Entrelacés

-Oi Ishida!

Dans une classe de 2e année du Lycée de Karakura, un jeune homme à l'air intellectuel releva la tête à l'appel de son nom. Il avait passé la pause de midi avec Arisawa Tatsuki. Ça ne s'était jamais vu. Et maintenant, voilà qu'elle l'appelait à la fin des cours. Ils allaient sûrement faire le chemin du retour ensemble...

Eh oui, on jasait pour un rien quand on était ado. Mais qui sait, peut-être y avait-il un fond de vérité?

Après le départ précipité d'Ichigo, Uryuu et Tatsuki s'était donné rendez-vous sur le toit pour l'heure de table. Le binoclard avait alors entrepris de raconter dans les grandes lignes ce qui leur était arrivé, à ses amis et lui. Comment Orihime avait une nouvelle fois été prise en otage pour contraindre Ichigo à risquer sa vie. Comment ce dernier était mort aux mains d'Ulquiorra et avait répondu à l'appel désespéré de leur amie en se transformant en monstre. Et comment tout était redevenu normal.

Tatsuki avait écouté... mais aussi demandé de nombreux détails. Elle avait besoin de comprendre. Pour pouvoir aider sa précieuse amie, elle avait besoin de savoir le plus précisément possible ce qui lui était arrivé. La métamorphose d'Ichigo n'avait été mentionnée qu'une fois depuis la fin de l'incident et elle avait bien compris que ça restait un sujet tabou pour les trois personnes concernées. Et donc sous l'empressement de la judoka, Uryuu avait fini par donner tous les détails qu'il pouvait, jusqu'à son humiliation d'avoir été transpercé par l'épée de la Bête sans avoir eu le temps de réagir.

-Ichigo..., avait commencé la jeune fille, « Ichigo a vraiment fait tout ça? »

Cette question devait demeurer sans réponse. La cloche annonçant la reprise des cours sonna. Les deux ados se relevèrent et Tatsuki reprit.

-Je veux aller les voir après les cours et tu vas m'accompagner.

Avant même que le Quincy ait le temps de répondre, elle était repartie. Il haussa les épaules et la suivit.

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Ils quittaient à présent l’école. Pendant les dix premières minutes de marche, ils pouvaient entendre le brouhaha des lycéens qui rentraient chez eux s’éloigner peu à peu, jusqu’à ne laisser que l’écho de leurs pas. Au bout d’un moment, Uryuu remarqua les coups d'œil répétés de sa compagne de route sur son ventre. Décidément, Orihime déteignait sur la judoka... On pouvait se demander comment deux filles si différentes pouvaient être meilleures amies. Mais souvent, à cause de ses airs de garçon manqué, beaucoup de gens ne voyaient pas qui était vraiment Arisawa Tatsuki : une fille sensible à la détresse de ses proches. Uryuu n’avait jamais eu l’occasion de sympathiser avec elle, mais ils faisaient tous les deux partie du même cercle d’amis désormais.

Aussi, il pouvait en quelque sorte comprendre le sentiment d'impuissance de Tatsuki face à la situation de sa meilleure amie. Malgré sa présence sur les lieux et ses blessures, le Quincy restait un personnage secondaire dans le cauchemar vécu par Ichigo et Orihime.

Après le cinquième coup d'œil en biais de sa camarade de classe, Uryuu ne put réprimer un micro sourire et finit par briser le silence.

-Arisawa-san.

La jeune fille se raidit.

-Quelque chose te préoccupe?

Il savait très bien à quoi elle pensait mais il avait envie de la titiller. Tout comme Ichigo, qui n’était autre que son ami d'enfance, elle avait un tempérament de feu et Uryuu ne connaissait rien de plus distrayant que de jouer avec les caractériels comme eux. Tatsuki lui jeta un regard hésitant, puis détourna les yeux.

-Est-ce que ça te fait encore mal?... ça a dû laisser une sacrée cicatrice.

Et là, quelque chose d'exceptionnel arriva. Ishida Uryuu rit. Un rire discret, caché derrière le dos de sa main. Mais on voyait ses traits d'ordinaire si tendus se relaxer et ses yeux pétillaient d'amusement. La jeune fille s'arrêta de marcher, subjuguée par ce spectacle à la fois beau et insolite mais se rappela bien vite qu'il était en train de se moquer d'elle pour une raison inconnue.

-Je peux savoir ce qui te fait rire?, dit-elle sur un ton impatient.

