Aventures : La Fanfiction - Saison 2

Chapitre 2 : Gain de puissance

2862 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 04/11/2025 13:08

Épisode 2 : Gain de puissance

Par Myfanwi


La voix du serviteur de l'Église des Murmures leur demanda de rentrer. Les aventuriers marquèrent une pause, hésitant. Ils avaient bien progressé en quelques mois. Les dernières aventures leur avaient servi de leçon, ils avaient décidé de prendre du temps pour s'entraîner, pour se préparer à la suite de leur voyage. De nouveaux atouts s'étaient ajoutés à leurs compétences initiales, leur permettant une plus grande liberté d'action.


Après quelques ratés et deux robes cramées, Balthazar avait appris à se téléporter dans les flammes. L'entraînement ne fut pas de tout repos et le mage s'était tué l'esprit à chercher les bonnes formules pour que tout fonctionne sans trop de mal, mais il était assez satisfait du résultat.


Grunlek, suite aux divers dysfonctionnements récents de son bras, s'était intéressé de plus près à lui, à ses mécanismes. Alors qu'il bricolait tranquillement, il avait fait une mauvaise manipulation, et son bras s'était disloqué, s'agrandissant d'un bon mètre et faisant au passage voler Viktor en bas de la colline où ils campaient parce qu'il avait eu le malheur de s'inquiéter pour lui. Ce petit problème, le nain le trouva extrêmement pratique, et décida de le garder tel quel, en faisant tout de même attention à ce que ça ne se déclenche pas tout seul, comme c'était arrivé plusieurs fois dans les jours qui suivirent.


Shin quant à lui, se sentit de plus en plus rappelé par son élément. Alors qu'il somnolait près d'une rivière après avoir mangé trop de pommes, il sentit une boule d'énergie se former sous ses doigts. Alerté, il paniqua quelque peu, surtout quand la forme se mit à bouger et à prendre une forme humanoïde. Avec quelques jours d'entraînement, il se dit que ça pouvait lui faire une bonne compagnie, notamment pour aller lui chercher les pommes trop hautes dans les arbres. Il lui donna même un nom : Icy.


Viktor emboîta le premier le pas à l'envoyé de l'Église des Murmures, suivi de très près par Balthazar, Shin et Grunlek, fermant la marche à l'arrière, toujours prudent. Il fit un petit signe de tête à Eden dans l'encadrement de la porte, pour lui signifier d'aller se promener. La louve ne se fit pas prier et disparut dans un fourré, arrachant un sourire en coin à son propriétaire. Même s'il savait qu'elle ne partait jamais très longtemps, la voir disparaître ainsi lui arrachait chaque fois un petit pincement au cœur.


En passant le seuil du temple, le regard du mage fut attiré par une charrette à l'entrée, visiblement là depuis très peu de temps. L'homme appuyé contre cette dernière croisa son regard l'espace d'une seconde, empli de gêne et de culpabilité. Était-il en train de leur cacher quelque chose ? L'esprit naturellement curieux du demi-démon s'éveilla immédiatement. Viktor s'aperçut de son état et tourna la tête lui aussi vers la carriole. Il reconnut le modèle de celle-ci, semblable à celles employées dans son ordre pour transporter les prisonniers. C'était un chariot prison. Il décida d'en informer le groupe, puisque le nain et le demi-élémentaire étaient en train de se disputer pour récupérer une pièce d'or à terre.


— Eh, murmura-t-il, vous voyez le chariot là-bas ?


— Ouais, c'est sûrement un piège, lâcha immédiatement Bob.


— … Non, mais c'est un chariot pour transporter des prisonniers. Je ne sais pas ce qu'il y a ici, mais il se pourrait que l'on trouve des personnes ayant commis des activités criminelles.


— T'es sûr qu'elle est pas pour nous ?


— C'est la question que je me posais aussi, poursuivit Grunlek. 


Viktor les dévisagea tous les trois, un à un, en plissant fortement les yeux.


— Pourquoi ? Vous avez réalisé des activités criminelles ?


— Quoi ? Nooooooon, répondit Bob, sur un ton légèrement suspect.


— Juste un peu de drogue dans mon sac, chuchota Shin. Mais c'est pas un drame, si ? 


