était très belle également, d'une élégance naturelle. Ses longs cheveux bruns ondulés ne faisaient qu'ajouter à sa beauté.
« Je le pensais aussi… »
Ma malchance légendaire …
« Ne vous inquiétez pas, je suis la seule de mon village à être tombée malade. La seule depuis des siècles… » ajoutai-je.
Je ne pouvais dire si ce renseignement les rassurait ou s'il les inquiétait.
« Quel âge as-tu ? »
C'était au tour de la plus petite des filles, elle avait de courts cheveux bruns, je crus voir un instant sur son visage que la vie ne l'avait pas épargné mais tout ceci s'enfuit avec son large sourire.
« J'ai eu onze ans l'été dernier. »
Une nouvelle fois la surprise se lisait sur leur visage.
« Et quand est-ce que ta croissance s'est finie ? »
C'était un vrai interrogatoire mais je me prêtais au jeu avec un calme que je ne me connaissais pas.
« Il y a trois ans environ, mais tout s'est fait progressivement, mon cœur a ralentit, ma température corporelle a baissé pour atteindre trente degrés. Mon père considère que c'est à ce moment que nous arrêtons de vieillir. »
« Nahuel nous a dit qu'il avait atteint sa maturité a sept ans, mais on pense que Renesmée l'atteindra avant. »
Nahuel était un hybride qui vivait en Amérique du Sud, je ne l'avais jamais rencontré mais certains vampires de passage au village m'avaient raconté son histoire. Son père était le plus masochiste de tous, il se servait d'humaines pour des expérimentations et avait abandonné la mère de Nahuel alors qu'elle était enceinte. Heureusement pour lui, elle avait une sœur qui veilla sur elle et sur son enfant lorsqu'elle le mit au monde. Il la transforma à sa naissance et elle s'occupa de lui toute sa vie. Même a cent cinquante ans, ils sont restés très soudés. C'était une histoire assez triste… Il avait tué sa mère en naissant et son père l'avait totalement abandonné, une vraie leçon d'humilité pour moi.
« C'est possible, Maéva n'avait pas six ans quand ça lui est arrivé. »
Maéva, celle qui avait été pendant mon enfance comme une sœur était désormais la cause de beaucoup de mes malheurs. Elle avait tué ma meilleure amie pour rejoindre les Volturi et apparemment j'étais la prochaine sur la liste. C'était une autre raison qui m'avait poussé à faire le tour du monde pour y apprendre de nombreuses techniques de combat.
Les Volturi, les maîtres des vampires en quelque sorte…
Ils veillaient à ce que notre identité reste secrète aux yeux des humains, celle des vampires en tout cas. L'existence des hybrides leur était inconnue, elle le devait ou ils nous tueraient. Maéva s'était injecté son venin et celui de son père pour devenir une immortelle et rejoindre leur rang. Lors de sa transformation, Alexandra altéra sa mémoire pour lui effacer le souvenir des hybrides, mais nous ne savons pas si cela a fonctionné et si sa mémoire n'était toujours pas revenue.
Il y avait à la tête de cette ordre trois anciens vampires extrêmement puissants. Marcus, que la longue vie avait lassé, Caïus qui chassait toutes les excentricités de notre monde et Aro, qui les convoitaient.
Tout ceci m'avait été raconté bien sûr, je ne les avais jamais rencontrés en personne.
Raison supplémentaire de les détester, ils se nourrissaient de sang humain. Ils piégeaient leur proie avant de les dévorer comme de véritables monstres.
Le château de Chambord était un de leur traquenard, c'était une raison pour laquelle les loups avaient élu campement dans le village voisin. Richard, notre chef, gardait le fort en leur absence. À y repenser, c'était assez risible, s'ils savaient que des hybrides vivaient dans leur château quand ils n'étaient pas là… Ils nous prenaient parfois par surprise mais nous nous cachions parmi les visiteurs avant de nous enfuir.
J'avais à plusieurs reprises failli nous dévoiler, les pouvoirs de certains Volturi étant extrêmement puissant comme celui de Jane qui pouvait nous infliger une douleur immense rien qu'en nous regardant ou son frère jumeau, Alec qui pouvait neutraliser tous les sens d'une vampire pour les anéantir plus facilement. C'était une autre raison pour laquelle les villageois ne m'appréciaient guère…
L'interrogatoire avait duré une bonne partie de la journée, sous un ciel couvert. Une petite fille au cheveux longs et bouclés brun acajou nous avait rejoint. Je supposais que c'était Renesmée, l'hybride de la famille. Apparemment, leur ami qu'ils appelaient Jacob avait dû partir. À mon plus grand désespoir, elle avait également un don, je ne savais pas ce que c'était mais je l'avais bel et bien senti quand elle passa à côté de nous.
