Un nouveau monde

Chapitre 29 : Le sauvetage

4156 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 18/01/2021 13:08

Infiltrer la cité d'Ombreforge ne fût pas une mince affaire.

Surtout que, déterminé à libérer sa fille des griffes de son ennemi juré, le roi Magni avait tenu être de la partie. Ce qui faisait que non seulement l'équipe comptait deux nains guerriers, mais surtout l'un d'eux était un monarque, à la fois très prisé au sein de son royaume et surtout redouté par ses ennemis. Ce qui compromettait la mission pour ce qui est de la partie infiltration.

Néanmoins, Magni avait eu la bonne volonté de laisser la couronne de côté le temps de la mission et de troquer son armure resplendissante contre une tenue dépouillée en chemin sur le cadavre d'un nain Sombrefer, afin de passer incognito.


Le groupe avait du se rendre aux Gorges des Vents Brûlants, une région calcinée au sud du royaume des nains et qui était sur le flanc nord du Mont Rochenoire, et largement dominé par les Sombrefers, des nains à la peau noir comme du charbon. Autant dire qu'ils allaient se trouver en territoire ennemi.

Une fois le groupe sur les lieux, Gahahli fut estomaquée. Jamais elle n'avait vu une région aussi sinistre. C'en était pire que le jour où les démons et les orcs corrompus avaient ravagés sa forêt natale. Surplombé par une montagne noire aux allures de volcan et sous un ciel rougeoyant, la terre était couverte de cendres et de caillasses aussi noirs que du charbon. Pas une once de verdure ou même de point d'eau à l'horizon, juste des bassins de roches en fusion disséminés. Au centre de la région se tenait un large gouffre — ou plutôt un site d'excavation, où s'affairaient les nains Sombrefers autour d'engins en fer à l'allure tout aussi sinistre.

Et dire que cinq minutes plus tôt, elle et son groupe était encore dans la région du Loch Modan, plus au nord, avec ses collines verdoyantes, son lac scintillant qui donnait son nom à la région et son climat doux et tempéré. Maintenant, après le froid de la région enneigée de Dun Morogh en sortant de Forgefer, elle devait à présent surmonter la sécheresse et la chaleur suffocante de cette région calciné.


Arrivé sur les lieux, le groupe fit affaire avec une confrérie de nains Sombrefers dissidents de leur clan d'origine, afin qu'ils leur fournissent les matériel nécessaire à leur plan d'infiltration. À savoir des haillons, des outils, des chaînes et une cage de fer trafiquée où le Sabre-de-Nuit serait enfermé et qui servirait en réalité à cacher les armes des aventuriers sous de la paille en attendant de passer les portes d'Ombreforge. Ainsi que de l'onguent vert à enduire sur Baelbo pour le faire passer pour un gnome lépreux, les deux nains se contentant de couvrir leur peau et leur barbe de cendres et de charbons pour se faire passer pour des Sombrefers.

Le but de l'opération était de faire passer les deux nains (ainsi que Bartélo qui jouait leur assistant) pour des marchands d'esclaves venus offrir à l'empereur Dagran Thaurissan deux esclaves et un animal exotique en guise de cadeau de mariage.

Baelbo grimé en gnome lépreux (pour plus d'authenticité) et Gahahli présentée comme une "elfe sauvage venus de lointaines contrées" devaient tenir le rôle des esclaves. Certes un peu dégradant comme rôles mais le futur d'une princesse était en jeu.

Au moins, ils avaient un rôle à jouer. Tandis que Bartélo, devant à la base jouer l'assistant un peu idiot des deux nains, dût se contenter d'être juste l'assistant quand Batël se rappela que le jeune paladin avait beau servir la Lumière, il n'en était pas une pour autant.

Ce fut en fin de compte le Jakua qui fut le plus réticent à jouer son rôle de bête en cage. En fait, il était réticent à la moindre idée d'être en cage et Gahahli dût hausser le ton pour qu'il daignât à obéir. Un instant que la jeune elfe déplora également, ne supportant pas non plus de voir son fidèle Sabre-de-nuit dans une cage. D'autant que le ton qu'elle avait dû prendre lui rappela amèrement son propre père. Mais encore une fois, ils avaient une princesse à sauver.


