La vérité n'a pas de prix

Chapitre 2 : Une goutte d'orgueil dans un océan de préjugés

4308 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 24/11/2019 17:43

Cimetière national d’Arlington

Nuit 1

Dans un tonnerre de bruit d'eau, le corps lesté dans son cocon de plastique sortait hors de l'eau, tractée sous les projecteurs. Brennan fixa l'Aphrodite d'Arlington du regard, ayant déjà découvert son sexe, tentant de recueillir le plus de beauté dans cette scène pour ne pas récolter des cauchemars de plus. Il n'était pas encore remis de son voyage mais le sérieux de Booth le remettait d'aplomb. Il jeta un regard vers son agent, elle aussi fixait la victime de ses yeux noirs, comme si elle tentait de percer le mystère avec la seule force de son esprit. Combien d'agents étaient aussi motivés qu'elle ? Combien d'entre eux étaient capables d'utiliser au mieux les capacités de ceux qu'ils appelaient des fouines ? Aussitôt, Brennan rangea ces questions dans un coin de son esprit et ferma sa combinaison. Zack était déjà prêt.

L'anthropologue commença à crier des ordres pour orienter les techniciens, Booth fit de même pour ajouter des projecteurs et rajuster ceux qui étaient présents. Délicatement, le squelette fut posé, photographié puis libéré par Brennan et Zack. Il était temps de découvrir l'histoire de cette chenille, devenue chrysalide dont la métamorphose s'était brutalement interrompue

Pendant que Zack continuait de prendre des photos, Brennan enlevait la corde, le lestage et mit à plat le plastique pour allonger le corps couvert de boue. Pour gagner du temps, il examinait les os tout en mettant les fragments du crâne. Quel gâchis... Même sans la tête, il pouvait constater sa beauté athlétique. Il n'irait pas dans la zone nébuleuse des spéculations mais il était curieux de savoir comment sa tête s'était retrouvée dans cet état


Les faits en priorité, il devait se concentrer uniquement sur eux.

- Les restes sont enveloppés dans un matériau plastique isolant de quatre millimètres, exposait Brennan d'un ton sérieux.

- Avec du fil armé en PVC, ajouta Zack.

- Le tout lesté. On a un squelette complet mais le crâne est en morceaux.

Attirée par la voix des deux scientifiques, Booth approchait, le carnet à la main pour noter leurs découvertes.

- Qu’avez-vous trouvé ?

- Pas grand-chose : il s’agit d’une femme qui devait être âgée entre dix-huit et vingt-deux ans, mesurant un peu plus d’un mètre soixante, race à déterminer mais ses traits sont assez délicats.

- Vous ne mentiez pas quand vous disiez ne pas avoir grand-chose…

Brennan aurait voulu la voir faire son travail dans ces conditions. Qu'ils s'estiment heureux d' avoir retrouvé cette femme dans un étang et non dans une rivière à fort courant. Il se concentrait sur le corps et ce qu'il pouvait apporter comme première ébauche.

- Elle était joueuse de tennis.

- Je vous ai déjà vu faire mais là, il faut m’expliquer comment vous savez qu’elle jouait au tennis.

Booth avait vraiment évoluer au point d'être bien plus curieuse qu'avant. Brennan était ravi intérieurement : il n'était plus une machine à jargon scientifique fait pour nourrir les défauts du système judiciaire.

- La fusion de l’épiphyse donne l’âge et la forme de l’os pelvien nous indique son sexe, commenta Zack tout en continuant de photographier.

- L’inflammation d’une épaule à cet âge ne peut être expliqué que par une activité sportive.

- Savez-vous à quand remonte sa mort ?

- Aucune idée, se résigna sombrement Brennan.

- Il faut que notre spécialiste en asticots jette un œil sur la victime, rassura Zack.

- En attendant, concentrons-nous sur ce qu’on sait : elle n’a pas de vêtements, déclara Brennan, factuel.

- Grande probabilité que le crime soit de type sexuel.

- Grande probabilité que la victime préférait les vêtements de type naturel comme le coton par exemple.

- En contre exemple, votre costume survivra à votre corps durant plusieurs dizaines d’années, étoffa Zack.

