L'Enfant Terrible du Rat Cornu

Chapitre 32 : La Chute de Gottliebschloss

7514 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 11/04/2020 11:16

L’armée des Skavens marchait sans discontinuer depuis près de deux jours. C’était une marche forcée, Vellux n’autorisait qu’une heure de repos à ses hommes-rats de temps en temps. Il n’avait pas perdu de vue que le sorcier chose-bizarre, Aescos Karkadourian, avait lui aussi des prétentions de domination sur la région. Le Skaven Blanc était bien décidé à arriver à Gottliebschloss avant lui et de s’y installer. Aussi, il ne permettait aucune perte de temps. Les troupes du Seigneur Vodaj étaient déjà aux alentours du domaine des choses-hommes, il ne fallait pas les faire attendre, encore moins leur laisser l’occasion de leur voler la prise qui leur revenait de droit.

 

Vellux était à l’arrière, assis sur son petit chariot à vapeur conduit par un Skryre. Il avait attendu longtemps cette invention, elle marchait très bien, et pourtant il n’en était pas content. Quand il repensait au véhicule personnel de Vodaj, il se sentait ridiculisé. Dans ces moments, il réduisait en cendres un esclave ou deux à coups de magie du Warp pour évacuer sa colère et motiver ses Skavens. Ceux-ci craignaient toujours le courroux de leur maître, et de leurs supérieurs hiérarchiques plus directs, et obéissaient avec zèle. Quelques-uns finirent par mourir de fatigue. Ils purent cependant continuer à servir les Fils du Rat Cornu en leur remplissant l’estomac.

 

Au milieu de la procession, il y avait un Skaven bien plus malheureux et terrifié que les autres.

 

Heike Steiner restait recroquevillée au milieu de sa cage, sans oser lever les yeux sur les alentours.

 

Ne pas croiser leur regard. Ne faire aucun geste qu’ils pourraient interpréter comme une invitation.

 

Quatre esclaves tiraient la charrette sur laquelle des Skavens Noirs avaient posé la cage. Ironie des circonstances, ce voyage réveilla chez la jeune fille d’autres éléments de son passé enfouis au plus profond de sa mémoire depuis longtemps. Son père lui avait expliqué comment il l’avait trouvée : des mercenaires engagés pour l’occasion par le prieur Romulus avaient intercepté une petite bande de Skavens qui fuyaient les hordes d’Archaon, le Seigneur de la Fin des Temps, et qui la transportaient, elle, alors frêle adolescente à peine en âge de produire des Skavens. Elle avait été capturée près de Middenheim, et un petit convoi comprenant maître Brisingr Mainsûre l’avait conduite jusqu’à Altdorf, en cage.

 

Se retrouver dans la même situation lui fit éprouver des sensations qui lui parurent familières. Le grincement des roues de la charrette sur laquelle était posée sa cage, les cahots, le froid mordant de la nuit, et surtout, la peur au ventre de ne pas savoir ce qui allait lui arriver. Cela faisait tellement longtemps qu’elle n’avait pas éprouvé cette sensation. C’était très désagréable.

 

Il y avait toutefois une petite, une toute petite étincelle d’espoir au milieu de ce cortège de tourments : cet immense Skaven Noir qui prenait très à cœur ses fonctions de gardien. Il ne s’éloignait jamais de la cage plus d’une minute, et garantissait autant que possible sa tranquillité. Chaque fois qu’un autre homme-rat approchait, le gardien n’avait besoin que d’un regard furibond pour le dissuader d’embêter la prisonnière. En revanche, quand il s’adressait directement à elle, son attitude changeait du tout au tout. Il devenait timide, presque impressionné, et toujours attentionné. Il bafouillait quelques mots en Reikspiel, suffisamment pour s’enquérir de son bien-être. Pendant les moments de repos, si un Skaven faisait trop de bruit, il le forçait à s’éloigner. Quand le repas était servi, il lui passait une gamelle pleine à travers les barreaux avec mille précautions. Il lui laissait même des morceaux de viande crue de sa propre assiette.

 

Heike ne savait pas quoi penser. L’attitude de ce Skaven Noir était vraiment perturbante. Quand il lui parlait, elle répondait le plus gentiment possible. Même si elle détestait la viande crue, elle mangeait du mieux qu’elle pouvait, consciente qu’elle était une privilégiée – Psody avait expliqué à son père que les Skavens n’avaient aucune considération envers leurs prisonniers. Il faisait preuve d’une douceur complètement opposée à la méchanceté de Vellux. Mais la jeune fille savait que sous cette douceur était tapie une force bestiale qui pouvait se déchaîner à tout moment. Comme le gardien était visiblement soumis au Skaven Blanc, ce dernier n’avait sans doute qu’un seul mot à dire, et la jeune fille-rate se retrouverait réduite en bouillie entre ses pattes. Elle en avait conscience, et elle n’osait rien dire, encore moins faire d’histoire.