Une fois le groupe paré, ils prirent la direction du sinistre Mont Rochenoire et passèrent les larges portes de confection naine bizarrement laissés à l'abandon, pénétrant ainsi dans le cœur de la montagne.

Ils se trouvèrent dans une large puits de lave au centre duquel un rocher qui semblait être le vestige d'une construction naine était suspendu par de solides chaînes liés aux paroi du puits.

Un large escalier creusé dans la roche descendait le long de la paroi jusqu'aux tréfonds de la montagne, menant à la cité d'Ombreforge mais rapprochant également les aventuriers de la lave qui coulait au fond. La chaleur y fut difficilement supportable. Et le Sabre-de-nuit s'agitait impatiemment dans sa cage.

Arrivés au bout des escaliers, ils empruntèrent un tunnel s'enfonçant plus profondément dans le cœur de la montagne, faisant traverser au groupe une carrière et une maçonnerie avant d'enchaîner sur un réseau de galeries plus complexe. Les nains Sombrefers qui occupaient la place remarquèrent la présence des aventuriers qui firent comme si de rien n'était mais aucun ne chargea et ne sonna l'alerte. Ils regardèrent juste le groupe passer d'un œil vigilant.

Le plan semblait fonctionner. Pour l'instant...


Arrivés devant les portes d'Ombreforge (qui ne furent pas sans rappeler celles que le groupe venaient de franchir en entrant dans la montagne), ils se présentèrent aux gardes et déclarèrent détenir un présent pour l'empereur Thaurissan et sa jeune épouse. Les gardes méfiants inspectèrent brièvement la "marchandise", veillant à ce qu'aucun des étrangers n'eut d'armes sur eux, mais restèrent à distance du Sabre-de-nuit qui leur lançait un regard méchant depuis sa cage. Ils s'échangèrent un regard puis finalement concédèrent à escorter le groupe jusqu'à la salle du trône.

Tout semblait aller comme sur des roulettes tandis que le groupe traversait la cité souterraine d'Ombreforge qui n'était pas sans rappeler Forgefer mais avec une chaleur encore plus insoutenable. Pourtant, le cœur de Gahahli battait la chamade au fur et à mesure qu'elle et ses compagnons se rapprochèrent de leur but. Elle redoutait qu'un pépin de dernière minute vînt saboter le plan et tout ficher par terre. Il y avait toujours un pépin dans ce genre de situation. Cela lui arrivait à chaque fois et elle commençait à en avoir l'expérience.

Et dire que c'était en partie grâce à elle que son groupe put échafauder un plan d'infiltration aussi minutieux. Et encore, la jeune elfe avait seulement lancé une suggestion, à ce moment là. Le reste venait du reste du groupe.


Ils arrivèrent finalement à la salle du trône impériale, large et fourmillant de (trop) nombreux soldats et gardes Sombrefers, où ils furent présenté en tant que marchand d'esclaves à leur empereur Thaurissan dont le siège était surélevé.

Celui-ci, à la longue barbe noire tressée, vêtu d'une élégante robe noire et vermillon, coiffé d'un diadème serti d'une pierre rouge sang faisant la la hauteur de son front dégarni, était confortablement installé sur son trône. À ses côtés se tenait impassiblement une naine aux cheveux bruns coiffés en macaron... et qui n'était clairement pas une Sombrefer tant sa peau était claire.

La princesse Moira Barbe-de-Bronze.

Le roi Magni lâcher une exclamation d'effarement à la vue de sa fille siégeant aux côtés de son ennemi. Heureusement, l'exclamation fut suffisamment faible pour que seule Gahahli l'entende.

Bartélo lâcha un léger sifflement d'admiration en voyant la princesse naine, ce qui n'échappa pas non plus aux oreilles de la jeune elfe. Celle-ci exaspérée lui lança un coup de coude dans les reins.

— Aïe ! Mais quoi ? protesta le jeune paladin en prenant soin de parler à voix basse. Elle est sexy !

— Ce n'est ni le lieu ni le moment, je vous rappelle ! lui répondit l'elfe en chuchotant avant de lever les yeux vers Moira.

