Ange-Gardien

Chapitre 9 : LES EXPLICATIONS

4015 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 02/11/2025 09:30



Dans le café Cat’s Eyes.


Nous avions laissé Kaori, Ryo , Falcon et Miki au café. La médium avait été blessée par un mauvais esprit.  Elle est de nouveau sur pieds mais à certaines révélations à faire.


— Je vous dois des explications, avait avoué Kaori, assise au comptoir. 

Avant de continuer sur la suite de ta narration :

-Des explications ? questionna Miki. Comment cela ?

La médium lui sourit. Elle leur devait bien ça et si elle perdait leur amitié... Son coeur se serra à cette idée. Kaori se sentait bien avec eux.

Ryo était debout, les mains dans les poches, le regard impassible. Falcon s’agita derrière son comptoir. 

-Venez donc la petite, je vais vous faire un très bon café.

La petite ? Il lui donnait déjà un surnom ? Kaori sourit intérieurement. Mine de rien, cela lui faisait plaisir. La médium s'assit au bar. Posant la tasse devant elle, Umi mit quelques gouttes de whisky dans le breuvage.

-J’ai dis liquide chaud ou froid ! protesta le doc, faut la nourrir, pas la saoûler!

Le barman lui tourna le dos.

-Tu ferais mieux de la mettre en veilleuse, vieux schnock, je n’en ai pas fini avec toi, grogna le géant.

Umi bouillonnait de colère face à l’attitude du doc envers son associé Miki, quelques instants auparavant, quand il avait tenté de lui toucher les fesses alors qu’il venait de soigner mademoiselle Tachiki. Il avait eu de la chance jusqu’à maintenant car il y avait la présence de Kaori. Mais le médecin ne perdait rien pour attendre.

Le doc changea de couleur. Le ton d'Umi était menaçant. Tentant un échappatoire, le médecin descendit doucement de son tabouret et fila vers la porte mais la voix de Kaori l’arrêta.

-Restez, s’il vous plaît ! 

Le doc s’arrêta net et l’interrogea du regard.

-J’ai vu votre expression par rapport aux marques sur mon cou. Je vais tout vous dire pour que vous compreniez, alors je vous en prie …asseyez-vous. 

L’homme en blouse blanche alla se mettre à l’autre bout du comptoir,  loin de Falcon. Grommelant quelque chose, le barman servit une tasse de café au doc. 

 Kaori tourna la tête vers le géant.

-Merci Umi ! dit la médium, en prenant sa tasse dans les mains.

Elle avala un peu de son breuvage et grimaça  en sentant la chaleur de l’alcool qui descendait dans sa gorge mais cela lui fit du bien.

-Les marques sur mon cou n’ont pas été faites par un humain mais par un fantôme, un mauvais, lâcha Kaori.

Elle avait déjà vu la réaction du nettoyeur et de Umi mais elle appréhendait celle des autres. La médium entendit le fracas d’une tasse sur le sol. La barmaid la fixait les yeux écarquillés, choquée. Elle mit les mains devant sa bouche.

-Je suis désolée, j’ai été surprise ! fit Miki.

Elle s'apprêtait à ramasser les dégâts, mais son associé la devança. Il  prit les morceaux de tasse puis les mit à la poubelle. Le silence s’installa dans le café, laissant un peu de temps aux personnes digérer cette nouvelle.

La barmaid remercia Umi d’un sourire, pour son aide, ce qui fit rougir le géant. Cela détendit un peu l’atmosphère.

-Mais les fantômes n’existent pas, si ? demanda Miki.

-Les esprits sont autour de nous, tout le temps, expliqua Kaori, ravie de voir que son interlocutrice cherchait à comprendre. Certaines personnes n’y sont pas sensibles mais d’autres… 

-Comment ça ? fit Miki surprise. Vous êtes médium ou quelque chose de ce genre ?!

Kaori approuva de la tête. La barmaid fixa Ryo et Umi. Ils semblaient impassibles comme s’ils le savaient.

