Un nouveau monde

Chapitre 30 : Tristes retrouvailles

4364 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 27/01/2021 17:58

Quand Fyrvas sortit enfin de son coma, il eut l'impression de sortir d'un cauchemar. Comme si les moments précédant son évanouissement dans la salle du trône de Hurlevent n'étaient qu'un mauvais rêve.

Pourtant, au fur et à mesure qu'il reprenait ses esprits, il comprit que quelque chose n'allait pas. Il était toujours bien en compagnie d'Harrina, ainsi que d'un humain à l'allure bien misérable tant il était maigre et vêtu de haillons, mais ils se trouvaient tous les trois dans une cellule creusée dans la roche, derrière des barreaux de fer qui paraissaient bien solide. Deux l'autre côté des barreaux, dans une salle faiblement éclairée par des torches, deux ogres montait la garde, l'un d'eux lançant un regard narquois aux prisonniers.

— Ça y est ? Elle se réveille enfin, la belle au bois dormant ? lança-t-il méchamment, ce qui fit rire son collègue.

— Qu'est-ce qui se passe ? demanda le druide soudain en alerte quand il prit conscience de sa situation. Où suis-je ? Où sommes nous ?

— Vous êtes à la cité d'Hordemar au Mont Rochenoire, mon mignon, lui répondit le second ogre d'un ton aussi moqueur de son partenaire.

— Où ça ? re-questionna l'elfe incrédule.

— C'est le siège de la Horde Noire et de leurs alliés à écailles du Vol Noir, expliqua d'un ton las l'humain avec lequel l'elfe et la magicienne partageaient la cellule.

— Mais au nom d'Elune, qu'est ce que nous faisons ici ? s'impatienta Fyrvas en se tournant vers la magicienne. Dame Harrina, expliquez-moi ce qui s'est passé ! On était à Hurlevent, dans la salle du trône et ensuite... ?

Le druide s'aperçut finalement que quelque chose avait changé chez sa partenaire en voyant cette dernière le fuir du regard. Elle qui d'habitude semblait confidente, sûre d'elle même, elle paraissait soudain abattue et honteuse.

— Je... Je suis désolée, murmura-t-elle. Sincèrement désolée.

— Votre amie m'a tout raconté quand vous étiez encore dans les vapes, intervint l'humain. À ce qu'il paraît, vous enquêtiez sur la disparition de... vous-savez-qui, et vous avez cru bon d'en informer les plus hautes autorités. Manque de pot, vous êtes tombés sur le cerveau du complot.

— Qui ça ?

— Dame Katrana Prestor, expliqua Harrina. La dame en pourpre qui nous a reçu à la salle du trône. D'après Windsor, ici présent, ce serait elle qui a commandité l'enlèvement de Varian.

— Je savais qu'elle n'était pas nette, cette mijaurée, reprit le dénommé Windsor. Qu'elle manigançait quelque chose. Qu'elle était en train de détruire Hurlevent de l'intérieur. Et ce depuis qu'elle a fait pression sur les nobles pour refuser la paie aux maçons après la reconstruction de Hurlevent, ce qui a amené aux émeutes, à la mort de la reine Tiffin et la création de la Confrérie Défias. Et après ce que j'ai appris sur cette traînée durant ma captivité, je ne serais pas surpris d'apprendre que la mort de notre bien-aimée reine ne fut pas si accidentelle que ça. Ou alors, c'est qu'elle a le cul bordé de nouilles.

Les paroles de l'humain laissa Fyrvas perplexe, n'y comprenait goutte.

— Le Maréchal Windsor m'a expliqué qu'il nourrissait des soupçons sur Dame Prestor ces derniers temps, expliqua tristement Harrina. Il s'était rendu au Mont Rochenoire prétendant surveiller les actions de la Horde Noire.