« Il me semble que tout a été dit. » intervint le médecin. « Tu as peut-être des questions pour nous. »
Je ne m'attendais pas à ça mais oui, il y en avait une ou deux qui me trottaient dans la tête.
« Oui, je ne connais pas vos noms, ni vos pouvoirs. »
« Bien sûr. J'ai manqué à tous mes devoirs. Commençons par la gauche, il y a tout d'abord ma magnifique femme Esmé, elle n'a pas de dons. »
Elle paraissait la plus âgée de toute la bande, elle avait sûrement été transformé vers trente ans, je n'étais jamais très doué pour deviner les âges. Elle était assez fine, à vrai dire elles l'étaient toute. Ses yeux dorés lui donnaient un air protecteur, ses longs cheveux bouclés couleur caramel renforçaient cette impression.
« Tu connais ensuite Emmett et à ses côtés c'est Rosalie, sa femme. »
La brute me fit un signe de la tête, amical. Il semblait m'apprécier, ce qui n'était pas le cas de la beauté grande et blonde qui se trouvait à côté de lui. Il y avait ensuite Edward, le père de la petite Renesmée qui était capable de lire dans les pensées, je me souvenais de son pouvoir. Toutes les voix que j'avais entendues le matin même provenaient de son don. Il était grand avec une silhouette élancée, un visage fin et des cheveux bronze ébouriffés qui lui donnaient un air assez séducteur.
Bella était la suivante, la mère « adoptive » de la petite était également ravissante avec ses longs cheveux bruns, son visage ovale et son petit corps aux proportions parfaites. Ses yeux étaient rouges, mais pas celui des vampires qui boivent du sang humain, mais celui des nouveaux-nés en fin de transformation.
Lorsqu'un vampire mord un humain, son venin le transforme, si il a suffisamment de contrôle… Le sang provoque une certaine frénésie chez un vampire, une fois qu'il a commencé son dîner, il lui est très dur de s'arrêter.
Dans la première année de leur transformation, ces immortels sont les plus forts de tous à cause du sang qu'il reste dans leur système. Ce n'est qu'après leur premier anniversaire qu'ils deviennent des vampires normaux. Je supposais que Bella n'avait été transformé que très récemment. En plus de cela, elle possédait un pouvoir défensif incroyable, c'était un bouclier. Elle pouvait parer tous les pouvoirs qui n'étaient pas physiques. Elle pouvait lutter contre la torture de Jane ou la vapeur anesthésiante d'Alec, elle était incroyable.
Il restait enfin deux autres silhouettes fines, celle de Jasper, un grand blond aux cheveux mi-longs qui semblait sur la défensive, il était capable d'influencer les émotions de personnes, il pouvait calmer une foule de personnes en colère ou faire de la personne la plus inoffensive, un meurtrier sanguinaire.
Et enfin, Alice, la plus petite des vampires et la plus gracieuse. Elle dégageait une joie de vivre communicante. Ces cheveux courts et noirs rendaient son regard doré très intense.
« Elle peut lire l'avenir, je suis surpris qu'elle ne t'ait pas vu arriver d'ailleurs. »
« Votre famille a des dons remarquables ! »
Il me faudrait énormément de temps pour gérer leurs pouvoirs, surtout ceux d'Edward et d'Alice.
Elle ne m'avait pas vu venir ? Peut-être parce que je n'étais que de passage ? Enfin la décision leur revenait entièrement.
Une idée noire me traversa l'esprit. Je savais qu'Edward était présent ce matin mais pas la voyante. Et si elle était restée autour, que je pouvais tout de même capter son pouvoir. Le rêve que j'avais fait sur la tête de mon père était peut-être une vision… La raison pour laquelle je ne faisais pas parti de l'avenir de cette famille est parce que je devais partir immédiatement, je devais retourner en France.
« Alice voit l'avenir… Je ne peux pas rester, je dois sauver mon père ! »
Devant l'incompréhension générale je repartis à toute vitesse.
« Attends ! »
Carlisle m'avait suivi.
« Mon père va mourir. » criai-je.
