Never Light Without Darkness

Chapitre 5 : A distance

4240 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 04/10/2017 15:03

La jeune femme se tourna vers nous et m’accorda le plus beau sourire qu’il m’ait été donné de voir. Les cheveux détachés de Tsunata caressaient le creux de ses reins, lequel était habillé d’une salopette short en jean clair qui surmontait un tee-shirt dont la couleur aubergine faisait davantage ressortir le vert de ses yeux. Les baskets en toile qui habillaient ses pieds accentuaient l’air mignon que la pince dégageant sa joue droite provoquait déjà. C’était la première fois que je découvrais Tsunata en tenue de civile, et je dois avouer que son style de tous les jours me faisait amèrement regretter que l’on nous impose un uniforme au lycée.

Les autres parurent au moins aussi subjugués que je l’étais. Elle ne sembla pas s’en formaliser et, de ses joues rosées, se précipita à ma rencontre. Une fois devant moi, elle s’exclama de son ton le plus enjoué :

–  Shûhei, tu as été époustouflant !

Le visage vermeil, je l’observai d’un air incrédule que mes coéquipiers notèrent. Mon cœur battait si fort qu’il me faisait presque souffrir. Rangiku s’avança à son tour et sourit :

–  Tu as vu qui est finalement venue te voir, gros bêta ?

–  Hein, Tsunata ? réussis-je enfin à articuler. Mais, depuis quand t’es là ?

–  Depuis le début, assura-t-elle dans un clin d’œil qui fit chavirer mes camarades. C’était impressionnant quand tu saisissais le ballon et le lançais avant même d’être tourné complètement dans le panier pour marquer un trois points ! Et je ne te parle pas de la fin du match : tu courrais si vite que je n’arrivais plus à te suivre ! Je comprends pourquoi on t’appelle l’espoir de Daiichi !

Que quelqu’un me réveille, car ce rêve est trop beau pour être vrai. Voilà ce que je ne cessai de penser en cet instant. J’étais tellement abasourdi que je ne parvenais même plus à cligner des yeux, me contentant de l’analyser de bas en haut pour m’assurer de ne pas être victime d’hallucinations. Ce n’est que lorsque Kira me rejoignit que je sortis de mon état léthargique.

–  Bah alors, mon vieux, t’oublies les bonnes manières ?

Je tournai successivement mon attention sur lui et la jolie blonde, avant de secouer vivement la tête pour retrouver mon sérieux et dire :

–  Ah, oui : Tsunata, je te présente Kira, Iba, Madarame, Ayasegawa, Abarai, Kotsubaki, Shiba, Hirako et Yasutora. Les gars, voici…

–  Tsunata-chan ! s’écria Hirako en se jetant sur elle pour l’enlacer. Quelle joie de te rencontrer enfin !

J’arrachai d’un geste vif ce pervers de bas-étage de ma camarade et menaçai avec une veine sur la tempe :

–  Gardez vos distances, bande d’enfoirés !

–  Elle est encore plus belle que tu nous l’avais décrite, Hisagi, constata Ayasegawa en faisant glisser une mèche blonde entre ses doigts.

–  Qu’est-ce que je viens de dire ? vociférai-je.

Après l’un de ses fameux rires débordant de chaleur, Tsunata leur sourit :

–  Ravie de vous connaître ! Shûhei m’a beaucoup parlé de vous !

–  C’est réciproque, affirma Kira d’un air sournois.

–  Enfin, j’espère qu’il t’a parlé de nous comme il nous parle de toi, nargua Madarame.

–  Vous allez la fermer, oui ? fulminai-je.

–  En tout cas, vous avez été fantastique ! s’exclama la jolie blonde. Vous êtes tous incroyables !

–  Merci, Nara-san, fit simplement Yasutora.

–  Quel dommage que notre cher Hisagi ne puisse pas nous accompagner boire un verre, ironisa Kotsubaki en posant son bras sur mon épaule. Mais peut-être que toi, Nara-san, tu voudras bien nous accompagner ? On t’invite, pour te remercier de t’être déplacée pour nous encourager.

–  Ce n’est pas la peine, sourit-elle.

–  Permets-nous d’insister, insista justement Iba. De plus, Rangiku sera là, elle aussi.

Tsunata se tourna vers notre manager pour lui demander la confirmation qu’elle obtint par un hochement de tête. Alors que je la voyais hésiter, je me résolus à ne pas la laisser seule entre les mains de cette horde de bêtes sauvages. Tant pis pour les révisions : un moment supplémentaire avec celle qui me tourmentait ne se refusait pas. Je m’apprêtai à dire que j’en étais aussi, lorsqu’elle me devança.

