The X-files Unsolved: Fahrenheit

Chapitre 2 : Prologue

2186 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 06/11/2021 21:52

Chapitre second : Prologue






5 Avril 2003

Au bord du Lac Erie

Willowcreek, Ohio



Billy espérait bien pécher un saumon ce matin. Un bon gros saumon bien gras. Le genre qui ferait taire les moqueries de son idiot de frangin. Un bon gros saumon pour déjeuner. Il était à peine 6h du matin, mais il en rêvait déjà. Le soleil se levait tranquillement, et les remous du lac scintillaient sous ses rayons. Il faisait frais. Suivant tant bien que mal son grand-père dans l’herbe humide, Billy, du haut de ses huit ans, avait les bottes couvertes de boues.

-Allez mon grand, on y est presque !


Les encouragements de son grand-père fonctionnaient bien, Billy accéléra le pas. Quelques mètres d’avance et un sourire indéboulonnable, son grand-père était large d’épaule, et encore gaillard pour son âge. Il portait dans une main un petit d’osier avec le matériel de la journée, dont un thermos rutilant, et de l’autre les deux canes à pêche. Joe n’avait que deux petits-enfants, et si le plus grand des deux ne voulait plus l’accompagner, Billy lui s’en faisait une joie.

-Ça va comme tu veux mon grand ? S’enquit le grand-père.

-Oui Papy ! Répondit Billy avec un large sourire, toujours en levant bien les genoux.

-Encore un peu, on va arriver au rocher plat dont je t’ai parlé.


Le garçon était vraiment heureux de passer du temps avec son grand-père. Au loin, sur les flots frayaient deux petits bateaux de pêche aux larges filets, et loin derrière eux, se dessinant sur la ligne d’horizon, un petit phare rouge. Billy rattrapa enfin son grand-père, d’autant que Joe ne marchait plus.

-On est arrivé Papy ?

Ce dernier se retourna vers l’enfant, jetant dans les hautes herbes paniers et cannes à pêche. Il s’agenouilla et entoura son petit-fils de ses larges bras. Sans un cri, calmement, il enlaça l’enfant, comme pour le protéger de tous les dangers que le monde réserve aux innocents. Le visage enfoui contre l’épaule de son grand-père, l’enfant s’inquiéta :

-Ça ne va pas Papy ?

Joe pris un moment puis :

-Ça va mon grand… Ça va aller. On s’en va…

-Pourquoi Papy ? Objecta doucement Billy.

-On s’en va. On doit trouver une cabine téléphonique.


Portant son petit-fils dans les bras, le gardant toujours contre lui, Joe s’éloigna, lui épargnant son horrible découverte. Couché sur le ventre dans la vase, le visage contre la large pierre plate, s’étalait un homme. Désarticulé comme le serait une vieille poupée, la peau grisâtre, dans un bleu de travail déchiré, l’homme était mort. « Il devait l’être depuis des jours »avait pensé Joe. Le vieil homme était également chasseur, et il s’y connaissait un peu en morsures. Il n’en reconnu aucune parmi les nombreuses blessures qui courait du haut du dos jusqu’à la nuque de ce pauvre homme, au milieu de vilaines brulures. « Il avait vraiment dû souffrir » avait pensé Joe.


Au loin, se reflétant dans l’eau, l’imposante forme grise et marron de l’usine Cooper’s Copper. Nombreux étaient les habitants de Willowcreek à dépendre d’elle, et nombreux étaient-ils, tout comme le vieux Joe, à connaitre le logo aux rayures orages de l’entreprise. Logo que l’on devenait toujours sur l’épaule déchirée du bleu de travail de l’infortuné reposant dans la boue du lac Erie.



