Chapeau melon et bottes de cuir
Chapitre 8 : Cabin Fever sans les Muppets
2612 mots, Catégorie: T
Dernière mise à jour 13/03/2014 01:21
Le plan d’Eddie avait marché.
L’ennui, c’est que Daphnée ne savait pas si elle devait s’en réjouir ou s’en inquiéter.
En détention, elle s’était débattue comme une folle, sortant les devinettes les plus horribles dont elle se souvenait, insultant les policiers en anagrammes, vantant son idéologie. D’après ce qu’elle avait pu comprendre, ils s’étaient attendus à ce qu’elle soit plus calme une fois que Nygma aurait été hors de vue. Manque de pot, Daphnée agissait plutôt comme un animal sauvage et avait mordu quatre personnes pendant sa première heure au poste de police. Ils avaient du lui mettre une muselière, ce qui avait encore empiré son humeur. Quand le psychiatre était arrivé, qu’il avait vu la muselière, les cheveux en pétard, la porte en métal légèrement tordue à force d’être frappée et le regard fou injecté de sang, il avait dégluti et dit « Arkham ».
Elle n’avait pas assisté au procès, étant jugée comme trop « instable » et avait été envoyée directement à l’asile, la décision du juge étant évidente pour tout le monde. Elle n’avait pas été extrêmement impressionnée par les bâtiments. Après tout, c’était juste un vieil institut perméable à souhait d’où elle sortirait bientôt. La mettre dans une camisole de force avait été une véritable épreuve. Comme ils devaient faire des tests sur son sang et son organisme avant de lui administrer des médicaments, ils ne pouvaient pas la sédater. Malheureusement pour les gardes, Daphnée avait une énergie illimitée pour se débattre et se fichait totalement de se déboiter des membres.
Au final, ils l’envoyèrent trois semaines en isolement. Sans camisole.
Elle avait été particulièrement fière de ce dernier point.
La jeune blonde découvrit qu’elle supportait toujours très mal d’être enfermée. Elle dormait mal, se réveillant souvent, tournait en rond dans sa cellule, avait des bouffées de chaleur, des crises de colère où elle frappait la porte et hurlait comme un animal…
A l’issu des trois semaines, elle avait enfin eu sa première séance avec son psychiatre, le docteur Bartholomew. Avec une bonne dose de sédatifs pour la calmer, évidement. Elle l’avait détesté dès qu’elle l’avait vu avec sa silhouette un peu ronde, ses lunettes, sa moustache soignée et ses vêtements bien repassés. Il représentait tout ce qu’elle détestait. L’inaction, la sédentarité, la routine. Il fit signe aux gardes de partir une fois qu’elle fut assise dans la chaise en face de son bureau. Il alluma le magnétophone.
« Première séance avec le patient 002116, Daphnée Greyhound, aussi connue sous l’alias « Seshat ». Bonjour mon petit, je suis le docteur Bartholomew. Je serai votre psychiatre durant toute la durée de votre séjour parmi nous.
Elle fit une grimace haineuse. Sa présentation lui rappelait celle de sa prof de primaire. Elle se pencha vers lui, et articula lentement, la rage transformant sa voix en un grognement.
- Si vous me reparlez encore comme à une enfant, je vous arrache la gorge avec les dents.
Son sourire glissa de son visage et il pâlit. Là, il savait à qui il avait affaire. Elle s’appuya contre le dossier de sa chaise et continua à le regarder sombrement. Il ouvrit son dossier et éclaircit sa gorge avant de parler, mal à l’aise.
- D’après votre inspection médicale, vous avez perdu six kilos entre votre arrestation et aujourd’hui. Vous avez aussi mordu de nombreuses personnes, frappé les murs, vous vous êtes déboité plusieurs membres en vous débattant, avez témoigné d’une énergie surhumaine et avez rongé le cuir de votre muselière. Les gardes ont signalé que ce comportement… animal, avait empiré lors de votre isolement. Un co-dét… une source extérieure nous a pointé que vous sembliez terrorisée. Miss Greyhound, pourquoi résistez vous autant ? Nous sommes ici pour vous aider. Tout le monde souhaite votre rétablissement.
