Ce qu’il reste de moi

Chapitre 4 : Ce qu’il n’avait pas vu

681 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 24/10/2025 01:08

Carlos resta figé un instant, incapable de détourner le regard.

Les mots de TK flottaient encore entre eux, lourds, irrévocables.

« Ça m’a fait replonger. »

Le silence s’étira. Il crut d’abord avoir mal compris, ou mal entendu. Puis, en voyant les épaules de TK se refermer sur elles-mêmes, cette fragilité presque tangible dans sa posture, il comprit que non — c’était la vérité.

Un goût amer monta dans sa bouche. Il sentit une vague de culpabilité lui remonter dans la gorge, comme un reflux soudain.

Il avait été en colère. Vraiment en colère. Contre ce type qui avait disparu sans un mot, alors qu’il avait passé des heures à tout préparer, à croire qu’entre eux, ce n’était pas juste un jeu.

Il s’était imaginé qu’il n’était qu’un fils à papa capricieux, le genre à fuir dès que ça devient réel. Un adepte des couchettes sans lendemain, incapable de se poser.

Mais maintenant…

Carlos sentit son cœur se serrer.

Il revit, malgré lui, la peau de TK sous ses mains, la chaleur de son souffle contre son cou, cette odeur qui lui revenait toujours — mélange de savon, de bois et de quelque chose d’un peu sucré.

Il se demanda comment il avait pu passer à côté.

Est-ce qu’il y avait eu des marques à ses bras ? Des signes, des ombres qu’il n’avait pas voulu voir ?

Il se sentit stupide, aveugle.

Devant lui, TK semblait minuscule, presque enfantin dans sa gêne, à moitié caché derrière ses excuses.

Et pour la première fois, Carlos vit autre chose qu’un pompier sûr de lui ou un amant trop beau pour être vrai.

Il vit un homme brisé. Fatigué. Qui essayait simplement de tenir debout.

Un mélange de tendresse et de tristesse l’envahit, le prit à la gorge sans qu’il puisse le repousser.

Carlos baissa les yeux un instant, la mâchoire serrée, puis laissa échapper dans un souffle :

— Je comprends mieux maintenant… ta réaction face au champagne.

Dès que les mots franchirent ses lèvres, il regretta.

Vraiment, c’est ça que t’as trouvé à dire ? pensa-t-il, amer. Il venait de s’ouvrir à toi, de te montrer une part de lui que personne ne voit, et toi tu trouves rien de mieux qu’une remarque idiote… Espèce de con.

Il releva les yeux, la gorge serrée.

— Excuse-moi, dit-il doucement. J’ai vraiment été bête…

TK secoua la tête.

— Non… c’est pas ta faute. Tu pouvais pas savoir.

Un silence retomba entre eux, lourd mais pas hostile cette fois.

— Depuis ma rechute, ajouta TK. C’est… c’est comme si je vivais dans le brouillard. Ça ma vidé de mes émotions. Je voulais juste… ressentir quelque chose…

Carlos le fixa, partagé entre la compassion et cette étrange tendresse qu’il n’arrivait pas à effacer en présence de TK.

Il finit par souffler, un léger sourire ironique au coin des lèvres :

— Vu l’état de ta lèvre, je dirais que ça a fonctionné.

TK laissa échapper un rire bref, un peu brisé, mais sincère.

— T’es en train de te foutre de moi ?

— Peut-être bien… répondit Carlos, les yeux pétillant d’un amusement qu’il ne tenta même pas de cacher.

Leurs regards se croisèrent, un peu trop longtemps pour deux gars censés jouer les indifférents.

Carlos aurait voulu le retenir, juste une minute de plus. Lui dire de faire attention… Pire, il aurait voulu le veiller tout la nuit… Mais il savait qu’il ne pouvait pas, du moins, pas ici, pas comme ça.

Il consulta sa montre : encore vingt minutes avant la fin de sa garde.

Assez pour prendre une décision idiote.

— Je finis dans vingt minutes, lança-t-il finalement. Tu veux que je te raccompagne…

TK sembla hésiter un moment, mais dans un sourire triste il lança :

— Ça va… j’vais appeler mon père.


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