X




10 Avril 2003

Solar Street

Syracuse, New York




Dans les enceintes de l’autoradio, Alanis Morissette entonnait ses remerciements amers, et, en chœur avec elle, la jeune Leyla Harrison criait des « thank you » à s’en rendre sourde. Elle était persuadée qu’elle s’était perdue, mais cela lui importait peu. Avec son mélange d’architecture stylisée, ses bâtiments postindustriels et ses larges espaces, Syracuse était une jolie ville. C’était une belle journée et la vie semblait enfin daigner offrir un peu de nouveauté. Leyla baissa le son de la musique alors qu’Alanis entamait une triste ballade au piano afin de mieux se concentrer sur les panneaux des rues. Gardant un œil sur la route, un autre sur ses notes éparpillées au milieu d’une carte routière sur le siège passager, elle arrivait sur Solar Street. Elle n’était pas aussi égarée qu’elle avait bien pu le croire. Beaucoup de terrains vagues et quelques entrepôts, elle arrivait finalement sans problème au lieu du rendez-vous. Elle n’avait pas revu l’agent Doggett depuis des mois. « -L’ancien agent Doggett » cru t’elle bon de se préciser à elle-même. Leurs échanges depuis s’étaient fait par mail ou par téléphone. Chemisier blanc, pantalon noir, Leyla se tenait devant l’entrepôt avec l’air austère que revêtent les agents du Bureau sur le terrain. Mais elle non plus ne faisait plus partie du FBI. Ses parents étaient devenus fous lorsqu’elle leur annonça la nouvelle. Ce que sa mère considérait comme un avenir plein de promesses, Leyla en était arrivée à le vivre comme un cul-de-sac sans intérêt. Ce que son père considérait comme une « bourde stupide », Leyla le vivait comme un renouveau. Pour le Bureau, elle n’était qu’une comptable parmi tant d’autre, sans réel avenir en dehors de la comptabilité. De son côté, déçu par ses paires, avec une furieuse envie d’être utile, John était devenu indépendant. À grand renfort de contact et d’aide de l’Etat, il avait ouvert son propre cabinet. Il était désormais détective-conseil auprès des agences de polices locales ou de diverses entreprises privées. Leyla fut désarçonnée lorsqu’il lui proposa de le rejoindre dans cette aventure, mais assez fier que quelqu’un puisse croire en ses capacités.

La jeune femme claqua la portière de sa Ford grise, et d’une pression du pouce sur la clé, ferma le véhicule. Le bâtiment n’était pas bien grand, tout en brique marron, entouré sur sa hauteur de grandes vitres quadrillées de vielles armatures métalliques rouillées. Les livraisons, à l’époque, devait se faire sur le côté du bâtiment, qu’une allée de terre reliait à la route principale. L’édifice aurait pu paraitre austère s’il n’avait pas été flanqué en bordure du grand lac Onondaga, et entouré d’herbe vive. Planté face aux briques rouges, un pommier semblait lui aussi profiter du soleil matinal. D’un pas décidé, la jeune femme approcha de la large porte de bois, s’arpentant à frapper, lorsqu’elle vit l’interphone à sa droite sous deux petits panneaux, deux plaques dorées. L’inscription « Bureau de presse de The_Lone_Gunmen.com » était gravé sur celle juste au-dessus de l’interphone, et la plaque supérieure présentait le dessin stylisé d’une plume entouré des mots « Semper fi », et sous le dessin l’inscription « UNSOLVED », le nom de l’agence indépendante de John Doggett. Leyla pressa de l’index le petit bouton, et l’appareil ne mis pas longtemps à grésiller :

-Bonjour, bureau des Lone-Gunmen! C’est à quel sujet ?

La voix était jeune et enthousiaste, on aurait pu l’entendre sourire. Décontenancée, la jeune femme ne sut que répondre, jusqu’à ce qu’une voix plus jeune encore ne grésille à son tour :

-C’est l’agent Harrison, imbécile.

Dans un claquement métallique, la serrure se déverrouilla, et la jeune femme poussa la porte. La lumière du jour passant par les larges vitres semblait agrandir l’espace. Encore une fois, en dépit du ton terne des briques rouges, la luminosité donnait à l’ensemble une aura rassurante. Au fond, dans la largeur de l’entrepôt, s’étendait une coursive métallique desservant trois espaces de travail derrière de larges baies vitrées. À droite descendait un escalier en colimaçon, toujours dans un pur style industriel. Sous la coursive, quelques portes semblaient donner sur des vestiaires. Trois modestes petits bureaux, chichement équipés, étaient disposés en lignes droites non loin de la large porte coulissante dont les touches de rouilles trahissaient l’ancienneté. Toujours sur la droite se trouvait une petite pièce de quelques mètres carrés, comme une grosse boite posée dans l’angle du bâtiment. C’est de cette boite que sortie une jeune fille. Chaussures noires, larges et mal fermées, jean déchiré au genou et pull en laine à sequin rose, elle devait avoir une douzaine d’années. Un large sourire sous de jolies pommettes rondes et roses, le regard franc et une coupe carrée noire corbeau. Elle s’approcha d’un pas tonique, visiblement heureuse de l’arrivée de Leyla :

-Soyez la bienvenue Agent Harrison !