Booth contracta sa mâchoire à cette remarque mais reste focalisée sur sa priorité. De son côté, Brennan était satisfait de voir Zack davantage à l'aise dans un domaine encore nouveau pour lui. Même de manière impertinente, il faisait d'une scène de crime son territoire, gênant de moins en moins sa capacité de réflexion. N'ayant plus rien à apporter, l'anthropologue se redressa en roulant une de ses épaules, se sentant un peu raidi.

- Il nous faut des prélèvements de vase dans un rayon de trois mètres. A une profondeur de dix centimètres. Votre équipe d’identification judiciaire peut prendre le cordon et le plastique. On s’occupe du reste.


Brennan n'avait même pas la nuit pour s'occuper des procédures qui les attendaient. Il assura à Booth qu'il se chargerait avec Zack de la livraison du corps au Jefferson et d'appeler l'équipe pour prendre le relais. Il avait peu de chance d'avoir le temps de dormir, peut-être dans la journée, le temps des analyses. Autant laisser du temps à sa partenaire pour dormir et faire son travail sans lui. Avant cela, il avait quelques comptes à régler avec la hiérarchie. Si Zack était là avec des hommes de l'institut, le Docteur Goodman avait donné sa bénédiction au FBI sans l'en informer.

C'était très frustrant d'être utilisé comme un pion par un archéologue. Sans discussion, Brennan allait laisser cette question en suspens le détourner de sa mission. Booth avait prouvé que cette méthode avait fonctionné sur lui-même, autant montrer qu'il pouvait assimiler cette leçon rapidement.



Institut Jefferson, Musée d’histoire naturelle

Aube 2


Passer par l'intermédiaire d'une secrétaire ? Non. Autant lui renvoyer la pareille en ne s'annonçant pas, chose qui troubla son assistant.


- Docteur Brennan, il est sans doute trop tôt. Le Docteur Goodman...

- ...passera forcément par l'autre entrée du musée, rejoindre son bureau et vaquer à ses occupations.

- Pourquoi on ne l'attend pas devant l'entrée. On n'est pas obligé de se cacher.

- Il fait une partie de cache-cache avec moi et c'est à mon tour de compter, maugréa Brennan en soupirant.

Brennan tira Zack par la manche pour le forcer à se coller contre le mur près de l'escalier. Heureusement, le Docteur Goodman ne se fit pas plus attendre et franchit la porte. Brennan entendit les claquements des chaussures hors de prix de l'archéologue qui s'arrêta dès qu'il vit Brennan. S'il était surpris, il ne le laissait pas paraître. Daniel Goodman était un homme grand, digne, arborant un costume impeccable et un bouc bien taillé pour soulever le menton avec plus de dédain. Brennan décolla son dos du mur pour mieux se mesurer à lui et le sonder.

- Ravi de vous revoir, Docteur Brennan. J'espère que votre séjour au Guatemala s'est bien passé.

- On en parlera après l'enquête que vous m'avez imposée par l'intermédiaire de l'agent Booth, siffla Brennan en souriant légèrement.

Sans comprendre pourquoi, l'égocentrique scientifique laissait place au partenaire indigné. Booth était un instrument tout comme lui. Elle ne voulait sans doute pas de ce second essai tout comme lui, ce qui le rendait davantage amère.

- Nous pourrons discuter de vos impressions sur cette seconde collaboration en même temps dans ce cas. J'ai un rendez-vous ce matin. Si ce n'est pas une urgence...

- Je préfère en parler tout de suite histoire de libérer mon cerveau de cette distraction pour l'affaire en cours. A moins que la coopération de l'institut et du FBI ne soit pas une priorité ?

Le Docteur Goodman étrécit ses yeux, méfiant et invita ses employés à le suivre. Rapidement, ils arrivèrent à son bureau où l'archéologue déposa sa veste pour le fermer à clef et s'engager dans l'autre aile du musée.

- Je vous écoute, Docteur Brennan.

- Docteur Goodman, j’aimerais que vous évitez de me mettre dans les pattes du FBI, surtout sans m'avertir.