« Les visions d'Alice sont subjectives, elles ne se réalisent pas toujours. »
« Je ne peux pas prendre le risque ! »
Je parvenais à le distancer, c'était bon signe. Cependant une autre personne plus rapide me rattrapait, il s'agissait d'Edward. Sa force me transperçait le corps mais je n'avais pas le droit de m'arrêter, si je voulais être en France le lendemain.
« Que fais-tu de ta maladie ? Tu veux prendre le risque de blesser des humains, de nous dévoiler ? »
Il ne me parlait pas, j'entendais sa voix dans ma tête. Il n'avait pas tort mais on parlait de la vie de mon père, je devais tout faire pour avoir ne serait-ce qu'une chance de le sauver.
« Nous avons des téléphones, tu n'as peut-être pas le temps de le rejoindre. »
Il était constamment présent dans ma tête mais je devais avouer qu'il avait peut-être raison. Il vivait avec Alice, il devait connaître son pouvoir. Je ne savais pas quoi faire…
« À quoi bon y aller si c'est pour te faire tuer par les Volturi ensuite ? Tu nous mettrais tous en danger. Arrête-toi, nous pouvons t'aider ! »
Pourquoi m'aideraient-ils ? J'étais persuadée qu'ils auraient refusé que je reste, Carlisle l'avait dit, Alice ne m'avait pas vu avec eux.
« Tu as tort, on était pour. »
Il savait parler ! Je m'arrêtais pour lui faire face et il me sourit, désolé. Je me sentais terriblement bête, je savais à quel point les mots pouvaient blesser. Je n'aurais pas dû penser ça.
« Ce n'est rien. »
C'était vraiment très étrange d'avoir son esprit sur écoute, d'autant plus que la douleur commençaient à être difficile à gérer.
« Je n'ai pas parlé. »
Ce don était vraiment déboussolant…
« Désolée. » m'exprimai-je.
« Arrêtons ton calvaire, viens. Je dirais à Carlisle de te donner un téléphone chez Emmett et Rose. »
« Merci, tu es sûr que ça ne les dérange pas que j'aille chez eux ? »
« Ils passent leur temps avec Renesmée à la maison. Ça fait des mois qu'elle est vide. »
Je le laissais partir devant, à une distance qui me permettait de ne pas ressentir son pouvoir. Je croisais les regards des autres vampires en repartant vers le cottage d'Emmett, la plupart d'entre eux me souriaient, Edward avait raison, ils voulaient que je reste. Ce dernier rejoignit sa famille me laissant aller vers une magnifique maison. Je n'avais pas pris le temps de l'admirer jusque là. On aurait dit une grande cabane dans la forêt, elle était sublimement fondue dans le décor.
Je rentrais dans un salon à la fois spacieux et incroyablement chaleureux. Les tons beiges dominaient et les meubles anciens se mélangeaient avec des éléments plus modernes. Le tout rendait une atmosphère cosy et intemporelle.
« C'est Alice qui l'a dessiné. Comme toutes les maisons que nous possédons. »
Esmé m'avait rejoint, une sourire chaleureux se dessinait sur son visage et elle apportait avec elle une téléphone et un sandwich qui avait l'air appétissant. Je ne savais pas combien de temps j'étais restée devant la maison, mais apparemment, plus longtemps que je ne pensais.
« Toutes les maisons ? » rigolai-je
« Privilège d'immortels et puis nous sommes une famille nombreuse. »
« C'est vrai, c'est incroyable de vous voir tous aussi unis et protecteurs, ça donne de l'espoir. »
« Je tenais à m'excuser de la manière dont je t'ai traité, j'aurais dû te laisser le bénéfice du doute. »
« Non, j'ai dit que je pouvais être dangereuse et vous vous êtes tous inquiétés pour un membre de votre famille, c'est normal. »
« Je t'ai apporté le téléphone et j'ai pensé que tu pourrais avoir faim. » me dit-elle avec le plus gentil des sourires.
Je ne mangeais que très rarement de la nourriture humaine. Elle était loin d'être satisfaisante en matière de nutrition et de goût mais j'acceptais l'attention avec grand plaisir. Cette femme était d'une douceur et d'une gentillesse incroyable.
Cependant, mon attention n'était attirée que par le petit boîtier noir, je devais à tout prix appeler mon père. Je l'ouvris et composai le numéro. La tonalité d'attente retentit, elle me paraissait durer des heures, il était peut-être déjà trop tard…
Après trois sonneries, une voix familière coupa court à mes névroses.