Le bleu et le rouge sourirent de manière totalement hypocrite au magister qui poussa un soupir de désapprobation. Comment Théo avait-il pu les supporter pendant aussi longtemps ? Grunlek, plus sage, profita de l'inattention du demi-élémentaire pour ramasser la pièce et la cacher dans une de ses poches en sifflotant.


Le groupe entra finalement dans l'église, en file indienne. L'entrée donnait sur un grand autel en pierre, aux écriteaux en or. Des odeurs d'encens leur chatouillèrent de suite les narines. Il y en avait partout dans la pièce, s'échappant de petits pots sur le sol et les appuis de fenêtre. Le serviteur était adossé contre un énorme pilier, les surveillant du regard alors qu'ils avançaient. Grunlek à l'arrière, peu rassuré, jura avoir entendu l'espace de quelques secondes des murmures, des voix presque imperceptibles venues d'outre-tombe. Il accéléra un peu le pas pour rattraper ses amis, mal à l'aise. Devant lui, le demi-diable et le demi-élémentaire semblaient eux en pleine forme, blaguant sur le fait que l'intérieur de l'église paraissait plus grand que l'extérieur.


Le groupe continua à progresser dans l'église. Ils approchèrent d'un homme à l'allure sévère, les dévisageant les sourcils froncés. Viktor l'identifia de suite comme un paladin, il en avait vu assez pour connaître leurs mimiques habituelles. La sentinelle n'appréciait de toute évidence pas l'intrusion d'hérésies dans son sanctuaire, mais il l'acceptait, probablement par un ordre venu de plus haut. Viktor jeta un coup d'œil à sa ceinture. L'homme était armé et représentait par conséquent un possible danger pour leur groupe. Le magister nota cette information dans un coin de sa tête, juste au cas où les choses tournaient mal.


— Est-ce que c'est normal qu'ils soient tous armés ? chuchota Grunlek à l'arrière. C'est pas censé être un lieu sacré les églises ?


— J'imagine que celle-ci doit être très silencieuse déjà, répliqua Shin, faisant pouffer le mage devant lui. 


Le nain n'eut pas plus de réponses, tirant une petite moue en voyant ses deux compagnons s'éloigner. Hormis le fait qu'ils étaient attendus, ils n'avaient reçu aucune information sur cet endroit, ce qui mettait le nain quelque peu mal à l'aise. Les rumeurs sur leur groupe allaient bon train dans le Cratère, et il craignait fortement d'être tombé dans une embuscade. Voyant que le soldat avait braqué le regard sur lui alors qu'il s'était arrêté pour réfléchir, Grunlek rattrapa rapidement ses amis. Il y avait quelque chose dans cette église qui le dérangeait. Et si ces prêtres n'étaient pas si pacifistes que ce qu'ils laissaient paraître ?


Les aventuriers s'arrêtèrent brusquement devant une scène irréaliste, qui relevait d'un rituel échappant même au mage habitué à toutes sortes de magie. Un homme en tenue de voyageur était assis sur le sol, poignets et chevilles liés à des chaînes. Il leva la tête vers eux, et éclata en sanglots tout en riant, visiblement peu ravi de les voir et résigné à son sort. À ses côtés, également enchaînée, se trouvait une seconde créature, massive, installée sur une dalle en fer.


— Une gargouille, marmonna Bob, visiblement tendu. 


Le monstre deux pierres tourna ses yeux rouge sang sur les aventuriers, tirant un peu sur ses liens. C'était après Viktor qu'elle en avait, certainement à cause de l'armure blanche qu'il portait, lui rappelant amèrement les personnes qui l'avaient attachée en ces lieux. Sur l'autel derrière les deux prisonniers se tenait un homme grassouillet, mains jointes, murmurant des versets que Viktor identifia comme appartenant à l'Église des Murmures. En revanche, aucun signe de la femme qui était censée les accueillir, Sœur Maëda. Le regard du magister fut détourné par la vision d'une jeune femme habillée en servante, à genoux, silencieuse. Il ne put refréner un frisson, cet endroit ne lui plaisait pas. Décidant d'en terminer au plus vite, Viktor s'avança vers l'homme près de l'autel, jusqu'à être à portée de voix :


— Bonjour, je suis Viktor Oppenheimer, magister-inquisiteur de l'Église de la Lumière. Notre ordre vous adresse ses salutations distinguées. Nous sommes ici en quête d'informations, sur l'invitation de Sœur Maëda. Serait-elle dans les parages, s'il vous plaît ? 