Elle était vêtue d'une tenue dorée des plus insolites. En réalité, elle était légèrement vêtue. Juste un soutien-gorge et des voiles flottantes attachés à l'avant et à l'arrière de sa ceinture, laissant entrevoir ses hanches et ses cuisses.

Cette tenue laissa même Gahahli perplexe, elle qui avait pourtant l'habitude voir des soldates elfes se promener ne décolleté, le nombril et les cuisses à l'air. Elle avait beau fouiller dans sa mémoire, elle ne se rappelait pas d'avoir croisées de naines aussi légèrement vêtues depuis son arrivée sur le continent. Les quelques naines qu'elle avait croisé durant son passage à Forgefer et même dans tout Khaz Modan jusqu'à la cité d'Ombreforge étaient aussi chaudement vêtus que leur homologues mâles. Quelque chose l'indiquait que ce que portait Moira n'était pas une tenue naine habituelle. Pas même pour une princesse


Le temps que le groupe déposa la cage au centre de la salle, l'empereur Thaurissan, dont on pouvait devenir un sourire satisfait sous sa moustache, toisa les visiteurs du haut de son trône avant de leur adresser d'un ton moqueur :

— Je commençai à croire quand tu allais te pointer, mon cher Magni.

Aussitôt qu'il avait prononcer le nom du roi de Forgefer, tous les gardes présents se tournèrent vers les intrus et brandir leur armes, prêts à passer à l'attaque, tandis que le groupe d'aventuriers se rassemblent autour de la cage, se sentant pris au piège. Et leurs armes étaient sous la paille, à l'intérieur de la cage qui n'était pas encore déverrouillée.

Gahahli pesta intérieurement. Elle savait qu'il y allait avoir un pépin. C'en était à se demander si elle ne portait pas un peu la poisse.

— Franchement j'admire ton courage et détermination, nargua Thaurissan. Et ton ingéniosité, je dois dire. Juste dommage que vous n'ayez pas pensé à la transpiration.

La transpiration ! Pour le coup, ce fut toute l'équipe qui se sentit idiot de ne pas y avoir pensé plus tôt. Avec la chaleur ambiant de la région et du cœur de la montagne, il fallait s'attendre à ce quelques gouttes de sueurs fissent diluer le maquillage des deux nains et du gnome.

— Je crois qu'il est tant de passer à la phase deux, les p'tits gars, chuchota Batël à l'intention de ses compagnons.

— Un instant, Batël ! l'interrompit Magni avant de s'avancer vers Thaurissan, le torse bombé. Je suppose que tu connais déjà la raison de ma présence ici si tu m'attendais, Dagran.

— Pour être honnête avec toi, je m'attendais à ce que tu lances un siège, le nargua à nouveau l'empereur des Sombrefers. T'aurais pas hésité, il y a vingt ans, quand la Horde occupait MA montagne.

— Relâche ma fille, Dagran, et je quitterai ta si précieuse montagne sans faire d'histoire, menaça le roi de Forgefer.

— Pourquoi ne lui demandes-tu pas son avis ? demanda Thaurissan toujours d'un ton aussi narquois. Elle assez grande pour décider de si elle veut rester ou pas. Moira, ma chérie, je crois qu'on te réclame.

Tous les regards se tournèrent vers la princesse qui était restée impassible depuis que le groupe était entré dans la salle, même quand son père fut démasqué. C'était comme si elle n'en avait rien à faire, bizarrement.

Le ton de Magni s'adoucit quand il s'adressa à sa fille.

— Moira, mon cœur...

— Je ne partirai pas, père ! l'interrompit sèchement Moira.

— Ma chérie, je t'en prie, insista son père sans pour autant hausser le ton. Je veux juste te ramener à la maison.

— C'EST ma maison, père, lui répondit toujours aussi sèchement la princesse naine. Je suis chez moi, avec mon mari et je ne partirai pas.

Il fallait s'y attendre malheureusement, sachant que l'esprit de la princesse était sous l'emprise de l'empereur Sombrefer. Et le ton qu'elle employait ainsi que son attitude ne laissait aucune place au doute.

— Tu vois Magni ! nargua Thaurissan. Ta chère fille a fait son choix. Elle reste avec moi.

