Chapeau melon et bottes de cuir

Chapitre 6 : Morelia Viridis

2755 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 13/03/2014 01:18

S’il y avait bien une chose que l’on pouvait accorder à Edward Nygma, c’est qu’il ne mentait jamais. D’accord, c’était à cause de ses troubles obsessionnels compulsifs, mais tout de même. Le costume de Daphnée, ou Seshat comme il l’appelait désormais, n’avait rien à voir avec celui de ses précédentes complices. Elle avait eu droit à un pantalon de combat, toutes les protections nécessaires au port d’un arc, une tunique verte avec les taches de léopard en forme de point d’interrogation et l’inévitable loup tenant grâce à une bonne dose de latex liquide. Dans le bureau de Nygma, qui à la grande horreur de Daphnée abritait un vivarium et un python vert nourri au beurre de cacahuètes, actuellement sur les épaules dudit vilain, le Sphinx présentait son plan.

La veille, évidemment, puisque personne n’a besoin de se préparer mentalement à ce genre de choses.

«  Comme tu le sais probablement, souris curieuse que tu es, Le musée d’Héraklion a tenu à risquer sa collection inestimable en faisant un échange avec Gotham, problèmes économiques obligent. »

A la réflexion, ça n’était peut être que son inconscient, mais il lui semblait que le serpent s’était mis à la fixer à la mention du mot « souris ». Mais qui dans cette ville avait bien pu être suffisamment dingue pour donner un python de trois mètres à un super vilain ?

… Probablement personne. Mais ce que Nygma aime, Nygma prend.

«  Et parmi tous les trésors qu’ils ont envoyé, il y en a un qui m’intéresse tout particulièrement, une énigme digne du Sphinx : le disque de Phaistos »

Elle leva les yeux au ciel. Evidement. Une poterie avec des inscriptions écrites dans un langage indéchiffrable, ça ne pouvait pas rester plus d’une semaine là bas. Elle espérait juste qu’il avait pensé à prendre de bons moyens de conservation. Ah et que sa limace allait arrêter de la regarder aussi.

« Je suis déjà allé étudier la hache d’Arkalochori, résoudre le disque est donc une continuation logique. Vois-tu, j’ai pour habitude de toujours finir ce que je commence. »

Comme la destruction de sa santé mentale ?

Elle recula un peu plus en voyant que la bestiole fluo commençait à se tendre vers elle. Visiblement aveugle à la tentative d’intimidation de son animal de compagnie, Edward continua de parler.

«  D’abord il faudra que tu lance trois flèches explosives, à ces trois endroits très précisément. Un écart d’un seul centimètre pourrait endommager la collection. Nous descendrons ensuite en tyrolienne dans la galerie, je m’occuperai des alarmes protégeant le disque pendant que toi et les autres gorilles vous vous occuperez des éventuels gardes. Une camionnette nous attendra pour que nous puissions nous enfuir, mais le disque ne sera pas avec nous. Un de mes contacts à l’intérieur du musée le mettra dans le sac de courrier à envoyer. Ainsi, si le Batman parvient à résoudre mon énigme et à se saisir de nous, il ne pourra pas le reconquérir. »

Il caressa tendrement son serpent, l’air particulièrement fier de lui.

« Brillant n’est-ce pas ?

N’entendant pas de réponse il fronça les sourcils. Curieux, habituellement Seshat le complimentait à ce moment là. Il se tourna vers elle et la vit écrasée contre le mur, tentant désespérément de s’éloigner du Python vert qui tendait son corps vers elle.

- C-C-C-C’est normal qu’il fasse ça ?

Il se frotta l’arrête du nez, juste au dessus de ses lunettes avant de s’adresser sèchement à elle.

-  Tu es. Pitoyable.

Elle commença à se diriger précautionneusement vers la sortie, visiblement paniquée.

- Oui, et bien je préfère être pitoyable plutôt que de me faire étrangler par une limace !

Il poussa un profond soupir. D’un côté, voir Seshat témoigner de l’intelligence d’une souris de laboratoire ne lui plaisait pas tant que ça. De l’autre, l’animal adoré voulait faire connaissance avec sa nouvelle partenaire. Le choix fut vite fait.

- Viens t’asseoir sur mes genoux.

Elle recula plus vite.

- Vous êtes tombé sur la tête ?!