-Vous étiez au courant ? gronda-t-elle en regardant les deux hommes. C’est cela que vous me cachiez ? 

Falcon qui préparait du café se tourna vers elle.

- Je m’en doutais. Mes sens m’ont averti qu’il y avait quelque chose chez elle.

Le doc tiqua.

-Il vous a soulevé n’est-ce-pas ? Cela expliquerait l’angle de vos bleus. Un humain pourrait le faire mais pas longtemps, alors qu'un esprit…

Il avait son doigt sur le menton, heureux que les pièces du puzzle se mettent en place.

Kaori prit une inspiration et se lança:

-D’aussi loin que je me rappelle, j’ai toujours vu les esprits des gens décédés.

Miki prêta attention aux paroles de la médium.

-En primaire, un de mes camarades s'est écroulé brutalement dans la cour.  Il s'appelait Aïko. Il est décédé d’un arrêt cardiaque dû à une malformation.

Le doc intervint.

-Malheureusement, on ne peut pas savoir si aucun signe ne donne l’alerte.

Kaori lui sourit. Elle continua: 

- Quelques jours plus tard, je voyais toujours mon camarade à mes côtés. On me trouvait bizarre et les autres enfants de la classe m’ont mise à l’écart. Ma mère a été convoquée à cause de mon comportement qui perturbait mes camarades.

La médium se mit à avoir un rire de gorge.

-Comment expliquer à la directrice que votre fille voit les morts? Compliqué, hein?

Kaori but une gorgée de son breuvage.

-Vous savez, je ne leur en veut même pas. Les gens ne croient que ce qu’ils voient. Ils auraient pu nous mener une vie  plus difficile qu’elle ne l’était déjà, ce que ma mère ne voulait pas.

Miki tapota le bras de Kaori pour la rassurer.

-Cela n’a pas dû être facile pour votre famille.

- Oh, oui !! Les amis se sont mis à nous éviter.

-C’est dégueulasse ! souffla le nettoyeur.

-Nous avons déménagé, reprit Kaori et contre toute attente dans un meilleur quartier. Ma mère a fait appel à une chamane qu’on lui avait recommandé afin de m’aider. J’ai appris à gérer la communication avec les esprits et à les faire passer dans l'au-delà ainsi qu’à me protéger de leur invasion car c’est très fatigant. Cela a pris du temps mais ça a marché.

La jeune femme posa sa tasse vide. Falcon le remplit de breuvage noir à nouveau mais sans rajouter de whisky.

-J’ai eu une scolarité presque normale. Des esprits venaient me taquiner pendant les pauses où nous restions dans les salles. Cela devenait compliqué quand les objets venaient à se mettre en lévitation. Mes camarades n’ont pas tardé à me soupçonner et m’ont surnommé “ la sorcière”. Eriko et moi avons été mises à l’écart mais j’étais tellement habituée à la réaction des autres personnes que cela ne me  faisait rien.

-Votre amie, Eriko, le sait ? demanda Miki.

-J’ai fini par lui expliquer. Elle a été convaincue suite au décès d’un de ses proches.

La jeune femme soupira. Le moment qu’elle appréhendait arriva.

-Lorsque j’avais quatorze ans, j’ai eu affaire à un mauvais esprit. C’était un jeune homme mort d’une overdose en faisant la fête avec ses amis. Ceux-ci l’ont laissé mourir sur un banc. S’ils avaient appelé les secours, il aurait pu s’en sortir.

Kaori inspira profondément, ses mains se mirent à trembler.

-Son âme était en colère car lorsqu’il est décédé, il a vu que ses “potes” l'avaient laissé seul.

Le silence était palpable dans le café. Le doc s’était rapproché afin de mieux écouter la jeune femme. La barmaid retenait son souffle, fascinée. Falcon et Ryo sentirent la tension émaner de l'oratrice.

-Il m’a tourmenté dès qu’il a compris que je le voyais. Je l’ai ignoré et lui ai dit que je ne pouvais rien faire pour lui. Il n’a pas accepté ma réponse.