 

 

Le bataillon de Vellux arriva enfin au point de rendez-vous. Le reste de la colonie de Brissuc attendait avec les Skavens de Treecil. Les Skavens se comptaient par milliers. Heike resta les yeux couverts, craignant de provoquer une éruption d’hormones mâles au moindre regard vers l’un ou l’autre de ses ravisseurs. Le Skaven Blanc avait raison, la cage et le grand Skaven Noir étaient ses meilleures chances de survie face à la menace constante de finir en pâture à ces brutes enragées. Tout autour d’elle, l’atmosphère était tellement malsaine qu’elle n’envisageait même pas de pointer le bout de son nez entre les barreaux. Chaque exclamation lui hérissait la fourrure, chaque cri la faisait sursauter.

 

Ne penser à rien, ne penser à rien, ne penser à rien, ne penser à rien…

 

La charrette à moteur s’immobilisa, et Vellux couina encore de nouveaux ordres qu’elle ne comprit pas. La cage s’arrêta, et toute l’escorte se dispersa. La jeune fille Skaven se redressa, plissa les yeux, et distingua quelque chose au milieu des volutes de brume nocturne.

 

Un grand rocher ? Non, un château !

 

Les Skavens avaient établi un immense campement tout autour de la construction Humaine. Les lumières de flambeaux allaient et venaient le long des remparts. Pendant un bref instant, Heike sentit une bouffée d’espoir. Un tel débordement de Skavens avait forcément été repéré par les habitants de ce château. Ils allaient certainement réagir : se défendre contre ces envahisseurs, aller chercher des renforts, ou n’importe quoi d’autre. Mais elle renonça bien vite à cette idée.

 

D’après ce que Psody nous a raconté, les Skavens n’attaqueraient pas cette place forte s’ils n’étaient pas sûrs d’être victorieux !

 

Et puis, même si les Humains se battaient contre les Skavens et l’emportaient, est-ce que son cas serait arrangé pour autant ? Elle, une Skaven, serait-elle considérée différemment des autres ? Même en étant en cage, elle restait des leurs.

 

La vue des Skavens en train de se préparer la tira de ses pensées. Elle sentit une certaine agitation. Les arquebuses circulaient de patte en patte, les guerriers sortaient et vérifiaient leurs armes, et les dresseurs tapaient à coups de bâton sur les cages où attendaient les rats géants. Heike allait être bientôt fixée. Elle aperçut alors deux Skavens en pleine discussion qui marchaient dans sa direction.

 

 

-         C’est magnifique-merveilleux, Maître Technomage !

-         Tu peux le dire, Diassyon ! Vodaj est un Seigneur de Guerre spécial. Il a un cerveau suffisamment développé pour comprendre le monde de la même façon que nous ! Et il compte sur nous pour faire des ravages sur cette baraque à choses-hommes.

-         Le Clan Skryre est le puissant-fort de tous les Fils du Rat Cornu ! On va leur montrer ! Mais… qui pilotera la Roue Infernale ? Vous ?

 

Le jeune Skaven brun s’était posé la question à de nombreuses reprises, n’osant imaginer le bonheur d’être aux commandes de cet engin de mort. Très confiant, il n’imaginait pas avoir de problème technique avec. Le Skaven couleur sable posa sa large patte sur l’épaule du Skaven brun.

 

-         Je resterai ici pour éviter que mon savoir ne soit perdu. Mais le Prophète Gris m’a demandé de choisir mon meilleur disciple pour mener l’assaut. J’ai réfléchi à ce qu’a dit Vodaj, et j’ai pensé que tu ferais l’affaire.

-         C’est vrai ? Oh, quel immense honneur-honneur, maître Mabrukk !

-         Tu peux le dire ! Tu sauras la conduire, n’est-ce pas ?

-         Oui ! Oui ! J’ai retenu toutes vos leçons !

 

En attendant Vellux, Mabrukk avait enseigné au jeune Skaven brun l’art de la conduite de cet engin meurtrier, au détriment de dizaines d’esclaves et de quelques arbres. Le Seigneur Vodaj avait donné son accord, et choisi lui-même les sujets d’entraînement.

 

-         Allez, Diassyon ! Va te préparer, on va y aller !

 

Les deux Skavens du Clan Skryre se séparèrent. Le jeune Technomage allait se précipiter vers la machine de guerre, lorsque quelque chose l’arrêta dans son élan. La curiosité le poussa à fléchir sa course vers la grande cage.

 

 

Heike frissonna en voyant approcher l’un des deux Skavens qui discutaient. Il portait tout un barda d’outils et de sacoches par-dessus son tablier de cuir. Son poil était brun, ses pupilles dilatées par une lueur fiévreuse, et sa respiration rapide. Il la regarda attentivement, la tête penchée sur le côté, et la jeune fille frissonna davantage, comme s’il était en train de lui arracher sa chemise de nuit rien qu’avec les yeux. Le Skaven au poil brun approcha d’un pas, posa une patte sur l’un des barreaux de la cage. Il fit cliqueter sa langue, et exhiba ses longues incisives avec un chuintement aigu. Le cœur de la jeune fille accéléra. Que voulait-il ? Encore un fou furieux mal intentionné ? Pourtant, il n’avait pas l’air prêt à se jeter sur elle. Non, il la regardait comme s’il se trouvait devant une bête curieuse.

