Mes mémoires
En ce mercredi, j'étais censé avoir ma séance avec monsieur Donovan, mais au final, j'avais changé la date au samedi. Aujourd'hui, j’avais préféré faire une sortie à quatre avec mon petit ami, ma sœur et sa petite amie. Un petit après-midi de couple, quoi. Nous allions donc commencer par un cinéma et ensuite nous irions tous les quatre boire un café. La journée allait très certainement être bien.
Seulement, nous n'avions pas pris en compte les goûts de chacun en matière de goût. Et si pour moi le gore était quelque chose que j’aimais, ce n’était pas le cas des trois autres. Le film d’action proposé par Vi et Ekko ne fut pas accepté par Cait qui tenait à tout prix à voir la dernière comédie romantique. Et après de longues minutes à délibérer, nous décidions de faire plaisir à Caitlyn. Non sans taquinerie ! Pop-corn et boissons en main, nous allions dans la salle et puis, à notre plus grande surprise, il se trouvait que Caitlyn avait trouvé une « bonne » comédie. Nous l’avions tous apprécié et à la fin du film, en allant vers le café, nous parlions dudit film. Finalement, ça n’avait pas été un choix trop ennuyant et nous nous étions excusés auprès de Cait qui avait pris une allure faussement hautaine. Des éclats de rire sortirent de nos gorges. On passait réellement un bon moment et cela me faisait du bien, d’autant plus que mon état mental n’avait pas été mis sur le tapis, ou pas encore du moins ?
De là où nous étions, on pouvait voir le café, il n’y avait plus qu’à traverser le passage piéton et nous y serions. Nous nous installions à une table en plein soleil. Il faisait beau, presque assez chaud pour être en t-shirt, enfin, pour les autres. Je comprenais mieux pourquoi j’avais sans cesse besoin de chaleur à présent. Une fois installés, nous attendions le serveur qui, pour l’heure, était occupé avec d’autres clients. Il était vrai qu’avec ce temps les gens seraient de sortie, la terrasse était du coup quasiment bondée. En attendant, je m’allumais une cigarette, et pour l’une des rares fois, j'étais la seule, bah, qu’importe. Lorsque le serveur arriva à notre table, nous commandions tous les quatre : un cappuccino pour moi, un macchiato pour Cait, et deux cafés pour mon petit ami et ma sœur.
En attendant nos commandes, nous commencions à parler du film, qui n’était pas si mauvais que ça au fond. Ce n’était pas de l’amour à l’eau de rose comme je le pensais et nous avions bien rit grâce aux rebondissements, mais…
« Ça manquait quand même d’hémoglobines… »
Les trois autres ricanèrent et je tirais la langue alors que nos boissons arrivaient. Je tirais une latte sur ma clope et posais mes mains de part et d’autre de la tasse une fois qu’elle était posée sur la table. Fermant les yeux, je soufflais de bien-être, j’adorais cette chaleur qui brûlait presque mes mains. Quelques secondes plus tard, je rouvrais les yeux et me rendis compte que les trois autres me regardaient. Je fronçais les sourcils et pris la parole.
« Quoi? » J’aime bien sentir ça… Ça pose un souci ?»
Sans vraiment m’en rendre compte, j'avais parlé d’une façon plus sèche que prévu. Est-ce que ma sœur parlait ainsi parce que cela touchait son hybridation ? Du moins, c’est ce que je pensais. Je soupirai.
« Pardon… »
« Tu penses sérieusement qu’on te regardait parce que cela vient de ton hybridation ?» demanda Cait.
« Je… Ouais…» Oui, il fallait bien que je l’avoue.
Et ma sœur me mit une tape derrière la tête.
« Jinx… Je suis une hybride et les deux autres humains là… » Elle montra Ekko et Cait du doigt avec un sourire en coin. « On choisit de sortir avec nous, même si on est des hybrides. Ils ont putain de bons goûts !»
Et tout le monde se mit à rire à l’unisson. Ekko prit ma main et la serra en me regardant avec ce zeste d’amour qu’il avait toujours en faisant ça. Je devais bien reconnaître que j’aimais ça, oui, par-dessus tout, et, je m’en voulais tellement de douter de lui parfois. Parfois… Trop souvent même. Je me raclais la gorge et sortais de mes pensées avant d'attraper ma tasse pour en boire un peu de son contenu, me rendant soudainement compte que la discussion avait continué et que les autres parlaient à présent de leur futur, de leur métier.
« Et toi Jinx?»
« Qu.. Quoi?»
« Perdue dans tes pensées encore une fois… Je demandais les métiers que l’on voulait faire. Ta sœur veut faire boxeuse pro, Ekko astronome…»
« Ouais, si j’y arrive avec ma moyenne…»
« Toujours croire en ses rêves, Ekko!»
S’exclama Cait’ qui était très enthousiasmée en entendant l’idée de métier de mon petit ami.
« Et toi alors ?» continua la jeune femme.
« J’hésite.. Il y en a deux, et opposés… Médecin légiste ou artiste peintre.»
« Personnellement, je pense que les deux à la fois sont possibles…» Expliqua Vi, pensive. « Tu peux faire médecin légiste et, à côté, peindre et te faire exposer? Je dis pas que ça sera simple loin de là, mais je sais que t’en es capable. Y’a bien des médecins légistes qui écrivent des bouquins…» Elle ricana et reprit. « Tu pourras faire des peintures de tes patients ?»
Nos rires se firent entendre et Cait secoua la tête.
« T’es irrécupérable, mon ange.»
« Bah quoi, c’est vrai !»
Je pus alors voir la petite amie de ma sœur réfléchir. Elle but un peu avant de reprendre la parole.
« Cela dit, je crois que ta sœur a raison. Pourquoi ne pas faire les deux ?»
Emballée par l’idée, j'eus un large sourire qui apparut sur mon visage.
« Oui! Vous avez raison !»
Tout le monde semblait heureux de voir que je croyais en ce qu’ils disaient, et pour être honnête, cela m’avait donné envie d’essayer, mais aussi envie de croire que j’avais un avenir. Ce qui n’avait pas été le cas depuis quelques mois déjà. Cependant, il ne fallait pas que je pense à ça, au moins pour ne pas ruiner cet après-midi qui se passait à merveille. Nous apprenions ensuite le métier envisagé par ma sœur, boxeuse professionnelle, c’était… Sur la bonne voie et pas du tout un rêve infaisable. Quant à Cait, elle souhaitait devenir psychiatre. Une chose qui ne m’étonnait que peu en soi, étant donné qu’elle était toujours à l’écoute des gens et était toujours de bons conseils.
Le temps passait et les conversations allaient bon train. Tout le monde faisait en sorte de me faire passer une bonne journée. En parlant, en riant, tout était fait pour que je ne pense pas à mes soucis. Scarifications, drogues, hallucinations, tout était fait pour que je ne pense pas à ces trois choses, bien qu’elles me traversaient parfois l’esprit. Seulement, cela se voyait et mon petit ami, ma sœur et Cait me faisaient revenir à la réalité bien vite en m’incluant de nouveau dans la conversation. Je passais véritablement un bon moment. Et quand le soleil commençait à se coucher, quand nous n’avions plus envie de boire, il était temps de rentrer chez nous. Nous nous séparions, sauf Vi et sa petite amie qui dormait chez notre père ce soir.