Aventures : La Fanfiction - Saison 1
Épisode 28 : La Porte de l'Étoile
Par Juuri San
Les aventuriers soufflèrent de concert. Ils avaient, miraculeusement, réussi à fuir ces araignées de malheur. Le sol trembla sous leurs pattes, par le poids dantesque de chacune, et de leurs tailles allant de pair avec leurs chitines monstrueuses. Ils arrivaient presque à compter le nombre du troupeau, qui glaça le sang de certains d'entre eux. Grunlek sentit en son for intérieur qu'aller vers la porte de l'étoile n'était absolument pas une bonne idée. Du tout. Il jeta un coup d'œil vers Bragg, qui tentait de se rassurer en regardant les postures des différents membres du groupe.
Le silence se fit soudainement. Ils se regardèrent tous dans les yeux, se demandant silencieusement si la possibilité de sortir de la tour allait les mener vers une mort aussi douloureuse que ridicule. Ils opinèrent tous ensemble silencieusement pour rester à l'abri entre ces murs, pour au moins se reposer un minimum. Le nain se craqua les épaules, fatigué par ces trois jours de marche non-stop, autant que Théo qui affichait une mine fatiguée. Bob et Shin partirent de leur côté pour trouver un point élevé pour que le demi-élémentaire puisse faire le guet. L'archer avisa un coin parfait et tendit son corps pour sauter. Aussi habile qu'un chat, son pied prit appui sur mur et il bondit sur le bord de la pierre, se relevant avec souplesse sur le rebord le plus haut de cette vieille tour. Son regard scruta l'horizon, plongée dans les ténèbres, captant les éclats de lumière lunaire brillants sur la chitine des araignées s'enfonçant dans le noir, toutes suivants un même chemin. Il fut effaré par leur nombre imposant plus que par leurs bruits.
Théo, d'en bas, lui fait un petit signe, celui de se reposer pour le moment. Le danger semblait s'être écarté, et un peu de sommeil ne ferait pas de mal aux muscles endoloris des aventuriers après ces nombreuses péripéties. Grunlek prit avec une joie à peine dissimulée les bourses d'or volées plus tôt, amour nain pour l'agent oblige pendant que Bob sortit les cartes, elles aussi dérobées, pour analyser le terrain et les environs, sous l'œil habituellement intransigeant du paladin qui ôta son armure pour mieux profiter de ses quelques heures de sommeil. Le mage s'endormit à son tour sur les parchemins, après avoir compris que cette fameuse « Porte de l'étoile » était des plus petite, de taille humaine sans doute, s'assoupissant après avoir compté les sept jours de marche qu'il fallait pour la rejoindre. La torpeur s'installa progressivement dans le groupe, aidée par une douce chanson en élémentaire fredonnée par Shin en haut de son perchoir, et tous sombrèrent dans l'inconscience.
Ils se réveillèrent tous d'un coup. Un haut-le-cœur les secoua, à la limite des vomissements. Un sentiment de malaise, pire, un sentiment de catastrophe serrèrent leurs gorges, les arrachant au doux bras de Morphée. La nuit ne semblait s'être finie, aucun d'entre eux n'en était sûr avec leurs têtes sonnées par ce réveil brutal. L'effet ne semblait pas seulement les toucher uniquement, toute la région devait être touchée par ce déferlement de puissance. La cité des Merveilles devait être la cause de cette impulsion alors que l'aurore pointait. Théo enfila prestement son armure tendit que Shin descendit de son mur et que les autres se réunissaient près de la porte. Balthazar usa de ses capacités de pyromage pour chauffer les gonds de la porte à blanc et Grunlek n'eut qu'à décocher un coup de poing pour faire voler la porte. À peine ouverte, les traces profondes des pattes d'araignées dans la terre leur sautèrent aux yeux, montrant le chemin à suivre sous la lumière nouvelle du jour.
Ils reprirent la marche. Bragg semblait toute fois inquiet de l'état du paladin, offrant son aide pour essayer de le soulager, voir de le guérir, annonçant être un descendant d'une lignée de médecins et de guérisseur. Bob avait ricané sous cape, les preuves contre l'Intendant l'ayant suffisamment alerté pour ne pas laisser un inconnu trempé dans cette histoire de gemmes toucher à son ami. Il surveilla donc les moindres faits et gestes de Bragg à la recherche de celui qui confirmerait tous ses soupçons, recommandant souvent à Théo de bien se détendre pour les aider à les guérir tous, invoquant même Brasier pour que l'inquisiteur ne marche pas trop et qu'il n'accélère pas l'effet du poison. Le nain, lui, flatta l'encolure d'Eden en vérifiant régulièrement l'état de la patte de son amie canidé, se souciant peu de Bragg et des émois de Bob.