 

Elle eut un sursaut en entendant la grosse voix du Skaven Noir.

 

 

-         Diassyon, ne t’approche pas trop ! Tu lui fais peur.

-         Oups ! Désolé, frère, répondit le Skryre en reculant. Content de te revoir.

-         Moi aussi-aussi.

 

Diassyon fixa encore avec insistance la jeune fille-rate. Elle se recroquevilla et se cacha le visage de ses mains.

 

-         C’est étonnant, elle n’est pas comme celles de la colonie !

-         Elle est différente. Je l’ai entendu parler la langue des choses-hommes. Je lui ai parlé, elle a compris.

-         Ah ouais ? Mais alors, il existe des pondeuses intelligentes ! Bizarre !

-         Tu ne dois pas la toucher, Diassyon. Personne ne doit la toucher.

-         C’est si important-important ?

-         Vellux m’a ordonné de veiller sur elle, je veille sur elle.

 

Le Skaven brun fit un petit signe de tête.

 

-         T’en fais pas. Je n’ai pas envie de m’accoupler, je pense trop à la bataille !

-         Tu es prêt ?

-         Ouais ! s’écria le Skryre. Je vais manipuler la Roue Infernale !

 

Diassyon ricana et sauta d’un pied sur l’autre, mais il cessa bien vite quand il vit l’expression concentrée de son frère.

 

-         Tu ne t’ennuies pas ?

-         Non, ça va.

-         Je sais que tu adores te battre, et que garder cette pondeuse n’est pas très excitant.

-         Le Prophète Gris m’a dit que c’était très important. Il faut qu’elle soit intacte pour la gloire-gloire du Rat Cornu. Et puis… je ne sais pas. Je crois que le Rat Cornu n’aimerait vraiment pas qu’il lui arrive quelque chose.

-         Ce n’est pas une femelle ordinaire, en effet. Bien. Je dois aller faire chauffer la Roue Infernale.

-         Ne te fais pas tuer, surtout.

-         Ces choses-hommes tomberont comme des mouches devant moi !

 

 

Les deux Skavens ricanèrent ensemble. Le brun se tourna une dernière fois vers la jeune Skaven, et siffla avec un très fort accent :

 

-         Salut… femelle !

 

Puis il fila en un éclair, laissant le grand Noir tout seul. Heike était de plus en plus perplexe. Encore un Skaven avec un drôle de comportement. C’est alors qu’elle remarqua que son geôlier n’avait plus d’oreille droite.

 

Psody m’a parlé d’un frère Noir avec une oreille manquante. Et si c’était lui ?

 

Elle pensa tenter de lui parler, mais y renonça. Ce Skaven-là n’était sûrement pas le seul à avoir perdu une oreille. Et puis, elle ne savait pas parler sa langue. Même si elle se contentait de dire « Psody, Psody »… allait-il réagir ? D’ailleurs, elle ne se souvenait plus du nom de ce frère.

 

Il y avait de moins en moins de Skavens dans le camp. Tous se rassemblaient vers le château, et au fur et à mesure que Heike vit les troupes défiler, ses espérances de voir les Humains leur résister fondirent comme un bloc de gromril dans une fournaise Naine. Une terrible pétarade éclata au-dessus du campement. En pivotant dans cette direction, elle repéra quelque chose qui lui parut trop irréel pour appartenir à ce monde. C’était une sorte de véhicule avec deux immenses roues, et des aiguillons métalliques. L’appareil avançait sans rien pour le tirer ou le pousser. Le Skaven brun curieux était assis sur le siège qui surplombait les roues. Il semblait déchaîné, et piaillait d’excitation tout en manipulant frénétiquement les leviers de commande.

 

C’est sûrement une des armes du Clan des Skavens constructeurs !

 

Elle sentit ses tripes se nouer davantage. Ses chances de s’en sortir paraissaient bien minces…

 

 

Chitik était désormais tout seul dans le camp avec la prisonnière. Il n’était cependant pas frustré pour autant, car il savait que personne n’embêterait la pondeuse. Très curieusement, cette pensée le réconforta. Même sans l’ordre de Vellux, il n’avait pas envie de laisser cette pauvre créature sans défense à la merci des autres. Encore une sensation bizarre.

 

*

 

Les Fils du Rat Cornu étaient à présent tous rassemblés en régiments à quelques dizaines de yards du château.

 

Le Prophète Gris Vellux voulut s’illustrer. Persuadé d’être le futur Hérésiarque, il était indispensable pour lui de faire l’original. Aussi harangua-t-il ses troupes avec ces mots :

 

-         Cette nuit, grande nuit ! Clapier-maison des choses-hommes sera à nous ! Vodaj et moi partagerons les ressources, et les différentes sections ! Mais je veux prouver que Vellux peut être magnanime ! Donner-laisser une chance aux choses-hommes !

