La Marée des Ténèbres

Chapitre 10 : La tempête du Siècle

Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 05:09



Pendant ce temps, à Blue Moon, d'horriiiiibles événements se préparent...

Zagor soupira de façon audible, et s'assit sur la souche la moins humide du secteur. Il en avait eu plein les chausses de traverser cette étendue de blancheur qui paraissait sans fin, en compagnie qui plus est d'Hegwalz qui ne trouvait rien de mieux à faire pour tuer le temps que de lancer des commentaires à l'intérêt douteux. Étonnamment, le Nozelar paraissait beaucoup plus frais que lui, alors même qu'il était originellement un être des marais. Cela agaçait plutôt Zagor, qui admettait mal que lui, le plus grand nécromant que cette galaxie ai porté, se retrouve plus fatigué que son second, un simple ophidianoïde.
Bah, l'essentiel était qu'ils en avaient enfin fini avec cette traversée, sans trouver quoi que ce soit sur leur chemin. Il était définitivement décidé à asservir cette contrée comme prix de sa rancœur pour avoir perdu autant de temps. Enfin, il fallait être juste : la rencontre et le sauvetage d'Arthas lui servirait dans le futur, il en était sûr. Le Chevalier de la Mort lui avait donné en gage de remerciement une pierre de mana, une petite nécropole à faire grandir, et une tête de mort qui contenait de la flétrissure. Il savait exactement quoi en faire.
Arthas... Il était un des rares à dégager une aura de puissance qui lui insufflait du respect pour lui. Chose exceptionnelle, parce qu'à part pour lui-même, on ne savait pas trop pour quoi ou qui il avait du respect, sauf paradoxalement, peut-être, pour mister D, chose qu'il n'avouera jamais, cela va de soi. Le Chevalier de la Mort paraissait un peu plus faible sur le coup, mais nulle doute qu'il exterminerait cet indigent Illidan et reprendrait possession du trône de glace. Zagor le devinait même assez malin pour ne plus être assujetti au Roi Liche, et comme vous le savez peut-être, il avait raison.

« Maître, que faisons-nous, maintenant ? La plus proche ville doit encore se trouver à quelques lieues d'ici, et vous devez être éreinté. Vous n'avez rien mangé depuis ces dernier jours.
- Ne dis pas de sottises ! siffla Zagor, qui peinait à reprendre son souffle. Un peu de glace fondue m'a suffit, oublierais-tu que je suis un Demi-Mort ? Ma résistance est sans commune mesure avec celle des simples mortels.
- Bien entendu, Maître. Pardonnez ma bêtise. Mais la question demeure : que faisons-nous ?
- Nous allons prendre le contrôle de ce royaume, Hegwalz !
- Peut-être ces terres n'ont-elles pas de roi, Maître.
- Baste ! Cet empire, alors.
- Rien ne nous dit que règne ici un empereur.
- Mort au tyran, dans ce cas !
- Il n'est aucun signe qui dise que...
- Hegwalz...
- Bien, Maître. Nous serons les maîtres de ces terres, quel que soit le gouvernement en place.
- Tu vois, quand tu veux ! Ce n'est pas bien compliqué.
- Mais de quelle façon ? Nous ne connaissons rien de cette terre étrangère.
- Voilà la question à dix mille heptines, mon ami. Nous allons utiliser les armes naturelles de ce pays contre lui-même. Je vais invoquer la plus grosse, la plus violente tempête que les autochtones aient jamais vu. Elle encerclera toutes ses frontières, et barrera la route à nombre des rayons du soleil de ce monde. Peu importe leurs moyens de communication... Ils seront tous coupés. Rien ne pourra passer cette averse de neige. L'intérieur sera invisible de l'extérieur, et vice-versa. Mais cela surtout dans le but d'isoler le pays de toute influence externe, elle ne fera que des perturbations suffisantes à l'intérieur, car il ne sert de rien que d'abîmer ce que l'on veut prendre. Et l'avantage avec les tempêtes magiques, c'est que l'on peut librement contrôler leurs effets. Ah ! Lorsque les clameurs de la tempête se seront tues, toute cette contrée sera à moi, sans même que les habitants ne le sachent... Et sans que toute autre nation du reste de ce monde en ai connaissance non plus. Une parfaite opération nécromantique sous anesthésie. Nul ne pourra imaginer que la main de Zagor a frappé ici.
- Assurément vous avez une stratégie autre en toile de fond ?
- Très simple, très simple ! caqueta Zagor. Une telle tempête fera des dizaines de milliers, des centaines de milliers de victimes... Mais crois-moi, Hegwalz, très peu d'entre elles mourront de froid, de faim ou de blessures. Et aussi peu reposeront dans la neige pour linceul. C'est fou le nombre de gens qui peuvent se perdre dans la tempête ! Je serai là pour les accueillir tous autant que faire ce peut. Avec les présents d'Arthas, ma puissance et mon savoir, et toi pour me seconder, notre conquête ne prendra pas plus de deux ou trois hajiks.
- Pardonnez-moi de modérer votre enthousiasme, cependant, votre magnifique et maléfique plan ne repose-t-il pas entièrement sur cette tempête ?
- C'est légèrement la clé de voûte de l'opération, oui. Et après ?
- Excusez-moi de vous dire ça, Maître, mais dans votre état actuel, je ne vous vois même pas invoquer une petite brise fraîche- déjà que j'ignorais totalement que vous puissiez contrôler les éléments.
- Ah ! fit Zagor, méprisant. Bien sûr, tout le monde est ébloui par mes capacités nécromantiques. La spécialisation à outrance est une impasse, Hegwalz ! Il faut savoir se diversifier pour survivre et faire face au maximum de situations possibles. Quant au reste, ne me sous-estime pas, je reste en forme. Pour un sort de cette ampleur, qui transcende presque les capacités d'un seul être, j'aurai néanmoins besoin d'un peu d'aide. Et je sais où la trouver. »