-Merci. Bredouilla Leyla. Comment t'appelles tu ?

-Je suis Jordan, annonça-t-elle fièrement dans une poignée de main amicale. Venez, je vais vous présenter Jimmy.

Une forte odeur de poussière brulée régnait dans la petite pièce encombrée : un lit métallique, une place défait, un bureau sur lequel trônaient fièrement un double écran d’ordinateur et un clavier, une poubelle qui débordait. Jimmy se leva de sa chaise matelassée. C’était un jeune homme bien bâti, plutôt charmant, aux épaules larges, vêtu d’un simple t-shirt à manches longues bleu ciel, d’un jean et d’une paire de snickers. Il tendit une main maladroite :

-Bond, Jimmy Bond.

-Leyla Harrison.

La jeune femme marqua une pause, le temps de la réflexion, puis affirma :

-Vous êtes le quatrième Bandit Solitaire !

Du temps de Mulder & Scully, les trois Bandits Solitaires, ou Lone-Gunmen, étaient des alliés précieux dans leur quête de la Vérité. Fantasque, parano, mais précieux. Jimmy eu un sourire gêné :

-Le dernier.

Une voie franche et forte dans le dos de Leyla précisa :

-Jimmy s’occupe de la logistique informatique d’Unsolved.

Elle se retourna doucement, il était là, un franc sourire au-dessus d’une mâchoire d’acier. Doggett semblait un autre homme sans son costume noir réglementaire. Un sweat léger marron foncé, un jean noir et un teint légèrement halé, John avait visiblement réussi à se recentrer. Le grand brun donna une tape amicale à l’épaule de la nouvelle arrivée :

-Tu as fait bonne route ?

-Plutôt oui, je suis arrivé hier soir. Je suis descendu dans un petit motel en ville en attendant mieux.

-Tu pourrais poser tes bagages ici, proposa John en pointant du pouce dans son dos. On a aménagé quelques anciens bureaux en dortoir dans le fond de l’entrepôt.

Étrangement, la proposition était aussi agréable que peu engageante. Leyla ne répondit que d’un sourire, en se promettant intérieurement de peser le pour et le contre, plus tard. John mena la petite troupe vers une petite table qui proposait quelques donuts dans une boite en carton, des gobelets en papier et une vieille machine à café, dont émanait un agréable fumé. À côté, un large tableau blanc sur lequel était punaisé photos et dossiers. Sur les clichés en noir et blanc, on pouvait y voir en gros plan de vilaines brulures, des morsures et le corps d’un homme. Arrivant du fond de l’entrepôt, de l’escalier en colimaçon, un homme filiforme, d’âge mûr, les traits ciselés sous une tignasse grise, s’approchait d’un bon pas. Une vieille chemise élimée verte à carreau gris sur un pantalon en tweed, il se frottait les mains.

-Et je te présente Frank.

-Frank Black, précisa l’homme en passant le bras autour des épaules de la jeune Jordan. Je suis le papa de Jordan.

Leyla emboita les pièces du puzzle dans sa tête, sa connaissance des X-files étant en effet encyclopédique :

-Vous êtes Frank Black ? Du groupe Millénium ?

À ce nom, il se raidit, et de sa voix rocailleuse :

-Je préfère ne pas évoquer le sujet, mais oui, effectivement.

Quelques années auparavant, l’ancien agent du FBI Frank Black était sorti de sa retraite pour rejoindre un autre groupe d’enquêteur indépendant : Le groupe Millenium. Ce groupe avait d’obscure visée, touchant à l’occulte et la manipulation. Lorsque Frank le comprit, il tenta de s’opposer à eux. Ils le lui firent payer le prix fort : la vie de la mère de Jordan. Frank s’était retiré de la vie active pendant un temps. Leyla changea de sujet :

-Vous avez réuni une fine équipe, John.

-Tout à fait ! On va enfin pouvoir se mettre à bosser ! » Annonça-t-il fièrement.

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