Les Chasseurs de l'Ombre

Chapitre 1 : Traquenard en forêt

1450 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 09/06/2015 11:37

Bois de la Pénombre,

Le brouillard qui se dégage continuellement de cette forêt est à la fois un atout et un déséquilibre. Camouflant les odeurs et les bruits, il obstrue aussi la vision… sauf si on est entrainé. Les animaux s'en servent aisément, pour se cacher ou pour chasser.

Au pied d’un arbre centenaire, dissimulé par divers buissons, un gros loup noir était assis, majestueux et serein. Il releva la truffe, humant l’air humide du matin… Rien à signaler. Il renifla, fixant sa maitresse. Accroupie à la hauteur de son animal, on n’entendait que quelques bruits de cuirs s’entrechoquant avec un crissement de bois. Il aimait l'odeur du cuir. 

Le regard et la chevelure aussi sombres que le loup, ils étaient tous deux parfaits pour cet environnement.

Elle se retourna vers lui et lui montra son arc silencieusement, tout juste terminé. Le loup lui répondit d'un simple soupir, expulsant d'une traite seche l'air de sa truffe. Elle haussa les épaules et replia les restes de cuir. elle ramassa sa dague, la fit tourner dans ses mains avant de la ranger dans sa botte droite montante.

La jeune humaine banda son arc et visa vers le brouillard, sans tirer. Le loup dressa les oreilles, piétinant ses pattes avant dans l’herbe humide, d’impatience.Elle tourna lentement la tête vers son animal et le fixa, il comprit… pas encore.

Un ours de bonne taille apparut non loin des deux chasseurs, l’épaisseur du brouillard l’empêcha de les repérer. Pendant un moment, il douta toutefois, s’arrêtant, observant les alentours, mais c’est vers le sentier qu’il s’éternisait. D’un pas lent et lourd, la bête fit demi-tour et s’enfonça plus avant dans la forêt, passant son chemin.

Le Loup noir huma l’air à nouveau, cette fois, il émit un léger grognement.

- Oui, il arrive… Comme prévu. Chuchota la jeune femme en souriant.

Le loup se stoppa, mit ses oreilles en arrière et attendit.

Quelques minutes plus tard, on commençait à entendre distinctement des sifflements, une petite chanson provenant du sentier.

La brune se plaça, mit un genou à terre. Elle ignorait l’effet froid du sol, au contraire, elle en puisait sa force. Vérifiant une dernière fois son arc, pointé vers le sol, elle se tourna ensuite vers le loup, par un simple hochement de tête, il se leva furtivement et se faufila entre les buissons.

L’humaine fit bouger ses épaules et son cou, tout en fixant la silhouette de l’homme qui sifflotait sur le sentier. Elle inspira profondément et banda son arc dans un léger grincement entre la corde en boyau de sanglier, le cuir préparé par ses soins et le bois de frêne si souple et solide à la fois. Ces matériaux travaillant ensemble faisaient merveille.

Le regard grave, elle attendait, concentrée. A force de fixer sa cible, le brouillard semblait se dissiper. Il fallait calculer la distance, le placement de la cible et la vitesse à donner à la flèche. Elle visa divers endroits, se jouant parfois à quelques millimètres… il ne fallait pas le louper, il n'y aurait pas de deuxième chance.

L’homme portait un sac et surtout un fusil. Il marchait à côté de son cheval, même plutôt une jument type Alezane sans aucun doute. Elle était chargée de sacs plus lourds qu’elle : des peaux, des animaux entiers venus du sud notamment un tigre avec une fourrure magnifique.

Rageante, la jeune femme visa l'homme encore plus déterminée.

La jument sentit quelque chose, elle s’arrêta et tenta de reculer.

- Hey !! Qu’est-ce que tu fais voyons ? Tu as vraiment peur d’un rien toi. Fit l’homme agacé en tapotant la jument sur le dos.

Le loup noir sortit de sa cachette et se rua devant l’homme et la jument. Les poils hérissés, la queue levée et les oreilles en retrait… signe imminent d’une attaque. Il grogna et montra les crocs.

L’homme surpris, retint comme il put sa jument qui prise de panique, se cabra.

Le loup aboya faisant mine de s’approcher, se tenant prêt à bondir.

- Ah tu veux jouer à ça ! Ricana l’homme.

Il lâcha sa monture pour mieux faire passer son fusil sur son épaule.

- Tu vas être mon nouveau trophée, Loup Noir !

La jument partit à toute allure vers la forêt. Le loup se redressa soudainement et la poursuivit, laissant l’homme sur le sentier. Ce dernier tira vers les deux fuyards. La détonation résonna dans toute la forêt, des oiseaux réveillés en sursaut s’envolèrent aux alentours.

Il baissa son arme, étonné. Un froid se dégageait brusquement de sa poitrine. Il se sentait partir. Le fusil tomba dans un cliquetis métallique sur le sol. Il eut à peine le temps de regarder son torse, pour y apercevoir une flèche à moitié enfoncée. Plissant les yeux, il regarda à la lisière du bosquet. Une silhouette humaine se leva et vint vers lui, une femme aussi sombre que la nuit, remettait son arc dans son dos.

- Alors, tu ressens maintenant, ce que ça fait, lorsque tu tues une bête ?

L’homme sourit et se concentra pour articuler.

- Ahh, tu m’as retrouvé ! Tu ne changeras jamais. L’homme tomba à genou. Aller, finis-moi ! Tu as gagné. 

L’humaine s’accroupit et prit sa dague flanquée dans sa botte et la mit rapidement sur la gorge de sa cible, lui souriant.

- Tu crois vraiment, que je vais te rendre ce service ... Jack ?

Elle ramena le couteau à sa bouche posant la lame fraiche sur ses lèvres et fit non avec sa main libre, le doigt balançant comme le tic tac d’une horloge.

- S'il te plaît...

La jument, essoufflée, déboula sur le sentier, toujours poursuivit par le loup noir. La brune se releva, rangea sa dague, regarda son loup qui ralentit la cadence tout en s’arrêtant à la limite du chemin. Elle attrapa la bride et apposa sa main sur le crâne du cheval.

- Chut, ça va aller, tu as été très courageuse.

Elle lui caressa longuement la tête pour tenter de la calmer. Elle lui susurra des mots, la jument la fixait, l’écoutait, hennit doucement par moments.

Un bruit sourd et soudain, l’homme était mort. La jeune femme récupéra le sac de l’homme, le retourna avec son pied et l’observa. Le loup noir s’approcha, sans que la jument n’éprouve de peur. L’humaine et son complice échangèrent un regard.

- Oui, on a réussi. Et… ce n’est que le premier d’une longue lignée… fit-elle en lui caressant la tête.

Le loup la regardait avec fierté. Mission accomplie.

- Bon, allons-y !

La jeune femme et la jument s’enfoncèrent dans la forêt où désormais, tout brouillard avait disparu. Avant de les rejoindre, le loup renifla le corps de l’homme pendant un moment et hurla à la lune, maintenant au zénith. 

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