- L’institut Jefferson est un établissement financé par l’État. Nos amis du Congrès ont besoin que l’on prouve notre utilité et on ne nous donne pas assez d’occasions pour le prouver. Cette enquête est une aubaine, montrer que nous méritons ce financement par votre biais est capital. Aussi, je vous prêterai aux agences fédérales quand cela me chantera.

Si tous les scientifiques étaient paranos comme Hodgins, Brennan aurait compris pourquoi on ne faisait pas appel à eux. C'était juste plus confortable d'utiliser ses propres ressources. Ce n'était pas étonnant que Goodman avait sauté sur occasion.

- Admettons que je sois un bien matériel, le FBI s’en moque et ne nous respectera pas.

- Je ne vous vois pas ainsi, vous êtes le bien le plus précieux de cet institut, Docteur Brennan.

- Par définition, un bien est une propriété, coupa Zack.

- Auriez-vous obtenu un doctorat sans que je ne sois mis au courant pour oser m’adresser la parole ? Et même pire, m’interrompre ?

- Je suis à la moitié de deux doctorats donc mathématiquement, je peux au moins vous parler conformément à vos règles.

- Dois-je vous envoyer un os à polir, monsieur Addy ?

Brennan espérait vraiment que Booth n'avait pas cette idée en tête quand elle l'appelait "Bones". Il admirait le contrôle de Zack qui ravalait sa fierté difficilement et rapidement. Ce dernier laissa tomber et retourna au labo pendant que Brennan continuait sa conversation.

- Comme je vous le disais, le FBI ne respectera aucun d’entre nous si vous nous prêtez comme des stagiaires, que ça soit un assistant comme monsieur Addy ou moi, votre «bien le plus précieux».

Ils s’arrêtèrent, le docteur Goodman étrécit ses yeux de suspicion vers Brennan.

- Docteur Brennan, est-ce que vous vous moqueriez de moi ?

- On ne reste pas longtemps le plus beau joyau de la couronne en courrouçant le roi qui la porte.

- Pour l’instant vous vous voyez comme un simple joyau...jusqu’au jour où on vous retrouvera à la place du fou. A moins que cela soit déjà le cas. Soit vous apprenez plus vite que je ne le pense, soit vous êtes un bon acteur. Dans un cas comme dans l'autre, cela reste inquiétant.


Non débarrassé de ses doutes, le Docteur Goodman tira sa révérence en laissant derrière lui Brennan. Il n'était pas rassuré : son supérieur venait de lui dire qu'il resterait à sa place d'administrateur en s'en lavant les mains. Tout dépendait de la relation entre lui et Booth pour que l'équipe ait confiance en cette collaboration.

Brennan n'avait pas le choix. Si cette enquête était un succès, il allait devoir jouer le rôle du coordinateur et sans avoir le salaire d'un administrateur. Ou comment passer du fou du roi au fou sur un échiquier. C'était à lui de s'inquiéter, pas à Goodman.

Au moins, il n'était plus si frustré mais toujours fatigué.


Institut Jefferson, Laboratoire médico-légal.

Jour 2


Brennan courut à travers le jardin pour se vider la tête et constata que toute l'équipe était au complet. Il sourit à Angela et encouragea Hodgins à expliquer ce qu'il avait trouvé. Hodgins fit glisser sa carte magnétique pour laisser tout le monde accéder à la plateforme gardée et commença à exposer les premiers faits.


- Non seulement l’eau de l’étang est chaude et bourrée de microbes ayant accéléré la décomposition mais elle abrite des carpes noires et koï qui se sont nourries sur le corps.

- Au nom des gens normaux, est-ce que je peux dire que c’est dégoûtant ? s’exclama Angela.

- J’ai relevé trois phases larvaires de trichoptera et de chyromydae, continua Hodgins sans relever la remarque d’Angela.

- Le décès de la victime remonte à quand selon tes conclusions ? demanda Brennan, n'oubliant pas la priorité de Booth.

- Le corps a passé un hiver et deux étés dans l’étang.

- Deux ans donc.

Cela ne suffira pas pour affiner les recherches dans le fichier des personnes disparues.

- Alors comme ça, t’as pas de mal à te mesurer à mes doctorats mais tu ne me dit pas en face que tu me trouves sexy ? Railla Hodgins, le sourire satisfait aux lèvres devant Brennan, assez circonspect.