— En réalité, c'était pour enquêter et trouver des preuves de la trahison de cette catin de Prestor, reprit Windsor. Parce qu'au vu de ses prises de positions discutables, je me doutais qu'elle serait de connivence de avec l'ennemi, que ce soit les Défias ou la Horde Noire. Vous ne pouvez pas mettre autant d'efforts pour empêcher toute action contre des menaces aussi réelles à moins d'être de leurs côtés. Mais comme l'affaire des Défias était déjà sous la responsabilité d'un ancien frère d'arme, je dû me tourner vers la Horde Noire. Et il a fallu que je me fasse capturer par des orcs, des trolls et des ogres décérébrés pour que je découvre toute la vérité.

— Hé ! Qui c'est que tu traites de "dessert-et-braie", minables ? s'insurgea un des ogres de l'autre côté de la grille.

— Vous êtes peut-être compétents pour garder vos prisonniers, leur lança Windsor d'un ton méprisant. Mais pour ce qui est de tenir votre langue et de garder un secret, tout est à revoir.

— Et après ? lança à son tour le second ogre. Comment est-ce que tu vas informer "Hurle-le-vent" de ce que tu sais depuis ta cellule ? Par pigeon voyageur ?

— En lançant une bouteille à la mer ? ajouta le premier ogre avant de rire aux éclats avec son camarade.


Fyrvas eut encore du mal à comprendre toute cette histoire de conseillère corrompue et de connivence avec des bandits ou des orcs noirs. Mais il y avait une chose qu'il l'avait percuté.

Sa fille était quelque part dans le royaume de Hurlevent.

Le prince avec qui il avait discuté l'autre soir lui en avait fait la confirmation.

Et le druide venait d'apprendre que ce royaume était sous la coupe d'une femme machiavélique qui, pour des raisons qui lui restait inconnues, œuvrait dans l'ombre pour mener ledit royaume à sa perte en collaborant avec des bandits sans foi ni loi et une Horde d'orcs probablement plus puissante et impitoyable que celle qui s'était installé en Kalimdor cinq ans plus tôt.

Et qui sait qui d'autre étaient impliqué dans ce complot au sein même du royaume.

En clair, Gahahli courrait un grave danger.

Mais manque de bol, le voilà emprisonné il-ne-savait-où sous terre, derrière des barreaux, gardé par des ogres.

Qu'à cela ne tienne, Fyrvas ne comptait pas se laisser abattre. Il fallait à tout prix qu'il sorte de ce trou, la vie de sa fille en dépendait.

Il tenta de forcer les barreaux de sa prison mais se rendit vite compte à quel point ils étaient solides.

— Hé, le violet, n't'fatigues pas ! l'interpella un des deux ogres en donnant coup violent sur les barreaux. Cette cage est assez solide pour tenir enfermer un dragon !

— Et puis garde tes forces ! intervint le second. Tu pourrais en avoir besoin. Toi et tes compagnons de cellule allaient en avoir pour un petit moment. Genre, jusqu'à la fin de vos jours.

Les deux ogres éclatèrent à nouveau de leur rire le plus gras. Mais le druide n'en démordit pas.

Il se concentra pour prendre sa forme d'ours, espérant avoir assez de force pour ne serait-ce que tordre un des barreaux de cette manière.

Mais il eût beau se concentrer, songer à sa fille qui serait en danger de mort ou à l'envie d'étriper ses geôliers dont il supportait de moins en moins les rires gutturaux, rien ne se produisit. Pas une once de transformation, pas de muscles qui doublaient de volume, pas de fourrure qui poussait, pas de museau qui s'allongeait, pas d'ongles qui s'épaississait pour former des griffes. Il tenta de se changer en panthère, sachant que ce serait insuffisant pour le sortir de sa prison, mais pareil, aucun effet. C'était comme si tout son pouvoir druidique lui avait été retiré pendant qu'il était dans le coma.

