Rien comme prévu
Chapitre 4 : Rien comme prévu - Chapitre 4
2369 mots, Catégorie: T
Dernière mise à jour 10/11/2018 17:29
J'entrai donc précédé d'Ambre vers la cuisine. Sa mère était trempée.
- Attendez, je vais vous aider, dis-je sans réfléchir.
- Oh, c'est très gentil mais ce n'est rien, mon mari s'en occupera quand il rentrera. En attendant, je vais me changer, nous ferons les présentation plus tard, si ça ne vous dérange pas jeune homme.
Je la suivis des yeux jusqu'à ce qu'elle disparaisse à l'étage.
- Tu viens dans ma chambre, me proposa Ambre. Ou tu préfères boire quelque chose ?
- Attends, je n'en ai pas pour longtemps.
Je pris une éponge et nettoya un peu le sol avant d'enlever ma veste pour m'attaquer à la plomberie qui avait sauté sous l'évier. Je demandais quelques outils à Ambre et elle me ramena carrément la boîte, n'ayant sûrement rien compris au vocabulaire que j'avais utilisé.
Lorsque je me relevais enfin, je fus surpris de trouver devant moi, la mère et la fille qui me regardaient avec malice.
- Tu as vraiment trouvé le bon, lui dit-elle.
Le bon ? Quoi le bon ?
- Je sais.
Je les fixais, perplexe.
Quelqu'un entra.
- Alors chérie, c'est quoi cette histoire de plomberie. Je vais m'en occuper maintenant, ce sera fait.
- Trop tard, lança-t-elle tout fière.
- Comment ça ?
Quand il arriva dans la cuisine, je crus que mon cœur allait s'arrêter.
Il m'observa quelques secondes de la tête aux pieds, puis explosa de rire.
- Et bien ! Qu'on serve quelque chose à boire à ce garçon au lieu de le laisser là, par terre !
Je me levai aussitôt.
Le père de Nathaniel rit de plus belle et posa une main sur mon épaule, tout en me remerciant d'avoir porter secours à sa femme.
Ils me firent asseoir à leur table et je me sentais de plus en plus mal à l'aise.
- Alors mon garçon, continuait-il de m'appeler. Tu es un ami de ma fille ?
- Oui, m'sieur.
- Haha ! Appelle-moi Marc, petit.
- Bien, m'sieur Marc.
Il rit de nouveau, sans que je comprenne vraiment pourquoi et me fit une tape dans le dos.
- Et, à part la plomberie, tu es doué pour d'autres choses ?
Sentant, malgré mes réticences, que c'était le moment où jamais d'entrer un peu plus dans la famille, je lançais:
- J'aime bien la méca et je me débrouille plutôt pas mal, sinon y a aussi...
- La mécanique ?! Tu déconnes... Vous avez entendu ça, les filles ? Je viens de me trouver un collègue ! Tu veux bien m'aider, hein gamin ?
- Seulement si vous arrêtez de m'appeler gamin.
J'avais sorti ça sans réfléchir et je le regrettais déjà. Je ne le connaissais pas et je savais déjà de quoi il était capable si quelque chose ne lui plaisait pas.
Contre toute attente, il explosa de rire à nouveau.
- Tu es décidément très drôle, mon garçon ! Et j'apprécie ta répartie et ta franchise. Ce sont de grandes qualités.
- Et qu'est-ce que vous voulez me faire faire ?
- Suis-moi, conclut-il en souriant.
Ce que je fis. Nous sortîmes de la maison.
Le vent frais de ce début de soirée était très agréable et soufflait sur mes joues telle un caresse.
Il se baissa et fit remonter sa porte de garage à bascule. En plein milieu de la pièce trônait une vieille bécane noire.
- Pas mal.
- Elle est belle, hein ? Je l'ai hérité de mon père. Elle a eu quelques accidents et il n'a pas vraiment pris le temps de la réparer. Alors je l'ai récupéré. Mais j'avoue que tout seul, ce n'est pas pareil. J'aurai voulu partager ça avec quelqu'un. Et comme mon putain de gosse n'est pas un grand débrouillard...
- Il est très doué dans pleins d'autres milieux, vous savez.
Il me regarda fixement un moment.
J'avais encore agit sans réfléchir. Merde.
- Peut-être. Mais pas dans des choses très utiles alors.
Il ne baissait pas son regard, ce qui me rendait nerveux.
- Je ne m'attendais pas à ce que «le grand Castiel» prenne la défense de mon fils.
- Comment...
- Il n'y a pas quatre milles gars qui se teignent les cheveux en rouge bordeaux.
- À la base, c'était plus rouge électrique mais à force, je m'en lasse...
- Pourquoi avoir fait ça ? Et surtout, pourquoi cette couleur ?