« Allô ? »
« Papa ! Tu es en vie ! » m'exclamai-je, heureuse.
« Elly ? Bien sûr que je suis en vie, qu'est-ce qui peut te faire penser le contraire ? », m'interrogea-t-il.
« Alice, c'est une voyante. », lui expliquai-je.
« Oh... » il eut un moment de pause, « rappelle-moi de remercier Carlisle, j'espère qu'il s'occupe bien de toi. »
Comment savait-il où je me trouvais ?
« Papa, comment… ? » demandai-je.
« C'est un numéro de l’État de Washington. Je ne connais qu'une personne susceptible de t'intéresser là-bas. »
C'était mon père tout craché ! Il avait le don pour éviter les sujets qu'il ne voulait pas aborder et cela me mettait dans un état de fureur.
« Papa, je viens de te dire que tu vas mourir ! Les Volturi vont te tuer ! »
« Ne t'inquiète pas chérie, j'ouvrirais l’œil, je te pro... »
« Papa ? Papa ?!! » criai-je.
Je devenais hystérique, ma vision venait-elle de se réaliser ? Les Volturi l'avaient-ils pris par surprise ? Je paniquais, ma main gauche tremblait et ce ne fut que lorsque quelques bouts de plastique noir tombèrent que je compris ce qu'il venait de se passer. J'avais écrasé le téléphone dans ma main…
Je me sentais terriblement honteuse, je venais de casser le téléphone des Cullen et le propriétaire en personne venait d'assister à ce désastre. Il était accompagné de son matériel médical.
« Je suis sincèrement désolée. » m'excusai-je.
« Ce n'est rien, William avait cet effet sur moi aussi de temps en temps. » rigola-t-il. « Ça ne te dérange pas si je t'examine ici ? J'ai pensé que tu ne pourrais pas aller à la villa avec les autres donc l'infirmerie vient à toi. »
« Merci. »
Il sortit son matériel sur la table, je reconnus un thermomètre et un matériel de prise de sang, le reste m'était totalement inconnu. Il commença par ma température et ne pus cacher sa surprise.
« Quelque chose ne va pas ? »
« Tu disais que la température des hybrides stagnait à trente degrés après leur maturité, n'est-ce pas ? » m'interrogea-t-il.
« Oui, c'est exact. » répondis-je, inquiète.
« Je ne pensais pas dire ça un jour à une personne immortelle mais il me semble que tu as de la fièvre. »
« Pardon ? »
Il reprit ma température pour confirmer.
« Je maintiens ma position, tu es à plus de trente deux. Tu es bien malade, ou tu grandis encore. »
Je ne saurais dire si son visage exprimait de l'inquiétude ou de l'excitation.
« Tu penses que ça peut être une poussée de croissance ? » demandai-je.
Cette nouvelle me bouleversait. Mes mains tremblaient, elles n'avaient pas réellement cessé depuis la conversation avec mon père.
« C'est possible, tu te sens différente ? »
« Non, pas vraiment. Juste plus fatiguée… »
« Je vais prendre ton sang, on verra bien ce qu'il va me dire. »
J'étais choquée, que m'arrivait-il ? Même si j'avais déjà fait des dizaines de prises de sang, grâce à mon père qui suivait de très près ma croissance, je ne me sentais pas à l'aise pour celle-ci. Je tendis mon bras par habitude, il prépara le flacon qui allait accueillir mon sang et approcha l'aiguille de moi. Mais rien ne se passa comme prévu, comme si je ne contrôlais plus mon corps, je poussai violemment le médecin contre le mur, écrasant les meubles qui étaient sur son chemin.
« Je suis désolée, je ne voulais pas ! »
Je n'en revenais pas, je venais d'agresser un vampire. Je venais d'agresser la personne qui allait m'aider. Pour la première fois j'étais témoin du monstre que je devenais. Je ne pouvais pas rester là, je devais partir, je ne pouvais pas les mettre en danger.
Je m'enfuis à toute vitesse dans la forêt, tentant par tous les moyens de trouver un chemin qui m'éloignerait de toute personne que j'étais capable de blesser. Mon corps tremblait de tout son long, les émotions se bousculaient dans ma tête, je ne savais plus quoi penser, plus quoi faire. Je courus le plus loin possible mais ce ne fût pas assez loin à mon goût. Je n'avais fait que quelques mètres avant de m'évanouir, comme chaque soir…