- Seshat, menaça-t-il, viens ici immédiatement ou je t’oblige à dormir avec lui.

Pas folle, Daphnée arrêta de bouger. Elle regarda une dernière fois la porte avec envie avant de se rapprocher de Nygma et de son monstre, évitant tant que possible de regarder les yeux de la chose. Il l’installa de sorte qu’il puisse toujours écrire d’une main tant que l’autre la tenait près du reptile, permettant à la bête de glisser sur la jeune femme. Laquelle était actuellement serrée contre lui pour éviter de regarder le serpent dans les yeux.

- Je-je vous déteste.

- Tu m’en vois bouleversé, répondit-il moqueusement. Maintenant à moins que tu ne souhaite qu’il t’étrangle, je te conseille de le caresser entre les yeux.

Non pas qu’il essaierait jamais de lui faire du mal, obèse qu’il était, mais ça elle ne le savait pas.

Elle se tourna vers la tête verte, désormais sur ses cuisses et la toucha tentativement avec un doigt. Quand elle vit qu’il ne comptait pas lui sauter dessus tout de suite, elle commença à le caresser. Au bout d’une bonne demi-heure, elle était devenue amie avec l’animal, qui aimait décidément s’emmêler dans ses boucles. Alors qu’elle souriait en le regardant faire un énième tour autour de son cou, elle vit Nygma lui faire un petit sourire victorieux. Elle fronça les sourcils et détourna le regard.

-… Ca reste une grosse limace.

- Juste pour ce commentaire déplacé, tu le nourriras ce soir. »

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Au troisième écart violent, Daphnée commença à se demander si le conducteur prenait plaisir à les balancer contre les parois de la camionnette. Ou alors c’était juste pour faire enrager Nygma, qui laissait échapper un flot continu d’insultes depuis que le moteur avait démarré. Pour un type en costume sur mesure, il avait un sacré vocabulaire. Un autre virage la fit tomber sur Nygma, et elle commença à jurer à son tour, le coude de son employeur lui étant rentré dans les côtes.

Finalement, ça ne l’étonnait plus trop qu’ils n’aient pas emmené le disque avec eux.

Elle s’accrocha maladroitement à une sangle avec une main, l’autre tenant son arc et quelques flèches, positionnées de façon à ce qu’elle puisse en tirer une par seconde. Non pas qu’elle aurait à s’en servir ce soir, Batman était occupé à l’autre bout de la ville et le plan de Nygma s’était déroulé sans le moindre problème. Daphnée devait admettre qu’il était tout de même assez doué, désenclencher les protections ne lui avait pris que quelques secondes.

Une explosion secoua la camionnette, ouvrant les portes et propulsant ses occupants dans tous les sens. Daphnée aurait glissé en dehors du véhicule si cela n’avait été pour un homme de main attrapant son chignon. Elle laissa néanmoins échapper une des flèches explosives qu’elle tenait et  une deuxième explosion se fit entendre. Relevant la tête elle vit Robin sur sa moto, désormais sans capot, roulant à toute vitesse sur le pont reliant Gotham Est à Gotham Ouest.

Etonnée par sa chance, elle se reprit néanmoins très vite et plia une jambe sous son corps pour se tenir droite, l’autre étant appuyée contre le rebord pour qu’elle ne puisse pas tomber. Nygma l’avait fait s’entraîner sur des pommes en vol depuis une moto, alors depuis une camionnette ? Facile. Elle avait déjà bandé son arc mais Nygma la retint.

« Ne tire pas sur lui ! Je me passerais d’une Batnounou pour ce soir ! »

C’est sur que dit comme ça …

Elle changea d’objectif, se focalisant sur les autres voitures et après avoir fait dériver trois autres voitures sur lui, sur lesquelles il roula sans hésitation, elle parvint à le perdre en lui faisant exploser un camion sous le nez. Par mesure de précaution, elle continua de tirer sur les autres voitures cherchant à en faire tomber une dans le fleuve. S’il était en train de sauver les gens, il ne pourrait pas les poursuivre.

Une dizaine de minutes plus tard, Nygma poussa un profond soupir et fit signe à ses homme de refermer les portes. Daphnée le regarda, étonnée.

« C’est déjà fini ?

Il haussa un sourcil.

- Robin n’est pas un adversaire très dur à distancer.