— Ce n'est pas du jeu, Dagran, vociféra Magni. Tu l'as ensorcelé.

— T'as jamais été un bon perdant, Magni, lui rétorqua Thaurissan. Cela dit, si pour toi l'amour c'est de l'ensorcellement, alors oui, je l'ai bien ensorcelé.

— Alors je ferais ce qu'il faut pour la désensorceler, dit le roi de Forgefer d'un ton en reculant vers les aventuriers, leur faisant signe de se tenir prêt. Quoi qu'il m'en coûte.

— J'aurais préféré ne pas en arriver là, répondit Thaurissan d'un ton faussement désolé en se levant de son siège et brandissant son marteau. Tu sais ? Pour ta chère fille. Mais comme tu refuses d'accepter qu'elle m'aime...

Il claqua de ses doigts et aussitôt, ses gardes avancèrent d'un pas menaçant vers le groupe d'aventuriers encerclé.

Gahahli concentra un instant son regard sur la princesse Moira qui ne bougeait toujours pas d'un poil et gardait son air froid et impassible. Le sortilège qui contrôlait son esprit devait être puissant pour qu'elle n'ait aucune réaction quant au fait que son "mari" envoyer ses laquais contre son propre père.

— Si t'es prêt à risquer ta vie pour ta fille, sache que je suis prêt à tout pour défendre la femme que j'aime, dit l'empereur Sombrefer avec cette fois un ton acerbe.


Sur un signe de Magni, le groupe (excepté Baelbo qui s'était hissé sur la cage durant la discussion) se baissa autour de la cage et s'affaira de défaire loquets qui retenait le Sabre-de-nuit à l'intérieur, pendant que le gnome envoya une vague de flammes sur les ennemis aux alentours, les cramant de douleurs au passage.

— Hé ! Dites donc je m'améliore ! s'exclama Baelbo.

Une fois la cage déverrouiller, Gahahli se chargea de libérer son Sabre-de-nuit qui mourrait d'impatience et l'envoya sur les Sombrefers encore debout tandis que le reste du groupe s'affairait à récupérer leur armes sous la paille, sur laquelle se tenait le tigre à l'instant.

Les bruits de combats et les cris résonnèrent dans toute la salle, tant l'affrontement battait son plein. Comme à l'accoutumé, Batël et Bartélo, prêtant main forte au roi Magni armés de ses deux marteaux, fendirent les airs de leur hache et leur marteau respectifs sur leurs adversaires, pendant que Gahahli et Baelbo couvrirent leurs arrières des flèches de l'elfe et de la magie du gnome. Le paladin criait "La Lumière vous consumera tous !", le nain unijambiste hurlait "Pour Khaz Modan !" et le roi de Forgefer gueulait "Craignez la fureur de la montagne !". Très vite, du sang de nains Sombrefers couvrit le sol marbré de la salle du trône.

Le groupe dût redoubler d'efforts quand d'autres soldats rappliquèrent de l'extérieur quand Thaurissan, furieux de voir plus de la moitié de ses hommes à terre ou mis en déroute par de minables aventuriers, bondit de son siège et chargea Magni, brandissant son marteau en gueulant :

— Je vais vous réduire en petits morceaux, toi et tes larbins, "beau-papa" !

S'enchaîna un duel un mort durant de longues minutes entre les deux dirigeants nains ennemis. Tous retinrent leur souffle quant à l'issue du combat, y compris les Sombrefers.

Gahahli risqua un regard sur la princesse Moira qui n'avait toujours pas bougé de son siège mais avait enfin changé d'expression. Elle se montra cette fois moins impassible que précédemment et semblait anxieuse. La jeune elfe ne sût dire cependant si elle s'inquiétait pour son mari, son père ou les deux.

Au terme du combat, Thaurissan prend finalement le dessus en renversant Magni d'un revers de son marteau. Semblant soudain sûr de son coup, l'empereur des Sombrefer maintint le roi de Forgefer au sol de son pied . Un sourire sadique se dessinait sour sa moustache.

— Maintenant, "beau papa", prépare toi à rencontrer ton destin ! clama-t-il d'un air dément en brandissant son marteau, prêt à fracasser le crâne de son adversaire. Aux mains du plus puissant serviteur de Ragnaro..."