Manifestement, son bras droit, lui n'en savait rien. Il haussait un sourcil dépourvu de toute pilosité, se demandant si son Maître n'avait pas eu le cerveau trop refroidi par leur longue marche glaciale.
« Ne fais pas cette tête-là, tu as l'air d'un demeuré, et un demeuré ne sied pas pour m'assister. Qui sont les seuls plus ou moins fiables à qui l'on puisse faire appel en toute circonstances, n'importe où dans la galaxie ? Non, pas les agents des impôts, Hegwalz. Les dieux, bien entendu !
- J'entends bien, Maître, mais...
- Pas de 'mais' qui tienne. Je sais très bien qu'il est difficile de les faire fléchir pour se les mettre à la bonne. Au contraire de toi, je ne les crains pas- du moins, trois d'entre eux. Et je sais que le plus important de ce trio me prêtera une oreille attentive, car je suis l'un de ses plus grands représentants sur Aznhurolys. En usant les bons mots, il ne pourra pas me refuser cette bagatelle. Qu'est-ce que pour lui une énorme tempête de neige ?
- Très bien, Maître, puisque vous voulez en faire ainsi. Hm, ça ne vous dérange pas si je m'éloigne un peu ? Je vais trouver du bois pour le feu et installer un camp de fortune pour cette nuit...
- Bha, va donc, agréa Zagor avec un geste nonchalant de la main. Petit couard, va. Tu vas manquer un beau spectacle.
- Non point, Maître. Je le regarderai (à une distance respectueuse).
- Jacte donc. »
Le Nozelar s'en fut donc, peu désireux de rester dans la même aire d'effet que celle d'où allait naître la tempête du siècle, et alla s'adonner à ces taches ingrates, mais sans danger. Au pire, il rencontrerait un loup, ou un ours, ou une autre créature des terres froides, et la tuerait en l'empoisonnant.
Débarrassé de la compagnie de son second, Zagor déblaya une zone du sol de sa neige, et y bâtit un autel grossier avec des pierres empilées, et un crâne pour trôner au-dessus, trouvaille qu'il avait faite tout guilleret en fouillant.

Il se coupa la peau du bras gauche avec un de ses ongles, qu'il avait acérés, et laissa se répandre un filet de sang violacé sur les pierres. Puis il inscrivit dans la neige quelques runes ésotériques, s'agenouilla, et entama une mélopée sinistre.
« O Dma'llum, Dieu de tout ce qui est aligné sur le mauvais,
Toi dont la noirceur éclipse la lumière des plus brillants astres,
Toi qui siège avec prestance sur le plus maléfique des divins dais,
Je requiers ta présence pour déclencher un beau désastre.
Entend ma voix, Seigneur du Mal Absolu !
C'est moi, ton hiérophante, Zagor l'invaincu,
[Qui réclame ton aide.
»

Un moment passa, puis une sonnerie se déclencha, suivit de l'expression vocale d'une voix féminine dénuée de personnalité.
« Bonjour et merci d'avoir pris contact avec le service des relations Divinités-Croyants. La déité que vous avez appelée est momentanément indisponible. Nous vous prions de bien vouloir patienter jusqu'à ce que nous puissions vous mettre en contact. »
Sa vois s'éteignit, remplacé par une marche funèbre assez enjouée. Zagor soupira, ennuyé par ce nouveau système de filtre des prières qui cassait quelque peu l'ambiance, nouvelle preuve de ce mercantilisme affligeant qui empoisonnait toute la société, et attendit patiemment.