-Je suppose qu’il voulait se venger ? questionna Falcon.

-En effet, dit Kaori. Mais il y avait tellement de colère en lui que je ne pouvais pas faire ce qu’il me demandait.

La médium ferma les yeux, se remémorant la scène. Elle les rouvrit.

-Un jour, en allant à l’école, j'attendais pour traverser à un passage piéton. Une voiture roulait  dans ma direction et au moment où elle arrivait à ma hauteur, j’ai senti que l’on me poussait avec une grande force. J'ai été renversée par le véhicule qui n’a pas pu m’éviter.

-Oh mon dieu ! souffla Miki, sous le choc.

-Vous êtes sûre que c’était le “mauvais esprit”? demanda Ryo.

Kaori lui sourit en le regardant.

-Oui, car je l’ai vu avant de tomber dans l’inconscience. Jamais je n’oublierai  ce regard plein de haine, ce sourire comme pour dire “bien fait pour toi!”.

Le nettoyeur se rappela du dossier de Kaori.

-J’ai failli y rester, poursuivit-elle. Plusieurs fractures, un oedème cérébral …je suis tombée dans le coma.

Elle se tut. Ce qu’elle avait “vu” pendant cette période, était très compliqué à expliquer alors elle le passa sous silence.

-J’ai été deux mois entre la vie et la mort. Quand j’en suis sortie, j’ai appris que la police, au départ,  ne croyait pas que j’avais été poussée mais que j’avais tenté de mettre fin à mes jours.

-Ce n’est pas surprenant, fit Falcon, vous étiez seule.

-Oui et leur expliquer que je voyais les morts, on allait me prendre pour une folle. Seulement, les médecins avaient pris des photos de mes blessures et il y avait bien deux marques dans mon dos. Ils les ont   alors montrées à la police qui, malgré sa réticence, n’a pas eu le choix d’ouvrir une enquête pour tentative d’homicide.

-Stupéfiant ! s’exclama le doc, mais il y a déjà eu des cas comme ça.

-Depuis quand tu crois aux fantômes, vieux débris ? demanda Ryo.

-Je suis peut-être un scientifique mais j’ai toujours pris l’habitude de garder l’esprit ouvert. On peut passer à côté de beaucoup de choses si nous ne prêtons pas attention. Certes, nous devons  être rationnel mais il  ne faut pas exclure d’autres possibilités non plus. 

Kaori fixa le vieil homme.

-Vous êtes aussi obsédé que Ryo mais vous n’êtes pas dénué de bon sens.

Le doc fut surpris et lui sourit, flatté.

-Que s’est-il passé ensuite ? demanda Miki.

-La police a fini par rechercher mon agresseur mais n’ont rien trouvé, forcément ! Donc, ils ont  laissé tomber.

-C’est le même esprit que celui de toute à l’heure ? questionna Ryo.

-Non ! Le premier agresseur m'a laissé tranquille après cela. Il faut savoir qu’il y a une règle dans le monde des fantômes : on ne fait pas de mal aux vivants. Ce jeune homme a rompu cette règle, fit Kaori.

-Que lui est-il arrivé ? questionna la barmaid. 

La médium haussa les épaules.

-Aucune idée.

Ryo en doutait mais n’insista pas. Il fallait déjà que les gens présents dans cette pièce digèrent le fait que Kaori puisse voir les âmes des défunts. Lui-même avait eu du mal au début et il a fallu cet “incident” avec cet esprit pour qu’il change d’avis.

-Je suis désolée pour tout ce qui vous est arrivé, compatit Miki. Cela n’a pas dû être facile.

-En effet, confirma la médium, mais j’ai eu de la chance d’avoir une mère, une sœur et une amie qui m'ont crue et soutenue. Cela allège le poids sur les épaules. 

