Le secret de Nathaniel [Amour sucré]
-Isaya, attends-moi! cria une voix familière .
Inaya souffla un grand coup quand elle vit son ami se diriger vers elle.
-Où comptais-tu aller sans moi? demanda-t-il en lui faisant un clin d'oeil. On a des choses importantes à régler!
-Je ne vois pas de quoi tu veux parler, répondit Inaya sur la défensive, les yeux encore gonflés par les larmes.
-Normal, tu ne le sais pas encore! dit-il en la prenant à la légère. J'ai rien compris aux intégrales... tu peux m'expliquer ça?
Inaya écarquilla les yeux. La jeune fille s'attendait à vraiment tout sauf ça. Elle trouva l'attitude de Kentin un peu décevante. Certes, elle n'avait pas forcément envie qu'il sache ce qui s'était passé quelques minutes plus tôt avec Castiel, mais il avait pourtant très bien vu qu'elle n'était pas sereine à l'idée de se retrouver à côté de lui. Ca ne lui avait même pas effleuré l'esprit de lui demander comment elle allait. Et puis, il était censé lui donner de l'aide pour comprendre ce qui se passait avec Nathaniel.
-Oh, je vois, répondit-elle sans laisser transparaitre sa surprise. Mais je t'aide à une condition.
Inaya s'arrêta, regarda à droite et à gauche pour vérifier que personne ne les écoutait, et murmura:
-Que tu m'aides à trouver ce que Nathaniel cache.
-Mais je t'ai dit qu'il ne cache rien! cria-t-il
-Mais moins fort tu es fou! dit-elle en lui rabattant les mains sur la bouche.
Kentin maugréa quelques paroles inintelligibles, qui résonnèrent en écho dans le couloir. Elle avait envie de le tuer. Elle entendit des bruits de pas qui raisonnèrent dans le couloir. Isaya, toujours les mains posées sur la bouche de Kentin, tendait l'oreille. De loin, elle réussit à reconnaitre la silhouette élancée et élégante de Nathaniel. Ses cheveux d'or formaient comme une auréole autour de sa tête angélique. En marchant tels des crabes, Isaya mena Kentin vers la sortie du lycée, celui-ci se débattant médiocrement.
Une fois dehors, elle enleva ses mains de sa bouche et gronda:
-Tu as failli nous faire griller! Viens chez moi, mon frère n'est pas encore à la maison. Par contre il faudra faire attention à l'heure, s'il découvre que t'es là, il va me tuer, puis te tuer, et il va nous faire revivre, puis nous RE tuer... et cela à l'infini.
-On n'est pas obligés d'aller chez toi tu sais... proposa-t-il tout bas, le visage subitement pâle
-Non mais on fera juste attention à l'heure! Aller viens espèce de mauviette! dit-elle en éclatant de rire.
Sans réussir à protester davantage, Kentin suivit Inaya dans le chemin menant jusqu'à chez elle. Une fois arrivés devant la porte, elle lui chuchota de rester un peu en retrait le temps de vérifier que la voie était libre. Le coeur battant, Inaya fit tourner la clé de la porte, entra le plus naturellement possible, et s'assura qu'Adel n'était pas là.
-Tu peux rentrer! cria-t-elle à Kentin.
-T'es sûr? chuchota-t-il. Je n'ai pas l'intention de mourir jeune...
-Aller entre! lui assura-t-elle
Non serein, il rentra dans le petit appartement avec quelques cartons de déménagement encore visibles. Le lieu était petit mais chaleureux, avec tout juste ce qu'il fallait pour être largement à l'aise. Kentin entra dans la chambre d'Inaya, aux murs couleur blanc et une porte teinté d'un rose poudré. La pièce n'était pas très grande mais on pouvait y mettre un lit deux places, une table de chevet, et un bureau débordant de livres et de papiers. Les draps du lits étaient fleuris, donnant une âme à la chambre, et sentaient le jasmin et la citronnelle. Mais ce qui était le plus frappant, c'est le nombre innombrable de toiles qui décoraient la chambre. Kentin se sentit happé par cette chambre féminine.
-Tu excuseras le désordre, dit Inaya rougissant, qui cacha ses vêtements sous le lit
-Non mais c'est très bien, c'est super mignon, dit Kentin en souriant. C'est toi qui peint?
-Oh ça, fit-elle modestement. Je peins à mes heures perdues. C'est pour ça que je n'ai pas un seul pantalon comme neuf, je me tâche tout le temps!
-C'est sublime, vraiment
Kentin, fasciné, n'arrivait pas à détâcher ses yeux des différentes peintures. La majorité étaient à l'huile, et les styles et couleurs pouvaient totalement varier d'une peinture à l'autre.