Le prêtre releva les yeux vers le groupe, détaillant chacune des personnes présentes d'un regard hautain, qui imposait le respect. Il s'inclina respectueusement au salut de Viktor, avant de prendre à son tour la parole, d'une voix grave et éraillée :


— Soyez les bienvenus, voyageurs. Soyez le bienvenu, inquisiteur-magister. Vous êtes bien dans l'Église des Murmures, Sœur Maëda vous accueillera en temps voulu. Vous êtes en ce jour béni en présence de deux accusés, de deux criminels qui ont causé du tort à l'Église des Murmures. Ils seront aujourd'hui jugés pour leurs crimes, et nous sommes honorés, ravis… Nous sommes heureux de vous avoir comme témoins, mes amis. 


Les aventuriers se jetèrent des regards interrogatifs, ne sachant pas comment réagir à ce… cadeau ? Balthazar et Viktor ne semblaient pas vraiment avoir de problème moral avec cet acte, habitués aux exécutions publiques des milieux citadins. Le mage était plutôt ravi d'apprendre que le chariot des prisonniers qu'il avait vu plus tôt ne leur était pas destiné, en plus du fait que les prêtres n'avaient pas hurlé à l'hérésie en le pointant du doigt. Grunlek et Shin restèrent silencieux, analysant la situation.


— Vous nourrissez ma curiosité, répliqua calmement le magister. Qu'est-ce que ces deux personnes ont fait ?


— En ce qui concerne le conteur, répondit patiemment le moine, en pointant l'homme enchaîné de la main, il raconte et fabule sur l'Église des Murmures. C'est un hérétique ! s'enflamma le religieux. Il dit n'importe quoi sur notre ordre, et sur toutes les Églises en général ! Il mérite qu'on lui retire le plus sacré des éléments : on lui enlève la parole à tout jamais. 


Le demi-diable siffla d'admiration. Ces glandus étaient plus inventifs que les bourrins de l'Église de la Lumière, privilégiant les pendaisons et les bûchers pour ses propres hérétiques.


— Et concernant cette monstruosité, poursuivit le prêtre en montrant la gargouille, elle s'est attaquée à des bienfaiteurs. À des personnes qui priaient profondément notre Dieu. Et pour punition, nous allons à elle aussi lui retirer le don de produire des sons. Car produire des sons est sacré, et nous sommes là aujourd'hui pour les châtier. 


Des pas retentirent derrière le groupe. Grunlek profita de cette diversion pour pousser un grognement de mécontentement, qui attira le regard de son compagnon à la peau bleue. Il s'adressa à lui à voix basse :


— Le seul crime de cet homme est d'avoir mal parlé. Et on le prive de sa liberté d'expression. Chez moi, on a fait tomber des tyrans pour avoir osé nous empêcher de nous exprimer.


— Je suis désolé, murmura le pauvre homme enchaîné, qui l'avait entendu. Je… Je ne suis qu'un conteur, je raconte des histoires. Je suis désolé, je ne voulais pas vous froisser… Inventer des histoires, c'est… c'est ma vie, ne m'enlevez pas la parole, pitié. Pitié… 


Viktor s'approcha de lui, et le força à relever la tête.


— Qu'as-tu dit sur les Églises, mon cher ami ? demanda-t-il d'une voix en apparence calme, mais menaçante.


— Quelques rimes malheureuses, répondit le condamné. Je… Je me suis peut-être un peu moqué, je suis désolé. N'y a-t-il donc aucune place pour l'humour ? 


Viktor, Shin et Bob débattirent à voix basse du sort de l'homme, se mettant d'accord sur le fait qu'il n'y avait rien à faire et qu'il fallait laisser couler, riant même de sa misère alors que le pauvre homme continuait de les implorer.


— Il connaît peut-être Bragg, lâcha Shin en riant.


— Oui ! Oui, je connais Bragg ! cria le malheureux. Libérez-moi et je vous dirais tout ! 


Le prisonnier fit un portrait exact de l'intendant immédiatement derrière, surprenant les aventuriers, décontenancés par ces soudaines révélations. Les pas se rapprochèrent derrière eux, et une femme âgée, ridée, aux cheveux pâles, se fraya un passage entre les aventuriers. La robe blanche la recouvrant lui donnait des airs de spectre. Elle passa simplement entre eux, les ignorant, tout en murmurant des versets de son ordre, un sourire malsain accroché sur son visage de fouine. Balthazar sentit son cœur se serrer en comparant ce sourire avec celui qu'avait parfois Théo, dans les mauvais jours. Il baissa immédiatement le regard, refoulant une envie de tout brûler.