Uryuu, qui avait continué d’avancer, dû revenir sur ses pas pour faire face à la jeune fille.

-Arisawa-san, je n'ai pas de cicatrice. Inoue-san m'a soigné tout de suite après qu'Ichigo soit redevenu normal. Tu te rappelles qu'elle rejette les évènements ? En fin de compte, c'est comme s'il ne m'était rien arrivé.

Elle rosit très légèrement d'embarras.

-J'avais oublié cette histoire de pouvoir de guérison. Désolée, je ne suis pas encore tout-à-fait habituée à ces sortes de dons que vous avez tous.

Ce fut au tour du jeune homme d'être étonné. Il avait cru que, comme cette tête brûlée de Kurosaki, elle allait monter sur ses grands chevaux et se mettre à hurler son indignation. Dans le genre ‘Evidemment que je le savais !’. Non, elle avait tout simplement admis être un peu perdue. Il ne l'avait pas si bien cernée que ça.

-Tu es quelqu'un d'intéressant, Arisawa-san.

C'était sorti tout seul, sans prévenir de la bouche d'un Uryuu aux yeux calculateurs. Tatsuki le regarda d'un air curieux avant de lui offrir un sourire en coin et de reprendre sa marche.

-Je vais le prendre comme un compliment... et Ishida?, l'interpella-t-elle en se retournant. « Tu devrais sourire plus souvent! »

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Une fois l'échelle menant à la base secrète descendue, Ichigo et Orihime avait suivi leur guide jusqu'au centre du paysage artificiel.

-Bien!, fit Urahara. « Je vous demande quelques minutes de patience et puis nous pourrons commencer. »

Les deux ados restèrent plantés là, un peu perdus à regarder le gérant s'agiter en tous sens. Ichigo fronçait les sourcils comme à son habitude, les mains dans les poches, et marmonnait quelques injures sur le comportement exubérant de l'ex capitaine de la Douzième Division. La jeune fille à côté de lui l'observait du coin de l'œil et ne put empêcher un petit rire de lui échapper devant cette scène décidément familière.

-Kurosaki-kun reste toujours Kurosaki-kun, se dit-elle doucement.

En entendant la voix de son amie, le Shinigami remplaçant se tourna vers elle.

-Tu me parlais Inoue?

Orihime rougit, elle ne pensait pas qu'il l'avait entendue.

-Oh, non ce n'est rien Kurosaki-kun, répondit-elle toujours souriante devant son air mi interrogateur mi méfiant. Puis il poussa un long soupir avant de reprendre.

-Je me demande quand même ce qu'il nous prépare encore...

La jolie rousse réagit dès qu'elle entendit l'inquiétude dans sa voix.

-Ne t'inquiète pas Kurosaki-kun! Je suis sûre qu'il y a une explication toute simple à notre... euh... situation. Ce n'est sûrement rien de grave!, termina-t-elle avec un sourire rassurant.

L'optimisme de la jeune fille était contagieux. Ichigo se sentit lui sourire en retour. Où allait-elle donc puiser toute cette joie de vivre? Il l'avait vue pleurer et entendue hurler son nom de désespoir. Et il n'avait aucune envie que ça se reproduise. Jamais. Ce qui l'inquiétait le plus, c'était le risque de perdre le sourire d'Orihime. Sans ça, sa vie serait beaucoup plus terne. Et ça valait aussi pour Ishida et Chad, il le savait. Au fil de ses pensées, Ichigo était revenu à son expression renfrognée et son amie s'apprêtait à le relancer quand :

-INOUE-SA-

-Waaaah!

À la soudaine réapparition du gérant, les deux jeunes gens avaient fait un bon d'un mètre et se tenaient la poitrine comme si leurs cœurs allaient les lâcher d'un moment à l'autre.

-Araaa... je suis désolé de vous avoir surpris, vous étiez tellement dans votre petit monde tous les deux que vous ne m'avez pas entendu la première fois que je vous ai appelé.

Encore fébrile d'avoir failli mourir d'une crise cardiaque, Ichigo s'adressa à l'ancien capitaine d'un ton envenimé.

-Eh bien on vous a entendu cette fois alors vous allez enfin nous expliquer ce que vous trafiquez!

-Oooh mais que de violence Kurosaki-san. Et dire que je me démène pour vous aider dans vos histoires de couple et c'est comme ça que vous me remerciez. Ça me rend... si triste! Bouhou bouhou.