Il se tourna nerveusement vers Harrina qui restait dans son coin et s'impatienta :

— Faites quelque choses, par les bois de Cénarius ! Utilisez donc votre satanée magie ! Faites explosez cette grille ! Gelez ces ogres ! Téléportez-nous hors de cette prison ! Il faut que je retrouve...

— Elle a essayé, mon gars, pendant que vous étiez inconscient, l'interrompit Windsor. Elle a tout essayé. Seulement... (il claqua des doigts) c'est une cellule anti-magie ! Ces salauds avaient vraiment pensé à tout !

Cela expliquait donc pourquoi le druide n'arrivait pas à prendre la forme de quelconque animal, même en se concentrant à fond. C'était la cellule qui l'en empêchait. Il s'en voulut aussitôt d'avoir crié après la magicienne.

— Et même si vous arrivez à sortir de cette cage et à nous éliminez, il vous faudra sortir de cette cité souterraine, intervint un des deux ogres. Et sachez que c'est un véritable labyrinthe. Même nous qui occupons les lieux depuis un certain temps, il nous arrive de nous perdre.

— Et c'est sans parler de nos compatriotes ainsi que nos camarades orcs, trolls des forêts et draconides qui occupent également les lieux, ajouta le second. Tous armés jusqu'aux dents. Et nous sommes légion.

Fyrvas n'eut pas le temps de réagir aux remarques de ses geôliers qu'il vit Harrina sangloter. Cette vision le laissa stupéfait en plus de le mettre mal à l'aise lui qui avait assumé la magicienne comme étant une femme forte et plein d'assurance, nullement le genre à fondre en larme quand quelque chose la contrarie. Pire encore, cela lui rappela douloureusement l'état dans laquelle il avait retrouvé sa fille après que les démons eussent rasé leur village.

Il tenta de la rassurer, sans vraiment savoir quoi dire, se contentant de parler doucement :

— Je... Je n'aurais pas dû... Je regrette de vous avoir crié dessus...

— Ne vous excusez pas, l'interrompit la magicienne entre deux sanglots. C'est moi qui désolée... Je vous avez promis que je vous aiderai dans votre quête... J'aurais tellement voulu vous aider, mais... J'ai tout fait foiré...

Il était vrai que leur mission ne fut pas une grande réussite, mais le druide ne se sentit pas de taille à monter sur ses grands chevaux, comme il avait tendance à le faire chaque fois que tout partait en vrille. Il se contenta de prendre la magicienne sanglotante dans ses bras musclés, laissant cette dernière pleurer sur son épaule. En un sens, il partageait sa peine. Lui même, suite à la disparition de sa défunte épouse, il s'était fait la promesse de veiller sur la seule famille qui lui restait, à ce que rien ne lui arrivait. Une promesse qu'il avait faite sans avoir la garantie qu'il pourrait la tenir jusqu'au bout.


Plusieurs heures passèrent, les prisonniers se laissant envahir par le désespoir, quand des cris de batailles et d'attroupement résonnèrent dans toute la cité, brisant le silence de mort qui régnait dans la salle des cachots.

Il y avait du grabuge, cela ne faisait aucun doute. Et au vue de l'intensité que ça prenait, ça paraissait sérieux. Ça se rapprochait même.

Même les ogres, jusque là décontractés dans leur poste de geôliers, commencèrent à perdre leur sang froid.

— Qu'est ce que ce qui se passe ? demanda l'un deux.

— J'sais pas, va voir ! répondit l'autre.

— Mais pourquoi ce serait moi qui doit allait voir ? redemanda le premier.

— Ben parce que c'est toi qui a posé la question le premier, banane ! lui rétorqua le second.

— Mais c'est pas juste ! s'indigna le premier. Même quand c'est toi qui demande ce qui se passe, c'est moi qui doit aller voir !

— Qu'est-ce que t'as ? s'impatienta le second. T'as peur ?

— Quoi ? Mais non ! s'offusqua le premier. Un ogre qui se respecte ne connaît pas la peur !