Elle haussa un sourcil.
- Si vous avez besoin de Crane pour diagnostiquer mon problème, alors je doute que vous puissiez… ah… m’aider. »
Le reste de leur séances n’avait pas été plus productif, mais il avait fini par conclure que son comportement ultra violent était dû au fait qu’elle était claustrophobe. Elle avait été placée dans une nouvelle cellule, où un mur était remplacé par une vitre et pouvait désormais sortir deux heures par jour dans le jardin, sous surveillance bien sur. Elle s’était calmée, et le personnel avait pu respirer.
Au bout de quatre semaines, elle fut réveillée en pleine nuit par une main sur son visage. Elle sursauta et commença à se débattre, puis reconnut le visage d’Eddie. Il était méconnaissable, ses cheveux étaient mal entretenus, une barbe de trois jours s’étendait sur son visage et lui aussi avait perdu du poids. Moins qu’elle, mais un bon repas ne lui aurait pas fait de mal. Elle le serra dans ses bras, heureuse de revoir un visage amical. Il la serra en retour, puis s’assit avec elle sur le matelas. Il pointa un doigt dans sa direction.
« Seshat, je sais à quel point la nourriture de cet asile peut être répugnante, mais si tu perds trop de poids tu ne me sera plus d’aucune utilité.
Elle lui fit un sourire gêné.
- C’est le stress, Bartholomew dit que je suis claustrophobe. Mais maintenant ils me laissent sortir un peu alors ça passe.
Il hocha la tête et prit une de ses mains dans les siennes.
- J’ai bien entendu un plan pour que nous partions d’ici quelques semaines, mais j’ai besoin que tu fasses quelque chose pour moi. Non pas que je ne puisse pas le faire seul, mais j’aurais moins d’efforts à fournir ainsi.»
Elle s’était tendue et lui avait fait un grand sourire. N’importe quoi du moment qu’ils pouvaient sortir de ce trou à rats. Il lui avait exposé son plan, puis était parti écrire des énigmes sur les murs.
Après la visite de son employeur, elle commença à être plus docile en thérapie. Elle fut alors introduite aux activités merveilleuses d’Arkham. La thérapie artistique l’ennuya à mourir, n’ayant jamais été très intéressée par le dessin. La thérapie de Groupe fut encore pire. Eddie, pour des raisons évidentes, n’avait pas été placé dans son groupe, mais Crane et Maxie Zeus, si. Elle étrangla le prétendu olympien dès la première séance. La deuxième, Crane lui envoya une bonne bouffée de gaz dans la figure. Elle ne se souvenait pas trop des détails, mais pour la troisième séance le docteur était désormais couvert de griffures, de morsures et avait juré qu’il ne recommencerait plus. Enfin pas sans une bonne doses de chaines à disposition. On est un savant fou ou on ne l’est pas. Lorsque le professeur était venu à la thérapie de groupe, les détenus s’étaient moqués de lui. On n’envoie pas un professeur de lycée entre les mains d’une bande de criminels qui possédaient tous au moins une maîtrise. Quand il avait parlé de « cours de réinsertion à la vie quotidienne », il leur avait fallu plusieurs minutes pour récupérer de leur fou rire. Daphnée en avait profité pour récupérer son passe. Elle l’avait ouvert aussi vite que possible alors que les gardes tentaient de rétablir le calme, avait retiré la puce puis lissé le film plastique afin qu’il ne voit pas la différence avant de le remettre discrètement dans le tas de feuilles que les détenus avaient jeté dans tous les sens.