- Il dit ça à cause du livre, précisa Angela.

- Du calme, le roi de la savane. Tu n’es pas dedans. Inutile de prouver ta toute puissante virilité à travers mon livre, rétorqua Brennan en n'arrivant pas à contenir son sourire carnassier.

- Oh que si, on y est tous, renchérit Zack.

- Vous ne lisez vraiment que ce qui vous arrange. J’insiste pourtant bien en préface sur le fait qu’il s’agisse d’une fiction, non ?

- J’ai trouvé des petits fragments osseux dans la vase, ajouta Hodgins.

- Retour à la réalité, on n’est plus dans le livre, adoucit Angela.

- Probablement une rana temporaria.

- Les os d’une grenouille rousse ? s'étonna Brennan.

Si loin de son habitat naturel. Il y avait sans doute une qui s'était échappée d'un centre d'élevage. C'était une anomalie intéressante.

- Et des anneaux dorés minuscules, de la bijouterie.

Tous regardaient l’écran jusqu’à une remarque de Zack.

- Juste pour corriger un fait : je ne suis pas vierge. J’en suis même très loin.

- Oh mais celle que tu as bien cerné est Booth. Très froide mais prête à livrer des flots de confidences sexuelles qui me réchaufferait de l’intérieur en un clin d’œil ! roucoula Angela.

Brennan se mordit la lèvre pour s'empêcher de rire comme un idiot. L'imagination débordante d'Angela était contagieuse.

- Ce n’est pas bien de parler de ce genre de fantasmes devant un bouillon de culture. Surtout qu’on a qualifié de dégoûtant, sermonna Zack.

- On revient définitivement à la réalité. Je ne suis pas là pour être l’auteur qui répond aux questions des fans mais l’anthropologue au milieu de ses pairs. Tout le monde a compris cette fois ?

- Je n’ai pas encore analysé ce qu’elle tenait dans la main, sûrement de la cellulose.

Il pouvait toujours compter sur la passion de Jack Hodgins. Il n'en avait pas toujours été ainsi. Les débuts étaient très électriques mais leur respect avait grandi lentement mais sûrement en un an.

- Un papier roulé en boule ou un carnet ?

- Tout est possible tant qu’on n’a pas analysé.

Brennan avait la dangereuse impression que Booth ne serait pas satisfaite de son prochain rapport. Il espérait qu'elle aurait davantage de patience que lui.

- Cette nuit, j’ai trouvé des particules microscopiques sur certains fragments du crâne, il va falloir les identifier. Zack ? Tu enlèveras les tissus restants et je mettrai à plats tous les fragments du crâne pour une reconstitution. Angela, je te mettrai les marqueurs sur le crâne une fois assemblé et tu pourras constituer un visage.

- Tant mieux ! Je préfère travailler sur des écrans. Ils ne sentent pas mauvais au moins.

Angela quitta les lieux et Brennan vint toucher deux mots en douceur à Zack.

- Zack, applique-toi plus sur les termes que tu emploies. Qualifier la victime de bouillon de culture n’est pas professionnel.

- Je sais, Docteur Brennan, répondit Zack, docile.


Brennan sourit légèrement, l'air complice et laissa son assistant à sa tâche. Il fila tout droit dans son bureau pour envoyer un mail à Booth pour la tenir au courant et en profita pour lui donner son numéro de téléphone pour être plus rapidement joignable. Tout le monde était occupé, il avait beaucoup de mails qui s'entassaient mais il devait se reposer pendant quelques instants.

Cinq minutes après avoir fermé les yeux, Brennan fut réveillé par un message sur son téléphone. Un numéro non répertorié accompagné d'un "Merci." très sobre. L'anthropologue se mit sur le dos pour répondre en ricanant. La droiture de Booth se reconnaissait en un mot. Il envoya : "Cette fois, vous ne vous ferez pas envoyer balader par mon assistant" en ajoutant un smiley clin d’œil. Il la voyait déjà soupirer en secouant sa tête. En espérant au moins un sourire intérieur de sa part en prime.

Plus motivé, Brennan se leva pour aller assembler les pièces de son futur puzzle.