-Celle-ci qu'est-ce qu'elle représente? demanda-t-il en désignant une toile noire fendue d'un trait rouge, et de deux traits bleus suivant les points de fuite.
-Ce n'est rien du tout!! dit-elle sans réussir à cacher sa panique. Il faut qu'on se dépêche par contre, je t'ai dit que mon frère venait bientôt...
Inaya remit une mèche noire derrière son oreille, signe qu'elle allait se mettre au travail, et s'exclama:
-A nos maths!
Elle reprit les notions du cours point par point, en insistant sur les points fondamentaux, illustra ses propos avec des schémas, tout cela sous le regard ébahi de Kentin. Elle prit le temps de lui expliquer comment calculer les différentes primitives, lui expliqua que certains cas nécessitaient des outils du supérieur comme les intégrations par parties, lui donna quelques exercices à faire. En moins d'une heure, les abstraction mathématiques parurent à Kentin beaucoup plus accessible, et dépourvus de toute mystification et sens caché. Les connaissances lui paraissaient à porté de main, aussi limpides que de l'eau claire. Les mathématiques perdirent de leur barbarie et de leur force intimidante. Kentin la remercia maintes fois, en flattant ses qualités de professeur.
-Ce n'est rien, lui assura-t-elle. Maintenant, il faut absolument qu'on trouve vite une solution pour Nathaniel.
-Ok, je suis à toi! Heu, je veux dire, pas à toi littéralement, enfin...
-Kentin! s'exclama la fille aux yeux d'amande. Tu divagues, il faut que je sache ce qu'il fait après le lycée...
-Mais Inaya, que penses-tu qu'il fasse? Il doit sûrement rentrer chez lui, comme absolument tous les gens après les cours.
Soudain, Inaya s'exclama:
-Mais c'est ça! Tu es un génie!
Le jeune homme arqua les sourcils en signe d'incompréhension.
-C'est évident, mais je ne vois pas le lien en fait. C'est à toi de rester concentrée jeune fille!
Ignorant sa boutade, elle se mit debout sur le lit et commença à sauter de joie.
-Mais non Kentin, ce que je vais faire, c'est que je vais tout simplement vérifier s'il est comme tous les gens... Je vais le suivre après les cours! C'est pas du génie ça!
-Ça, ça s'appelle être une psychopathe Inaya
-Et tu vas m'accompagner, ce sera juste excellent! s'exclama-t-elle en l'ignorant, toujours avec joie.
-Tu risques d'être déçue, je ne pense pas qu'il ait une vie parallèle ou quoi que ce soit. Il n'a pas l'allure d'un Peter Parker, encore moins d'un Bruce Wayne. Ce mec est totalement comme toi et moi. Et puis s'il nous crame, on va finir en prison, et je répète que je tiens à vivre une jeunesse normale sans mort prématurée ou emprisonnement à perpétuité. Et puis...
Chacun poursuivait son monologue, ce qui constituait le parfait dialogue de sourds.
-Demain, après les cours! Je sortirai de la bibliothèque comme à mon habitude, à la même heure. Puis on se cachera près des grillages et on attendra sa venue. Et là on va le suivre c'est du génie je le répète!
Elle sautait toujours de manière incontrôlée sur le lit.
-Inaya? fit une voix venant du salon
-Merde! merde! murmura Inaya, s'arrêtant de rebondir comme une enfant sur le mur.
-Tu es dans ta chambre? dit cette même voix familière
-N'entre pas je me change! cria-t-elle en fermant violemment la porte de sa chambre.
De la tête elle indiqua à Kentin de se cacher sous le lit, le visage de celui-ci étant aussi pâle que la mort. Il rampa comme un vers de terre jusqu'à la cachette de fortune.
-Tu es rentrée tôt aujourd'hui, lui dit son frère de l'autre côté de la porte
Il toqua.
-Je peux rentrer? demanda-t-il gentiment.
-Pas encore, dit-elle le plus sèchement possible pour qu'il n'ait pas envie de rentrer.
Elle sentit qu'il avait les mains posées sur la porte couleur pastel, attendant sagement le moment où il pourrait rentrer.
-Bon je rentre, joignant la parole à l'acte
Inaya, était assise sur le lit, le visage rosi après avoir tant sauté de joie. Adel courba le dos pour pouvoir rentrer, et se mit à côté d'elle sur le lit. Kentin, quant à lui, louchait sur les chaussures d'Adel et retenait tant bien que mal un éternuement.