Kaori les regarda tour à tour, tentant d’évaluer leur “accueil” vis-à-vis de cette nouvelle. Ryo et Umi, eux, avaient eu suffisamment de “preuves” de l'existence de ces êtres invisibles. Quant à Miki, la médium était rassurée de son attitude. La barmaid pensait plus à l’isolement qu'avait dû ressentir Kaori qu’au paranormal en lui-même. Le doc, en bon scientifique, aurait pu émettre tout un tas d’hypothèses pour la contrecarrer mais il avait suffisamment l’esprit ouvert pour la croire.

-A vous de vous faire votre propre opinion  sur le sujet maintenant, dit Kaori.

Le silence s’installa mais fut rompu par une voix grave.

-Je vous crois sans problème, dit Falcon. Dites, il y avait bien un esprit qui accompagnait Ryo quand il venait au café ? Vous savez qui c’est ?

Kaori hocha la tête.

-En effet, c’est Hideyuki Makimura. Je l’ai rencontré il y a peu.

-L’associé de Ryo ? fit Umi légèrement surpris. 

Il tourna la tête vers le nettoyeur.

-Tu te rends compte,  reprit-il, qu’ Hideyuki est obligé de te surveiller même de l’au-delà ? Tout ça pour que tu te tiennes tranquille.

-Qu’il soit là ou pas, ça ne change rien. Les femmes ne résistent pas à mon charme, se vanta Ryo.

-Bah voyons, grommela le géant, disons qu’elles fuient, oui !! 

-Certainement pas ! protesta Ryo. Pourquoi à ton avis on me nomme l’étalon de Shinjuku ?

-Parce que tu cours vite pour éviter le tabouret que je vais t’envoyer dans la figure !! cria Falcon.

-Ca suffit tous les deux, dit Miki d’une voix ferme.

Les deux hommes se boudèrent mutuellement.

-On croirait deux gamins qui se chamaillent, reprit la barmaid. Comportez vous en adulte !

Le silence se fit dans le café. Soudainement, Umi tourna la tête vers la médium.

-Pendant que j’y pense, lorsque vous êtes revenu au café, j’ai eu la nette impression qu’ils étaient plusieurs, continua le géant.

- Votre instinct est excellent, le rassura la médium. Il y avait aussi l’esprit d’Aïko ainsi que d’une autre personne. Vous avez “senti”  l’enfant d’ailleurs.

Le géant fut rassuré. Il n’était pas fou.

-Je suis désolée pour tout ce que vous avez pu subir…  dit Miki d’une  voix douce.

La médium retint son souffle priant intérieurement qu’elle ne la rejette pas comme les autres ont pu le faire.

-Si vous avez besoin d’en parler, comptez sur nous !  Vous n’êtes plus seule, désormais ! Hein, nounours ? fit Miki avec un sourire chaleureux.

Kaori eut envie de pleurer. Elle était rassurée. Sa peur fondit comme neige au soleil.

-Mais au fait, comment m’avez-vous trouvé lorsque le mauvais esprit m’a agressé ?

Umi toussota et lui expliqua.

-Euh…disons que quelque chose me disait que vous étiez en danger et mon instinct me trompe rarement. Je suis sorti mais comme j'ignorais où vous étiez partie, j’ai marché pour tenter de sentir votre aura. J’ai vu Ryo au loin qui courait alors j’ai accéléré le pas. La suite vous la connaissez.

Kaori tourna la tête vers Ryo.

-Et vous, monsieur Saeba? 

Le nettoyeur déglutit, ne sachant pas comment le lui dire. Falcon ricana.

-Il ne le sait pas ! dit-il.

-Pardon ? questionna Kaori. Comment ça ?

Ryo se sentant gêné, toussota :

-Il a raison, je n’en ai aucune idée, avoua Ryo. Je me rappelle de la porte de mon appartement qui s’ouvre violemment et puis je me suis retrouvé devant vous.

La médium le fixa et éclata de rire. 

Ryo et toute la bande la regarda, ne comprenant pas son hilarité. La jeune femme se calma.

-Sauf erreur de ma part, à mon avis, vous avez été possédé, lui dit-elle, en reprenant son souffle. 