Après le nettoyage des os, il put faire un deuxième examen plus précis en duo avec Zack en lui apprenant quelques petites astuces. A l'aide de gants, il toucha les os de cette femme inconnue, scrutant chaque aspérité. Cela paraissait étrange mais ce corps sans tête reproduisait des gestes répétitifs, des accidents dans son imagination. Si jeune, si insouciante. Elle n'avait pas froid aux yeux, c'était certain.


- Mon tout beau ? interpella Angela.

Brennan fut surpris, elle était si près de lui. Il se débarrassa de ses gants pour se frotter les yeux et sourit à sa meilleure amie.

- Pardon, j'étais...ailleurs.

- J'avais compris l'idée, j'ai dû t'appeler deux fois.

- Ça explique pourquoi Zack n'est plus là. Je suis là depuis combien de temps ?

- Il est midi. Viens manger avec moi. C'est un ordre. Tu me parleras du Guatemala sans les détails sordides.

Brennan pouffa de rire.

- Il n'y aura pas grand chose à dire dans ce cas !

- Viens quand même, insista Angela de sa voix doucereuse.

Elle était si inquiète que cela ? A quoi bon lutter contre cette invitation ? Il avait besoin de se restaurer. Et dormir. Au moins une heure.


A la fin de la journée, Brennan profita de sa solitude pour prendre une douche dans la salle de décontamination après sa journée à répondre à des mails dont un de Booth avec son rapport préliminaire. Il ajouta quelques commentaires et corrigea deux, trois détails puis envoya le tout en précisant ses prochaines étapes. Il savait que c'était dur d'attendre des résultats. Il était nécessaire de la tranquilliser s'il voulait que chacun donne le maximum.

Il était prêt pour assembler les derniers morceaux.

Sur la plateforme, muni d’un masque et de gants, Brennan reconstituait le crâne avec patience et concentration. Pour être sûr de ne pas laisser de traces, il avait mis un un bandeau à motif léopard qu'il avait emprunté à Angela. Cela jurait avec le caractère sérieux de l'assemblage des morceaux d'os mais il n'avait pas encore coupé ses cheveux mi longs négligés. Cela pouvait attendre.


Institut Jefferson, Laboratoire médico-légal.

Aube 3


Brennan avait fini la reconstitution. Le beau au bandeau léopard était endormi sur le plan de travail, le masque toujours en place, légèrement humide. Zack laissa une tasse de café en soupirant, observant son mentor entre fierté et admiration. Il fit le tour du bureau en faisant le moins de bruit possible pour regarder le crâne. Mollement, Brennan se réveilla quelques secondes, le maléfice rompu grace l’odeur de café. Il enleva le bandeau ridicule qu'il avait encore sur la tête et le masque médical sur lequel il avait bavé.


- Bonjour... croassa Brennan.

- Bonjour, Docteur Brennan, répondit Zack, la voix basse.

- Je n'ai pas eu le temps de te demander mais...t'as étudié les livres que je t'ai prêté ?

- Oui, bien sûr. J'ai même rédigé des analyses de lecture.

- On pourra s'organiser un après-midi ici pour étudier. Après l'enquête.

Zack fit sa moue d'hésitation, celle de poser une question de trop. Quel assistant adorable. Qui lui faisait un bon café et tout pour ne pas le déranger pendant qu'il émergeait. Pour le rassurer, Brennan sourit doucement en buvant une gorgée de café. Il se redressa sur son siège et soupira en s'étirant.

- Allez Zack, qu'est-ce qui te tracasse ?

- Vous allez vraiment travailler avec le FBI ?

- Tu as toi-même entendu le Docteur Goodman, je ne suis qu'une propriété intellectuelle comme on prête comme un livre.

- Mais vous n'aimez pas ça.

- Je n'aime pas la manière dont on me prête mais il faut être assez adulte pour admettre que Goodman a raison. Alors autant être un livre entre les mains d'une personne qui veut réellement lire.

Zack manipula le crâne reconstitué à l'aide de gants pour l'observer sur tous les angles.

- L'agent Booth ? Pourtant, c'est une idiote qui nous a viré alors que nous étions très compétents la dernière fois.

- Et pourtant, on ne peut pas dire qu'elle lâche l'affaire pour me recontacter. Assez paradoxal, non ?