En milieu du voyage, alors que Bragg préparait un onguent naturel avec des plantes sauvages que Shin lui avait dégoté, le mage décida de mettre au clair les intentions de l'Intendant. Il s'approcha de ce dernier, examinant les gestes de l'autre homme, qui, soudain méfiant de la brusque approche et du souffle du demi-démon contre sa nuque, se retourna vers l'autre.
— Ça fait trois jours que cela dure, maître mage. Votre attitude est un peu oppressante, si vous avez quelque chose à me dire ou à me reprocher, dîtes le moi, fit Bragg, un peu dépité par l'attitude de l'autre.
— Depuis trois jours, les coïncidences s'accumulent. Vous êtes l'intendant de la Tour, vous avez un général sous vos ordres avec lequel vous commencez vos expérimentations sur les gemmes de pouvoir, il vous met en taule parce que vous deux, ou lui-même, découvrez quelque chose au sujet d'araignées empoisonneuses dont vous savez mystérieusement soigner les effets alors que, pour connaître les effets d'un venin, il faut au moins connaître l'existence de ce venin. J'ai des suspicions et je ne doute pas sur le fait que vous soyez notre allié. Nous ne vous aurions pas sauvé, sinon, et pour tout vous dire, j'apprécie votre compagnie. Cependant, j'ai peur que vous nous cachiez quelque chose ou que vous nous cachiez des méthodes pour soigner notre compagnon. Si vous êtes responsable de tout ce bordel, je ne vous en tiendrais pas rigueur, on fait tous des erreurs, cependant, j'ai beaucoup de questions et je n'osais pas vous les poser, mais maintenant, vous m'y voyez forcé, conclut le mage en reprenant légèrement son souffle.
Bragg fronça légèrement les sourcils, attentif à la parole de Bob, avant de prendre lui-même la parole pour rétorquer :
— Et bien… me voilà ravi que vous ayez crevé l'abcès, lâcha-t-il en ignorant le petit « navré » de Balthazar. Écoutez, je vous l'ai dit, je ne suis pas évidemment tout blanc dans cette affaire… La guilde des intendants a tenté des choses, peut être, probablement visionnaires… et il y a eu des dérapages. Regardez le chevalier Vladimir Hanibal, où est-ce qu'il en est venu… Il a découvert des choses… je, je sais que nous sommes allés trop loin, en cette connaissance, qu'il y a des choses interdites, qu'il faut mesurer. Ces araignées, peut être, probablement est-ce le résultat de ces recherches… mais, qu'est-ce que vous voulez que je défende ? Nous sommes dans un domaine visionnaire, nous sommes dans un domaine qui dépasse le commun des mortels ! Si aujourd'hui je vous dis que je suis coupable, oui, je peux vous le dire coupable. Coupable de quoi après tout ? Coupable d'avoir tenté des choses qui n'ont jamais été expérimentées ? Et, ce que je sais aujourd'hui, c'est que le chevalier que nous poursuivons est probablement en train d'essayer de faire pire encore… Est-ce que ça veut dire que je suis contre vous ?
— Non, non… en tant que mage, vous avez gagné mon respect après tout. Ma fonction m'impose et m'oblige à expérimenter de nouveaux domaines et à toujours chercher du côté de la connaissance ! Si vous cherchez un homme d'éthique, vous êtes tombé sur le mauvais bonhomme, rit Bob. Ce que je vous reprochais, ce n'était pas forcément d'être responsable de tout ça, c'était pour savoir si vous derrière vous aviez un agenda caché ou si votre objectif ultime était de vous aussi lier soit à ces gemmes de pouvoir soit aux araignées. C'est ça la seule crainte que j'avais, mais du coup, vous semblez être cool donc…
— Je suis forcément lié à tout ça… à cause de tout ce qui a été fait… et, je vous le promets, et je vous le jure sur ce que j'ai de plus cher, mon principal objectif, là, maintenant, tout de suite, est d'arrêter la folie de ce chevalier qui est probablement en train de mettre en place des choses qui vont à l'encontre de tout ce qui peut être bon pour ce monde.