 

Moitié pour être sûr de se faire comprendre par les moins intelligents, moitié sous le coup de l’excitation, le Skaven Blanc parla avec des phrases courtes et hachées. Il y eut quelques crissements de surprise. Normalement, les Skavens attaquaient sans préavis, ni demande de reddition. Vodaj désigna quatre de ses Vermines de Choc pour accompagner le Prophète Gris jusqu’à proximité du fossé.

 

Les yeux rouges et perçants de Vellux virent distinctement quelques choses-hommes sur le chemin de ronde juste au-dessus du portail. Le pont-levis était relevé, la herse baissée, mais ça n’allait rien changer.

 

Vellux toussa, prit son inspiration, et invectiva :

 

-         Holà, choses-hommes ! Qui commande ce clapier ?

 

Le Skaven Blanc entendit une voix claire et haut perchée lui répondre :

 

-         C’est moi, Franzseska Gottlieb, épouse du défunt seigneur Wilhelm Gottlieb, que votre sale engeance a lâchement assassiné !

 

Vellux distingua une silhouette particulière penchée par-dessus le créneau. Un visage plus fin et imberbe, une fourrure de la tête bien plus abondante, et une voix plus aiguë que la plupart des choses-hommes...

 

Sans doute la pondeuse personnelle de leur chef, qui lui a donné son nom !

 

Le plus inhabituel était la réaction de cette pondeuse : loin d’être terrifiée par les Fils du Rat Cornu, elle osait lui tenir tête ! Elle n’était pas seule, quatre choses-hommes étaient alignées près d’elle, chacune brandissait un jezzail dans sa direction. Mais le Skaven Blanc ne voulut pas paraître déstabilisé. Il cria à son tour :

 

-         Je te laisse une seule chance, chose-femme. Ordonne à tes guerriers de jeter leurs armes, faites-vous prisonniers, ou sinon…

-         Sinon quoi, sale rat géant ?

-         Sinon… euh…

 

Jamais personne n’avait eu le culot d’interrompre le Prophète Gris Vellux. Il dut s’y reprendre à deux fois avant de répondre :

 

-         On vous massacre tous, jusqu’au dernier !

-         Comme vos prédécesseurs ? Laissez-moi rire ! Vous nous avez assiégés, mais on a tenu bon, et vous avez été chassés. D’autres sont venus quelques semaines plus tard, mais ils ont fui la queue entre les jambes au premier coup de feu. Et vous pensez avoir une meilleure chance ? Allez-vous-en ! Si vous êtes encore là dans dix secondes, nous ouvrons le feu !

 

Vellux serra les poings de rage. Ce n’était pas seulement sa fierté qui était atteinte, mais son autorité, remise en question devant toutes ses troupes et devant celles du Seigneur de Guerre Vodaj.

 

Je vais la…

 

Un coup de feu le fit plonger en arrière. Ses glandes à musc projetèrent une forte odeur rance de frayeur. Il pivota sur ses talons et courut aussi vite qu’il put vers le camp, suivi par ses quatre Vermines de Choc. Une fois revenu auprès de Vodaj, il reprit son souffle bruyamment. Quand il capta les rires et quolibets des choses-hommes, il couina de colère.

 

-         Assez ! Ces choses-hommes vont… Je vais…

 

Incapable de trouver ses mots, il glapit encore de rage en agitant les bras. Du haut de son char à vapeur géant, Vodaj tira son épée à lame incrustée de malepierre, et la pointa vers le château.

 

-         Fils du Rat Cornu, à l’attaque !

 

Aussitôt, tous les Skavens de Treecil s’élancèrent comme un seul homme-rat sur la bâtisse, suivis par le char de Vodaj. Vellux ne voulut pas avoir l’air dépassé par les événements. Il se ressaisit, et ordonna à son tour :

 

-         En avant, Skavens de Brissuc ! Pour le Rat Cornu !

 

Les Vermines de Choc poussèrent en avant les esclaves. Les Technomages du Clan Skryre avaient mis leur attirail de respiration, préparé leurs globes et les lance-feu. Les Maîtres des Bêtes firent claquer les fouets pour motiver leurs animaux.

 

Sur le siège de la Roue Infernale, Diassyon bondit d’excitation. En quelques mouvements, il remit le moteur en marche, et lança l’engin en avant.

 

-         Faites place au nouveau Ikit la Griffe et à sa machine à zapper-désintégrer !

 

La Roue Infernale s’ébranla, et roula tout droit vers le château. Au passage, trois esclaves se retrouvèrent écrasés sous ses roues massives. Arrivé à quelques yards du fossé, il tira la manette de frein. En effet, il n’y avait aucun adversaire à réduire en cendres, toutes les choses-hommes étaient protégées derrière les hauts murs.

 

Tous plus lâches-peureux que des ranuques !

 

Seules quelques choses-hommes se tenaient sur les remparts. Le Skaven brun sentit quelques petits chocs sur la carrosserie du véhicule, autant de balles qui ricochaient autour de lui. Il gémit de panique en relançant la machine, en marche arrière. En regardant derrière lui, il réalisa avec un glapissement apeuré qu’il risquait de percuter le char de Vodaj. Vite, il poussa le levier, et la Roue s’immobilisa brutalement. Le jeune Technomage faillit dégringoler du siège.