–  Je suis désolée, mais mon grand frère m’attend. On remet ça à la prochaine fois ?

–  Avec plaisir, opina Abarai. On joue dans deux semaines à Kagamino, si ça te dit ?

–  Kagamino ? répéta-t-elle, une lueur dans le regard. Vous pouvez compter sur moi ! Je connais plein de supers endroits, là-bas !

–  Alors on fait comme ça, sourit Kira avec tendresse.

Rangiku passa ses bras autour de Tsunata et la serra contre elle en chantonnant :

–  Je suis si contente de savoir qu’on va se revoir, ma petite Tsunata !

Ma voisine de table rit de ce son qui la caractérisait si bien, finissant de tous nous attendrir. Je savais que Tsunata avait quelque chose de différent, mais je ne me doutai pas qu’elle aurait un tel effet sur mes équipiers. Au moins, de cette manière, ils seraient plus à même de comprendre là où je voulais en venir quand je leur parlai d’elle avec autant de douceur.

Avant que l’un de ces abrutis ne décide de me devancer et de me faire passer pour le plus parfait des goujats une fois de plus, je dis à l’attention de notre adorable supporter :

–  Je te raccompagne.

Je n’avais pas besoin de me retourner pour savoir que les autres se donnaient des coups de coude et m’accusaient du regard d’un plan auquel je ne préférais même pas songer. La jeune femme rougit légèrement pour ensuite me demander avec inquiétude :

–  Tu es sûr ?

–  Je rentre chez moi par le train, et il passe à Kasazaki. On peut le prendre ensemble ?

–  Ce serait super ! s’enjoua-t-elle.

Je lui caressai le dessus de sa longue chevelure avec amusement, oubliant complètement que nous n’étions pas seuls, comme la dernière fois. Ce sont mes amis qui se chargèrent de me ramener parmi le commun des mortels.

–  Bon, fit Kira en posant une main sur mon épaule, je vois que tu es en charmante compagnie, alors on va te laisser. A lundi !

–  Ouais, repose-toi bien, Hisagi ! enchaîna Iba.

–  Et encore super coup, tout à l’heure ! ajouta Abarai.

–  Un jeu magnifique suivit d’une visite des plus charmantes. Cette journée ne cessera pas de me combler de beauté, rêvassa Ayasegawa.

–  A dans deux semaines, Tsunata-chan ! sourit Rangiku. Prends soin de toi !

–  A la prochaine ! les salua Tsunata en levant son bras droit.

Je leur fis un signe de la main, puis nous partîmes dans la direction opposée à la leur. Une fois que j’estimai être assez éloigné des autres, les mains enfoncées dans mes poches, je pris mon courage à deux mains et lui dis :

–  J’ai regardé dans les gradins en entrant sur le terrain, mais je ne t’y ai pas vue.

–  J’ai remarqué, rit-elle. Si tu ne m’as pas vue, c’est uniquement parce que je n’y étais pas.

–  Alors, tu étais où ?

–  Près de la porte d’entrée. Je suis arrivée plus en retard que ce que j’avais imaginé, et il n’y avait plus de places assises. Mais je n’ai rien manqué pour autant !

Je compris pourquoi je ne l’avais pas aperçue : j’aurai pu la reconnaître entre mille, ça ne faisait pas l’ombre d’un doute dans mon esprit, mais la porte dont elle me parlait se trouvait en plein soleil, si bien que l’ouverture créait un contre-jour tandis que la lumière se reflétait sur le sol du gymnase. Avec toute ma volonté, regarder dans cette direction ne m’aurait rien apporté de plus que de m’éblouir, aussi n’ai-je pas pris ce risque pour ne pas être déconcentré lors du match.

Néanmoins, je ne saurai décrire l’état dans lequel je me trouvais à présent. J’avais espéré si fort la voir aujourd’hui, je m’étais senti si mal de devoir attendre encore une interminable journée avant de la retrouver, que le soulagement serait un terme trop faible pour décrire l’excitation qui me rongeait l’âme. Je dus mettre en œuvre un effort surhumain pour ne pas laisser transparaître cet enthousiasme plus que nécessaire devant elle, mais aucun doute que cette surprise resterait l’une des plus belles choses qui me soient arrivées au cours de ma vie.