Urahara se cachait derrière son éventail et imitait des pleurs pitoyables. Quant au Shinigami remplaçant, il était tellement rouge qu'on se demandait comment de la fumée ne sortait pas de ses oreilles. Il explosa néanmoins.

-Mais vous allez arrêter vos conneries! On attend toujours que vous nous expliquiez ce qui nous arrive!, il continua en croisant les bras et en détournant les yeux, très timide tout-à-coup : « Et puis on n'est pas en couple. »

Orihime, qui se triturait les doigts en rougissant depuis le début, laissa retomber ses bras le long de son corps. Ça lui faisait toujours mal de se rappeler que l'homme qu'elle aimait ne lui rendait pas ses sentiments. D’un côté, elle ne les lui avait jamais avoués, et de l’autre, elle comprenait qu'il préfère quelqu’un comme Rukia. La petite Shinigami était une personne si rayonnante, si forte, et selon elle, adorable.

Alors que la princesse ruminait ses idées noires, Ichigo ressentit un étrange sentiment de tristesse l'envahir.

• C'est bizarre... je ne suis pas triste pourtant en ce moment.

Par réflex, il releva les yeux sur son amie et remarqua qu'elle avait le regard dans le vague et un petit sourire mélancolique.

• Hein? Mais... ne me dites pas que cette tristesse vient de... Inoue?

Comme à son habitude, Urahara observait ce qui se passait devant lui avec intelligence. Et d'après ce qu'il voyait, son hypothèse ne faisait que se confirmer. Il était temps de vérifier.

-Inoue-san, Kurosaki-san, approchez- vous s'il-vous-plait.

Les deux adolescents revinrent de leurs rêveries pour donner toute leur attention au scientifique.

-Bien, placez-vous au centre du cercle que j'ai tracé au sol et je vais vous demander de vous tenir les mains.

Les deux jeunes gens s'exécutèrent et se tenaient côte à côte, chacun les mains jointes comme pour faire une prière. Ce qui fit soupirer le gérant.

-Pas comme ça! Kurosaki-san, j'ai besoin que tu tiennes les mains d'Inoue-san. C'est important.

Les concernés se firent donc face cherchant timidement les yeux de l'autre. Ils ne se touchaient jamais vraiment volontairement et cette situation les rendait un peu mal à l'aise. Ichigo tendit ses mains vers celles de la jeune fille, très lentement. Au moment de la toucher, il l’interrogea du regard pour demander son autorisation. Elle lui répondit par un sourire timide. Et tout doucement, il prit les petites mains de son amie dans les siennes. Orihime sentit les poignes du jeune homme se resserrer sur ses doigts, fermement et précautionneusement à la fois, comme s'il avait peur de la casser.

Un peu trop conscient de sa proximité inhabituelle avec Orihime, le Shinigami remplaçant s'adressa à Urahara.

-Et maintenant?

L'homme aux getas se tenait au bord du cercle en position de kido.

-Maintenant, je vais vous demander la plus grande concentration. Vous allez tous les deux laisser vos reiatsu émaner de vous. Et pas d'inquiétude, j'ai placé une barrière autour de vous pour ne pas causer de dégâts.

Les adolescents hochèrent la tête en signe de compréhension et prirent une grande inspiration avant de se concentrer sur leurs reiatsu. Bientôt, on pouvait voir s'élever irrégulièrement l'énergie d'Ichigo jusqu'à plus d'un mètre au-dessus de lui. Celle d'Orihime, moins puissante mais contrôlée, formait une auréole entourant son corps. Mais leur concentration fut ébranlée quand ils sentirent quelque chose s'enrouler autour de leurs avant-bras.

-Surtout restez concentrés!, leur ordonna Urahara.

Au prix d'un grand effort, ils fermèrent les yeux pour faire déborder leurs reiatsu. Une nouvelle fois, ils sentirent quelque chose serpenter sur leurs peaux mais ne se laissèrent pas déstabiliser, attendant un quelconque signal d'Urahara.

-Ah!

Ichigo et Orihime avaient crié en parfaite unisson et fixaient de leurs yeux écarquillés ce qui entourait leurs bras.

-Hmmm... A présent, il n'y a plus aucun doute!, s'écria joyeusement le gérant.

Illuminant leurs mains jointes, un étrange ruban bleu flottait, enroulé autour de leurs poignets.

-Vos reiatsu sont entrelacés!