- J'avais envie, enfin surtout besoin de changer. Et pourquoi le rouge ? Pour sa symbolique. Pour en revenir à Nathaniel, il s'avère qu'il rend beaucoup de service aux gens au lycée.
Son regard profond me fit frémir. Il semblait soit chercher à me déstabiliser, soit à évaluer ma sincérité.
- Pour sa symbolique...ha ! J't'aime bien toi. Bon et ma bécane alors, t'en dis quoi ? Ça te dit de la réparer avec moi ?
- Pourquoi pas.
- Bien. Viens voir par ici.
Je m'exécutais.
Il me montra les principales pièces endommagées et ce qu'il fallait faire pour les réparer.
Je l'observais un peu plus attentivement. Il avait beau avoir pas mal rit depuis mon arrivée, -ce qui aurait dû me mettre à l'aise- je me sentais toujours aussi bizarre. Et puis, il faut dire qu'il est sacrément impressionnant. C'est un vrai mec viril. Pas de la plastique. Un méga buste, de larges épaules, des bras musclés... Grand, en plus de ça. Au moins une demi-tête de plus que moi. L'air mature, sans être trop vieux. Ses cheveux clairs sont coupés courts afin de bien dégager son visage et mettent en valeur sa mâchoire carrée et ses yeux noisettes.
- Tu t'en sens capable ?
- Et vous ?
Un léger sourire se dessina sur son visage.
- Des questions ?
- Vous avez des toilettes ?
- Non, non, on fait ça dans l'évier...mais bien sûr qu'on a des toilettes ! Elles sont à l'étage, fais comme chez toi.
J'entrais donc dans la maison et montais les escaliers qui se trouvaient sur ma droite. À l'étage, il y avait plusieurs portes et elles étaient toutes fermées, sans aucune démarcation. Difficile de les différencier. Je testais donc, espérant tomber sur la bonne. La première ouvrit sur un placard, la seconde sur la salle de bain, la troisième sur la chambre de Nathaniel. Il était là, allongé sur son lit, transpirant de sueur, les yeux fermés. Il ne sembla pas remarquer ma présence, je présumais donc qu'il dormait.
Je ne sais pas vraiment pourquoi, mais quelque chose me fit m'approcher de lui. Je m'avançais jusqu'à son lit et m'accroupis pour me mettre à sa hauteur.
- Les toilettes sont en face.
D'un bond, je me relevais en manquant de me casser la figure. Encore sous le choc, je tentais de reprendre un souffle régulier.
- O-oui... je me suis trompé de porte, et comme je l'ai...j-je l'ai vu...
- Il est seulement malade. Grosse fièvre, ce genre de truc.
- D'accord.
- Tu peux aller aux toilettes maintenant que tu sais où c'est, non ?
- O-oui m'sieur.
Je me dépêchais de sortir de la pièce.
Une fois sur le palier de la porte, je dis au revoir à Ambre pour la énième fois (puisqu'elle trouvait toujours une excuse pour prolonger la discussion). Sa mère, Amanda à ce que j'avais cru comprendre, discutait avec son mari en nous observant depuis la cuisine, un sourire satisfait sur le visage. Puis, ils vinrent me saluer avant mon départ.
- Et bien jeune homme, ce fut un plaisir, commença la mère.
- Reviens quand tu veux, gamin. Surtout pour m'aider à terminer le boulot entreprit, n'est-ce pas ? On ne va pas le laisser comme ça, hein, ajouta-t-il en me donnant une tape sur l'épaule.
- Bien sûr qu'il va revenir, s'exclama Ambre. Pour donner les cours à Nathaniel !
- Mais enfin, tu es dans la même... répliquai-je.
Elle fit un clin d’œil. Ça semblait m'être destiné, mais ses parents avaient visiblement mieux compris que moi.
- Disons que ça te donnera une excuse supplémentaire pour venir me voir...
Sérieux... mais dans quoi je m'embarque, moi ? Enfin, quelque part, c'est pas si con. Mais bon, si un jour on m'avait dit ça... Bref. De toute façon je suis bien obligé.
Décidé à jouer le jeu à fond, je pris une mine un peu gênée et lorsque le père d'Ambre me dit qu'il ne voulait pas me forcer, je répondis:
- Oh, oui évidemment. Je ne comprenais pas le lien avec Nathaniel. Mais on est bien d'accord que ma priorité est votre fille, pas votre blondinet.
- Enfin, je retrouve le Castiel qu'on m'avait décrit, lâcha Marc avec un sourire plein de malice adressé à sa petite famille.
Sur le chemin du retour, je fis un bilan de ma journée. Mon plan était bien entamé et s'était plutôt pas mal déroulé. Ambre avait l'air aux anges, ses parents semblaient plus que satisfaits et personne ne se doutait que tout cela n'était que purement stratégique.