-Inaya, je voulais te dire que j'étais désolé pour hier... Tu sais, depuis que nos parents sont loin, j'ai l'impression d'être responsable de toi, et s'il t'arrivait la moindre chose, je ne pourrais pas me le pardonner.
Inaya hésitait entre l'envie de se confier et le désir de voir son frère partir de cette chambre avant qu'il ne découvre que cette conversation n'était pas si privée que ça...
-Je ne t'en veux pas, mais je t'assure que je te disais la vérité, je travaille plus qu'à mon habitude, c'est tout.
-Atchoum! fit une voix
-Tu as entendu ça?! demanda Adel.
-Excuse-moi je viens d'éternuer, je ne me sens pas très bien, mentit Inaya.
Adel fronça les sourcils, se leva un instant. Il posa une main sur le front de sa soeur.
-Mais tu es brûlante! Et tu perles de sueur! Tu veux que j'appelle un médecin?
-Non, non, non, dit-elle précipitamment. Je suis juste fatiguée, c'est pour ça que je suis rentrée plus tôt.
-Tu aurais dû me dire, je serai venu te chercher. Aller allonge-toi. Tu veux quelque chose?
Inaya fit semblant de tousser et eut l'air soudainement fatiguée.
-Ca ne te dérange pas de me ramener un pain au chocolat de la boulangerie du coin? Je t'en demande sûrement beaucoup mais...
-Ca ne me dérange pas du tout! Ne bouge pas je reviens dans un quart d'heure ma Aya.
Il lui fit un bisou sur le front et courut vers la sortie.
Inaya attendit que la porte ne se claque avant de s'exclamer:
-Sérieusement Kentin! Un éternuement! T'es vraiment le pire. Maintenant file avant qu'il ne revienne, je n'ai pas mieux pour faire diversion.
Kentin sortit d'en dessous du lit, les cheveux pleins de poussière.
-Il faudrait penser à passer un coup d'aspirateur, j'y suis pour rien moi si je suis allergique aux acar-...
-Mais file je te dis! tempêta-t-elle
Kentin sourit et avant de partir, posa un baiser sur son front.
-Bisous ma Aya, la meilleure des actrices!
Puis il lui souffla d'un air séducteur:
-N'oublie pas de ramasser tes jolis sous vêtements d'en dessous du lit...
Elle rougit de honte et le regarda s'éloigner, lui éclatant de rire, elle le cœur battant incontrôlablement contre sa poitrine.
***
Le lendemain, Inaya ne pensait qu'au moment où la nuit tomberait, et où elle percerait enfin le mystère de Nathaniel. Elle avait opté pour une combinaison noire assez moulante, pour pouvoir le soir venu se confondre avec l'obscurité nocturne.
Isaya avait le coeur qui battait la chamade. Elle avait l'impression qu'elle allait faire quelque chose de proscrit, ce qui faisait monter en elle la sensation d'adrénaline.
Elle retrouva Kentin à l'entrée du lycée, comme à son habitude, le corps adossé contre le grillage.
-Heureuse que tu ne te sois pas désisté, dit-elle en rigolant.
Il répondit que peut être "reporter" la mission à une date non déterminée serait préférable, ce qui ne voulait pas forcément dire l'annuler selon ce qu'il entendait. Évidemment, Isaya se contentait de lui donner un coup d'épaule pour l'inciter à se taire. Puis pour compenser cette petite violence, elle lui faisait un câlin, ce qui suffisait très largement pour le faire taire. Personne d'autre à part lui n'était au courant de la mission, ce qui intensifiait le côté secret et interdit de la mission.
La sonnerie retentit, et Isaya prit Kentin par le bras pour l'entrainer vers la première heure de cours, qui n'était autre qu'un cours de philosophie.
-Ca ne fera pas accélérer le temps de courir! dit-il en trainant des pieds
Une fois en classe, Isaya s'assura d'être le plus loin possible de Castiel. Celui-ci ne semblait pas se soucier de sa présente. Agréablement surprise et soulagée, elle put se concentrer sur ce qui importait réellement. Le professeur commença à faire l'appel. On arrivait aux derniers de la liste...
-Nathalie?
-Présente!
-Nathaniel?
Personne ne répondit. Inaya regarda à droite et à gauche pour être sûre de ce qu'elle pensait avoir compris...: il n'était pas là. Il ne s'est jamais absenté, il n'est jamais arrivé en retard, pourquoi aujourd'hui?! Inaya serra fort le bras de Kentin qui retint un petit cri de douleur.
-Je ne suis pas un souffre douleur, je vaux mieux que ça! chuchota-t-il de manière outrée
Elle lâcha un long soupir de mécontentement.