 

Il se tourna vers le Seigneur de Guerre qui le contemplait avec pitié et condescendance. Sur son propre char à vapeur, Vellux écumait de rage. Diassyon s’en aperçut et prit peur. Il se mit à pleurnicher.

 

-         Ces choses-hommes ont trop peur ! Ne veulent pas se laisser tuer-détruire !

 

Le Seigneur de Guerre fit un petit hochement de tête, et articula :

 

-         On va les forcer à sortir. Globadiers !

 

Les Technomages de Vodaj exhibèrent alors une invention de leur Seigneur de Guerre ; chacun était équipé d’un masque de protection, d’un conteneur à air respirable sur le dos, ainsi ne risquaient-ils pas de s’étouffer avec le gaz mortel de leurs grenades de verre. En soi, ce n’était pas un dispositif original, et les Skryre de tous les terriers en avaient. L’inédit était le long tuyau relié à une autre boîte métallique fixée sous le réservoir d’air. Les grenadiers stockaient leurs globes à gaz à l’intérieur, et grâce à un système de pompage, pouvaient catapulter leurs projectiles à des distances normalement impossibles à atteindre à la seule force des bras.

 

Ils étaient une vingtaine, tous en ligne. Sans une parole, ils levèrent le canon de leur tuyau comme un seul homme-rat. Les globes de verre s’élevèrent au-dessus des douves avec un bruit de ressort. Quelques-uns s’écrasèrent sur la muraille, mais les autres passèrent par au-dessus et éclatèrent dans la cour. L’une des boules de verre se brisa même directement aux pieds d’un des arquebusiers. Aussitôt, de gros nuages verdâtres s’échappèrent des débris avec de forts chuintements. Les choses-hommes prises dans la fumée se mirent à tousser, tousser, à en recracher leurs poumons.

 

Les arquebusiers s’empressèrent de viser et tirèrent de nouveau vers les hommes-rats. L’un des Technomages s’écroula avec un cri étouffé par son masque. Une perte minime pour Vodaj qui eut un petit rire méprisant.

 

-         Juste un coup de chance ! Nous sommes trop loin-loin pour leurs jezzails !

-         Regardez, ô magnifique-futé-puissant Seigneur ! cria un Guerrier des Clans. Ca marche ! Ils vont sortir !

 

Les choses-hommes s’étaient résignées à baisser le pont-levis pour tenter de les repousser. Cette erreur allait leur coûter bien plus que la victoire.

 

-         Globadiers, stop ! Reculez !

 

Vodaj savait que le matériel utilisé par les Skryre était précieux, il ne voulait pas prendre le risque de le perdre. Les Globadiers avaient fait leur travail, il n’était pas nécessaire de les exposer au danger plus longtemps, ni d’empoisonner les Skavens qui allaient pénétrer dans l’enceinte. La manœuvre surprit Vellux. D’ordinaire, les Skavens ne prenaient jamais ce genre de précaution. Il n’y pensa plus, et décida de mettre les Pestilens à contribution.

 

-         Soum, maintenant !

 

Le vieux Skaven cagoulé agita le bras vers le Skaven au dernier rang du régiment de Moines de la Peste, faisant tinter les clochettes cousues sur sa bure.

 

-         Keuton ! En avant, pour le Clan Pestilens !

 

Le chef de régiment émit un bref couinement, et la centaine de Moines de la Peste trottina vers le château. Vodaj se pencha vers le chauffeur.

 

-         Roule !

 

Le petit Skaven affecté au pilotage hocha la tête, et le char de Vodaj partit vers le château, entouré par les nombreux hommes-rats de Treecil. Diassyon poussa un ululement surexcité pendant que la Roue Infernale s’élança de plus belle.

 

Les arquebusiers sur le rempart rechargèrent leurs armes à toute vitesse, et bientôt, une deuxième salve de balles s’abattit sur les Skavens. Quelques-uns tombèrent et se retrouvèrent piétinés par leurs camarades.

 

Les premières choses-hommes à sortir étaient groupées, et brandissaient lances et haches. Vellux sentit son museau se froncer. Vraisemblablement, les choses-hommes avaient pu reconstituer leurs forces depuis le siège de Jourg du Clan Moulder, et semblaient déterminés à se défendre. Le Skaven Blanc serra les poings de rage.

 

Ils ne vont pas nous résister !

 

Les Skavens du Clan Eshin plongèrent dans le fossé sans ralentir leur course. Ces Skavens-là étaient suffisamment entrainés pour se faufiler entre les pieux disposés dans le trou, et grimper au mur d’en face.

 

Les premiers esclaves percutèrent les choses-hommes. Ils étaient trois fois plus nombreux, mais leur mauvaise condition physique et la détermination de leurs adversaires étaient deux données qui compliquaient l’équation. Les soldats combattaient de toute leur énergie. Et les arquebusiers continuaient de pilonner les troupes plus à l’arrière. Quelques Guerriers des Clans tombèrent, mais cela ne brisa pas la vague déferlante de Skavens. Un deuxième régiment suivit. Ceux-ci portaient des plastrons de fer et des armes de meilleure qualité. Cette fois, les Guerriers des Clans rencontrèrent une résistance trop forte.