Tsunata semblait elle aussi ravie de partager cette marche à mes côtés, mais était-ce pour les mêmes raisons que moi ? J’en doutais sérieusement, car je ne pouvais avoir la prétention d’avoir une place aussi importante dans son cœur. Toutefois, je décidai de ne pas y songer davantage et de profiter de notre tête-à-tête pour me rapprocher un peu plus d’elle, ce qui ne fut pas d’une grande difficulté : abordez n’importe quel sujet avec Tsunata, et la conversation est lancée.

Nous arrivâmes trop vite à mon goût dans le train qui nous mènerait chez nous, mais ce n’était pas non plus pour me déplaire : il y avait tellement de monde que nous étions assis sur une parcelle de banc réduite, nous obligeant à nous coller l’un à l’autre. Nous ne pouvions rien faire contre le fait que nos cuisses se touchaient. Sa peau était si douce et si chaude qu’elle m’enivrait encore plus que la fragrance qui se dégageait de son petit être. Mon cœur battait à tout rompre, et mon regard se perdait à nouveau dans les détails de son visage au tracé si parfait.

Alors qu’elle riait aux éclats, je vis s’approcher dans son angle mort une femme avec un large sac dont elle ne semblait pas se préoccuper. Si cette imprudente reculait encore un peu, nul doute qu’elle bousculerait ma camarade, et je ne pouvais promettre de garder mon calme si quelqu’un osait lui faire le moindre mal. Pour éviter que la situation dérape, je passai mon bras derrière son dos, saisis Tsunata par son épaule gauche et la ramena avec force contre moi, si bien qu’elle perdit l’équilibre et se retrouva presque avachie sur mon torse. Sans m’en soucier, je la serrai avec poigne et attendis que le danger soit écarté pour lui rendre sa liberté.

Sentir son cœur battre contre moi, ses cheveux caresser mon menton, et son délicieux parfum d’aussi près… Je me jurai qu’un jour, je connaîtrais de nouveau toutes ces sensations et que, cette fois, ce ne serait pas contre le gré de ma camarade.

Lorsqu’elle se redressa, elle sembla m’interroger du regard dans une expression dont aucune trace de reproche ne ressortait, ce qui me rassura. Le feu au visage, je détournai les yeux d’elle et balbutiai :

–  Désolé, c’était juste pour…

–  Merci, Shûhei.

Je l’observai de nouveau et découvris au-delà de son indéniable embarras ses iris pétiller d’un sentiment qui m’était inconnu, mais pas désagréable pour autant.

Après cela, nous fûmes rapidement forcés de devoir nous séparer. Le haut-parleur annonça l’arrivée imminente en gare de Kasazaki, et Tsunata commençait d’ores et déjà à se lever lorsque je lui saisis le poignet et lui dis :

–  Merci d’être venue, aujourd’hui. Ça m’a vraiment fait plaisir de te voir.

Elle rougit légèrement et m’avoua dans un doux sourire :

–  Je n’aurai manqué ça pour rien au monde.

Puis le train s’arrêta, et Tsunata en sortit. Je me tournai face au quai et la vis marcher vers le hall de la gare, lorsqu’elle s’immobilisa pour ensuite pivoter dans ma direction et m’adresser son plus beau sourire. Mon cœur manqua un battement, et alors qu’elle disparaissait de mon champ de vision, je sentis que quelque chose avait changé en moi.

–  Cette fille, murmurai-je, je l’aime encore plus que ce que je pensais.

Ma motivation venait de connaître une flagrante ascension ; lorsque je rentrai dans mon studio vide de toute présence autre que la mienne, je jetai mon sac de sport dans un coin de la pièce et me hâtai d’ouvrir mes livres pour acquérir un maximum de connaissances en un minimum de temps. N’ayant pas de télé, le soir, je recherchai sur une application de mon téléphone des vidéos en lien avec nos travaux pratiques du moment, et m’endormis une heure plus tard sans même m’en rendre compte.

***

Le lendemain matin, aux alentours de neuf heures, je m’éveillai plus reposé que jamais. Tandis que le soleil brillait par la fenêtre située sur ma droite, je saisis machinalement mon smartphone et m’aperçus que mes camarades ne s’étaient pas privés de me harceler de messages, la plupart – sinon tous – ayant pour sujet ma délicieuse camarade de classe. Leurs commentaires me firent sourire, bien que s’ils avaient eu le cran de me les dire en face, j’aurai feint une profonde irritation et les aurai dissuadés d’en faire davantage ; mais, personne n’étant spectateur de mes réactions, je pouvais me laisser aller à la sincérité.