Le professeur ne sembla pas vraiment s'inquiéter de cette absence, et se contenta de demander distraitement:
-Quelqu'un sait ce qu'il a?
-C'est pour raisons personnelles monsieur, dit une petite voix
La jeune fille aux yeux d'amande se retourna au quart de tour. Mélody! Bien sûr, c'est sûr qu'elle devait savoir ce qu'il avait. Gigotant sur son siège, Inaya ne pensait qu'à la fin du cours.
-Cesse donc de bouger! lui dit son camarade.
-Je ne peux pas je pense trop,
-Concentre-toi, ce qu'à dit ce très cher Nietzsche est brillant!
-Parce que tu comprends quelque chose à Nietzsche? pouffa-t-elle
-Mlle Inaya! s'exclama son professeur.
Celle-ci s'excusa piteusement et tenta de se re-concentrer, malgré le fou rire moqueur qui avait gagné la salle. Elle mordit son stylo rêveusement et continua à prendre des notes. Mais elle n'avait honnêtement pas la tête à ça. Inaya ignorait fondamentalement les raisons pour lesquelles Nathaniel la perturbait. Après tout qu'avait-il de si mystérieux? Elle se faisait certainement des films, tentant tant bien que mal d'ajouter du piment à sa vie. Et pourtant, elle n'était qu'à demi convaincue de ce que sa raison pouvait lui dire. Non, il n'y avait quelque chose d'autre... et elle allait le trouver. Elle ne savait exactement ce qu'elle éprouvait pour Nathaniel. Après tout, elle n'était là que depuis quelques semaines. Mais elle sentait son coeur réagir lorsqu'il était là. Elle se sentait bien avec lui. Elle avait l'impression qu'ils étaient peut être... "non je suis ridicule" se dit-elle intérieurement.
La sonnerie retentit, et c'est avec horreur qu'elle découvrir qu'elle n'avait même pas une demi page de prise de notes sur le cours.
-Je vais devoir rattraper tout ça, pleura-t-elle à Kentin
-Olala, épargne-moi ça, râla-t-il en la taquinant. Je te passerai mes notes. Et tu les passeras à ce cher et tendre Nathaniel aussi, tant qu'on y est!
Un éclair lumineux passa sur les grands yeux noisettes de la jeune fille. "Mais c'est cela! Viens on va voir Melody d'abord" s'exclama-t-elle. Elle le tira avec lui pour rejoindre Mélody, qui était sûrement dans la cour.
-Attends Inaya! Attends!
Il s'arrêta, essoufflé, sous le regard interdit d'Inaya. Il reprit:
-Tu ne penses pas que ça va faire bizarre qu'on aille parler à Melody? Je pense que c'est un peu trop obvious si tu vois ce que je veux dire.
-Tu as peut être raison... mais je ne vois pas de meilleure solution.
-Elle est peut être naïve, mais tu peux me croire que si c'est pour défendre Nathaniel, elle mettra tout en œuvre pour que personne ne sache ce qu'il a, dans l'optique où il cacherait vraiment un truc. Cette fille est dingue de Nath! Et puis, il y a même la possibilité qu'elle ne sache pas ce qui se passe.
-Mince, je n'y avais pas pensé, je me suis trop précipitée.
-Comme d'habitude j'ai envie de dire, dit Kentin à qui cela plaisait de pouvoir corriger cette tête
Déprimée, Inaya se laissa tomber sur un banc. Elle ne savait plus quoi faire. Il était vrai que voir Melody n'était pas la plus brillante des idées. Elle pourrait prévenir Nathaniel de leur curiosité mal placée... Que faire?
-Hé, Aya... lui dit Kentin en s'asseyant à côté d'elle.
Il posa son bras autour de ses épaules et lui dit:
-T'inquiète pas, on trouvera ce que ce petit blondinet arrogant peut bien cacher!
-Hé!
Il enleva du bout des doigts une larme qui perlait le long de sa joue. Puis s'approcha jusqu'à ce qu'ils soient nez contre nez. Inaya commença à rougir. Paradoxalement, elle se sentit protégée. Kentin était grand, fort, sentait l'air marin. Elle avait l'impression que ce simple bras la protégeait tout entière de tous les maux du monde.
-Mais ce soir, ajouta-t-il, on oublie toute cette histoire! Il nous faut du temps pour vivre! On fera ce que tu veux, on appelle Rosa, Iris, enfin tout ce petit monde, et on sort, on regarde un film, on fait ce que tu veux.
Inaya rit et hocha de la tête. Elle sentait qu'elle pouvait compter sur lui...
Mais elle ignorait ce qui allait lui arriver prochainement...