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Elle était allongée dans son lit et repassait les ordres de Nygma dans sa tête. Elle y arriverait. Ca allait marcher et ils sortiraient. Du gâteau. Elle ferma les yeux en entendant le garde. C’était la relève d’une heure du matin. Elle se releva lentement, puis poussa la porte. Un frisson d’excitation parcourut son corps lorsque celle-ci s’ouvrit sans résistance. Glissant à l’extérieur, elle fit attention à bien rester hors de la vue des caméras, empruntant le chemin indiqué par Eddie. Elle parvint à atteindre le garde sans problème. Aussi vite que possible, elle prit sa tête entre ses mains et lui brisa le cou d’un geste sec. Elle resta interdite pendant un moment. Est-ce que le bruit avait été détecté ?
Elle secoua la tête. Ce n’était vraiment pas le moment de paniquer. Elle prit les clés et son passe pour l’aile de haute sécurité avant de se mettre à courir, évitant toujours les caméras. Elle sortit aisément de l’aile de Moyenne sécurité, puis utilisa le passe du garde pour entrer dans l’antichambre de l’aile de haute sécurité. Elle jeta un coup d’œil au mur, à peine refait, avant de trouver ce qu’elle cherchait. Elle arracha le crépis encore frais avec ses ongles pour atteindre les fils. Elle dégagea suffisamment de place pour atteindre le fil rouge puis se mit à se sectionner en se servant de ses dents. Nygma avait raisonné que si ses dents pouvaient ronger du cuir, elles pourraient s’occuper du plastique et d’un peu de métal. Elle passa facilement à travers du plastique, mais dû reculer un instant en se prenant un coup de jus. Consciente qu’elle n’avait pas d’autre solution elle continua à mordre. Alors que les larmes lui venaient aux yeux à cause du choc électrique, elle parvint enfin à couper le dernier fil métallique.
Elle se rua à la porte et attendit quelques secondes, sans rien entendre. Pendant un instant elle crut que le plan n’avait pas marché et sa respiration s’arrêta. Les claquements de porte la rassurèrent et elle sautilla sur place, ne pouvant plus retenir l’excitation. Puis elle vit une lumière au dessus de la porte et appliqua la puce volée contre le récepteur noir. Elle entendit un bruit aigu, puis la porte s’ouvrit sur le visage réjoui de son employeur et le reste de la galerie mettant les gardes en pièce.
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Elle était glacée, la traversée à la nage avait été difficile pour elle. Daphnée pouvait courir toute la journée sans problèmes, mais nager ça c’était une autre histoire. Recroquevillée sur elle-même à l’arrière de la voiture volée, elle regarda Nygma.
« Où tu nous emmène ?
Il ne se retourna pas et se contenta de sourire en se mettant à siffler. Au bout de quelques minutes, le bruit lui tapa sur les nerfs.
- Sérieusement Eddie…
Il lui jeta un coup d’œil.
- Mmm je ne suis pas sur que je puisse te le dire.
- Eh ! J’ai le droit de savoir non ?
Il tapota son menton tout en conduisant.
- Je ne sais pas, peut être devrais-je le dire en énigme…
Elle plissa les yeux.
- Si tu fais ça je te jure que je couine pendant tout le reste du voyage.
Le fait que ce soit son meilleur argument lui donna envie de se frapper la tête contre un mur. Il se fit prier pendant quelques minutes, le débat se finissant sur une victoire écrasante d’Eddie. Encore.
- Oh grand Maître des puzzles vénérable et vénéré auriez-vous l’extrême obligeance d’indiquer à votre doberman préféré notre lieu de destination ? Content ?
- Enchanté.
Elle le fixa encore pendant quelques secondes, tentant de faire savoir juste en le regardant qu’il allait se faire étrangler s’il ne répondait pas de suite. Il prit ce temps à parti pour se garer au bord d’un entrepôt, puis il se tourna vers elle.
- Tu sais que ce n’est pas dans mes habitudes de donner les réponses sans devinettes.
Elle soupira bruyamment et leva les yeux au ciel, exaspérée.
- Donne en une simple alors !
Il fit un grand sourire avant de pointer le mur de l’entrepôt. Daphnée regarda sans comprendre pendant quelques secondes avant de voir la publicité.
Elle le serra dans ses bras en criant.