Il n'eut ni le temps de terminer sa phrase ni de donner le coup de grâce quand Batël, probablement poussé par du patriotisme ou simplement une volonté de protéger son roi et ancien frère d'arme, débarqua au galop sur sa jambe artificiel et profita du fait que Thaurissan brandissant son arme au dessus de sa tête pour lui asséner un coup de hache dans l'abdomen.


Thaurissan vacilla et fit tomber son marteau avant de s'effondrer lourdement au sol, les mains serrant son ventre ensanglanté. La princesse Moira, soudain dans tous ses états, se précipita vers son "mari" agonisant, tandis que le reste du groupe aida Magni, encore hébété par ce qui venait de se passer, à se relever. Même les Sombrefers furent pétrifiés de stupéfaction en voyant leur empereur tomber.

— Mon époux ! s'écria Moira d'une voix tremblante en tenant dans ses bras Thaurissan qui se mit à tousser du sang. Qu'est-ce qu'il vous ont fait ? (Elle se tourna vers les aventuriers, les yeux emplis de rage) QUE LUI AVEZ VOUS FAIT, MONSTRES !

— M-mais enfin, il était sur le point de tuer votre père ! se défendit Batël. D'accord que je viens de briser un code d'honneur mais...

— JE M'EN MOQUE ! vociféra de plus belle la princesse naine en larmes. Dagran était un grand et honorable nain. Et il m'a toujours traité avec le respect, l'amour et l'attention qui m'est dû, depuis que je suis ! Vous avez tout gâché !

L'attitude de Moira laissa les aventuriers incrédule, se demandant si elle ne souffrirait pas de l'effet restant de l'empereur mourant.

Celui-ci agrippa soudain son "épouse" par l'épouse et lui dit entre deux quintes de toux :

— Prends... soin... de... l'enfant...

Puis il rendit son dernier soupir, son corps paraissant soudain aussi mou qu'une poupée de chiffon dans les bras de Moira. Les Sombrefers aux alentours et encore debout s'agenouillèrent solennellement en hommage à leur empereur.

Magni s'approcha timidement de sa fille en deuil.

— L'enfant ? demanda-t-il incrédule.

— Je suis enceinte, père, lui expliqua d'un ton sans émotion. Et que tu le veuilles ou non, celui qui héritera de ton royaume sera un Sombrefer. Et "grâce" à tes laquais sans cervelles, il viendra au monde orphelin de père.

— Baelbo rassurez-moi, elle est toujours sous l'emprise du sortilège ? demanda Gahahli en proie au doute.

— Ah non non non, lui répondit le gnome. Aussi puissant soit l'ensorceleur ou le sortilège, si l'ensorceleur rend l'âme, son sort s'estompe irrémédiablement. Je crains malheureusement qu'elle n'ait jamais été ensorcelée.

Une fois de plus, la jeune elfe eut la désagréable impression d'avoir tout foirer avec ses compagnons.

— Ma chérie, je suis désolée, tenta de s'excuser Magni. Si j'avais su...

— Assez ! l'interrompit sèchement la princesse. Hors de ma vue ! GARDES ! Renvoyez-moi ses assassins hors de ma cité !

Les gardes obéirent à la princesse qui désormais était leur reine. Les aventuriers craignirent à une nouvelle démonstration — ce qui tombait mal, l'elfe étant à cours de flèche et le gnome à cours de mana — mais Magni, résigné et meurtri, leur fit signe d'obtempérer.

— Et gare à vous, si vous croisez ma route à nouveau ! jura la princesse à l'adresse des aventuriers. Le jour où je reviendrai réclamer le trône de Forgefer pour mon enfant à naître, je vous traquerai et vous ferai payer pour ce que vous avez fait ! Tenez vous-le pour dit !


— Hé, ça aurait pu être pire ! tenta de relativiser Bartélo à la sortie d'Ombreforge. Elle aurait pu nous envoyer aux oubliettes ou *couic* nous exécuter sur place !

Encore une victoire amère pour les aventuriers qui emboitaient le pas d'un roi Magni plus abattu que jamais.