Cependant, l'image de Nathaniel restait omniprésente dans mon esprit.
On verra ça plus tard. De toutes façons, je ne peux rien pour lui pour le moment.
Entre la plomberie et la méca, j'avais besoin d'une bonne douche et de vêtements propres. Je m'acquittais donc de ces tâches avant de me préparer un sandwich.
La flemme de cuisiner ce soir... Suis épuisé.
Sur ces derniers mots, je plongeais dans un profond sommeil.
Une sensation entre le baveux et le râpeux se fit sentir sur ma main. J'ouvris un œil, pour ne pas être trop aveuglé par la lumière matinale et vis Démon me lécher la main qui dépassait du canapé. Je me retournais et fis tomber la moitié du sandwich que je n'avais pas terminé la veille. Démon se jeta dessus comme un gros morfale.
- Sale goinfre. Fais pas comme si je te donnais jamais à bouffer !
Je m’asseyais sur le bord du canapé en me frottant le visage. Je cherchais à tâtons ma veste sans vraiment regarder ce que je faisais. Je finis par la trouver et sortis le petit papier que j'avais dans la poche de droite. Ambre avait pris soin de me laisser son numéro. Sur un post-it rose comme on pouvait s'en doutait...avec écrit «rappelles-moi» dessus. Comme si tu prenais le téléphone de quelqu'un juste pour le plaisir de remplir ta liste de contacts. Je lui envoyai donc le premier truc qui me passait par la tête : «Bien dormi ?», auquel elle répondit aussitôt.
Elle n'a pas du tout passé la nuit à attendre mon message... pensais-je.
J'essayais d'écourter la conversation au maximum et partis me préparer.
Une fois prêt, je filais à bouffer à mon chien pour la journée, enfourchais mon sac et ouvris la porte.
- Surprise !!!
- … ah oui, pour une surprise, c'est une surprise, ne pus-je m'empêcher de lâcher d'un ton parfaitement désintéressé.
- Ça ne te dérange pas j'espère, poursuivit Ambre. En fait, j'allais te proposer de passer me chercher, mais je me suis dit que prendre un peu d'initiative en retour ne serait pas déplaisant ! J'ai eu raison, n'est-ce pas ?
- Oui, bien sûr...
- Et puis, comme je me suis levée tôt ce matin et que j'étais de plutôt bonne humeur...
Et c'était parti pour un quart d'heure de blabla ultra chiant où le seul truc qui a fait que je me suis tourné vers elle, c'était pour regarder si elle prenait le temps de respirer entre chacune de ses phrases. Mon dieu, les filles sont vraiment des extra-terrestres. Et comment elles font pour avoir autant de trucs à dire alors qu'il ne s'est écoulé qu'une nuit depuis la dernière fois qu'on s'est vu ?!
Bref, le moment tant redouté était arrivé: l'entrée devant le lycée. Ambre allait sûrement refaire le coup d'hier à me prendre la main. Quelle plaie. Mais miracle, alors en pleine explication sur le dernier concert qu'elle était allée voir, elle en oublia tout le reste et ne sembla même pas prêter attention à tous les regards tournés vers nous. Elle rigolait à ses propres blagues (ce qui était plutôt drôle à voir) en me regardant gentiment et ne semblait réellement pas s'être rendue compte qu'on était arrivé.
- Oh, on est d'jà là ? demanda-t-elle une fois dans le couloir principal. Wouaw, c'est que le temps passe vite avec toi ! Haha, bon tu m'excuseras, il faut vraiment que j'y aille. J'ai quelques trucs à aller chercher et je dois rejoindre les filles. On se voit plus tard ?
- Ça marche.
- À t'à l'heure !
Elle me fit à nouveau un de ses grands sourires accompagné d'un discret signe de la main et partit dans la direction opposée.
Pincez-moi, je rêve. C'est la vraie Ambre, là ? Est-ce que je me serais trompé sur son compte ? Ambre m'a-t-elle vraiment faire un sourire sincère, un geste DISCRET, sans chercher à jouer la fille superficielle, à se vanter auprès de tout le monde ou simplement à se mettre en avant ?
Ça alors... Alors elle serait vraiment sympa ? J'en apprend tous les jours. En tout cas, c'est super agréable ! Enfin une journée qui commence bien !
...Il faut vraiment que j'apprenne à me taire. Tous ces regards. Ils me fixent avec insistance. Bordel mais qu'est-ce qu'ils me veulent tous ?
- Quelqu'un a un problème avec moi ?!
Bah quoi, j'ai une image à préserver quand même.
Tous détournèrent le regard, mais je pouvais toujours les entendre faire des messes basses à mon sujet.
Soûlé, j'envoyais un message à Lysandre pour lui donner rendez-vous sur le toit.