Zack reposa le crâne et plissa les yeux, incertain. De la même façon qu'il mâcherait un aliment dont il n'était plus sûr de sa provenance.

- Sur ce point, elle est comme nous, Zack. Elle veut des résultats.


Brennan finit son café en expliquant certaines zones difficiles à assembler sur le crâne et lui demanda de l'apporter à Angela. Brennan partit du labo, ayant fini son travail.



Bureau du secteur de Washington

Bureau Fédéral d’Investigation

Matin 3


Booth se sentait en pleine forme, prête à défendre les intérêts de son affaire et comment la mener. Elle avait toujours de l'instinct sur comment et avec qui mener ses combats. Elle paraissait insensible mais elle connaissait parfaitement ses hommes, en retour, ils ne se posaient pas de questions. Étrangement, être un pilier au FBI était plus simple mais tout aussi restrictif qu'à l'armée en étant son propre stratège. Elle aurait pu continuer sa carrière militaire...si seulement elle n'avait pas autant laissé d'elle-même en partant et davantage en revenant.

Néanmoins, Booth se sentait coupable d'entraîner Bones là-dedans. Elle sentait le danger, quelque chose n'allait pas. Il lui aurait tellement ri au nez et l'aurait encouragé à sa manière. Bones n'avait pas confiance en elle mais il respectait ses capacités. Elle n'avait pas le droit de douter.


D'un pas sûr, elle entra dans le bureau du Directeur-adjoint Sam Cullen.

Installée face à lui, l'agent au visage impassible lui présenta son rapport préliminaire, avec le livre qu'elle avait depuis le retour de Bones et attendit qu'il prit la parole. Cullen retourna le livre, scrutant la quatrième de couverture.

- Je pensais qu’il ne voulait plus travailler avec vous, dit le directeur adjoint en lâchant le livre de Brennan sur son bureau.

- Lors de notre première collaboration, il a réussi à nous fournir la description de la victime, où elle avait passé son enfance, le métier qu’elle faisait et avec un dessin de son visage à partir de son crâne. Le tout sans connaître l’identité de la victime ni aucune information concernant le suspect numéro un qui était un juge fédéral. J’aurais eu du mal à le croire sans avoir testé ses compétences pendant cette enquête.

- Moi de même...

- Pourtant, plus on avançait, plus rapidement on a pu boucler l’affaire qui a failli être enterrée et non classée. En ce qui concerne la victime de l’étang, le Docteur Brennan m’a donné son âge, son sexe et son sport favori alors que le corps était à peine sorti du plastique et un crâne en morceaux.

- Eh bien ! s’exclama Cullen en regardant la photo du corps encore sur le plastique. C’était quel sport alors ?

- Le tennis.

- Il est très fort.

- Imaginez ce que ça donnera comme résultat avec lui et l’équipe de l’institut. Il est important de l’avoir dans notre camp mais la condition est qu’il soit sur le terrain. S’il vous plaît.

Après quelques secondes de réflexion, il fit part de sa décision :

- Bien, prenez-le avec vous mais une fouine dans vos pattes, au moindre faux pas, vous en paierez les conséquences, souvenez-vous ce que qu'il s'est passé il y a un an, prévint Cullen.

Bones en venait à la violence rapidement, verbale mais élégante puis physique quand la personne n'appréciait pas de se faire insulter, aussi joli soit le verbe utilisé.

- Merci, monsieur.

Booth reprit le dossier que lui tendit le directeur adjoint Cullen et sortit du bureau d’un pas pressé.

Après cette entrevue, elle n'enviait pas du tout Bones : être réduite à une quatrième de couverture lui serait insupportable.


Booth regagna son bureau pour envoyer un message depuis son portable à Bones, loin des regards.

"Le Directeur-adjoint a donné son feu vert pour notre accord. Signé Mulder."

Trop personnel ? Trop exagéré ? Trop grotesque ? Elle était la plus sérieuse des deux après tout. Trop de questions.


Quelques secondes plus tard, elle serra doucement le portable de ses doigts osseux, retira la signature et envoya le message.


Droite. Carrée. Concise.

Laisser un commentaire ?