— Alors, nous sommes d'accord et nous sommes amis, fit le demi-diable avec un sourire. Vous pourriez m'apprendre à faire cet onguent magique ? Parce que, si jamais il arrivait malheur à n'importe qui, même à vous, je suis désolée de le dire, mais j'aimerai quand même pouvoir continuer à soigner mon compagnon si vous n'y voyez pas d'inconvénient, c'est pour ça que je regarde au-dessus de votre épaule depuis trois jours…
— Le temps n'est pas à l'apprentissage. Je vous promets quand tout cela serra terminé, je vous apprendrais tout ce que vous avez besoin d'apprendre, vous en avez ma parole.
— Mmmh…
Après cette scène, le groupe se remit en route assez silencieusement, pour finir en fin de semaine au lieu tant attendu et craint. La Porte de l'Étoile. Shin se trouvait en premier, éclaireur parfait avec ses sens aiguisés de demi-élémentaire, il pourrait repérer les éventuels dangers avant les autres. Il remarqua avec Théo beaucoup de toiles d'araignées tendues sur la plaine, avec de grandes masses sombres se profiler près de la porte, en nombre. Le paladin n'arrivait pas à voir plus loin, au contraire de l'archer qui, du coin de l'œil, perçut une silhouette se débattre dans une gigantesque toile, un paladin au vu de son armure imposante. Son oreille entendit à peine un appel à l'aide, si faible qu'il n'arriva pas à différencier un homme d'une femme. Ils reculèrent légèrement pour trouver une stratégie afin d'éviter un maximum les araignées.
— Mon seigneur, fit Bob en tournant sa tête vers Bragg, vous auriez une astuce pour contourner les araignées, tromper leurs sens ou un point faible quelconque ?
— Euh… écoutez, peut être qu'en ayant été immergé dans cette ambiance, moi je peux essayer éventuellement de faire diversion en y allant… ou je peux essayer d'avancer pour voir comment elles réagissent…
— Mais vous allez vous faire bouffer, ne faites pas ça ! s'exclama Bob, outré.
Tous se retournèrent vers l'intendant, les suspicions de retour. Était-il fou, courageux, ou conscient que les araignées lui obéiraient s'il marchait en plein milieu du champ de bataille ? Et comment sauver la personne coincée dans les toiles ?
— C'est louche, lâcha Théo d'un ton dur.
— Attendez, vous vous rappelez pas le coup de la tour !? Vous avez failli vous faire bouffer donc c'est quoi le délire maintenant ? Vous allez volontairement plonger dans les araignées ? acquiesça Shinddha.
— Me dites pas que les recherches sur les gemmes de pouvoir sont liées sur le contrôle de ces araignées ? s'énerva Bob.
Bragg leva ses mains devant lui en geste d'apaisement, ce qui ne fit que plus énerver le demi-démon et assura que les recherches portaient sur plein de domaines différents, que les araignées pouvaient être reliées à elles, mais il ne savait pas dans quelle mesure, ce qui calma un peu Bob.
— Si vous aviez accès à une petite dose de gemmes de pouvoir, pourriez-vous nous frayer un chemin ? demanda le mage en prenant soin de ne pas parler directement du crâne cristallisé dans sa sacoche avant de le sortir.
Tous se mirent à réfléchir ensemble. Bob continua d'être perplexe sur la fidélité et l'honnêteté de Bragg. Attirer les araignées vers eux pour voir leur agressivité, idée sortie par Théo, fut la plus potable. Ils décidèrent d'attirer une ou deux araignées vers eux afin de tester le pouvoir du crâne sur les animaux, afin d'être sûrs de pouvoir aller jusqu'à la porte. Ils choisirent Shin pour attirer une araignée et les autres entourèrent Bragg pour l'empêcher de fuir, Bob collant le crâne couvert de gemmes dans les mains de l'intendant en attendant que le demi-élémentaire ne lance un caillou sur l'araignée la plus proche. Korry prit une pierre qui lui sembla adéquate, se concentra sur son lancer quelques secondes et lança. Fort. Beaucoup. Trop. Fort.
La pierre frappa de plein fouet la première araignée, puis ricocha avec force sur une autre, puis une autre… Tellement que Shin n'en devint que plus bleu, en voyant toutes les araignées touchées se ruer vers eux avec rage…