Elle baissa son arc et pencha sa tête sur le côté. Il y avait un piège non ?

- Ca a duré moins de dix minutes.

- Il est encore moins malin que son mentor. Crois-moi, aucun membre de la galerie n’a jamais été vaincu par ce … robin. »

Quand elle vit qu’aucun homme de main ne semblait être préoccupé, elle finit par hausser les épaules. Une erreur dans l’industrie Batman ? Après tout pourquoi pas.

Un peu plus tard, ils s’arrêtèrent à quelques rues de leurs cachettes. Nygma paya ceux qu’il avait engagé pour l’occasion et fit signe aux autres de partir. Il lui avait expliqué plus tôt qu’il gardait habituellement un ou deux hommes de main pour sa protection, mais comme elle était là et qu’elle faisait moins de bruit qu’eux, il n’en voyait pas l’intérêt. De plus, ça lui permettait de garder cette cachette là plus secrète. Et de regarder la roue de la fortune sans craindre qu’un autre membre de la galerie ne l’apprenne.

Quelques heures après qu’ils soient rentrés, cachés par la magie de longs manteaux et d’un bonnet, Nygma ouvrit en grand la porte de la chambre de Daphnée. Elle grogna en rabattant les couvertures sur sa tête.

« J’ai déjà nourri la bestiole…

Il sauta et atterrit étendu de tout son long sur le lit, la faisant rebondir. Elle lui jeta un regard noir, mais comme d’habitude cela ne lui fit rien. Il continua de sourire et appuya sa tête sur le dos de sa main

-J’ai un cadeau pour toi.

Qu’est-ce qu’il avait encore inventé ?

- Un cadeau ?

Il leva les yeux vers le plafond, faussement songeur.

-Peut-être aurais-je du t’appeler Echo finalement…

Elle le poussa pour qu’il tombe sur le dos, ce qui le fit rire. Visiblement il était de bonne humeur.

- Tant d’ingratitude… Devrais-je garder ceci ? »

Il sortit une petite clé de sa poche avant de l’agiter au dessus de lui. Regardant de plus près elle vit que c’était la clé de son bracelet électrique. Vive comme l’éclair, elle se jeta sur lui et la lui arracha des mains. Mais aussi vite que son sourire était arrivé, il s’effaça lorsqu’il envoya une décharge dans son bras, lui faisant lâcher la clé. Furieuse, il lui fallu quelques secondes pour se rappeler qu’elle ne pouvait pas étouffer Nygma avec un coussin. Ce n’est jamais très professionnel de tuer son employeur. Elle lui tourna le dos, enfonça sa tête dans un oreiller et poussa un hurlement de frustration. Ce qui fit beaucoup rire Le Sphinx. Alors qu’elle grognait encore, il passa un bras autour de ses épaules tout en étant derrière elle.

« Allons, allons Seshat, ne te mets pas dans des états pareils. Je vais te la donner cette clé.

Elle se redressa et lui jeta un regard noir.

- A condition que … ?

Son sourire s’élargit encore.

- Je sais où tu veux te rendre, et je veux venir avec toi. »

Elle le regarda pendant quelques secondes avant de laisser retomber sa tête dans son coussin.

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« C’est complètement ridicule.

-Je ne vois pas en quoi.

Elle leva les yeux au ciel. Evidemment qu’il ne voyait pas, il passait la moitié de son temps à Arkham et l’autre avec un serpent géant. Elle tira sur son bonnet, anxieuse et s’approcha de la porte. Elle s’apprêtait à frapper, mais elle s’arrêta à la dernière seconde.

- Vous ne voulez vraiment pas partir ? Sincèrement ?

Il tira sur son manteau pour l’attirer près de lui et lui fit un grand sourire, plus moqueur que jamais.

- Ma chère, je ne raterais cela pour rien au monde.

Elle le repoussa en soupirant et frappa trois fois à la porte.  Au bout de quelques secondes, ils entendirent des pas arriver dans leur direction, suivis par le bruit d’un verrou.

- Bonsoir maman… euh ne panique pas s’il te plait mais…

Un bruit sourd se fit entendre et Daphnée poussa un long soupir en se passant la main sur le visage.

-… ça aurait pu se passer d’une meilleure façon, fit remarquer le Sphinx en regardant le corps étendu à ses pieds.

Elle lui jeta un regard noir.

- Non, tu crois ? »

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