Saut dans le temps
En chemin vers la voiture, Rose traînait un peu en retrait, ses pas hésitants sur le trottoir
Carlos ralentit, se pencha légèrement vers elle, son regard doux ancré dans le sien.
— Ça va, mon trésor ? murmura-t-il.
Rose leva les yeux vers lui, le visage marqué par la fatigue et les émotions.
— Je suis désolée… de vous avoir fait manquer du travail… souffla-t-elle, la voix à peine audible.
TK s’arrêta net et échangea un regard tendre avec Carlos.
— C’était un accident, ma princesse, dit-il doucement, en posant une main rassurante sur son épaule.
— Oui, mais papa… il est sur une enquête importante… expliqua Rose, le regard fuyant, un peu coupable.
Carlos posa ses mains chaudes et fermes sur les épaules de sa fille, les tenant avec douceur, les yeux dans les siens.
— Hey… rien n’est plus important que mes enfants. Rien. Pas même le travail. Rien.
Une chaleur montait en elle, un mélange de soulagement et de gratitude. TK sourit, glissant un bras autour de ses épaules pour la rapprocher.
— Et personne ne t’en veut, ajouta-t-il. Toute la 126 s’inquiète pour toi. Grace n’a pas arrêté de m’envoyer des textos pour savoir comment tu allais.
Rose baissa les yeux, rougissante.
— J’pourrai plus jamais retourner à la caserne… murmura-t-elle.
TK fronça les sourcils, surpris.
— Pourquoi tu dis ça ?
— J’veux plus voir Nancy… ni Tommy… j’ai pratiquement vomi sur elle… j’ai tellement honte… chuchota-t-elle, les mains sur son visage.
Un sourire attendri étira les lèvres de TK. Il la serra un peu plus contre lui, caressant doucement ses cheveux.
— Ma princesse… ça fait partie de notre boulot, tu sais ? On a vu pire. Personne ne t’en tiendra rigueur. Je te le promets.
— Allez, viens, abuela nous attend à la maison, lança Carlos en attrapant doucement sa main.
— Tu as prévenu abuela ? demanda Rose, honteuse que tout le monde se soit inquiété pour elle.
Carlos hocha la tête, un sourire rassurant aux lèvres.
— Bien sûr !
— Est-ce que vous avez appelé grand-père Owen ? ajouta Rose. Je veux pas qu’il prenne l’avion pour une bêtise…
— Oui, ma princesse on l’a prévenu, expliqua TK. Mais, il reste tranquille chez lui, promis, répondit-il avec un sourire rassurant.
Ils marchèrent en silence jusqu’à la voiture. Jonah les attendait, adossé contre la portière, les bras croisés, les écouteurs aux oreilles. Il leva les yeux en les voyant approcher.
— C’est bon, on rentre ? lança-t-il en retirant un écouteur.
— Oui, monte, répondit Carlos en déverrouillant les portières.
Rose se pencha un peu vers son frère, un petit sourire aux lèvres.
— Tu sais… le style flic d’Austin, ça te va bien.
Jonah la bouscula doucement, un coin de sourire apparaissant malgré lui.
— Tu devrais y penser sérieusement, reprit-elle. Qui sait ? Tu as peut-être la vocation.
— J’suis pas fait pour ça, marmonna-t-il.
— Tu es courageux et tu as du cœur, intervint Carlos. C’est déjà un bon début.
Jonah haussa les épaules, un peu dubitatif.
— Peut-être…
— Ouais, ricana Rose. Et puis de toute façon, t’as pas assez de muscles pour remplir l’uniforme de papa.
— Estúpida, grommela Jonah.
— ¡Oye! ¡Basta de discusiones! Coupa Carlos en riant, en poussant doucement les deux enfants vers la portière.
Le moteur ronronna, et la voiture prit doucement la route du retour. Le trajet se fit dans un calme relatif. Jonah, à l’arrière, fixait la route, les bras croisés, tandis que Rose, la tête appuyée contre la vitre, somnolait doucement. À l’avant, TK jetait des coups d’œil réguliers dans le rétroviseur, ses yeux parlant pour lui. Carlos, concentré sur la route, gardait une main posée sur la cuisse de TK. Ce simple contact leur suffisait à retrouver un peu de sérénité après l’agitation de la journée.
Lorsque la voiture s’immobilisa dans l’allée, la porte de la maison s’ouvrit presque aussitôt. Andréa était là, bras croisés, tablier noué à la taille, le visage marqué par le soulagement.
— Ay Dios mío… enfin vous voilà, souffla-t-elle, les yeux brillants. Rose, mija, tu nous as donné toute une frousse…
Rose descendit lentement de la voiture et se laissa envelopper par les bras chaleureux de sa grand-mère. Jonah suivit, plus discret, les mains dans les poches.
— Et toi, t’as rien ? demanda Andréa en posant une main douce sur sa joue.
— Non… répondit-il bas.
— Il a juste eu très peur pour sa sœur, expliqua TK en refermant la portière.
À peine entrés, Rose s’immobilisa près de la cuisine. Une petite boule de peur se forma dans sa poitrine à la simple idée de voir à nouveau du sang.
— Ne t’inquiète pas, mon trésor, murmura Andréa en posant une main réconfortante sur son dos. J’ai déjà tout nettoyé.
Rose inspira profondément et relâcha un peu la tension, se laissant guider par la douceur de sa grand-mère.
— Désolée pour le bazar… souffla-t-elle, honteuse.
— Querida… crois-moi, j’en ai vu d’autres. Ton père et tes tantes n’étaient pas de tout repos non plus ! lança Andréa avec un clin d’œil complice.
— Bon, allez, rentrons avant qu’abuela commence à raconter comment je me suis fait chacune de mes cicatrices, rigola Carlos.
Ils éclatèrent de rire en franchissant le seuil, l’atmosphère enfin un peu plus légère. Andréa avait déjà commencé le souper et, après quelques embrassades et éclats de rire, elle leur laissa le temps de se reposer et de souffler un peu.