[...]




[...]




[...]








" Merci d'avoir patienté. La déité que vous avez demandée va maintenant apparaître devant vous. Notre service ne se porte aucunement responsable du refus du service que vous avez demandé, pas plus que de tout dommage ou mort subite que la déité pourrez vous infliger. Le service des relations Divinités-Croyants vous remercie de votre appel et vous souhaite une bonne continuation. Cette prière vous sera facturée un carré d'or, à payer comptant dans les deux faulks qui suivent, sous peine de malédictions variables."
Zagor aurait bien aimé lui dire sa façon de penser, quand un titanesque -7 mètres- trône d'obsidienne surgit du néant pour apparaître devant lui dans un déluge d'effets spéciaux obscurs, accueillant une silhouette dont la taille allait de paire.
L'humanoïde gigantesque appuya son menton contre sa main mise en poing, et balaya des yeux les environs.
" Qui m'appelle ? Je ne vois personne. Si c'est encore une blague d'un petit malin, la foudre noire va tomber, je vous le garantis...
- Je suis ici, puissant Dma'llum !" cria Zagor pour se faire entendre de son dieu tutélaire.
Celui-ci baissa les yeux.
" Oh, c'est toi, Zagor ! fit-il sur un ton bonhomme. On m'a dit que c'était un appel important, sans plus. Tu sais ce que c'est, ces nouveaux services... Bref, que veux-tu ? Et où m'as-tu amené, pour commencer ? C'est que ça caille sec, ici...
- Seigneur du Mal Absolu, j'aurai besoin que tu me donnes un coup de main divin pour ma maléfique entreprise.
- Je suis toujours intéressé quand c'est maléfique, Zagor. Enfin, à priori. Qu'est-ce que tu comptes faire par ici ?
- J'ai pour projet de transformer lentement cette contrée en un royaume des morts dédiés à votre gloire, Seigneur. Je viens planter une nouvelle bannière du mal sur ce monde inconscient du danger qui le menace, mais j'en suis sûr, point exempt de péchés.
- A d'autres, fit Dma'llum en baissant sa paupière inférieur de son index. Tu veux surtout augmenter ton pouvoir personnel, oui. Et je sais que tu ne viens pas sur un autre monde pour le plaisir, donc tu dois encore, et sempiternellement, poursuivre le Gardien, n'est-ce pas ? On ne l'avait plus vu depuis quelques temps, tout concorde.
- Hm, oui, bon, c'est également l'un de mes objectifs, avoua le nécromant, un octave plus bas.
- Tu sais qu'il n'y a vraiment que moi qui pourrait t'accorder de l'aide pour une telle entreprise ? Il est protégé de Nous, mais tu continues quand même à le chasser après toutes ces années, alors qu'il t'as mis plusieurs raclées monumentales."