 

Diassyon décida d’agir. Les choses-hommes sortaient du château par régiments entiers. Les esclaves avaient subi de très lourdes pertes, et les survivants tournaient déjà les talons pour fuir. Il allait enfin pouvoir montrer ce qu’il était capable de faire. La Roue Infernale se dirigea en grondant vers les cibles du Skaven brun. Quand il jugea être suffisamment près, il abaissa la manette de la dynamo principale. D’énormes éclairs d’énergie de malepierre jaillirent en crépitant des aiguillons, et frappèrent les choses-hommes. Le Skaven brun fut enchanté de constater que les plastrons métalliques ne protégeaient pas les choses-hommes, mais attiraient la foudre artificielle. Il y eut des cris de douleur et de panique, de la fumée, et une odeur âcre de viande grillée montait par-dessus la vapeur de la Roue Infernale. Les choses-hommes se dispersèrent, certains voulurent se retrancher dans le château. Le jeune Technomage ne leur ne laissa pas le temps : il poussa la manette des gaz un grand coup. Les énormes roues de bois renforcé d’acier de l’engin écrasèrent une bonne demi-douzaine de fuyards trop lents. Diassyon ne voulut pas aller trop loin et se retrouver coincé au milieu des choses-hommes. Aussi fit-il demi-tour à l’approche du pont-levis.

 

La Grande Dent Sémik grommela. Le Skryre avait fait des ravages dans les rangs de leurs opposants. C’était peut-être le meilleur moment pour ordonner à ses Vermines de Choc de passer à l’attaque, mais il s’y refusa. Il n’allait pas prendre le risque de voir ses Skavens Noirs sous les roues du véhicule.

 

-         Vermines de Choc, restez en arrière !

-         Non ! Vermines de Choc, foncez dans le tas !

-         Quoi ?

 

Sémik était furieux.

 

-         Qui se permet de me contredire ?

-         C’est moi, Grande Dent Sémik ! rétorqua la Grande Dent Fermy. Vous êtes sous mes ordres, et vos Vermines de Choc aussi !

 

La Grande Dent de Brissuc, outrée par cette arrogance, se planta devant son homologue de Treecil, prêt à le fracasser.

 

-         De quoi ?! Vous osez…

-         Vous aviez perdu votre pari, Sémik ! Vous devez m’obéir !

-         Je vais vous étriper !

 

Fermy ne se laissa pas intimider.

 

-         Si vous faites ça, Vodaj le fera payer à votre colonie ! Nous sommes plus nombreux, mieux équipés, et mieux organisés ! Et si on l’épargne, votre Prophète Gris s’occupera de vous !

 

Fermy s’adressa à tous les Skavens Noirs.

 

-         Maintenant, Puissants du Rat Cornu, dégageons le chemin-passage pour notre Seigneur de Guerre ! Sémik, mettez-vous devant !

 

Les Skavens Noirs étaient les plus disciplinés de tous les Fils du Rat Cornu. Malgré l’évidente frustration de leur commandant, les Vermines de Choc de Brissuc reconnurent que Fermy avait raison, et obéirent à son ordre. Sémik, en revanche, hurla de fureur. Il se tourna vers les choses-hommes, bien décidé à se défouler sur eux.

 

D’autres choses-hommes passèrent à l’attaque. L’assaut contre les Skavens Noirs fut particulièrement violent. Une dizaine de choses-hommes étaient montées à cheval, filaient à toute vitesse le long du régiment de Fermy et frappaient à tour de bras au passage dans la masse grouillante et couinante des Puissants. Cela redonna du courage aux choses-hommes à pied, et leurs assauts redoublèrent de hargne. Craignant pour sa vie, Sémik balançait sa hallebarde à grands mouvements larges. Heureusement, ses Vermines de Choc tenaient bon malgré les coups. Il distingua le jeune Rool, armé d’une épée à très longue lame, qu’il maniait à deux pattes. Rool enfonça son arme dans le corps musculeux d’un des chevaux, et lui faucha les deux pattes avant en un mouvement. La monture s’écroula avec un hennissement de souffrance, et fut rapidement réduite en bouillie sous les coups, tout comme son cavalier.

 

Un troisième régiment de choses-hommes entra en lice et contourna la masse compacte formée par ceux qui combattaient les Vermines de Choc. Keuton, au dernier rang, ordonna à ses hommes-rats de clopiner vers les nouveaux venus. Soum avait décidé d’utiliser toutes les ressources de son Clan pour l’assaut. Le tiers des cent moines était équipé d’encensoirs. Sous l’injonction de leur chef, les porteurs s’empressèrent de les allumer. La fumée toxique se répandit dans toutes les narines. Rapidement, les Moines de la Peste passèrent d’une somnolence embrumée à une terrible rage meurtrière, y compris ceux à l’arrière.