— Ouais, c'est ça ! T'as les jetons ! le nargua le second. C'est pour ça que tu ne veux pas aller voir !

— Et toi alors ? lui rétorqua le premier. Pourquoi tu ne vas pas voir, toi, hein ? C'est qui, qui a les jetons !

— Hé ho ! intervint soudain une troisième qui fut étrangement familière aux oreilles de Fyrvas. Si on vous dérange, vous le dites !

Les ogres eurent à peine le temps de réagir à la provocation que l'un d'eux se prit un coup de hache dans le bide tandis qu'une lance transperça le crâne du second. Les deux geôliers vidés de leurs sang s'écroulèrent de tout leur longs, au pied d'un orc vert de peau ainsi que d'un troll bleu de peau et accompagné d'un raptor qui renifla les cadavres d'un air gourmand. Ceux là n'était clairement pas de la région.

— T'étais obligé de leur informer de ta présence avant de les attaquer ? demanda le troll.

— Je préfère quand mes ennemis me prête attention que je puisse voir leur regard quand je leur assène le coup fatal, lui répondit l'orc d'un air trahissant l'autosuffisance.

Il furent rapidement rejoint par un tauren et un second troll en tenue de sorcier qui vinrent inspecter les lieux.

— Je crois que nous sommes dans les cachots, commenta l'orc. Et ça m'a tout l'air d'être un cul-de-sac.

— Voyons ce qu'il y a dans les cellules, suggéra le sorcier troll. Dès fois qu'il y aurait un compatriote à libérer ou un cadavre à dépouiller.

— Je crois que celle-ci est la seule qui soit occupé, fit remarquer le troll au raptor en désignant celle où était confiné les prisonniers.

Ce fut au moment où les nouveaux arrivants s'approchèrent de la cellule et croisèrent le regard de Fyrvas que celui-ci les reconnût aussitôt. C'étaient les même maraudeurs de la Horde avec lesquels il eut une altercation dans le marécage.

— Tiens ! Comme on se retrouve ! s'exclama l'orc qui lui semblait avoir reconnu druide.

— Qu'est-ce que vous fichez ici ? leur demanda Fyrvas dont le sang n'avait qu'un tour.

— Je te retourne la question et sache que ce n'est pas tes oignons, lui rétorqua méchamment l'orc. En tout cas estime-toi heureux que tu sois protégé par ses barreaux, autrement je t'aurais déjà réglé ton compte.

"Et moi donc ?" songea amèrement le druide.


— Dites donc, les gars ! intervint une autre voix provenant de derrière le groupe de la Horde. Je vous rappelle que nous venons d'échouer en matière de diplomatie et de discrétion, qu'à l'heure actuelle, l'alerte a été lancé et toute la Horde est nos trousses. Donc ce n'est pas le moment de bayer aux corneilles.

— Excuse-nous, le macchabée, mais on vient de tomber sur de vieilles connaissances ! rétorqua le troll à la lance à l'intention du nouvel arrivant.

Un individu encapuchonné se détacha alors du groupe, avança d'un pas titubant vers la cellule en s'appuyant sur un bâton d'aspect sinistre. Un diablotin nimbé de flammes vertes ainsi qu'un gangrechien le suivaient à la trace. En avançant dans la lumière, Fyrvas constata avec effarement que l'individu empestait la mort, que ses mains ainsi que la visible de son visage dissimulé sous sa capuche étaient putréfiés. Il avait donc affaire à un mort-vivant. Un mort-vivant associé à la Horde. Comme si la présence d'une telle horreur ne suffisait pas à emplir l'elfe de dégoût. Son cauchemar ne faisait que commencé, décidément.

— Ça alors ! s'exclama le mort-vivant en inspectant la cellule d'un regard mauvais. Un elfe de la nuit ! C'est le deuxième que je rencontre en l'espace d'une semaine...