Sa gorge lui faisait mal.

-Vous êtes sérieuse ? s’exclama Ryo.

Des frissons lui parcoururent le corps.

-J’espère que c’était une belle femme au moins, rajouta-t-il.

Des corbeaux dansèrent dans le café. La médium soupira.

-Un esprit est entré dans votre corps mais j’ignore lequel, alors je poserai  la question si vous voulez vraiment le savoir, dit Kaori se retenant de rire en imaginant la scène.

-Mais c’est vrai alors ? Un fantôme peut nous posséder ? demanda timidement Miki.

La médium lui sourit.

-Tout à fait mais pour une très courte durée. Un corps c’est une âme et non deux. Cela peut être très compliqué pour le psychisme si cela dure plus longtemps. Ceci reste très rare, je vous rassure.

Le silence se fit de nouveau.

La barmaid gloussa.

-Ryo c’est peut-être une vieille femme toute ridée qui t’a possédé. J’espère pour toi qu’elle n’en a pas profité.

Falcon se mit à rire et Ryo se mit à grimacer, ne préférant pas imaginer la chose.

L’atmosphère s’était faite plus légère tout comme le cœur de Kaori. 

-Au fait, l’esprit qui vous a fait du mal tout à l’heure,  qui était-il ? On ne le reverra pas ? C’est sûr ? demanda soudainement le nettoyeur.

La médium le regarda. Pourquoi fallait-il qu’il brise cette tranquilité ?

-J’ignore qui il est,  mais il était très en colère après moi et le pourquoi est un mystère. Quant à son retour, je vous ai expliqué la “règle”.

-Oui d’accord, j’ai bien compris. Mais il pourrait revenir. 

Kaori le fixait, surprise de son obstination.

-Cela m’étonnerait beaucoup, monsieur Saeba, croyez-moi ! insista-t-elle agacée. Puis de toute façon s’il revient, comme vous le supposez, que pourriez-vous y faire ? 

Ryo qui fut mouché,  garda le silence. Il n’avait pas pu l’aider quand elle s’était retrouvée suspendue au-dessus du sol, c’est vrai. Cependant, pour un homme comme lui, rester inactif face au danger, c’était quelque chose qu’il avait espéré ne jamais connaître.

Le doc, Umi et Miki étaient sidérés de l’attitude du nettoyeur. Ils rêvaient ou l’étalon de Shinjuku s’inquiétait ?

-Comment elle t’a fait taire la demoiselle ! dit Umi en s'égosillant. C’est trop drôle !

-Oh ça va toi ! Tête de poulpe ! fit Ryo en croisant ses bras sur la poitrine, légèrement vexé.

-Je t’ai dit d’arrêter de l’appeler comme ça ! râla Miki.

La médium les regarda se chamailler et sourit. Une bande d’amis avec les défauts de chacun mais qui se serraient les coudes si besoin. En ferait-elle partie, un jour ?

Regardant l’heure sur la pendule, elle vit que la fin d’après-midi approchait.

Kaori descendit de son tabouret. 

-Il se fait tard, je vais vous laisser, dit-elle.

-Oh oui, en effet ! s’exclama Miki qui constata qu’ils n’avaient pas vu le temps passer.

Kaori s’inclina mais grimaça. La douleur dans son dos la rappela à l’ordre.

-Je vous remercie infiniment pour ce que vous avez fait et l’oreille attentive que vous m’avez prêtée.

-Faites attention à vous, conseilla la barmaid, légèrement inquiète. 

Elle lança un regard à Ryo et celui-ci hocha la tête. Il avait compris.

-Je vous raccompagne chez vous, dit Ryo d’une voix ferme.

-Mademoiselle, je vous rappelle qu’il vous faut du repos et surtout vous ne restez pas seule, c’est bien compris ? insista le doc.

La médium hocha la tête.

-Je vous ouvre, dit Miki en allant vers la porte.

-Je vais vous quitter aussi, fit le vieil homme, s'apprêtant à descendre.