Le mage s'aperçut alors que Grunlek avec les poings serrés, crispé. En relevant les yeux vers son visage, il put lire l'intense réflexion qui l'animait. Le sentant proche d'intervenir et risquer une catastrophe, Bob se pencha discrètement vers lui et lui chuchota quelques mots :


— Je sais qu'il a l'air de connaître Bragg, mais c'est un conteur, on ne peut pas savoir s'il dit la vérité, même si c'est dur. Et si on veut retrouver Bragg, et venger Théo, on va devoir écouter ce qu'elle a à nous dire.


— Oui, mais si on perd notre identité en chemin, lui répondit-il sombrement, si on laisse des choses comme celles-ci se produire, si un simple conteur va être mutilé juste pour quelques mots : moi, ça me pose un problème.


— Nous ne sommes pas de taille à nous battre contre tout un pays, Grunlek. Ils ont leurs rites, leurs cultures, et cette Église soumet probablement la moitié de cette région. Crois-moi, on ne peut rien faire. Pensons d'abord à sauver nos vies avant de sauver celle des autres. Nous ne sommes pas rois. Je sais que c'est pas cool, mais on récupère nos informations et on se casse d'ici. Je ne veux pas perdre ma voix pour ces conneries.


— Et puis il va pas mourir, intervint Shin. Il va juste perdre un sens, il s'en remettra. 


Viktor, en entendant les jérémiades de ses compagnons, finit par lever les yeux au ciel. Il s'approcha de l'imposant prêtre, et s'adressa posément à lui, pour faire son possible pour aider :


— Excusez-moi, ce jeune conteur détient apparemment des informations qui seraient extrêmement utiles à l'Église de la Lumière. Voudriez-vous faire preuve d'une extrême bonté et de nous accorder le droit d'interroger cette jeune personne pendant quelque temps, avant que vous ne l'exécutiez, dans le cadre des bonnes relations entre l'Église de la Lumière et l'Église des Murmures. 


Grunlek croisa le regard de vipère de la femme qui les avait convoqués. Il lui vint alors à l'esprit que tout ceci était peut-être un test pour les jauger. Pour qu'ils montrent leur vrai visage sur la façon de traiter un innocent. L'envie d'intervenir lui démangeait de plus en plus, mais il restait pour l'instant en retrait, remerciant simplement Viktor du regard d'essayer de gagner du temps.


Le moine plissa les yeux à la requête de Viktor, avant de prendre la parole :


— J'ai une sentence à appliquer, mais j'accepte. Vous pouvez… 


La main de Sœur Maëda se dressa immédiatement devant lui, le faisant taire et s'incliner de respect. Elle se dressa sur l'autel, et prit la parole :


— Vous n'êtes pas chez vous, inquisiteur. J'ai les informations que vous désirez, mais j'aimerais avoir le privilège de mener ce châtiment. Et j'aimerais avoir le plaisir de vous compter comme invités, pour accomplir cette sanction. Je vous en prie, posez-vous en témoins et appréciez s'il vous plaît le spectacle.


— Vous détenez toutes les informations de ce jeune homme ? insista Viktor, sentant qu'il perdait l'avantage.


— Je connais les informations que vous cherchez. Vous êtes à la recherche de cet intendant Bragg, c'est bien cela ? Je vous donnerai ses informations. 


Grunlek serra un peu plus les poings, le regard noir, se sentant prisonnier, alors que Shin murmurait à voix basse qu'il refusait d'assister à ça. Balthazar, après un moment d'hésitation, avança de deux pas et claqua son bâton sur le sol marbré, pour obtenir l'attention de leur interlocutrice.


— Vous voulez le silence, parfait. 


Il se concentra, se préparant à ouvrir une communication mentale avec la vieille femme. Derrière eux, Shin remarqua soudainement un détail frappant, qu'il pointa du doigt en donnant un petit coup à Grunlek et Viktor. Les chaînes entourant les pieds de la gargouille étaient mal scellées, se pouvait-il que cet acte soit volontaire ?

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