"Le deuxième qu'il rencontrait" se répéta Fyrvas. Pourvu qu'il ne faisait pas allusion à Gahahli. Il n'osait imaginer ce qui se serait passé si ça avait été le cas.

— Et vous, Maréchal Reginald Windsor ! reprit le mort-vivant en se tournant vers l'homme en question. Je ne vous ai presque pas reconnu ! Qu'est-ce que vous avez mauvaise mine, mazette !

— Parlez pour vous ! lui rétorqua Windsor en marmonnant dans sa barbe. Moi au moins, j'ai toujours de la peau sur les os.

— Et qui est donc cette charmante jeune f... ?

Le visage du mort-vivant se figea de stupeur lorsqu'il croisa le regard d'Harrina, comme s'il venait de voir un fantôme. La jeune magicienne qui semblait tout aussi abasourdi avança d'un pas prudent vers les barreaux de la prison qui la séparait du mort-vivant. Fyrvas vit avec dégoût le bras de ce dernier se tendre lentement vers la jeune humaine à travers les barreaux. Il fut tenté de réagir mais la magicienne, sans quitter le mort-vivant du regard, posa une main rassurante sur l'épaule du druide, l'incitant à rester calme. Elle se trouva à portée des doigts putrides du mort-vivant.

— H-Ha... H-Harrina... c'est bien toi ? balbutia-t-il en tâtant la magicienne de ses doigts.

— C'est bien moi... père ! répondit Harrina les yeux larmoyant.


"Père ?" Fyrvas laissa échapper un cri de stupéfaction en réalisant qu'elle faisait équipe avec une humaine qui avait un mort-vivant pour père et manqua de se mettre un doigt au fond de la gorge en voyant celui-ci poser délicatement sa main osseuse et putréfiée sur la joue d'Harrina.

Même les compagnons d'armes du mort-vivant semblaient médusés, ne sachant comment réagir devant cette scène sortie de nulle part.

Un air mélancolique se dessina sur le visage squelettique du mort-vivant tandis qu'il contemplait sa fille du regard.

— A-alors, c'est vrai ? balbutia le mort-vivant. Tu es bel et bien vivante.

— Oui, père, c'est vrai ! lui répondit Harrina.

— Vivante. Et toute fraiche, bredouilla le mort-vivant. En parfaite santé.

— Oh père, j'aurais tant aimé que ce soit le cas pour vous, lui confia la magicienne les larmes aux yeux. Pour notre famille.

— Alors t'as pu échapper à la chute de Lordaeron ? lui demanda le mort-vivant. Et de Dalaran ?

— Oui père, lui répondit Harrina désolée. Et si vous saviez comme je regrette que vous n'ayez pas eu autant de chance que moi...

— Comme c'est touchant ! dit le mort-vivant tandis que son expression se changea progressivement en un air plus froid.

De même que sa main passa de la joue de sa fille à son cou et qu'il se mit soudain à serrer, à la grande surprise de tout le monde.

— T'as osé t'enfuir et abandonné les tiens quand le Fléau est venu ravager nos terres et nous changer en zombies ? dit le mort-vivant dont le visage était désormais tordu par de la haine. Après tout-ce que j'ai fait pour toi ? Sale petite ingrate !

— Mais qu'est-ce que vous faites ? s'indigna Fyrvas ne sachant quoi faire. Lâchez la !

— Hé, qu'est-ce qui te prend, mec ? tenta d'intervenir le troll à la lance.

— Il va la tuer ! s'exclama le tauren horrifié.

— Silence, vous tous ! s'écria le mort-vivant à l'intention du reste de l'assemblée. Ce ne sont pas vos affaires !

— P-Père, je vous jure... Je ne voulais pas... vous abandonner, tenta de se justifier Harrina qui suffoquait sous la pression des doigts de son paternel cadavérique. Je voulais vous... emmener avec moi... mais Lordaeron... en train de tomber... Et maître Antonidas... voulait pas risquer nos...

