Ce qu’il reste de moi

Chapitre 7 : Entre deux fléchettes

1206 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 24/10/2025 13:16

Carlos referma doucement la porte de son appartement derrière lui, le cœur encore un peu agité par la conversation.

Il n’aurait jamais pensé recevoir ce texto… Surtout qu’il avait bien failli proposer à TK de sortir boire un verre après avoir parlé avec Michelle la veille. Et maintenant, TK l’avait invité chez lui.

Il secoua légèrement la tête, un sourire amusé flottant sur ses lèvres. Ce garçon… il avait ce don de le surprendre à chaque fois. Pas toujours de la bonne façon, mais quand même. Et pourtant, ce qu’ils venaient de partager… c’était différent. Plus intime, plus réel, plus fragile.

Carlos se dirigea vers la cuisine, se fit couler un verre d’eau.

 Il se surprit à repenser à la manière dont TK avait parlé, à sa voix hésitante, à ses gestes nerveux… et à ce mélange d’honnêteté et de vulnérabilité qui le laissait à la fois inquiet et fasciné.

Peut-être qu’il pourrait encore lui proposer un verre, pensa Carlos, un peu en souriant

Il s’installa sur le canapé, reprenant mentalement la discussion, relisant ses propres réactions, se demandant comment naviguer entre le désir et le respect de l’espace que TK avait si clairement posé. Et malgré tous ses raisonnements, il savait qu’il voulait revenir, rester, explorer… doucement…


Le lendemain soir, Carlos était debout devant le jeu de fléchettes avec TK. Il ne savait pas trop comment il s’était retrouvé là, à vrai dire. Un simple texto, un « t’es libre ? » envoyé sans réfléchir, et voilà qu’il se tenait à côté de lui, un peu trop proches pour que ce soit seulement de l’amitié, mais pas assez pour que ce soit autre chose.

Le bar n’était pas bondé, juste animé et Carlos s’était attendu à quelque chose de tranquille — un verre entre adultes, quelques fléchettes, un peu de légèreté pour détendre l’atmosphère après la veille. Il ne voulait surtout pas brusquer TK ni l’emmener dans un endroit où le pompier aurait cru à un rencart. Juste… une soirée sans tension.

Mais les choses ne s’étaient pas passées comme prévu.

Dès qu’ils avaient franchi la porte, Carlos avait compris son erreur : toute la 126 était là. Judd, Paul, Marjan, Mateo… et bien sûr, le capitaine Strand.

Autrement dit, le père de TK.

Ce n’était pas le genre de soirée qu’il avait imaginée. Pas du tout.

Et encore moins quand TK s’était mis à râler contre Judd Ryder, visiblement pour une histoire d’égo… Carlos n’avait pas tout compris, mais une chose était claire : Judd occupait un peu trop de place dans la conversation.

Il avait souri, sans rien dire. Une chance qu’il n’était pas du genre jaloux.

Entendre TK parler d’un autre homme, même sur le ton de la frustration, aurait pu le piquer un peu plus qu’il ne l’admettait.

Il s’efforça donc de se concentrer sur le jeu de fléchettes.

Une autre chanson commença dans les enceintes du bar, un air de country un peu trop entraînant.

TK poussa un long soupir, bruyant et théâtral, qui fit tourner quelques têtes autour d’eux.

— Sérieusement ? Encore du country ? grogna-t-il en lançant sa fléchette qui rata lamentablement la cible.

Carlos ne put s’empêcher de rire.

— Tu réalises qu’on est au Texas, quand même ? dit-il en arquant un sourcil moqueur.

TK se tourna vers lui.

— Je sais, mais y’a des limites à la torture. Toutes les chansons son pareille. Un gars qui perd sa femme, sa maitresse, son chien, son pick-up…

Carlos rit de plus belle. Il adorait quand TK faisait ça — râler juste assez pour qu’on sente que c’était du second degré, mais avec un fond de sincérité désarmante.

— T’es vraiment pas fait pour la vie ici, murmura-t-il, amusé.

— Non, c’est juste que les cowboy c’est temps-ci m’énerve particulièrement, protesta TK en attrapant sa bouteille d’eau pétillante et en jetant un regard de braise à Judd qui parlait tranquillement avec Grace.

Carlos hocha la tête, feignant le sérieux.

— Alors… je t’énerve…?

TK tourna rapidement la tête vers lui.

— Toi ? Non. C’est n’est pas toi… J’veux dire…

Il prit une gorgée d’eau, puis ajouta, plus bas :

— Ne te met pas de chapeau de cowboy et ça ira.

Carlos éclata de rire, mais son regard resta un instant suspendu sur lui. TK avait ce ton désinvolte, cette façon d’esquiver les émotions derrière l’ironie, mais il y avait autre chose ce soir — une tension à peine perceptible, un fil invisible entre eux.

Il sentit son cœur battre un peu plus fort, sans trop savoir pourquoi.

— J’en porte quand je vais au ranch de ma tante, dit-il doucement. Peut-être que tu changerais d’avis si tu me voyais avec…

TK leva les yeux vers lui, un sourire en coin, mi-moqueur, mi-inquiet.

— Hm… j’sais pas si je veux voir ça.

— Oh, je crois que si, répondit Carlos, son ton plus bas, presque taquin.

Un silence glissa entre eux, un de ceux qui ne sont pas gênants, mais chargés. Carlos cru remarquer que TK se força à regarder ailleurs. Il lança une fléchette au hasard, comme pour se donner une certaine contenance.

La fléchette atterrit dans le mur. Pas dans la cible.

— Putain, souffla-t-il.

— T’as un vrai talent, le taquina Carlos, s’approchant pour retirer les fléchettes.

— J’te signal que c’est toi qui sais viser… Agent Reyes…

Carlos leva un sourcil, un sourire au coin des lèvres.

— Agent Reyes, hein ? Tu sors les grands titres maintenant ? Fais attention, c’est dangereux de flatter un flic, dit Carlos en se penchant pour récupérer la dernière fléchette.

Quand il se redressa, leurs visages se retrouvèrent à quelques centimètres l’un de l’autre.

Le bruit du bar semblait soudain s’être étouffé derrière eux : la musique, les rires, le tintement des verres. Tout s’était comme brouillé, ne laissant que ce court instant suspendu.

TK soutint son regard, une seconde de trop.

Carlos sentit sa respiration s’accélérer, imperceptiblement. Il aurait pu jurer que TK aussi retenait la sienne.

Puis TK détourna les yeux, un sourire nerveux au coin des lèvres.

— Fini ta bouteille, dit soudain Carlos, la voix plus rauque qu’il ne l’aurait voulu. On s’en va.

TK releva la tête, surpris.

— On s’en va ?

— Ouais. Je t’emmène ailleurs.

— Ailleurs, genre… un autre bar ? lança TK, les sourcils levés.

— Exact.

— Parce qu’il n’y a probablement pas cinquante bars à Austin ?

Carlos eut un sourire en coin.

— T’a peur de revoir tes p’tits copains… ceux qui t’ont fendu la lèvre, fit-il.

TK esquissa un rire, secouant la tête.

— Très drôle…

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