 

Les choses-hommes furent débordées, surprises de subir un tel déferlement de fureur. Les hommes-rats qui étaient arrivés se montrèrent bien plus coriaces et agressifs que ne laissait présager leur état de décrépitude. Même si les premiers Moines de la Peste se retrouvèrent rapidement mutilés, la perte d’un bras, de la queue ou d’un autre membre ne diminuait en rien leur combativité. Et pourtant…

 

En dernière ligne, Vellux surveillait ses troupes sur son petit char. Il grinça des dents, énervé. Malgré le siège de Jourg du Clan Moulder, il était clair que les choses-hommes de Gottliebschloss avaient eu le temps de reconstituer leurs forces. Les Skavens étaient nombreux, mais malgré leur infériorité numérique, leurs adversaires tenaient bon. Soum siffla entre ses incisives cariées, inquiet.

 

-         Votre immensité au génie stratégique incommensurable ?

-         Quoi ?

-         Tous les Skavens sont prêts à donner leur vie-vie pour vous et le Rat Cornu. Mais… comment le Rat Cornu continuera à favoriser ses enfants de Brissuc s’il n’y a plus ceux qui acceptent de porter son fardeau-fardeau ?

 

Le Prophète Gris se sentit agacé par les paroles du Diacre de la Peste, mais perçut un fond de vérité dans ce raisonnement. Lui-même commençait à trouver le temps long. C’était le moment d’agir, et de faire entendre la voix du Rat Cornu. Il fouilla dans la bourse qui était attachée à sa ceinture, et en retira un petit morceau de malepierre qu’il posa sur sa langue. La roche magique fondit au contact de ses papilles, et des étincelles lui chatouillèrent le palais. Au fur et à mesure que la poussière descendit dans son œsophage, il sentit la puissance de la magie du Warp remonter jusqu’à son cerveau. Ses poils se hérissèrent, et le rythme de son cœur accéléra. Il concentra toute sa rage sur le régiment des choses-hommes qui résistaient aux Vermines de Choc, puis il marmonna quelques syllabes en tendant les bras en avant.

 

Une brume verdâtre se matérialisa au bout des doigts du Skaven Blanc. Elle fila jusque devant le pont-levis, et s’abattit sur les choses-hommes. En un clin d’œil, les volutes de fumée se transformèrent en une nuée de rats furieux. Les choses-hommes se retrouvèrent complètement pris au dépourvu. Certains jetèrent leurs armes par réflexes pour se rouler par terre, retirer à coups de gifles les rats qui les mordaient. Il ne fallut guère plus d’une minute aux Vermines de Choc pour exterminer le régiment principal.

 

Les rats magiques se dissipèrent quelques instants plus tard, mais déjà un autre bataillon de choses-hommes s’engagea sur le pont-levis. Et les arquebusiers continuaient à faire pleuvoir des grêles de plomb sur les Skavens. Quelques Skavens Noirs finirent le museau dans la boue maculée de sang. Les Skavens du Clan Moulder lancèrent leurs créatures. D’autres rats géants affamés se précipitèrent sur les combattants. Comme leurs jambes n’étaient pas protégées, ils furent rapidement estropiés. Les Skavens Noirs, infatigables, continuaient à taillader leurs rangs. Et quand les choses-hommes virent arriver les rats-ogres par les côtés, ils ne purent résister bien longtemps. Les griffes et les crocs des énormes créatures déchiraient armures, cuirs et chairs comme du papier.

 

Diassyon tourna la tête, et vit le char de Vodaj avancer lentement mais sûrement. Cependant, la lenteur du véhicule lui laissait le temps de faire encore un tour du champ de bataille. Justement, une demi-douzaine de choses-hommes à cheval galopait dans sa direction.

 

Ils espèrent me prendre de flanc. Ils ne pensent pas que je peux tourner sur place !

 

Il tira le levier d’accélération. La machine infernale pivota vers les cavaliers. Les éclairs grésillèrent derechef, et s’abattirent sur les choses-hommes. Le jeune Technomage ulula d’enthousiasme quand il vit les éclairs d’énergie de malepierre rebondir d’un cavalier à l’autre, à cause du métal des armures. Tous se retrouvèrent à terre, bégayant, agités de soubresauts nerveux. Certains moururent dans l’instant, le cœur foudroyé, les autres finirent broyés par la Roue Infernale elle-même.

 

Diassyon chercha sa prochaine cible du regard, lorsque soudain, le moteur de la Roue émit une curieuse pétarade, hoqueta, et se tut. La machine s’immobilisa aussitôt. Affolé, le jeune Skaven brun vérifia la chaudière sous tous les angles. Certains tuyaux avaient éclaté, des câbles étaient arrachés.

 

Réparable-réparable, mais ça prendra du temps. Mais comment…?

 

En effet, avant de partir à l’assaut, le moteur était parfaitement fonctionnel, et si quelqu’un était monté sur la Roue Infernale pour le saboter, il l’aurait vu. Des mains invisibles ? Il n’eut pas le temps d’y réfléchir davantage. Les balles des arquebuses sifflèrent à ses oreilles. Diassyon s’enfuit à toute vitesse en laissant derrière lui un nuage invisible d’odeur de panique.