— Épargne-moi tes excuses, gamine ! lui rétorqua sèchement le mort-vivant. Que tu ne puisses rien faire pour sauver les tiens passe encore. Que tu jouisses encore de la vie après ça, ça me répugne...

Horrifié par l'attitude du mort-vivant, Fyrvas se laissa son instinct prendre le dessus et frappa le bras du mort-vivant d'un coup sec pour l'obliger à lâcher sa prise. Il y eut un horrible crac et Harrina, libérée de l'emprise de son père, tomba sur ses genoux, reprenant tant bien que mal son souffle. Le mort-vivant quant à lui s'en sorti avec le bras disloquer qu'il contempla d'un air las.

— Comment as tu osé t'interposer, elfe ? fulmina le mort-vivant tandis qu'il remettait tant bien que mal son bras en place, sous le regard dégouté des ses compagnons d'armes.

— Et vous comment osez-vous traiter votre propre fille de la sorte ? s'indigna à son tour le druide tandis qu'il aida la jeune magicienne à se relever.

— Depuis sa naissance, j'ai veillé à ce qu'elle ne manque de rien, se justifia le mort-vivant quand il finit par remettre son bras en place. Je lui ai tout donné ! Tout ! J'ai fait la Seconde Guerre en pensant à elle ! Et comment est-ce qu'elle me remercie ? En nous abandonnant, moi et toute sa famille à notre sort ! En jouissant égoïstement de la vie pendant que les siens sont condamnés à une condition comme la mienne !

— Sa reste votre fille ! insista Fyrvas tout en couvrant Harrina de ses bras. La chair de votre chair, que je sache ! Vous devriez être au moins heureux qu'elle soit encore vie et en bonne santé ! Au lieu de la blâmer pour ne pas être... comme vous !

— Personne ne t'as demandé ton avis ! s'impatienta le mort-vivant tandis qu'il tendit une main aux doigts crochu vers le druide et sa protégée qui se recroquevillèrent instinctivement.

Un éclair violet sortit de sa paume mais n'alla pas plus loin que les barreaux de la cellule, comme si un mur invisible l'en empêchait.

— Une cellule anti-magique ! marmonna-t-il lorsqu'il finit par lâcher prise. Voilà qui est intéressant !

— Finalement, il n'y a pas que du mauvais dans ce système de magie, commenta Windsor désabusé.


De nouveaux bruits d'attroupement résonnèrent dans toute la cité, alertant toute l'assemblée.

— Je crois que c'est la garde qui rapplique ! dit le tauren. On devrait peut-être se bouger, non ?

— Je vais me faire un plaisir de les accueillir ! rétorqua l'orc en brandissant sa hache en sortant de la pièce, prêt à repasser à l'action.

Le tauren et le sorcier troll lui emboitèrent le pas, tandis que le mort-vivant lança un nouveau regard noir vers les prisonniers.

— On n'en a pas encore terminé, tenez-vous le pour dit ! leur dit-il d'un ton menaçant. En particulier toi, l'elfe ! Un jour, nos chemins se croiseront à nouveau. Et tu vas regretter de t'être mêler de mes affaires !

— Je ne te le souhaite pas, sale démon, lui rétorqua sèchement Fyrvas tout en maintenant Harrina fermement dans ses bras.

Dès lors que le mort-vivant fut sortit de leur champ de vision, la magicienne se blotti davantage dans les bras de son protecteur et leva vers lui ses yeux encore emplie de larmes.

— Vous n'étiez pas obligé de faire ça, mais merci quand même ! lui dit-elle d'une voix faible.

Il fallait bien qu'il intervienne, se dit le druide. La manière dont le mort-vivant considérait sa fille l'avait révolté au plus haut point. Et il le pensait en tant que père. Même s'il s'était montré particulièrement dur avec Gahahli ces dernières années, jamais il ne l'aurait traité de la sorte et jamais il ne le ferait. Du moins, il le pensait...