— Même dans la mort, Thaurissan a gagné, maugréa-t-il. Et quand mon heure sera venu, les Sombrefers vont réclamer Forgefer. Moira a raison. Il n'y a rien que je puisse faire contre ça. (Il se tourna vers Batël avec un mine triste) Bien que j'apprécie ton intervention, j'aurais préféré subir le coup de grâce que de devoir subir un tel affront.

— Si ça pouvait lui ouvrir les yeux et lui faire réaliser quelle genre de nain elle a épousé, l'autre gourde ! fulmina Gahahli qui tremblait d'indignation.

Tous la la jaugèrent d'un regard désapprobateur.

— Dame Lili ! objecta le paladin. Vous parlez quand même de la fille du roi ici présent.

— Et qu'est-ce qu'on y peut si elle aime sincèrement son Dagran ? tenta d'intervenir Baelbo. Ce n'est peut-être pas le meilleur choix qu'elle ait pu trouver, mais ça ne se commande pas ce genre chose. Peut-être que vous comprendriez mieux quand ça vous arrive...

— Amoureuse ou pas, elle a parfaitement compris que nous avons fait tout ce chemin pour elle ! insista la jeune elfe qui ne pouvait plus contenir sa colère. Et vous avez vu comment elle était impassible quand son père s'est présenté à elle ? Quand son "mari" a commencé à envoyer ses hommes contre nous ? Quand il fut sur le point de tuer de sang froid son propre père ?

— On était tous là, on sait, lui répondit le gnome en tentant de rester calme.

— Sur le moment je pensais que c'était dû au sortilège, continua l'elfe. Mais NON, il s'avère qu'elle n'a jamais été ensorcelée en premier lieu. Ce qui fait qu'elle n'en a rien à faire qu'on se fasse du soucis pour elle, qu'on se démène et qu'on risque notre vie pour la sauver. Pas même quand ça implique sa propre famille ! Elle serait prête à faire sa vie avec celui qui aura assassiner son père, ça ne l'empêchera pas de dormir pour autant ! Ç-ça me sidère ! Ç-ç-ça me révolte !

— Jeune fille, je vous en prie, calmez-vous ! lui ordonna le roi nain. Je comprends votre indignation mais je vous rappelle que vous parlez de MA fille. Et je dois avouer que depuis la disparition de sa mère, nos relation se sont un peu dégradée avec le t...

— Et alors ? s'indigna Gahahli. Moi aussi j'ai perdue ma mère, figurez-vous ! Et moi aussi j'ai des problèmes avec mon père depuis ! Pourtant je... Je...J-je...

Elle laissa sa phrase en suspens. Elle voulait démontrer qu'elle avait une attitude plus respectable vis-à-vis de son paternel que la princesse Moira et s'en était même persuadée. Mais en son for intérieur, une petite voix vint semer le doute dans son esprit en lui demandant si c'était vraiment le cas. Si elle n'aurait pas eu une conduite aussi exécrable si ce n'était plus que celle de la princesse naine. Et si elle pouvait sincèrement se revendiquer meilleure que Moira sachant qu'elle même ne fût pas un modèle d'obéissance, de respect et de sagesse. Ainsi qu'en se remémorant les circonstances dans lesquelles elle s'était enfuie de chez elle. Ou si elle ne serait pas hypocrite de se clamer en tant que tel.


Son malaise fut finalement sauvé par le gong quand Bartélo, qui était parti devant, les demanda de le rejoindre à la sortie du tunnel.

De retour dans le puits de lave avec l'escalier taillé dans la roche et le rocher suspendu par des chaînes, ils virent un groupe de silhouettes monter l'escalier sans se soucier de la présence des aventuriers en contrebas, leur ombre se reflétant sur les parois rocheuses du puits. Parmi eux se tenaient un orc, un tauren, deux trolls dont un était monté sur un raptor, ainsi qu'un mort-vivant qui semblait ouvrir la marche... et qui rappela étrangement le mort-vivant auquel le groupe s'était frotté quelques jours plus tôt dans le Bois de la Pénombre.

Que diable venaient-ils faire dans un endroit pareil ?

Le groupe suivit silencieusement ces intrus de la Horde du regard et les vit se diriger vers le Pic Rochenoire, la partie de la montagne occupée par les orcs Rochenoires.

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