Zagor fulminait intérieurement, mais même s'il ne montrait aucune peur face à l'entité divine, il ne pouvait pas le contredire comme il aurait rabroué Hegwalz. Il se força à adopter un sourire de circonstance.
" C'est que j'ai de la suite dans les idées, Seigneur. Si je le bat ici, vous pourriez certainement posséder ce monde pour vous seul. Pensez à toute la foi que vous pourriez récolter grâce à une conversion massive et forcée. Au pire, je pourrai organiser des sacrifices tellement gigantesques que l'Hécatombe de Wölmark vous semblera une douce plaisanterie en comparaison. Votre puissance cosmique augmentera sensiblement, d'une façon ou d'une autre, et vous aurez un repaire secret où mener à bien des projets spéciaux, afin de servir vos desseins.
- Bha, que sais-tu de mes desseins ? Ce que tu me dis est alléchant, toutefois. J'ai confiance en tes capacités, Zagor, tu n'es pas l'archinécromant de l'Impérium de l'Ombre pour rien, et l'un de mes serviteurs préférés. Oui, cela pourrait être une bonne chose. Je devrais pouvoir me débrouiller pour embrouiller les autres pour qu'ils n'en sachent rien. Mais si jamais l'un d'entre eux découvrait le pot aux roses... Tout retombera sur toi, compris ? Je ne veux pas risquer ma place de dieu, tant que je ne suis pas certain de la réussite de mon plan.
- C'est comme vous voudrez, Dma'llum, articula le nécromant, retenant sa contrariété.
- Bien. Alors, qu'est-ce qu'il te faut comme aide ? Rien de bien long, j'espère. Il ne faut pas que je reste trop longtemps ici ou mon absence sera remarquée.
- Une pacotille, Seigneur. J'ai besoin de lever une tempête magique qui recouvrira tout le pays et l'isolera complètement, tout en créant assez de perturbations intérieures pour que je puisse moissonner une belle armée.
- Simple mais efficace. Cependant, je ne suis pas le dieu des Sqwarrims, moi, depuis quand crois-tu que je suis capable d'invoquer les éléments, même s'ils apportent la mort ? Tu t'es trompé d'adresse.
- Mais moi je le peux, Seigneur. Il faut juste que vous me chargiez avec une fraction de votre puissance divine pour que j’acquière la capacité de lancer la tempête du siècle.
- Oh, oh ! Je serai bien curieux de voir ça. Un nécromant appeler la tempête ! Tu me cachais ça, Zagor. Très bien. Je vais remplir ma part du marché, n'oublie pas la tienne. Je viendrai chercher mon dû plus tard. Pour le moment, je vais t'accorder une partie de mon pouvoir. Fais-en bon usage... Attention également, car ton corps devrait en resté saturé quelques temps. Avec risque mortel, mais ce n'est pas ça qui va te faire peur, hé ?"
Dma'llum ricana gentiment, et saisit d'un geste ample le nécromant dans sa main. Puis il ferma les yeux, et se concentra. Des pulsions de pure énergie noire remontèrent le long de son bras musculeux pour se concentrer dans sa paume. Quand il sentit la charge suffisante, il la relâcha progressivement dans le corps du demi-mort.

Zagor exultait. Cela faisait bien longtemps qu'il n'avait ressenti quelque chose d'aussi merveilleux et grisant. Chaque fibre de son être se retrouvait remplie de cette énergie noire, qui dissipa sa fatigue et fit pétiller son âme, son esprit et son corps d'un pouvoir nouveau et terrifiant. Il se sentait bien, bien !
Si mister D se tenait devant lui, là, il se sentait capable de le pulvériser d'une Black FireBall (TM). Ah ah ! Les habitants de Blue Moon n'avaient plus qu'à trembler...
Dma'llum reposa son hiérophante.
" Ne prends pas la folie des grandeurs non plus. Lorsque la charge sera terminée, tu subiras un contrecoup assez terrible. Environ dix fois plus puissant que celui d'un drogué en manque. Tel est le prix pour utiliser mon pouvoir ! Impossible de retourner en arrière.
- Je ne crains rien, Dma'llum. Avec une partie de votre Essence en moi, l'avenir de ce pays ne fais pas un pli.
- Je l'espère pour toi... J'aimerai bien voir comment tu vas t'en débrouiller, mais comme je te l'ai dit, je risque d'être repéré à rester ici. De plus, je ne veux pas rater le début de la prochaine guerre sur Aznhurolys. Ma force est avec toi, Zagor ! N'échoue pas..."
Le dieu du Mal Absolu frappa du pied, et disparut dans un grandiose éclair noir. Des paillettes argentées tombaient du ciel.
Et voilà, ce n'était pas plus difficile que ça lorsque l'on était dans les petits papiers d'un dieu...
Plus qu'à se mettre au travail.
Il passa plusieurs heures à tracer de grands signes dans la neige, l'ensemble n'étant compréhensible immédiatement que vu de dessus. Lorsque le cercle d'invocation fut achevé, il se plaça en son milieu, et commença le sortilège. Un sortilège de si haut niveau exigeait toutes les composantes possibles : gestuelle, runique, verbale, mentale, catalyseur (la pierre de mana), énergie magique à toc, concentration extrême, et une pincée de chance.
Le rituel dura près de trois heures, trois heures qui passèrent comme dans un souffle pour Zagor, pendant que Hegwalz cherchait un abri précaire contre la menace qui pointait. Il n'était pas totalement certain que son Maître ai prévu un moyen de les immuniser contre la catastrophe neigeuse.
Quelques mots rauques s'écoulèrent encore de la bouche du nécromant, et alors, alors la tempête naquit. Ce ne fut au départ qu'un misérable souffle froid, puis une brise glacée, qui enfla, enfla, pour aller conquérir le ciel et le cacher par intermittence sous ses vents chargés de flocons.