— Psst !

Ce son arracha Fyrvas de ses pensées.

C'était le troll à la lance qui était resté dans la salle avec son raptor qui leur lança quelque chose à travers les barreaux de la cellule. Quelque chose de cliquetant. Comme des petits bouts de métaux.

C'étaient des clés. Les clés de la prison.

— Si on vous le demande, je ne vous ai jamais aidé ! leur chuchota le troll avant de tourner les talons pour rejoindre ses compagnons. Vous les avez trouvé vous-même et vous êtes sortis tout seuls !

— Attendez ! tenta de l'interpeller Harrina. Pourquoi vous nous aidez ?

Le troll marqua une pause à l'entrée de la salle avant de finalement répondre :

— Ne cherchez pas à comprendre ! Quittez juste les lieux tant que vous le pouvez ! (il se tourna vers son raptor) Allez, Éventreuse ! Tu mangeras plus tard !

Le reptile emboita le pas de son maître avec un bras arraché d'ogre dans la gueule.

Curieux, ce troll ! songea Fyrvas. Il ne semblait pas s'être gêné dans les marécages à lancer à filet sur un elfe de la nuit comme un vulgaire gibier. Mais le laisser croupir dans une prison lugubre, ça n'avait pas l'air de le satisfaire plus que ça. Fussent-ils ennemis.

À moins que ce ne soit par compassion pour la fille du mort-vivant qu'il devait se coltiner comme compagnon d'arme. Le druide se souvint que le troll à la lance était de ceux qui était horrifiés par l'attitude du mort-vivant, là où les autres étaient simplement surpris.


Harrina ramassa les clés en s'en servit pour ouvrir la cellule.

Ils étaient libres. ... Du moins, ils l'espéraient.

Dans tous les cas, ils ne comptaient pas s'éterniser dans cette endroit aussi lugubre.

Après tout, Fyrvas avait sa fille à retrouver. Et Harrina devait dénoncer Prestor.

Accompagnés de Windsor qu'ils durent porter à cause de ses jambres trop faibles et engourdis (en raison de son séjour prolongé en prison) pour le permettre de marcher tout seul, ils arpentèrent prudemment les couloirs sombres de la cité souterraine, enjambant tant bien que mal les cadavres d'orcs noirs et de draconides qui jonchaient le sol et veillant à ne pas tomber de nouveau sur les maraudeurs de la Horde. Ceux-là leur avait déjà donné du fil à retordre à Fyrvas et Harrina quand ils étaient dans le marécage, et il n'y avait pas encore le mort-vivant et ses démons. Et si à eux seuls, il pouvaient venir à bout d'une légion d'orcs, d'ogres et de créatures draconique, qu'en serait-il s'ils tenaient à leur merci un druide et une magicienne venant tout juste de récupérer leur pouvoir, ainsi que d'un officier déchu pouvant à peine tenir sur ses jambes.

Ils arpentèrent un couloir qui semblait déboucher sur une grande salle d'où ils entendirent des voix suspectes. Par chance, ce n'étaient pas celles des maraudeurs de la Horde.

"La vache ! Ils n'y sont pas allés de mains morte !" entendait-on s'exclamer.

"Tu l'as dit ! Ceux-là, ce ne sont pas des amateurs ! C'est moi qui vous le dit !" répondit-on.

"Ils les ont tous massacrés ? À eux cinq ?"

"Six ! Ils avaient un raptor, je vous rappelle."

"Vous oubliez le démoniste ! Il a dû faire appel à ses démons pour leur faciliter la tâche."

Le cœur de Fyrvas fit un bond dans sa poitrine quand il entendit la dernière voix qui venait de parler. Cette voix-là, il la reconnaissait entre milles.

Abandonnant Harrina avec Windsor, il se précipita vers le bout du couloir, son cœur battant la chamade.

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