-Tu restes ici, tu as des comptes à me rendre, grogna Falcon.

Le doc piailla redoutant la punition que le géant lui réservait.

Miki salua le couple Ryo et Kaori sur le seuil du café et ferma la porte. La médium s’inquiéta pour le doc.

-Ne vous faites pas de souci. Ce vieux fossile est plus solide qu’il en a l’air, affirma le nettoyeur.

La médium regarda Ryo et décida de le croire. Elle ouvrit la marche et se dirigèrent vers l’appartement de Kaori.





QUELQUE PART DANS L’AU-DELÀ 




La mauvaise âme qui avait agressé la médium regarda autour d’elle, perdue. Lorsqu’elle avait eu cette femme entre ses doigts, prête à l’achever, un esprit l’avait attrapée et emmenée très rapidement. 

-Ishima Yukio ! Tu as été averti,  il me semble ! dit une voix.

L’esprit chercha d’où venait cette voix mais tout résonnait dans cet endroit.

-On ne fait pas de mal aux vivants ! gronda-t-elle.

Yukio frémit. L’ambiance changeait. A travers la brume qui recouvrait ce lieu, il vit une ombre s’approcher.

-Où suis-je ? demanda-t-il.

-Dans les limbes ! 

L’ombre devint forme humaine. L’homme était de grande taille, habillé d’une chemise et d’un pantalon. Son visage inspirait le respect. Son œil droit était barré par une cicatrice.

Yukio comprit qu’il allait passer un sale quart d’heure.

-Tu sais que tu ne dois pas toucher aux corps physiques ? dit-il d’un air sévère.

La mauvaise âme haussa les épaules. 

“Que pouvait-il me faire de pire alors que j’étais déjà mort !" pensa t-il.

Mal lui en prit. En un battement de cils, il se retrouva tenu par la gorge et soulevé.

-C’est ça que tu lui as fait, n’est-ce-pas ? Je te le ferai subir encore et encore.

Malgré qu’il ne soit plus qu’une âme errante, il souffrait, horriblement.

-Du calme Kenny, du calme !! entendit-il.

Yukio sentit que l’emprise sur son cou se relâchait. Il atterrit sur le sol brusquement.

A travers la brume, une autre ombre prit forme. Se relevant, Yukio vit un autre homme plus petit, s’avancer vers lui. Il se tint à côté de Kenny. Le nouvel arrivant était vêtu comme au temps des empereurs japonais. Sa main droite tenait une canne faite dans du bois noble. De son autre main, il tripotait sa barbichette en fixant la mauvaise âme. Il avait une soixantaine d'années tout au plus.

-Je sais que tu es en colère, mon ami, mais ne l’achève pas tout de suite. Nous avons besoin de lui pour une mission, reprit l’inconnu.

-Quelle mission ? demanda Yukio, agressif.

-Tu parles à la mort, fit Kenny furieux, soit plus respectueux !

La mauvaise âme frémit. 

-La mort, la mort, une de ses nombreuses formes, dit-elle. J’avoue que j’aime bien celle-ci.

-Où suis- je ? demanda Yukio, tremblant. 

Qu’allait-on lui réserver?

-Dans les limbes, fit la mort. Tu es là car il me semble que tu t’en ai pris à une être vivant et c’est absolument interdit.

-Le père de cette  idiote est responsable de la mort de ma soeur ! se justifia-t-il.

D’un geste d’une extrême rapidité, la mort fit un mouvement avec sa canne et Yukio se retrouva à genoux.

-On ne fait pas payer aux enfants la dette des parents ! gronda la mort d’une voix forte qui résonna dans le lieu.

Yukio ne broncha pas. Il continua à regarder le sol. Une main lui saisit le bras, l’incitant à se relever.

-Tu vas venir avec nous, très cher. Cela va t’amener à te faire comprendre certaines choses, du moins je l’espère, dit la mort.

Avec sa canne, elle tapa le sol trois fois et ils disparurent.







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