C’est ainsi que je me rendis compte que Rangiku ne figurait pas aux abonnés absents dans mes mails non consultés. J’ouvris son message avec une légère appréhension, et restai bouche bée en lisant ceci :

« Salut, beau brun ! ;)

Comment s’est passé ton rencard avec la douce Tsunata ? J’espère que t’as pas tout foutu en l’air > :@

Bon, plus sérieusement, je lui ai demandé son mail pour toi ! Je me doutais bien que t’oserais pas le faire, alors je m’en suis chargée ! (Ne me remercie pas, ça me fait plaisir :3)

Elle est au courant, donc ne traîne pas avant de lui envoyer un message ! Elle m’a demandé le tien, mais je lui ai dit que, gros asocial que tu étais, t’avais réglé ta boîte mail pour ne recevoir aucun message d’adresses inconnues.

A toi de jouer, mon grand !

Rangiku. »

Je devins rouge écarlate à la lecture de cette missive. Rangiku avait fait quoi ? Je dus parcourir plusieurs fois les différents paragraphes de son message pour être sûr d’avoir bien compris. Depuis la veille, Tsunata attendait donc un mail de ma part, alors que je n’avais pas la moindre idée de ce que je pourrais lui dire ? Il fallait que je trouve, et vite, au risque de passer pour un parfait abruti si elle attendait en vain un signe de ma part.

Je me creusais tellement les méninges que je finis par bouder complètement mon petit-déjeuner et me résolus à prendre une douche pour m’éclaircir l’esprit.

La douche n’eut pas l’effet escompté. Avachi sur mon matelas, je me tapai le front avec rage et essayai de mettre bout à bout les mots qui me venaient à l’esprit pour formuler quelque chose qui ressemblerait, de près ou de loin, à une phrase ; cette technique ne donna rien, elle non plus. Après deux heures de torture cérébrale, je grognai de fureur à mon égard et décidai d’agir sans réfléchir. Tant pis pour les effets de style, le mieux à faire était de laisser parler mon cœur.

Je cliquai sur l’adresse ajoutée en pièce jointe dans le mail de mon amie d’enfance, et un nouveau message s’ouvrit. Je faillis m’étrangler en lisant le nom de Tsunata dans le champ du destinataire. L’envie ne m’avait pas manqué, depuis notre rentrée, de lui demander cette fameuse adresse pour pouvoir communiquer avec elle, mais la peur d’être rejeté me bloquait chaque fois dans mon élan. Or, d’après Rangiku, Tsunata désirait aussi que l’on puisse échanger en dehors du cadre scolaire. Rien d’étonnant à cela, puisqu’elle s’était déplacée la veille pour venir nous encourager lors de la rencontre avec Naruki.

Je vidai mes poumons de leur air et tapai mécaniquement sur les touches de mon téléphone, sans m’encombrer de quelques pensées. C’est ainsi qu’après un instant, je puis lire sur mon écran :

« Salut, Tsunata

Rangiku m’a donné ton adresse mail hier, mais je n’ai vu son message que ce matin. Désolé d’avoir été aussi long à te passer la mienne.

Shûhei. »

Je m’insultai mentalement pour avoir rédigé quelque chose d’aussi froid à son égard et voulus corriger cela mais, dans la précipitation, je finis par appuyer sur « envoyer ».

–  Mais quel con ! hurlai-je dans mon appartement.

Je balançai mon téléphone contre le pouf situé près de ma fenêtre, me levai de mon lit et pris rageusement place sur mon bureau, agacé d’être aussi désagréable et maladroit avec la personne que je ne désirais surtout pas perdre. J’ouvris un livre au hasard et me mis à gratter je-ne-sais-quelle formule sur ma feuille de brouillon, lorsque j’entendis le vibreur de mon téléphone malmené de bon matin. Comme une panthère, je me jetai sur lui et me précipitai d’ouvrir ma boîte mail, avant de déchanter en voyant le nom de Madarame s’afficher. Je décidai toutefois de ne pas l’ignorer et ouvris la pièce jointe, puis m’empourprai de la tête aux pieds.

–  Tout ça pour ça ? fulminai-je.

Cet imbécile de chauve avait dessiné, avec un soin douteux et un art qui lui était propre, deux personnages que j’identifiai comme étant nos représentants, à Tsunata et moi, en train de s’embrasser. Je ne prendrais pas la peine de décrire le nombre incalculable de cœurs qu’il s’était amusé à gribouiller autour de nous, tant cela m’affligeait. Mon portable connut un nouveau voyage aérien pour finir sa course contre mon lit. Je repris place sur mon bureau et essayai de m’appliquer dans mes révisions, aujourd’hui encore.