 

Le char géant était maintenant devant le pont-levis. Le Seigneur de Guerre Vodaj du Clan Skryre se frotta les mains, impatient d’en découdre. Soudain, une lueur argentée irisa le char avec un fort tintement. Le véhicule s’emballa, et vibra alors que le bruit de moteur s’amplifia de manière très inquiétante. Le chauffeur jappa :

 

-         Seigneur de Guerre Vodaj tout puissant !

-         Quoi, quoi ?

-         Commandes répondent plus!

-         Alors, éteins !

 

Le petit Skaven allait obéir, lorsqu’une balle en plein front le projeta sur le côté. Il roula sur quelques mètres. Vodaj grogna d’inquiétude, et essaya d’atteindre le frein. Il tira le levier, mais rien ne se produisit. Le grand véhicule à vapeur s’engagea sur la passerelle, et comme il n’y eut rapidement plus rien sous la roue gauche, il s’inclina, et bascula dans le fossé dans un grand fracas.

 

Vodaj avait sauté juste à temps et s’était reçu lourdement sur le bois. Il se releva lentement, et vit la douzaine de choses-hommes devant lui. Tous étaient alignés face à lui, hallebardes pointées dans sa direction. L’un d’eux jacassa quelque chose qu’il ne comprit pas.

 

Vous auriez mieux fait de m’attaquer tout de suite !

 

Le grand Skaven orienta la pointe de sa queue vers le groupe, et poussa une petite manette sur le côté du cylindre métallique qu’il portait dans le dos. Aussitôt, un énorme jet de flammes vertes jaillit du cône attaché à son appendice. Les choses-hommes se retrouvèrent toutes consumées par le feu de malepierre en quelques secondes à peine.

 

Le Seigneur de Guerre esquissa un petit sourire sous ses longues moustaches, alors que ses Vermines de Choc déferlèrent dans la cour. Les Coureurs d’Égout avaient atteint le sommet des murailles, et se jetèrent sur les arquebusiers. Il ne fallut que quelques coups de dague pour faire taire définitivement les jezzails des choses-hommes.

 

 

Vellux avait vu ce qui était arrivé aux deux machines de guerre. En levant les yeux, il distingua sur le toit de la plus haute tour une chose-homme qui portait un masque de fer et une robe, le genre que les choses-hommes pratiquant la magie aimaient porter. La chose-homme tendait les mains vers les Coureurs d’Égout, et des flèches d’argent jaillissaient de ses phalanges pour frapper les Skavens.

 

T’aimes la magie-sorcellerie, hein ? Goûte celle du Rat Cornu !

 

De nouveau, il avala une petite pépite de malepierre. Cette fois, il convertit son pouvoir en un tourbillon d’étincelles vertes qui éclata juste au-dessus du donjon. De nombreux éclairs verts s’abattirent sur le sommet de la tour. Le magicien fut frappé à la tête, et son crâne explosa sous l’impact de la décharge magique.

 

Plus de magicien, plus de chef visible, plus d’endroit où se réfugier, il n’était même plus possible de relever le pont-levis ou rabattre la herse. Les choses-hommes étaient condamnées. Vellux sentit ses commissures dessiner un abominable sourire quand il vit les régiments Skavens pénétrer dans l’enceinte du château. Les piaillements de joie des fils du Rat Cornu se mêlèrent aux lamentations désespérées des choses-hommes.

 

Ce fut un abominable bain de sang. Les choses-hommes se retrouvèrent débordées de toutes parts. Les Coureurs d’Égout du Clan Eshin bondissaient du haut du chemin de ronde pour se laisser tomber sur leurs proies et les massacrer à coups de poignard. Les rats géants s’infiltrèrent à l’intérieur des bâtiments, les rats-ogres enfoncèrent les portes les unes après les autres. Les Guerriers des Clans, les Vermines de Choc et les Moines de la Peste encore en vie s’en donnaient à cœur joie. Tous les guerriers choses-hommes avaient été matés, il ne restait plus que les ouvriers et les petits. Quelques-uns furent rapidement dévorés par les Skavens, mais le Seigneur de Guerre Vodaj ordonna à ses troupes de ne plus tuer. Quelques claques sur la tête des plus déchaînés refroidirent les ardeurs. Et les quelques rares choses-hommes qui parvenaient à échapper aux hommes-rats et franchir le pont-levis étaient immédiatement arrêtés dans leur fuite par les flammes mortelles de malepierre des lances-feux du Clan Skryre qui attendaient en rang devant le château.

 

-         Ô puissant et magnifique élu du Rat Cornu ?

 

C’était le Skaven du Clan Skryre préposé au pilotage de son char à vapeur qui venait de parler. Le Skaven Blanc secoua la tête pour se tirer de sa rêverie. Ils étaient tous les deux seuls, à quelque distance de Gottiebschloss. Même le Diacre de la Peste Soum avait rejoint ses Moines de la Peste, estimant qu’il n’y avait désormais plus rien à craindre.

 

-         Allez, on y va ! Démarre !

 

Le petit char à vapeur pétarada et cahota vers la grande bâtisse.

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