Le jour était encore long, bien que beaucoup moins bien visible maintenant, lorsque Blue Moon tout entière fut recouverte. Rien ne perçait ce manteau intermittent de neige, sauf quelques rayons du soleil. Toute communication, tant interne qu'externe, fut soit rendue si mauvaise qu'il était impossible d'en faire usage, soit tout nettement coupée. Les radios crachotèrent un peu, avant de n'émettre plus que des grésillements, les télévisions, au grand dam d'une bonne partie de la population, ne montrèrent plus que de la neige électronique. Tous ceux qui étaient dehors levèrent des yeux inquiets vers le ciel assombri, avant de rentrer. On connaissait bien le froid et la neige, à Blue Moon, mais d'aucun avaient de mauvais pressentiments quant à cette soudaine tombée.
Surtout les vieux du pays, qui, pour ceux qui l'ignoreraient, sont une des espèces les plus dangereuses du troisième âge quand il s'agit de marmonner dans leurs barbes et de tirer un mauvais avenir pour le pays. Ainsi, sur leurs bancs, pouvait-on les entendre dire, la mine sombre et la barbe frémissante :
" Il n'y a point de neige comme ça en cette saison. Il y a quelque chose de pas naturel là-dessous.
- Jamais tempête n'est venue aussi rapidement sans signes de son arrivée. Il y a quelque chose de mauvais là-dessous.
- Et cette façon de recouvrir le ciel en partie sans toucher de la même façon l'intérieur des terres... Il y a quelque chose de dangereux là-dessous.
- C'est un présage, pas d'erreur."
Généralement, on n'écoutait pas les vieux du pays- ils ne cessaient de radoter et de voir des présages mauvais un peu partout, ce qui finissait par taper sur les nerfs de tout le monde. Mais cette fois, ils avaient raison. Et la tempête n'en allait que plus mauvaise.
Bientôt les bateaux furent immobilisés à quai par des blocs de glaces formés bien trop rapidement; ceux qui étaient partis en mer ne revinrent jamais pour la plupart. Aucune unité aérienne ne pourrait vaincre la tempête non plus, aucun espoir de quitter Blue Moon de cette manière.
Les liaisons satellites furent également coupées; la neige s'amoncela sur les axes de communication. En l'espace d'une journée, Blue Moon semblait bien se retrouver dans un tombeau de neige; même si la panique ne perçait pas encore. Mais elle viendrait, elle viendrait.
Ce n'était que le commencement du calvaire.
Dans sa datcha, Olaf regardait par la fenêtre cet événement envelopper tout son fier pays, silencieux. Il devinait plus que tout autre le caractère insensé de ce qui se passait au-dehors. Il ne devinait pas encore ce qui avait pu le provoquer, et si on le lui avait dit, il n'y aurait d'abord pas cru.
Saurait-il jamais la vérité ?
Il quitta son bureau, et partit prendre sa voiture personnelle. Sa place était aux côté de son peuple, et il fallait immédiatement organiser un quelconque plan pour dresser la situation avant qu'elle ne prenne une trop grande ampleur.
Les habitants de Blue Moon étaient préparés à la rudesse du climat...
Mais le seraient-ils face à l'horreur qui se cachait derrière ?

Si l'horreur irait jamais se montrer...

Dans une petite région presque sans histoire du pays, dans un patelin paisible, dans une jolie maison au bord du village, Lyly Mistalker regardait elle aussi la neige tomber. Elle venait de faire un rêve éveillé, très étrange, où elle revoyait Maverick.
Elle n'avait jamais oublié le petit garçon qui la protégeait lorsqu'ils étaient petits. En témoignait la photographie encadrée qu'elle tenait contre son cœur (bien qu'elle ne sache pas trop pourquoi elle avait ressortie du tiroir ce vieil objet), les représentant tout deux au bord du lac Bluewish. Malgré toutes les années passées, elle avait gardé précieusement l'objet, se demandant souvent ce qu'il avait pu advenir de Maverick. Était-ce vraiment lui dans ce rêve ? Il paraissait avoir tellement changé, comme si l'on avait vidé son cœur de sang pour faire pulser un liquide glacial à la place. Elle aurait tellement voulu modifier cela, mais elle ne gardait qu'un souvenir flou de ce songe.
Soudainement inspirée, elle chanta une ancienne mélopée mélancolique.

Puis, elle souhaita de tout son cœur qu'il allait bien, et s'endormit sur son lit, la photo toujours serrée contre sa poitrine.

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