Toute la matinée durant, je ne cessai de faire des voyages entre mon lit et mon bureau pour m’assurer de ne pas manquer sa réponse, mais je retournai chaque fois bredouille à mes ouvrages. Dès que je percevais les vibrations qui m’informaient d’un nouveau message, je me précipitai d’en découvrir le destinateur et grimaçai en constatant qu’il ne s’agissait pas de celle dont je désirais le plus voir s’afficher les caractères de son nom. Aussi, après une dizaine d’allés-retours peu fructueux, je pris la décision de me couper du monde et de ne rallumer mon portable que le soir, une fois mon travail terminé.

C’est en effet ce que je fis, et cela me permit de me concentrer plus que je ne l’avais espéré. J’avais finalement troqué la physique et la chimie contre les mathématiques en vue de notre prochain test en classe, et m’étonnai de voir que mon niveau n’était pas si catastrophique que ça. Néanmoins, aucun miracle ne se produisit : je peinais à terminer mes raisonnements et à trouver le résultat attendu. Mon seul lot de consolation fut cette vieille expression que j’avais entendu mon parrain prononcer une fois : « Rome ne s’est pas faite en un jour ». C’était aussi vrai pour les romains dans l’Antiquité que ça ne l’était aujourd’hui pour moi avec les logarithmes népériens, les suites, et que sais-je encore.

Il était dix-huit heures lorsque je rangeai mes affaires et mis au four une pizza surgelée que j’avais eu en promotion au konbini situé en bas de chez moi. Le temps de la cuisson, je le passai à me préparer pour le lendemain. Je pris une douche rapide pour me rafraîchir et me mis à table.

En dégustant la première part de mon festin, je décidai de rallumer l’objet qui me torturait l’esprit depuis mon réveil. Une certaine appréhension naquit dans mon for intérieur : si elle m’avait répondu en début de journée, alors elle attendrait sûrement un message de ma part, et une fois de plus je risquai de la décevoir. Mais le destin en voulut autrement, puisqu’en dehors des soixante mails de la part de mes amis au sujet de ce qu’ils nommaient tous « mon rendez-vous avec la princesse aux cheveux d’or », je n’avais aucun signe de vie de cette dernière.

Je soupirai de désillusion, mais aussi de soulagement. Après tout, Tsunata restait Tsunata, une jeune femme passionnée par ses études qui rêvait en grand, et donc se donnait les moyens d’atteindre ses objectifs. Elle avait sûrement dû passer, elle aussi, la journée plongée dans ses livres, l’attention rivée bien loin de son téléphone. Et puis, il ne fallait pas non plus que j’oublis qu’elle avait mis son temps de révision entre parenthèses pour venir voir notre match.

Je pris un nouveau morceau de pizza et le portai à ma bouche, lorsque je sentis le vibreur de mon portable dans ma main droite. D’un geste habile, je le déverrouillai et ouvris ma messagerie sans trop de conviction. A peine avais-je lu le premier caractère de « Nara » que j’avalai de travers ma bouchée et manquai de peu une fausse-route fatale.

Après avoir craché mes poumons, je me précipitai de cliquer sur la réponse de l’objet de mes tourments pour y lire ceci :

« Salut, Shûhei !

Pardonne-moi de ne répondre que maintenant, mais je viens seulement de me poser pour souffler. Tu vois, je ne suis pas mieux, alors ne t’excuse pas pour si peu ;) et puis j’aurai dû te la demander en personne, mais Rangiku a insisté pour que je la lui donne à elle, alors…

Enfin, repose-toi bien ! On se retrouve demain pour une nouvelle semaine ! J’espère qu’elle sera aussi géniale que celle-ci. Je compte sur toi !

Tsunata. »

Ni une ni deux, au comble de l’excitation, je m’empressai de lui répondre. Je la rassurai au sujet de ses préoccupations et lui souhaitai de bien se reposer. Contre toute attente, elle me répondit presque aussitôt, et nous entamâmes une longue conversation qui dura jusqu’à plus de minuit, avant que je ne lui dise d’aller se coucher pour ne pas être trop fatiguée le lendemain. Dire que j’étais sur un nuage aurait été un pur euphémisme, et je m’endormis sur les plus belles pensées.

Alors que je pensais la voir arriver avec de gros cernes sous les yeux, encore groggy par les heures de sommeil que je lui avais arraché, je m’étonnai de la découvrir encore plus rayonnante qu’elle ne l’avait jamais été, un sourire indélébile ancré sur son visage aux contours si merveilleux. Elle me salua avec l’entrain qui lui était propre, suscitant une nouvelle vague de jalousie chez les autres types déjà présents, et nous reprîmes notre conversation là où nous l’avions arrêtée.




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